TOUT EST DIT

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dimanche 25 octobre 2009

Besson relance le débat sur l'identité nationale

Le ministre de l'immigration, Eric Besson, a annoncé dimanche 25 octobre le lancement d'un vaste débat sur l'identité nationale. "J'ai envie de lancer un grand débat sur les valeurs de l'identité nationale, sur ce qu'est être Français aujourd'hui", a déclaré le ministre de l'immigration et de l'identité nationale au Grand Jury RTL - Le Figaro -LCI qui a ajouté: "Je vais le lancer avec les parlementaires, députés et sénateurs, avec les députés européens".
Au moment où plusieurs épisodes – polémique autour de Frédéric Mitterrand ou de la candidature de Jean Sarkozy, notamment – ont troublé l'opinion, notamment dans les rangs de la droite, l'annonce de l'organisation d'un vaste débat sur l'identité nationale relance spectaculairement un des thèmes porteurs de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkorzy. Peu avant la présidentielle de 2007, un sondage CSA-Cisco pour France 3 et France Info, avait fait apparaître que l'irruption du thème de l'identité nationale dans le débat électoral était jugée comme une "bonne chose" par 62 % des Français, et 81 % des électeurs potentiels de M. Sarkozy.
Le débat proposé par M. Besson durera deux mois et demie avant un "grand colloque de synthèse" fin janvier-début février, a précisé le ministre qui va demander "aux préfets et aux sous-préfets d'organiser des réunions avec les forces vives de la Nation sur le thème de qu'est-ce qu'être Français, quelles sont les valeurs qui nous relient, quelle est la nature du lien qui fait que nous sommes français et que nous devons être fiers". "Il faut réaffirmer les valeurs de l'identité nationale et la fierté d'être français", a-t-il dit. "Je pense par exemple qu'il serait bon – aux Etats-Unis c'est banal en France ça reste parfois compliqué – que tous les jeunes Français aient une fois dans l'année l'occasion de chanter la Marseillaise", a-t-il expliqué.

"LA BURQA EST INACCEPTABLE ET CONTRAIRE AUX VALEURS DE L'IDENTITÉ NATIONALE"

Pour les adultes, Eric Besson a annoncé le lancement d'une expérimentation dans deux départements, le Rhône et les Bouches-du-Rhône, consistant à offrir à tout adulte "désireux de bénéficier d'une sorte d'instruction citoyenne" quatre séances de formation à l'instruction civique.
Interrogé sur le port de la burqa, le ministre a jugé qu'elle était "contraire aux valeurs de l'identité nationale". "On peut débattre sur l'opportunité de la loi (...) mais sur les principes il n'y a pas de débat: la burqa est inacceptable et contraire aux valeurs de l'identité nationale".

Eric Besson a toutefois dit ne pas vouloir "trancher" sur les travaux de la mission parlementaire sur le voile intégral mise en place par l'Assemblée nationale, souhaitant qu'elle aille "au bout" de ses travaux. "Nous n'aurions jamais du abandonner au Front national un certain nombre de valeurs qui font partie du patrimoine républicain", a estimé le ministre évoquant l'immigration et la sécurité, ajoutant: "Je pense que la mort politique du Front national serait la meilleure nouvelle pour tous".

En matière d'immigration, M. Besson a réaffirmé que les "retours groupés" d'Afghans vers leur pays d'origine, critiqués par les associations des droits de l'homme et la gauche, se poursuivraient: neuf, a-t-il dit, ont été reconduits depuis le début de l'année. "Je respecterai les objectifs qui m'ont été assignés", a réaffirmé plus globalement le ministre, précisant que 21 000 personnes avaient été déjà reconduites sur un objectif de 27 000 pour l'année fixé par le président de la République.

Tunisie: un vote qui préfigure un plébiscite pour Ben Ali

L'élection présidentielle de dimanche en Tunisie, couplée à des législatives, devrait être sans surprise: au pouvoir depuis 22 ans, le président sortant Zine El Abidine ben Ali, 73 ans, brigue un cinquième mandat consécutif de cinq ans qu'il est quasiment assuré de remporter.

Les quelque 5,5 millions d'électrices et d'électeurs étaient appelés à voter de 8h à 18h locales (7h-17h GMT) par un temps automnal légèrement ensoleillé.

Accompagné de son épouse Leïla et de son gendre, Mohamed Sakher el-Materi, le président sortant a voté vers midi à Carthage, dans la banlieue nord de Tunis. Rompant avec l'usage protocolaire, les responsables de la sécurité ont donné laissé les photographes prendre des clichés très rapprochés du couple présidentiel au moment du vote et lorsque le président-candidat s'est mêlé à la foule.

Dans les bureaux de vote de Tunis et sa périphérie, les femmes et hommes de divers âges affluaient par vagues successives. Aucun incident n'y a été relevé, sous l'oeil vigilant des agents de l'ordre.

A 16h, le taux de participation était de 84,15%, selon l'agence officielle TAP.

La quasi-totalité des votants interrogés par l'Associated Press ont confié avoir voté pour Ben Ali, ce qui laisse préfigurer un raz-de-marée en faveur du candidat du parti au pouvoir. "J'ai voté pour le meilleur, c'est-à-dire pour Ben Ali. Il faut lui être reconnaissant pour ce qu'il accomplit. Je le dis franchement: il n'y a pas d'alternative à Ben Ali actuellement", a déclaré Mohamed Salah Amroussi, 69 ans.

Ce PDG à la retraite se défend d'être "démagogue". "Je considère que le bilan d'un dirigeant ne se mesure pas à l'applaudimètre, mais à son action, à l'oeuvre qu'il accomplit", juge-t-il. Même son de cloche pour Dorra Materi, titulaire à 24 ans d'un master en finances, qui se dit "très fière" d'avoir Ben Ali pour président. "Il a fait beaucoup de choses pour la Tunisie", estime-t-elle.

Tout en avouant "aimer Ben Ali", Fatma Trabelsi, 75 ans, en veut cependant à son parti de n'avoir apporté aucune aide à son fils handicapé. "A 42 ans, il poireaute encore à la maison sans ressources", se frustre-t-elle.

Distant, Brahim, un chauffeur de taxi qui n'a pas souhaité donner son nom de famille, dit avoir voté "uniquement pour ne pas avoir de problèmes dans (son) quartier". "D'ailleurs, j'ai voté blanc, parce que ma voix ne compte pas de toute façon", lâche-t-il.

Fait inhabituel, le chef de l'Etat s'est engagé dans une adresse à la nation, à la veille du scrutin, à "ne tolérer aucun abus, ni aucune falsification ou manipulation de la volonté du peuple". Il a assuré que "la loi sera appliquée avec la même rigueur contre quiconque émettra des accusations ou des doutes concernant l'intégrité de l'opération électorale, sans fournir de preuves concrètes", dans un clin d'oeil aux détracteurs de son régime.

En réaction, la secrétaire générale du Parti démocratique progressiste (PDP), Maya Jribi, qui n'a pas voté pour "ne pas cautionner ce simulacre d'élections", considère que "les critiques formulées à la veille d'un événement de l'importance des élections relève de la liberté d'expression et même de la mission de l'opposition".

