TOUT EST DIT

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mardi 15 novembre 2011

L’euro, un otage idéologique

Il y un moyen simple de résoudre la crise de la zone euro : que la Banque centrale européenne promette de prêter aux Etats en dernier recours. Mais cette solution défendue par de nombreux économistes est rejetée par l’institution. Une rigidité purement idéologique, déplore un éditorialiste du Monde. 

Il suffirait d'une phrase pour endiguer la crise de l'euro, affirment nombre d'économistes. Une petite phrase que devrait prononcer la Banque centrale européenne. La BCE devrait dire haut et fort qu'elle jouera le rôle de prêteur de dernier recours pour les membres les plus endettés de l'union monétaire. Et l'euro se porterait mieux.
Et les marchés seraient tenus en respect. Et, ô ! Joie suprême, on se ficherait pas mal de ce que racontent les agences de notation. Et on pourrait desserrer quelque peu l'étau de l'austérité budgétaire, assouplir les conditions de la rigueur. Et cela favoriserait un début de reprise de l'activité, qui faciliterait l'apurement de la dette. Et, sans promettre de raser gratis, on sortirait de ce cycle sinistre qui voit se défaire la zone euro, comme dans une méchante partie de bowling quand la grosse boule noire vient faucher les quilles les unes après les autres : d'abord Athènes, puis Dublin, Lisbonne, Madrid, Rome – en attendant Paris...

Des ressources illimitées

L'institut d'émission battant monnaie – c'est l'une de ses fonctions -, ses ressources sont, par définition, illimitées. Si la BCE dit qu'elle sera l'assureur de dernier ressort, elle dissuade la spéculation. Les marchés seront rassérénés. Ils n'exigeront plus des taux de rémunération faramineux pour souscrire aux emprunts des Etats les plus endettés.
Ceux-là échapperont à l'emballement des coûts de leur dette. Ils sortiront d'une infernale spirale dont on connaît parfaitement les étapes. L'Etat ignoblement endetté est d'abord condamné à ne plus pouvoir se financer sur le marché en émettant des bons du trésor : il devrait verser des taux d'intérêt prohibitifs. Il est amené à tendre la sébile. Il sollicite une aide auprès de créanciers extérieurs. Mais ces derniers n'accordent leur assistance qu'à des conditions d'austérité draconiennes qui épuisent le malade.
Dans l'hypothèse où la Banque centrale dit à l'avance qu'elle souscrira aux emprunts d'un Etat qui a du mal à payer ses dettes, le schéma est tout différent. Les achats de l'institut d'émission vont rabaisser les taux à des niveaux praticables, si la seule déclaration d'intention de la banque centrale n'a pas suffi à le faire.
C'est ce qui se passe hors zone euro, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, au Japon, par exemple. A des titres divers, ces trois pays n'alignent pas un carnet de notes plus brillant que la moyenne dans l'union monétaire européenne. Mais il est clair pour tout le monde que la Réserve fédérale, la Banque d'Angleterre ou celle du Japon n'hésiteront pas.

La doctrine de la séparation des pouvoirs

Pourquoi la BCE n'agit-elle pas de même ? Parce qu'elle est liée par une doctrine qui prône la séparation des pouvoirs. A la banque de s'occuper du monétaire, au gouvernement du budgétaire ; à la banque de garantir la stabilité de la monnaie (pas d'inflation), au gouvernement de gérer sa dette. Autrement dit, ce n'est pas à l'institut d'émission à venir au secours du Trésor – chacun son mandat.
"C'est de l'idéologie", tonne Jean-Paul Fitoussi, directeur de recherche à l'OFCE. "En s'interdisant de disposer d'un prêteur de derniers recours, on s'expose, en cas de difficultés financières, au choix suivant : soit la faillite, soit une aide mais conditionnée à une telle austérité qu'elle n'empêchera d'ailleurs pas la faillite", dit-il.
Son incompréhension est partagée par nombre de ses confrères américains qui, du Prix Nobel Paul Krugman à Jeffrey Sachs, en passant par Kenneth Rogoff, disent tous la même chose : "Si la BCE prenait en charge les dettes européennes, la crise s'allégerait considérablement" (Paul Krugman, New York Times, le 23 octobre).
Les risques ? A l'évidence, l'inflation. Les tenants de la séparation des pouvoirs font valoir que le rachat direct de la dette d'un Etat par sa banque centrale équivaut à faire marcher la planche à billets. Et cette crainte de l'inflation, celle d'une monnaie qui entre dans la spirale d'une dévaluation continue, le souvenir de cette tragédie qu'elle vécut dans les années 1920 et qui conduisit à Hitler, voilà ce qui hante la mémoire collective de l'Allemagne ; voilà qui explique qu'elle n'accepta d'abandonner son très solide deutschemark pour l'euro qu'à la condition qu'on n'assigne qu'une seule tâche à la BCE : la lutte contre l'inflation.

