TOUT EST DIT

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jeudi 3 février 2011

Éloge de la lenteur en politique

La relance, mal accueillie, du débat sur la TVA sociale confirme que l'on ne peut pas traiter n'importe comment et n'importe quand des questions aussi vitales, sans prendre le risque d'activer la machine à perdre les élections.

Personne ne nie que la France a un problème de compétitivité, de coût du travail et de déficits. En réponse, depuis des semaines, l'UMP craque des allumettes ¯ 35 heures, « niches » sociales, statut des fonctionnaires, fiscalité sur la résidence principale, hausse de la TVA... ¯ d'une manière qui inquiète la droite et l'opinion.À chaque fois, le Premier ministre doit jouer les pompiers de service. Sitôt ouvert, sitôt refermé : est-ce ainsi que l'on fait avancer la réflexion collective ?

Plusieurs facteurs expliquent cette cacophonie anxiogène. Jean-François Copé, déjà candidat pour 2017, cultive son image d'agitateur d'idées à la tête de l'UMP pour mieux se distinguer de son rival potentiel, François Fillon, et pour accentuer le contraste vis-à-vis d'une gauche qu'il veut ringardiser. Cette répartition des rôles renforce peut-être le rôle arbitral de Nicolas Sarkozy. En attendant, elle fragilise la majorité à quelques semaines des cantonales.

Il est vrai qu'en face, l'étirement du calendrier socialiste offre à la droite du temps et de l'espace. Faute de leader désigné, la gauche éparpillée peine à répondre de manière construite, ajoutant du flou à la confusion. Espérons que l'émergence des protagonistes officiels de 2012 aidera à clarifier les positions.

Mais ces deux explications conjoncturelles sont un peu courtes. La difficulté d'imprégner la société de questions complexes et de suggérer des réponses fines se heurte à des évolutions de fond.

Le quinquennat, en raccourcissant le temps politique, encourage les débats à marche forcée, le recours au marketing et la réponse mécanique et simpliste à toute question qui surgit. L'obsession quasi permanente du sondage et de la prochaine présidentielle encourage une précipitation et une inflation législative qui brouillent plus qu'elles n'éclairent.

Les instabilités brutales du monde ¯ de la crise financière aux révolutions arabes ¯ et leur impact sur notre vie rendent difficile de se faire une idée, d'avoir une grille de lecture claire et définitive de l'actualité.

Enfin et surtout, il est devenu très compliqué de conduire une réflexion sereine et approfondie entre, d'une part, une complexification des problèmes ¯ la fiscalité, par exemple ¯ et, d'autre part un émiettement, une individualisation, des attentes. Ajoutons que les formats médiatiques nouveaux ¯ le diktat d'Internet qui exige de faire vite et court ¯ accentuent cet effet, compliquent la pédagogie politique et retiennent le facile, le slogan, le bon mot.

Ces causes ne vont pas disparaître. Il y a tout lieu de redouter que nous n'en soyons qu'aux prémices d'une campagne dont les modalités ne grandiraient pas ses acteurs et ne feraient pas avancer le pays. On ne traitera pas de justice sociale ou d'équité fiscale en ne les regardant que par le petit bout de la lorgnette. Chaque question n'a de sens que si on l'intègre dans une globalité dont l'examen nécessite du temps. Après des années de culte de la vitesse, il faudrait refaire l'éloge de la lenteur en politique.

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