Les résultats du scrutin devraient être connus lundi à l'aube et officiellement annoncés en début d'après-midi lors d'une conférence de presse du ministre de l'Intérieur Rafik Hadj Kacem. AP

UN SCORE SOVIÉTIQUE, COMME ON DIT !

OM-PSG reporté: heurts à Marseille

Les échauffourées qui opposent depuis le début de l'après-midi supporteurs de l'Olympique de Marseille et du Paris SG se poursuivent depuis 17 heures sur le Vieux-Port. Ces heurts ont commencé après l'annonce du report du match entre les deux équipes pour cause de grippe A.
La préfecture a recensé six blessés légers, selon un bilan provisoire. Des bouteilles et des fusées traçantes sont lancées à destination de supporteurs parisiens, également pris pour cible par les habitants des immeubles en dessous desquels ils sont confinés par les forces de l'ordre. Les CRS ont fait usage de gaz lacrymogènes et de flash-ball. Des vitrines ont été brisées et des magasins ont été saccagés.
Par ailleurs, selon une source policière, des incidents ont également eu lieu sur l'aire d'autoroute de Peypin, près d'Aix-en-Provence, où ont été bloqués des cars du PSG. Huit interpellations ont été effectuées.

2.000 supporteurs parisiens

Le match OM-Paris SG a été reporté aujourd'hui par la commission des compétitions de la Ligue de football professionnel (LFP) après la découverte d'un 3e cas de grippe A (H1N1) dans le groupe du PSG, a annoncé la Ligue.
Environ 2.000 supporteurs parisiens étaient attendus, dont 800 venus par leur propres moyens mais, selon une source policière, les supporteurs du Paris SG descendus en bus doivent reprendre le chemin du retour sous escorte.

TOUT ÇA POUR DU FOOT BORDEL ?
c'est à se flinguer tellement c'est con !

Clearstream : "la Cour européenne condamnera la France ", assure Montebourg

Selon le député PS Arnaud Montebourg, le procès Clearstream, dans lequel Nicolas Sarkozy est partie civile, expose la France à une condamnation par la justice européenne "pour violation de l'équilibre et de l'égalité des armes". "Je pense que la Cour européenne des droits de l'Homme, qui sera un jour saisie de ce procès, condamnera la France pour violation de l'équilibre et de l'égalite des armes", a déclaré dimanche 25 octobre sur France 2 le député de Saône-et-Loire, avocat de profession.
"Un président de la République ne peut pas être dans un prétoire avec un avocat qui fait peur à tout le monde, y compris aux magistrats, parce que son mandant, son client, est celui qui fait la carrière de ces magistrats", a-t-il ajouté. Dans les textes en vigueur, le président de la République est encore officiellement à la tête du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), organe suprême de la profession. Le tribunal correctionnel de Paris, qui a fini de juger l'affaire Clearstream vendredi et rendra son jugement le 28 janvier, "n'a pas la liberté de délibérer parce qu'il est sous pression permanente", a soutenu Arnaud Montebourg.

"Cela fait partie des graves problèmes qu'a semés d'une certaine façon le sarkozysme judiciaire en voulant toujours utiliser la justice à des fins politiques... Ca produit des décisions qui ne seront pas acceptées ni acceptables d'ailleurs", a-t-il dit. Dans cette affaire de dénonciation calomnieuse, l'ex-Premier ministre Dominique de Villepin est un des cinq prévenus ayant comparu pendant un mois devant le tribunal. Dix-huit mois de prison avec sursis ont été requis contre lui mardi dernier par le procureur Jean-Claude Marin.
ENCORE FAUDRAIT-IL QU'ELLE EN SOIT SAISIE.

SOUVENEZ-VOUS; QUAND ON N'Y COMPRENAIT DÉJÀ RIEN À PROPOS DE L'HEURE D'ÉTÉ ET CELLE D'HIVER.

L'image de France Télécom plonge dans l'opinion publique

La vague de suicides intervenue parmi les salariés de l'opérateur en télécommunications a eu un impact direct sur l'image de l'entreprise, analyse Claude Posternak, l'un des auteurs de l'étude interrogé par le Journal du dimanche. "C'est un phénomène légitime qui va se dissiper si France Télécom parvient à résoudre ses problèmes humains", estime-t-il.

Renault fut victime d'une vague de défiance à la suite d'une série de suicides en 2006, mais le groupe automobile est depuis lors remonté à la dixième place. Son concurrent Citroën figure à la première place du classement du mois d'octobre, profitant des effets de la prime à la casse, selon le JDD.

Les bonds les plus spectaculaires concernent toutefois la grande distribution : quasiment toutes les enseignes ont fortement progressé dans le classement, et 5 enseignes figurent dans le top 10: Intermarché (2e place), Leclerc (3e place), Auchan (5e place), Casino (6e place) et Carrefour (8e place).

Enfin, Electricité de France (EDF), régulièrement premier du classement, semble pâtir de la polémique sur les tarifs intervenue cet été.
Le PDG d'EDF, Pierre Gadonneix, avait demandé une hausse des prix de l'électricité de 20% en 3 ans, au début du mois de juillet. Depuis lors, le groupe a perdu 8 places et figure désormais à la 9e place du classement.

BAYROU PLUS BAYROU.....QU'EST-CE QU'IL CAUSE !

Invité dimanche du Grand Rendez vous Europe1-Aujourd'hui en France

Bayrou: L'affaire J.Sarkozy nuit à la France
L'affaire Jean Sarkozy a abimé l'image de la France "auprès des Français, notamment des jeunes diplômés au chômage, et auprès de l'étranger", a déploré samedi le président du Modem, François Bayrou devant les instances de son parti à Paris. "J'ai dit depuis le début que ce n'était pas Jean Sarkozy le problème, mais le président de la République (...) Ceci est un problème du pouvoir, pas celui d'un jeune garçon de 23 ans qui, en effet, peut avoir envie d'occuper de grandes responsabilités, mais il me semble que cela aurait été à d'autres de lui dire non".

Bayrou: "Pas d'antipathie pour Sarkozy"
François Bayrou a estimé qu'il y avait "beaucoup de gens qui croyaient que j'avais beaucoup d'antipathie pour Nicolas Sarkozy. C'est entièrement faux". Et le leader du Modem de poursuivre: "Je n'ai pas une once d'antipathie pour Nicolas Sarkozy mais j'en ai pour ce que le gouvernement fait à la France", a-t-il précisé.

Bayrou: Jean Sarkozy, "un tournant"
François Bayrou a estimé que l'affaire Jean Sarkozy avait causé "beaucoup de dégâts pour l'image de la France et donne une image terrible du point de vue népotisme à l'étranger". Et le leader du Modem d'ajouter: "C'est un tournant qu'on ait vu le pays dire non et le pouvoir céder".

Bayrou: "Pas de ralliement avec le PS"
François Bayrou a assuré que le Modem ne s'alignerait pas avec le Parti socialiste. "Nous ne nous alignerons pas avec le PS", a déclaré le leader du Modem. "Je suis ce que je suis et il n'y a pas de ralliement possible et envisageable", a-t-il insisté. "J'ai fait à la rentrée une offre publique de dialogue qui est toujours d'actualité mais surtout une urgence", a estimé François Bayrou.