L'inflation n'est pas à craindre

Les tenants de la doctrine évoquent d'autres raisons. Il faut préserver la crédibilité de l'institut d'émission, et donc ne pas grever son bilan de créances douteuses – mais la BCE achète en sous main, sur le marché secondaire, pas directement, des quantités importantes de dette souveraine des Etats les plus faibles de la zone euro... Autre argument des partisans de la "séparation des pouvoirs" : ne pas encourager le laxisme budgétaire en disant à l'avance qu'on garantira les dettes des irresponsables.
A quoi Jean-Paul Fitoussi et Paul Krugman répondent que la création de monnaie ne crée pas d'inflation dans des économies déprimées comme les nôtres. Et pour empêcher qu'un assouplissement de la doctrine monétaire de la BCE ne soit une incitation au vice de la dette, il faut l'accompagner d'une stricte discipline budgétaire. Relâchement doctrinal contre sévérité budgétaire : donnant-donnant.
Paul Krugman conclut ainsi son article : "Sur les ruines de la guerre, les Européens ont créé des sociétés qui, sans être parfaites […] sont sans doute les plus décentes de l'histoire de l'humanité. Et cela est menacé parce que l'élite européenne […] arrime le continent à un système monétaire qui recrée des rigidités […] aux allures de piège mortel."

La contre-attaque du couple DSK-Sinclair

DSK et Anne Sinclair saisiront la justice contre toute atteinte à leur vie privée. C'est légitime et de droit. Préoccupés, à juste titre, par les extrapolations sur la cohésion du couple, leurs avocats l'ont fait savoir hier. C'est leur travail, quand bien même on relèvera une curiosité de vocabulaire. S'élevant contre les médias qui fantasmeraient (sic) après les révélations sur l'affaire de proxénétisme du Carlton, on peut se demander à quels désirs et à quels auteurs leur propos renvoyait ! Qu'il y ait du voyeurisme chez quelques papivores, que des pièces de l'instruction soient connues en temps réel, certainement. Quant au « lynchage médiatique » dénoncé, nous sommes là face au vieil argument de ceux qui, ayant bénéficié d'une forte exposition, voient soudain leur étoile pâlir et la justice les inquiéter. Il reste que l'affaire du Sofitel a bouleversé la vie politique française. Et qu'elle a livré un éclairage extravagant sur les pulsions intimes et la conception des femmes de quelqu'un qui aspirait à diriger le pays. L'affaire du Carlton de Lille, dans laquelle le nom de DSK est cité pour avoir participé à des parties fines - pourquoi d'ailleurs cette pudeur et, quand la bonne société est mouillée, ne pas dire « partouzes » - en est une variante. Ni plus ni moins. S'adonner à des soirées tarifées ne constitue certes pas une infraction. Mais si elles font l'objet d'un financement suspect, il est normal de rechercher la vérité et d'en parler. A fortiori lorsque de troublants SMS suggèrent qu'un acteur de ces rencontres coquines se préparait à un rendez-vous d'une autre dimension, celui de la présidentielle.