L'édition française résiste bien

Le marché a reculé de 0,5 % en 2008, selon le classement annuel des éditeurs de Livres Hebdo.

Malgré leurs inquiétudes, les maisons d'édition tirent plutôt bien leur épingle de la crise, constate le treizième classement annuel des principaux éditeurs français du magazine Livres Hebdo. L'activité des 231 sociétés réalisant un chiffre d'affaires d'au moins un million d'euros stagne en un an, passant de 8,63 à 8,59 milliards d'euros.

Sans surprise, le trio de tête reste identique :

• Hachette Livre, la branche édition de Lagardère, creuse encore davantage l'écart sur ses concurrents avec 2,15 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 2008 (+ 1,4 %) ;
• loin devant Editis (Robert Laffont, Plon…, racheté par le catalan Planeta en 2008) • et France Loisirs (filiale de l'allemand Bertelsmann, en baisse de 3,4 %).

Ce trio devance toujours :
• Media Participations (Dargaud, Dupuis, Kana…) ;
• le groupe Lefebvre Sarrut (juridique).

Mais «c'est dans la tranche intermédiaire - les éditeurs réalisant un chiffre d'affaires de 5 à 50 millions d'euros - que l'activité s'est le plus dégradée l'an dernier», note le magazine qui observe une nette augmentation du nombre de maisons d'édition affichant un chiffre d'affaires en ­baisse. «Elles sont 107, soit plus de 46 % des maisons classées, contre 80 en 2007 (33,9 %)», précise l'enquête.

Ces résultats ne signifient pas forcément que ces éditeurs souffrent de la crise. Certains reculs s'expliquent tout simplement par la fin d'un succès. C'est le cas de Gallimard qui a subi en 2008, explique Livres Hebdo, « le contrecoup des succès spectaculaires qu'il a réalisés l'année précédente avec le septième et dernier volume de Harry Potter, L'Élégance du hérisson, de Muriel Barbery et le Renaudot de Daniel Pennac pour Chagrin d'école».

En un an, Gallimard Jeunesse a vu ses revenus chuter de plus de 47 %. Les petits éditeurs sont plus sensibles encore à ces réajustements, à l'instar de Mercure de France qui perd plus de la moitié de son chiffre d'affaires en 2008 après le succès rencontré par Alabama Song, de Gilles Leroy (Goncourt 2007).

Les succès à la rescousse

À l'inverse, d'autres éditeurs ont vu leurs revenus exploser en 2008 : La Consolante, d'Anna Gavalda, a dopé les ventes du Dilettante dont les revenus ont été multipliés par cinq sur l'année. Viviane Hamy profite aussi à plein (+ 109 %) de l'engouement pour le dernier ouvrage de Fred Vargas, Un lieu incertain. Autre maître d'œuvre récompensé en 2008, l'éditeur Zulma à l'origine de la parution de Là où les tigres sont chez eux, de Jean-Marie Blas de Roblès, récompensé des prix Médicis et Fnac. Sans oublier Actes Sud porté par le succès de la trilogie Millenium.

Seul à sortir du lot, ETAI a doublé son chiffre d'affaires l'an dernier en rachetant le groupe d'information professionnelle Gisi (L'Usine nouvelle). Reste que la palme de l'éditeur le plus rentable revient en 2008 à un éditeur public, CNRS Éditions, avec 612 millions d'euros de résultat net.

Un bizut au gouvernement

La Mauvaise vie, certes, mais aussi la mauvaise école? Le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, est revenu samedi au micro de RTL sur la polémique suscitée par Marine Le Pen en 2009 par son livre écrit en 2005. Le neveu de François Mitterrand estime avoir subi un "super-bizutage". Un de ceux qui endurcissent.
"Endurci". Pas même de la "rancœur". Juste un "super-bizutage carabiné". Frédéric Mitterrand est revenu samedi au micro de RTL sur la polémique lancée par Marine Le Pen sur le plateau d'A vous de juger, en septembre. La vice-présidente du Front National mettant en cause ses bonnes mœurs, punies par la loi, et demandait la démission du novice, du bizut de la politique gouvernementale. La polémique a depuis essaimé avant de retomber comme un soufflé. Le bon moment pour sortir du bois.

"La seule chose qui compte, c'est d'avancer", a jugé Frédéric Mitterrand. Tout en assurant qu'il ne se départirait pas de sa "part d'émotion" à l'avenir, le ministre de la Culture a expliqué qu'il serait désormais "un peu plus prudent" dans son expression publique. Son soutien appuyé au cinéaste franco-polonais Roman Polanski lors de l'arrestation de ce dernier en Suisse pour une affaire de viol sur mineure aux Etats-Unis remontant à 1977 l'a également profondément desservi.
"Je vais être plus prudent"

"Tous les ministres ont leur passage au feu, leur superbizutage, le mien était carabiné. Mais je pense que je pourrai en tirer tous les enseignements et, au fond: ni ressentiment, ni rancoeur, ni rancune. La seule chose qui compte, c'est d'avancer", a déclaré Frédéric Mitterrand. "Je me suis endurci. Les seules traces, c'est que j'ai appris un certain nombre de comportements qui peuvent être ceux d'un ministre que je n'avais peut-être pas totalement maîtrisés", a-t-il reconnu. Frédéric Mitterrand a estimé que l'affaire lui permettrait de "trouver l'équilibre entre citoyen et ministre. Je vais être un peu plus prudent", a-t-il expliqué tout en revendiquant sa "part d'émotion. Je ne veux pas devenir un monstre administratif ou qui fait carrière politique".

Il n'a pas confirmé le dépôt d'une plainte en diffamation contre Marine Le Pen, vice-présidente du Front national. En direction de membres du parti socialiste qui l'avaient accusé de promouvoir le tourisme sexuel, tel Benoît Hamon, le ministre de la Culture a estimé à nouveau que la raison les avait quittés. "Je pense que parmi ceux qui ont perdu leur calme, je n'étais pas le seul, loin de là. Il y en a peut-être qui sont allés beaucoup plus loin", a commenté le ministre, adoucissant toutefois ses propos. Endurci à la chose politique?

Dans un pays où l'on se préoccupe plus de ce qui se passe dans le slip des gens que dans leur tête, il n'est pas étonnant qu'il faille se montrer très prudent, il est si facile de se faire enculer !

C'est vulgaire mais je le pense vraiment, les gens sont détestables.

La Poste-NPA: Appel à manifester lundi

Olivier Besancenot appelle à un rassemblement unitaire lundi 26 octobre à Paris avec le comité national contre la privatisation de la Poste, annonce samedi le Nouveau Parti anticapitaliste dans un communiqué. "L'objectif est de manifester contre le transfert à la RATP de compétences dévolues à La Poste, à savoir la remise des recommandés", explique le NPA, précisant que "cette nouvelle initiative unitaire s'inscrit dans la poursuite du combat contre la privatisation, avant d'autres actions le 31 octobre devant les bureaux de poste et à partir du 2 novembre, lors de l'examen du projet de loi au Sénat."

IL COMMENCE A ME FAIRE CHIER CE PETIT CON, FRANCHEMENT, CE MEC N'EST CAPABLE DE RIEN SAUF À DISTRIBUER LA MERDE, PARCE QUE LE COURRIER; ÇA FAIT LONGTEMPS QU'IL NE S'EN CHARGE PLUS, JE PENSE QU'IL EST TIMBRÉ.

Faut-il juger Chirac?

Le JDD révèle les 5 auditions de l’ancien Président dans l’affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris. La juge Xavière Simeoni doit décider cette semaine si elle le renvoie devant le tribunal.
Jacques Chirac sera-t-il renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris ? Réponse cette semaine. La juge d’instruction Xavière Simeoni, chargée de l’affaire des emplois présumés fictifs de la Mairie de Paris, se prononcera au plus tard vendredi, le jour où elle prend de nouvelles fonctions à la cour d’assises. Après Alain Juppé et les emplois fictifs du RPR, après Villepin et Clearstream, Jacques Chirac va-t-il, à son tour, devoir monter les marches d’un palais de justice ? Silence radio total dans son entourage. Le politique préféré des Français, qui sort le premier tome de ses Mémoires dans quinze jours, ("un livre politique qui s’arrête en 1995, dans lequel il n’y a pas un mot sur les affaires", révèle un proche), espère échapper aux foudres judiciaires. "Le président Chirac attend cette décision avec sérieux et sérénité", indique-t-on dans son entourage.

La magistrate a entre les mains un volumineux dossier commencé en janvier 1999, suite aux révélations de l’ancien directeur du personnel de la Ville, Georges Quémar. Concernant l’ancien maire de Paris, l’affaire a été mise en sommeil jusqu’à la fin de son mandat présidentiel, immunité du chef de l’Etat oblige. Puis la juge, en novembre 2007, a mis l’ancien Président en examen pour "détournement de fonds publics", concernant 35 emplois présumés fictifs de 1983 à 1995. Jacques Chirac a été entendu à cinq reprises par la magistrate, et a signé 107 pages de procès-verbaux. L’ancien Président se défend pied à pied. Il "assume ces embauches", même s’il "ne connaissait pas la plupart des personnes concernées". "Jamais, à aucun moment, je n’ai eu, ni la volonté, ni même le sentiment de commettre une quelconque infraction ou irrégularité, ni même de transgresser la morale ou l’éthique ou encore de léser les intérêts des Parisiens qui, pendant 18 ans, m’ont accordé leur confiance", conclut-il dans sa dernière audition. Seul hic : les sommes en jeu, de l’ordre de 3,5 millions d’euros. L’actuel maire, Bertrand Delanoë, via son avocat, Me Jean-Pierre Mignard, continue de les réclamer… En fin de semaine, Me Mignard a adressé une note à la juge, lui rappelant les intérêts de la ville. "Nous demandons remboursement au centime près… il n’y a aucune vindicte contre quiconque", explique-t-il. Comment Xavière Simeoni va-t-elle trancher ? "Elle est insondable, glisse un des nombreux avocats du dossier. Mais à l’évidence, c’est une décision lourde à prendre."
"Détournements de fonds publics"

Si la juge décide de rayer le dossier d’un trait de plume, elle peut suivre les réquisitions du parquet. Discrètement, au début du procès Clearstream, le procureur de la République Jean-Claude Marin a signé un réquisitoire de non-lieu général de 117 pages, dont le JDD a pu prendre connaissance. Le parquet estime que « sur les 481 chargés de mission recensés par l’information judiciaire, le plus grand nombre avait occupé un emploi bien réel ». Reprenant ensuite, un par un, les 35 emplois litigieux, le parquet considère à chaque fois que les charges ne sont "suffisantes"…

Une argumentation un peu légère pour la partie civile. Quoi qu’il en soit, l’affaire est un casse-tête. Aux côtés de Jacques Chirac, mis en examen pour "détournement de fonds publics", un délit passible du tribunal correctionnel, ses cinq anciens directeurs de cabinet, qui ont bel et bien signé les contrats litigieux, ont été mis en examen pour "faux en écriture publique", un crime passible de la cour d’assises. Dans le dossier, la plupart des bénéficiaires d’emploi supposé fictif ont été mis en examen pour "recel de détournement de fonds publics"… Certains ont même reconnu les faits. "Jacques Chirac “assumant” les embauches, il serait logique de faire bénéficier ses directeurs de cabinet d’un non-lieu", avance Me Pierre Haïk, l’avocat de l’un d’eux, Michel Roussin. Encore cinq jours d’attente avant d’être fixé. Cinq petits jours avant un éventuel nouveau séisme politico-judiciaire. L’enquête a démarré le 6 janvier 1999. Il y a presque dix ans.

Isabelle Balkany face à Zemmour et Naulleau


Je n'aime pas cette émission, parce que je ne peux pas encadrer le présentateur, il est trop con, mais j'avoue que la joute verbale est bonne.

Le compte est bon pour l’ordinateur quantique

Grâce à une puce optoélectronique quantique, des chercheurs sont parvenus à calculer les facteurs premiers du nombre 15. Une étape décisive.
Des chercheurs de l’université de Bristol, au Royaume-Uni, ont réalisé un prototype de puce optoélectronique quantique qui leur a permis pour la première fois d’effectuer un calcul mathématique. L’appareil est constitué de minuscules guides d’ondes en silice placés sur une puce de silicium et il exécute l’algorithme de Shor, un algorithme mathématique conçu spécifiquement pour exploiter les propriétés du calcul quantique et factoriser ainsi en nombres premiers. Ce résultat constitue, selon l’équipe, un pas important vers la mise au point de véritables ordinateurs quantiques utilisables. Les chercheurs se sont servis de leur puce pour calculer les facteurs premiers du nombre 15, soit 3 et 5. Ce genre de décomposition en facteurs premiers constitue une partie essentielle des processus de codage modernes, tels ceux qui assurent la sécurité des communications sur la Toile.

Les ordinateurs classiques stockent et traitent l’information sous forme de bits, une unité d’information qui ne peut avoir qu’un des deux états 0 ou 1. Un ordinateur quantique, en revanche, exploite le principe de la superposition d’états, c’est-à-dire le fait que les particules quantiques peuvent coexister dans deux états ou plus en même temps. Un tel ordinateur serait en principe plus performant qu’un ordinateur classique pour bien des tâches, mais sa réalisation pratique pose de gros problèmes car les bits quantiques – les qubits – sont fragiles et donc difficiles à transmettre, à stocker et à traiter. Les photons sont des qubits très appréciés, car ils peuvent parcourir de grandes distances à travers des fibres optiques ou dans l’air sans perdre pour autant leur nature quantique. En effet, en dehors de conditions spécifiques, les photons n’interagissent pas entre eux. L’inconvénient de cette propriété, cependant, est qu’elle rend délicate la construction d’appareils de traitement de l’information quantique – les portes logiques, par exemple –, parce que le principe même de ceux-ci consiste a priori en l’interaction d’au moins deux photons.