Camarades

À gauche, rien de nouveau : l’union est un combat. Les rafales de petites phrases fusent dans tous les sens, entre deux promesses d’accord de gouvernement. C’est je t’aime moi non plus façon politique, un tiers de conviction et trois quarts d’ego. On a entendu Monsieur Mélenchon flinguer le capitaine de pédalo Hollande, puis les amis de Monsieur Hollande mitrailler Georges Marchais-Mélenchon, tandis que Monsieur Chevènement dénonçait la Joly massacreuse d’emplois, avant d’être traité de Titanic klaxonnant devant l’iceberg, si on a bien compris… Et on en oublie ! La gauche vérifie une vérité que connaît bien la droite : les meilleurs ennemis se recrutent en famille, jusqu’à la défaite finale… Et que faisait donc pendant ce temps Monsieur Hollande ? Il livrait son 37 e commentaire de la semaine à la Gazette de Lamotte-Beuvron, affirmant haut et fort : je suis candidat. Sans blague ?

Si nous étions éternels...

Notre époque est étonnante. Le monde entier célébrait, récemment, le fait que la planète porte désormais 7 milliards d'humains.On apprenait au même moment que des biologistes avaient réussi à reprogrammer in vitro des cellules âgées pour en faire des cellules souches pluripotentes. Des cellules rajeunies, capables dans un avenir pas si lointain de réparer des organes ou des tissus chez des personnes âgées.

En d'autres termes, le vieillissement n'a qu'à bien se tenir désormais : l'immortalité pourrait bien être à portée de main. C'était en tout cas sur ce registre que le grand biologiste Axel Kahn était interrogé sur une chaîne de télévision par un journaliste tout ébaubi devant l'idée que le rêve d'éternité qui habite l'homme pourrait, un jour, se réaliser. Rien que du bonheur en perspective...

Tout d'un coup, s'était effacée la question de savoir comment nous allions gérer les ressources limitées de notre « vaisseau spatial », en étant de plus en plus nombreux à l'habiter et à vouloir accéder à des modes de consommation dévorant énergie et matières premières. Tout d'un coup, étaient oubliées les multiples questions que nous pose le vieillissement de la population, revers de la médaille du bond accompli par l'espérance de vie en un siècle.

En France, l'espérance de vie moyenne est passée de 48 à 79 ans entre 1900 et 2000. En 2011, elle est de 78,1 ans pour les hommes et de 84,8 ans pour les femmes. Cela signifie que, d'ici à 2025, le nombre des personnes de plus de 75 ans aura crû de 25 %. Or, les dépenses liées à la dépendance des personnes âgées représentent déjà, ne l'oublions pas, 34 milliards d'euros et nous nous demandons comment nous allons régler la facture.

Ce changement soudain de perspective traduit à sa manière la prééminence, pour la plupart d'entre nous, du destin individuel sur celle du destin commun. Dans nos sociétés occidentales, où les grandes espérances idéologiques ou religieuses se sont considérablement affaiblies, l'individu contemporain accorde en général une priorité quasi absolue à son sort singulier, voire à celui de son entourage ou de son groupe social. Il peine à prendre la mesure des conséquences collectives de ses choix personnels. Mais comment la planète pourrait-elle supporter l'accumulation d'individus dont la durée de vie s'allongerait ad vitam aeternam ?

Poussons le raisonnement : en viendra-t-on à renoncer à avoir des enfants pour demeurer un nombre déterminé d'heureux élus à jouir de l'éternité dans des conditions viables ? Et d'ailleurs, « élus » par qui ? Ces questions extrêmes nous renvoient, en fait, à la conscience que nous avons de la vie. Est-elle quelque chose que nous recevons et que nous transmettons, nous effaçant un jour devant d'autres qui nous prolongeront autrement en prolongeant ce même mouvement ? Ou est-elle une simple propriété dont nous jouissons, pour autant que nous ne nous en lassions pas ?

Là où naguère les religions plaçaient le mot ou la personne de Dieu, nous revient finalement la question de savoir si la vie n'est pas en elle-même transcendance. Nous appartient-elle ? Ou nous porte-t-elle ? Cette interrogation n'est pas simplement une affaire privée et personnelle : en termes écologiques, nous voyons bien que la réponse nous concerne tous dans l'ensemble que nous formons et nommons « humanité ». Et non seulement nous, mais les générations à venir. Si nous voulons encore avoir des descendants...