En 2003, Jeremy O’Brien et ses collègues de l’université du Queensland, en Australie, avaient surmonté ce problème en le contournant et en construisant la première porte logique contrôlée (CNOT) à photon unique. Une telle porte CNOT possède deux entrées – “cible” et “contrôle” – et constitue un composant élémentaire fondamental pour parvenir à l’ordinateur quantique. Cette première porte avait cependant été réalisée à partir de composants optiques traditionnels, des miroirs et des séparateurs de faisceau optique, entre autres, et occupait toute une table de laboratoire. L’appareil nouvelle version, mis au point en 2008 à Bristol, est composé de plusieurs centaines de portes CNOT tenant sur une pièce de silicium de 1 millimètre de côté seulement. Au lieu de miroirs et de séparateurs de faisceau optique, il utilise des guides d’ondes couplés – des canaux de silice transparents larges de 1 micron, que l’on fixe sur un substrat de silicium grâce à des procédés industriels classiques. L’équipe de Bristol a franchi une étape supplémentaire en effectuant son premier calcul mathématique avec cet appareil de dernière génération.

Dans cette expérience, quatre photons sont passés par les guides d’ondes, et des structures appelées portes H ont préparé ces qubits en une superposition de 0 et de 1 de sorte que l’état de l’ensemble des quatre photons est lui-même devenu une superposition de toutes ces entrées à quatre bits. Le calcul a ensuite été effectué par deux autres portes, créant un état de sortie hautement intriqué. Les résultats du calcul ont été obtenus en mesurant l’état de sortie des deux premiers qubits. L’opération a reposé sur l’algorithme de Shor, inventé par le mathématicien Peter Shor en 1994. Celui-ci pensait que les ordinateurs quantiques pourraient factoriser les nombres à un rythme exponentiellement plus rapide que les machines classiques. “Ce qui est vraiment excitant à propos de ce résultat, c’est qu’on pourra désormais développer de gros circuits quantiques, ce qui ouvre la voie à toutes sortes de possibilités”, assure Jeremy O’Brien. Une étape cruciale de l’élaboration du futur ordinateur quantique a donc été franchie.

Entretien avec Jean d'Ormesson

Ce qui frappe, avant tout, ce sont ses yeux. Pétillants. Rieurs. Oui, les yeux de Jean d'Ormesson sont une formidable machine à voir le monde et la vie. Qu'ont-ils donc vu, ces yeux, qui fixèrent bien des puissants (Giscard, Mitterrand, Sadate, Obama...), qui caressèrent les femmes autant que les rêves? Ah, ces yeux! Ne demandez pas d'où vient qu'ils brillent autant: c'est au contact des textes qu'ils se sont ouverts! Chateaubriand (bien sûr), Ronsard, Toulet, Aragon et des centaines d'autres dont "Jean d'O" récite les vers par coeur, ponctuant chaque soupir d'un regard d'enfant. En rassemblant ses "chroniques du temps qui passe", étalées sur plus de soixante ans (1948-2009) et évoquant autant les écrivains que le cours de la vie ou le destin de la planète, le plus mutin des académiciens montre que journalisme et littérature ne font pas toujours si mauvais ménage. Sans doute Jean d'Ormesson est-il un bon romancier. Assurément, il est un grand journaliste. Saveur du temps, qui fait suite à son admirable Odeur du temps, est à l'oeuvre de ce grand érudit hédoniste ce que le Bloc-notes de Mauriac est à la cathédrale du grand écrivain catholique. Il était temps de confesser la "nouvelle idole des jeunes".


Vous publiez un nouveau recueil d'articles. Quelle est l'unité de ces "chroniques du temps qui passe"?
Jean d'Ormesson. C'est ma fille Héloïse qui a choisi ces chroniques. La plus ancienne n'est pas fameuse: elle date de 1948, c'est une lettre ouverte intitulée "Qu'est-ce qu'un bourgeois? " que j'avais envoyée au Monde et où je disais des choses que tout le monde savait déjà. A titre documentaire, cela peut peut-être être intéressant. La plus récente de ces chroniques date de 2009 et porte sur l'anniversaire des premiers pas de l'homme sur la Lune. D'une chronique à l'autre, il y a certaines répétitions, bien sûr... Mais, après tout, on a le choix entre se répéter et se contredire. Et vous m'accorderez qu'il n'y a pas tant de contradictions. L'unité, c'est l'admiration. Un exercice d'admiration des écrivains morts, des écrivains contemporains, des grandes oeuvres, du monde. C'est ce qui fait l'originalité de ce livre: nous vivons une époque vouée à la dérision et à l'ironie; moi, même si je sais aussi jouer ce jeu, je me reconnais davantage dans un personnage qui ressemblerait au Candide de Voltaire: il s'émerveille de tout.

On dit parfois de vous, non sans moquerie mais non sans raison, que vous aimez jouer le ravi de la crèche...
J. d'O. Mais oui! Ce sont les chroniques du ravi de la crèche! Avec, naturellement, de grandes inquiétudes. Il est difficile, notamment, d'être en admiration devant l'état de la langue française ou devant les grandes interrogations sur la littérature. La littérature d'aujourd'hui vaut-elle celle de l'entre-deux-guerres qui fut, avouons-le, stupéfiante?

A ce point?
J. d'O. Et comment! La littérature française commence, tout le monde le sait, avec la Cantilène de sainte Eulalie, qui suit de très peu les Serments de Strasbourg, premier document rédigé en une autre langue que le latin. Tout au long de ces mille ans de littérature, quatre périodes me semblent particulièrement éclatantes. La première, c'est le XVIe siècle. Merveilleux, le XVIe siècle! Ronsard, du Bellay, Jodelle, et, plus tard, Maynard, Malleville... Ronsard, qui fut un familier des princes, qui s'intéressa à l'histoire, à la politique, à la religion, mais qui s'occupa surtout de Marie, de Cassandre et d'Hélène, fut incroyablement célèbre de son vivant et tomba totalement dans l'oubli au siècle suivant. Voltaire le traite extrêmement mal et le XVIIIe l'ignore complètement. C'est Sainte-Beuve qui l'a redécouvert. Ensuite, évidemment, il y a l'âge classique, avec ces deux créateurs définitifs de la prose et de la poésie que sont Pascal et Corneille. La troisième grande période, c'est le romantisme, qui va de Rousseau et Chateaubriand à Zola et Baudelaire. La quatrième période n'est pas la moins brillante, elle s'étend sur moins de vingt ans, c'est l'entre-deux-guerres: Claudel, Péguy (même s'il meurt en 1914), Saint-John Perse, Valéry, Gide, Aragon, tous les autres... Vous savez, on connaît la date de naissance de la langue française (1539, l'édit de Villers-Cotterêts), mais on connaît aussi le jour et l'heure de la fin de la domination de la langue française. C'est le 10 mai 1940. L'effondrement français, que les gens de vingt ans ne connaissent pas mais que ceux de ma génération ont subi, restera une douleur à jamais. La littérature française, qui va mourir ou, du moins, perdre beaucoup des siens, donne avant cette date un dernier éclat. Et ce dernier éclat est extraordinaire!

Dans ce livre, vous, que l'on a connu si bienveillant à l'égard de beaucoup d'écrivains, êtes très sévère avec la littérature française contemporaine: est-elle en crise? Est-elle nulle?
J. d'O. Oh, nulle, non! Mais en crise... La seconde moitié du XXe siècle, à laquelle j'appartiens, m'apparaît en effet moins brillante que cet entre-deux-guerres si stupéfiant. Cela dit, je trouve que la situation est meilleure aujourd'hui. Je pense à Claude Lanzmann, dont Le lièvre de Patagonie est un livre formidable. Je pense aussi à Jean Rolin, que je considère comme un grand écrivain, ou à Pierre Michon ou Marie NDiaye...

Vous retrouvez votre habituelle bienveillance... Mais revenons à vous. Votre premier texte date de 1948. A quel âge avez-vous su que vous seriez écrivain?
J. d'O. Très tard. J'avais vingt-neuf ans.

Vingt-neuf ans, vous trouvez que c'est tard!
J. d'O. La plupart de mes amis ont écrit à quinze ou seize ans. Et Françoise Sagan a publié Bonjour tristesse à dix-neuf ans! Moi, à dix-neuf ans, j'envoyais un mauvais article au Monde. J'étais passionné par la littérature, attiré par le journalisme, mais je n'aurais jamais osé écrire. Mon premier livre date de mes vingt-neuf ans. Je l'ai écrit sous les ricanements de mes camarades d'école. C'est que j'étais normalien et on ne rigole pas, à Normale sup: il faut de l'érudition; écrire un roman, c'est ridicule. Mes premiers romans n'ont pas connu un succès formidable, avouons-le.

Pour quelles raisons, selon vous?
J. d'O. C'est très simple: ils n'étaient pas assez bons.

Encore votre fausse modestie légendaire!
J. d'O. Mais non, je vous assure! Je dois beaucoup, pourtant, à René Julliard qui m'a toujours soutenu en me prédisant un destin à la Sagan, publiant mes romans avec abnégation et essuyant, avec moi, demi-échec après demi-échec. Peut-être que l'une des raisons de ces échecs est le fait que personne ne parlait de mes livres au Figaro où j'étais interdit de recension depuis que j'avais massacré dans la presse un roman - très mauvais - du directeur, Pierre Brisson, qui était un grand journaliste, mais un piètre romancier. Et puis, il y a eu La gloire de l'Empire, en 1971, et là, tout s'est emballé. Le succès est arrivé. Enfin! Pourtant, en l'écrivant, je trouvais ce livre un peu ennuyeux. Il m'arrivait de m'endormir dessus. Mais je me disais: "Il faut aller jusqu'au bout." J'intégrais alors quelques petites plaisanteries, comme, par exemple, des notes de bas de page renvoyant à elles-mêmes.

Puis vous êtes devenu directeur du Figaro et vous avez cessé d'écrire des romans...
J. d'O. Je n'ai pas suivi ce conseil que donnait Paul Morand: "Pas de pornographie. Et pas de journalisme..." Le Figaro m'a pris six années de ma vie. Passionnantes, mais qui m'ont totalement éloigné de la littérature. A mon arrivée au Figaro, j'avais fini un livre qui était une chronique familiale, Au plaisir de Dieu, et qui fut un grand succès. C'est à partir de là que ça a vraiment marché.

En soixante ans de vie littéraire, avez-vous connu des moments de découragement?
J. d'O. La littérature, c'est comme le mariage: les quarante premières années sont difficiles, mais après, ça va tout seul. Non, je n'ai jamais eu de grandes difficultés à écrire. On m'a beaucoup reproché d'avoir souvent écrit mon dernier livre. Il est vrai qu'il y a eu un adieu à la littérature (Au revoir et merci). Et, lorsque j'approchais les soixante-dix ans, alors que ma santé était peut-être un peu moins bonne qu'aujourd'hui et que j'avais, aussi, traversé quelques chagrins, j'ai écrit C'était bien. Je pensais, très honnêtement, que ce serait mon dernier livre. Ce ne fut pas le cas. En fin de compte, j'aurai partagé ma vie entre littérature et journalisme. Je pense véritablement que l'opposition entre journalisme et littérature est très forte. Naturellement, il y a eu quelques écrivains qui furent de grands journalistes et inversement: Hérodote, Xénophon, Victor Hugo (celui de Choses vues), Mauriac, Kessel... Mais l'opposition entre journalisme et littérature est réelle. Le journalisme, c'est une équipe. La preuve? Quand Mauriac a quitté Le Figaro, on a dit: "Le Figaro va s'écrouler", et il ne s'est pas écroulé. Quand Raymond Aron a quitté Le Figaro, je me suis dit la même chose... Et Le Figaro est encore là! Le journaliste, c'est une équipe; l'écrivain est toujours seul. Mais la différence principale est ailleurs: l'écrivain pense à la mort.

Et pas le journaliste?
J. d'O. Pas du tout! Le journaliste pense à la vie. Spinoza disait que philosopher, ce n'est pas réfléchir à la mort mais réfléchir à la vie. Eh bien, le journaliste est spinoziste, pas l'écrivain.

Derrière l'image joyeuse que vous avez pris soin de fabriquer de vous-même, notamment à travers les médias, se dissimule donc une réflexion sur la mort?
J. d'O. A un point énorme! Je suis très gai et extraordinairement mélancolique. Oui, je pense à la mort sans cesse. D'abord parce que mon âge est quand même avancé. Il faut bien le dire: je suis vieux. J'ai commencé à comprendre que j'étais vieux à partir du moment où les gens m'ont dit: "Comme vous êtes jeune! Vous avez bonne mine! " Evidemment, car on s'attend à ce que j'ai mauvaise mine, à mon âge. Donc la mort est là. Oui, elle est là. Mais elle est là, présente dans mes pensées et dans mes livres parce que j'ai énormément aimé la vie.

Vraiment? L'an dernier, dans Qu'ai-je donc fait?, vous avez tout de même fendu l'armure en confessant avoir été parfois lâche avec les femmes. La confession est un art que vous avez très peu pratiqué: vous restez très secret sur votre vie privée.
J. d'O. Très secret. Vous savez, la parole a été donnée aux hommes pour cacher leurs pensées. Et l'une des meilleures façons de dissimuler consiste à parler beaucoup, à écrire beaucoup. Oui, j'ai très peu parlé de moi. Je ne dis pas que je me suis bien conduit dans la vie, je dis que la vie a été indulgente avec moi, même dans mes bassesses, même dans ce que j'ai fait de mal - et il y a beaucoup de choses dont je ne suis pas tellement fier. Après tout, j'aurais pu avoir une vie beaucoup plus brillante: j'avais tout de même dix-huit ans en 1944, j'aurais pu m'engager dans la Résistance. D'autres l'ont fait à cet âge. Moi, je passais le concours de l'Ecole normale...

Est-ce là votre unique regret?
J. d'O. Cher François, vous ne me ferez rien dire sur ma vie sentimentale. Mais... elle n'a pas toujours été formidable, je le reconnais. J'en ai donné un aperçu dans Qu'ai-je donc fait?. Mais j'ai encore des ressources d'ignominie cachée. Et, donc, je ne cherche pas à me faire briller. D'ailleurs, on m'accuse parfois de fausse modestie. Ma modestie est tout à fait sincère. Ce qui est vrai, c'est que la vie a été indulgente à mon égard: j'ai pu faire des études, je n'étais pas si pauvre. Je ne vais pas me présenter à vous comme un homme de gauche, mais je trouve que l'égalité des chances au départ est vraiment une grande cause. Moi, j'ai eu la chance de naître au bon endroit. Je suis un héritier. Tout ce que j'ai fait de bien, peut-être, c'est de ne dilapider cet héritage ni dans les boîtes de nuit ni sur les champs de courses mais de le transformer en livres.

Vous avez été plutôt sage comparé aux écrivains qui vous fascinent: Morand et ses Bugatti, Roger Nimier et sa fin tragique en Aston Martin, Sagan et sa façon de brûler la vie par les deux bouts. Pourquoi?
J. d'O. Parce que j'ai commencé à écrire très tard. Savez-vous pourquoi je parais si jeune alors que je suis si vieux? Parce que j'ai commencé ma vie très tard. Je rattrape le temps perdu. Jusqu'à trente-cinq ans, je n'ai rien fait. J'ai travaillé. A Normale sup, je travaillais. A l'Unesco, je travaillais ou je faisais semblant. J'ai beaucoup glandé, vous savez. Si, si! J'ai eu, en effet, des voitures ridiculement longues, des chemises fabuleuses, j'ai beaucoup été aux Caraïbes... Et puis, à partir du moment où j'ai commencé à écrire, je n'ai plus eu en tête qu'une seule idée: me retirer. J'avais envie d'être un grand écrivain. Alors, de nouveau, j'ai travaillé. Mais je savais que je ne saurais pas unir les grandes voitures et les grands livres. J'ai abandonné les voitures pour la littérature. Oh, je ne dis pas que j'ai été un grand écrivain... mais...

Vous vous êtes vous-même surnommé l'"écrivain du bonheur". Or vos romans, ces quatre ou cinq dernières années, semblent démentir ce surnom...
J. d'O. Oui, je suis un peu revenu de ça. J'ai été un écrivain du bonheur. Parce que j'ai beaucoup parlé de l'amour de la vie. La vie et moi, on s'est très bien entendus. Elle m'a beaucoup donné et j'ai essayé de lui rendre un peu de son indulgence. Bernard Frank, que j'aimais beaucoup et qui ne m'a jamais ménagé, comme vous savez, me disait: "Tu ne seras jamais un bon écrivain car tu n'as jamais souffert." Faut-il vraiment souffrir pour être un grand écrivain? me demandais-je. J'ai longtemps répondu non à cette question. Aujourd'hui, je n'en suis plus sûr. Je pense, en disant cela, à François Nourissier, qui est un grand écrivain - Le bar de l'Escadrille ou A défaut de génie sont des chefs-d'oeuvre - et dont la vie et le destin furent marqués par le malheur. Sa vie est comme ses livres: malheureuse. A tout prendre, peut-être que, oui, je préfère le bonheur au malheur.
Reprendriez-vous à votre compte cette formule de Roger Nimier: "Ne rien prendre au sérieux, tout prendre au tragique"?
J. d'O. J'ai pris trop de choses au sérieux, comme tout le monde. Si je faisais une tache sur mon costume ou une rayure à ma voiture décapotable, cela m'ennuyait. Mais ce n'est rien. Ecrire un livre réussi, vous savez ce que c'est? C'est écrire un livre qui change un peu celui qui le lit et celui qui l'a écrit.

Combien de vos livres vous ont changé?
J. d'O. La gloire de l'Empire m'a fait monter d'un degré - un de ces degrés que l'on atteint en se disant: "Maintenant, il ne faut pas descendre en dessous de ce niveau-là." C'était bien m'a changé. Ainsi que Qu'ai-je donc fait?. C'est tout.

En quoi ces livres vous ont-ils changé?
J. d'O. Ils m'ont éloigné de l'écrivain du bonheur que j'étais. Je suis actuellement en train de travailler sur un nouveau livre. Je vais aller encore plus loin dans ce sens... Je ne prétends pas avoir écrit de grands livres mais ceux que j'ai écrits ne m'ont pas laissé indemne. L'idée que les Mémoires d'outre-tombe n'ont pas changé Chateaubriand, que Les châtiments n'ont pas changé Hugo, que Les essais n'ont pas changé Montaigne ne tient pas debout. Un livre qui ne change pas son auteur n'est pas un grand livre. Ni même un bon livre.

Dans Saveur du temps, vous posez la question de savoir si l'écrivain doit ou non se mêler au tourbillon du monde. Vous êtes admiratif devant Pierre Louÿs, Cioran, Gracq ou Modiano qui ont tous choisi de ne pas se mêler au tourbillon du monde alors que vous, à l'inverse, avez choisi de vous y confronter. Quelle doit être l'attitude de l'écrivain?
J. d'O. Je suis un peu schizophrène. J'aimerais être comme eux. Je suis comme moi.

"Je me suis souvent trompé", écrivez-vous dans Saveur du temps. Sur quoi?
J. d'O. J'ai salué la grandeur de Mao à sa mort, par exemple. Quand Khomeiny est mort, j'ai écrit que le régime des mollahs ne lui survivrait pas.

Vous avez beaucoup aimé les feux du pouvoir...
J. d'O. Le pouvoir... Je m'en suis toujours méfié. J'ai été invité à l'Elysée par Giscard d'Estaing. Une seule fois. Il est vrai que j'avais fait sa campagne. Mitterrand, sur qui j'avais tiré à boulets rouges, m'a invité vingt-six fois!

Quels sont vos défauts?
J. d'O. Je suis Gémeaux, cyclothymique et un peu schizophrène.

Paranoïaque?
J. d'O. Ah non, pas du tout! Le paranoïaque, c'était Raymond Aron. J'admirais Aron, plus que tout, mais il était totalement paranoïaque. Un jour, je l'ai écrit dans un de mes livres. Il m'a répondu, en grommelant: "Paranoïaque, paranoïaque... Est-ce ma faute, à moi, si j'ai toujours raison? " Ce qui est la définition même du paranoïaque!

Ne pas avoir réussi à le faire entrer à l'Académie française est-il un de vos regrets?
J. d'O. Et comment! J'ai réussi à faire entrer Marguerite Yourcenar mais j'ai échoué avec Aron. A la fin de sa vie, il acceptait l'idée d'entrer à l'Académie mais il était très orgueilleux et avait un caractère terrible. Il m'a donc demandé de sonder les autres académiciens. J'ai fait le tour et je suis revenu en lui disant: "Vous ne pouvez pas vous présenter pour cinq raisons. 1°) Vous avez contre vous les antigaullistes - à cette époque, il y avait encore beaucoup d'anciens vichystes Quai Conti. 2°) Vous avez contre vous les gaullistes - Maurice Schumann rapporte que de Gaulle parlait de lui ainsi: "Aron, Aron? Est-ce ce personnage qui est journaliste au Collège de France et professeur au Figaro? "" 3°) Vous avez contre vous les antisémites - à l'époque, il y en avait. 4°) Vous avez contre vous les juifs de l'Académie - qui disaient: "Il n'en faut pas trop." Ces quatre catégories-là, vous pouvez les surmonter. Mais il y a une cinquième catégorie que vous ne pourrez pas surmonter: ceux à qui vous avez fait comprendre, un jour ou l'autre, que vous étiez plus intelligent qu'eux." Aron a ri et ne s'est pas présenté. Il a bien fait. Il aurait été impitoyablement battu. J'ai un autre regret: Aragon. Un jour, il m'a dit: "Jean, tu sais, je suis snob." Je lui ai répondu: "Vous êtes snob? Entrez à l'Académie française." Il ne m'avait pas dit non. Il avait démissionné du jury Goncourt - en partie à cause de Nourissier. J'en ai parlé à l'Académie et on m'a répondu qu'il n'avait qu'à se présenter, faire les visites, ce qui était inconcevable pour lui: Aragon, le plus grand poète français vivant, celui qui a écrit:

"C'est une chose étrange à la fin que le monde
Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit
Ces moments de bonheur ces midis d'incendie
La nuit immense et noire aux déchirures blondes [...]
Il y aura toujours un couple frémissant
Pour qui ce matin-là sera l'aube première
Il y aura toujours l'eau le vent la lumière
Rien ne passe après tout si ce n'est le passant",

il fallait lui dérouler le tapis rouge - c'est le cas de le dire! - et il serait venu. Evidemment, l'Académie a refusé de lui faire cet honneur.

Pourquoi ne cessez-vous de défendre l'Académie française?
J. d'O. Il ne faut pas cracher dans la soupe.

Certes. Mais ces dernières années, tout de même, la crise ne touche pas que la littérature: succession d'élections blanches, élections qui font ricaner...
J. d'O. Je n'ai plus l'énergie nécessaire. Je me suis mis en retraite, je laisse faire les autres... L'Académie française a toujours comporté un grand nombre de médiocres, vous savez. Voyez le XVIIIe siècle: c'était pire! Quand vous regardez mon fauteuil, le seul nom que vous connaissez est Jules Romains. Voltaire disait: "Nous faisons très attention de ne pas avoir que des grands esprits à l'Académie, car ce serait invivable." Et Paul Valéry avait cette formule fabuleuse: "L'Académie est composée des plus habiles des hommes sans talent et des plus naïfs des hommes de talent."

Mais tout de même, "quand on est quelqu'un, pourquoi vouloir devenir quelque chose? " - puisque vous voulez jouer au jeu des citations.
J. d'O. Vous avez raison! Eh bien voici ma réponse: j'ai voulu entrer à l'Académie française pour me débarrasser de cette tentation. J'y suis entré à quarante-sept ans. Après, j'ai pu faire autre chose: écrire.

Que peut-on espérer de mieux que ce que vous avez eu?
J. d'O. Léon Bloy, qui était insupportable et chrétien, a dit: "La seule tristesse, c'est de ne pas être un saint." C'est beau, non?

A quelle sainteté aspirez-vous?
J. d'O. M'occuper des autres. J'ai été très refermé sur moi-même. Un grand écrivain, c'est bien; un saint, c'est mieux.

Vous confessez avoir été narcissique?
J. d'O. Mais naturellement, je suis narcissique. Bien sûr. Tout écrivain véritable est narcissique.

Y a-t-il un moment où il faut, pour reprendre une expression que vous employez au début de votre livre, "quitter la table"?
J. d'O. Oui. Pour moi, le silence est une grande tentation. Je crois que je devrais en être capable. Vous verrez...

Qu'est-ce qu'un bon écrivain?
J. d'O. C'est d'abord un style. Beaucoup de gens arrivent chez les éditeurs et disent: "J'ai une histoire merveilleuse." Mais ce ne sont pas les histoires merveilleuses qui font les écrivains, c'est le style.

Est-ce que le style, c'est l'homme?
J. d'O. Le style, c'est la littérature. Mais il ne faut pas aller trop loin. Je pense que le formalisme, qui écarte tout ce que les Américains font si bien, c'est-à-dire raconter une bonne histoire, est très dangereux parce que cela éloigne le public. Mais il est vrai que ce qui dure, dans un livre, c'est le style. On n'écrit pas avec des histoires, on écrit avec des mots. Et les écrivains qui tiennent, qui traversent le temps, et ne parlons même pas des plus grands mais de Mérimée ou de Voltaire, ceux-là tiennent parce qu'ils ont un style et non pas parce qu'ils ont des histoires merveilleuses. Les histoires ne font pas l'écrit.

Vous écrivez, en 1962: "La crise de la littérature, et plus particulièrement du roman, vient d'abord sans doute de l'absence de grands écrivains." Pensez-vous toujours la même chose?
J. d'O. Il est possible que le grand écrivain soit une création du XIXe siècle. Madame de Sévigné n'a jamais pensé qu'elle était un "grand écrivain". Je doute que Montaigne ait pensé qu'il était un "grand écrivain". Bossuet aurait eu horreur de l'idée d'être un "grand écrivain". Il disait d'ailleurs: "La terrible mission de l'orateur sacré qui veut à la fois plaire et qui ne veut pas plaire..." C'est très très bien, ça. Soljenitsyne est moins un grand écrivain qu'une grande conscience. Peut-être que les derniers grands étaient Hemingway et Faulkner. Cioran, que j'aime tellement, n'était pas ce que l'on appelle le "grand écrivain".

Vous écrivez: "La culture française ne doit pas s'appeler nostalgie, elle doit s'appeler espérance." Comment transformer cette nostalgie - dont certains déclinologues, y compris dans les colonnes du journal que vous avez dirigé, ont fait un fonds de commerce - en espérance?
J. d'O. Grâce à Dieu, je ne suis pas ministre de la Culture!

Auriez-vous aimé l'être?
J. d'O. J'aurais détesté l'être, mais j'ai un caractère si faible que si on me l'avait proposé j'aurais accepté.

Quels conseils donneriez-vous à un jeune écrivain?
J. d'O. Surtout pas de journalisme! Il vaut mieux être banquier ou chauffeur de taxi pour être écrivain. Vous savez très bien qu'être journaliste et écrivain, ce sont deux métiers hystériques et qui se tuent l'un l'autre.

Il y a un leitmotiv dans ce livre, mais aussi dans toute votre oeuvre, qui est: "Nous avons perdu notre gaieté." Comment la retrouver?
J. d'O. Comment voulez-vous qu'on ne l'ait pas perdue? Vous voyez bien ce qu'a été ce XXe siècle: épouvantable. J'ai fait le calcul: si vous additionnez Hitler, Staline, Mao, Pol Pot, le colonialisme, vous obtenez cent millions de morts violentes en cent ans, c'est-à-dire un million de morts par an! Et ce début de XXIe siècle: la crise, la fin de la religion... Oui, les gens ont perdu leur insouciance. Le grand problème, c'est de rendre l'espérance aux gens. Qu'est-ce qui donnait de l'espérance, autrefois? L'Eglise catholique et le Parti communiste. Or, le Parti communiste a disparu et l'Eglise catholique est un peu souffrante. Aujourd'hui, ce qui donne de l'espérance, c'est peut-être la littérature. On pourrait peut-être dire que la littérature naît du malheur et qu'elle donne du bonheur. Elle rend une espèce d'espérance aux gens. C'est sans doute pour cela que le livre ne se porte pas si mal en France. Il y a une formule de Michel-Ange que j'aime tellement: "Dieu a donné une soeur au souvenir et il l'a appelée espérance."

Et vous, quel est votre truc pour rester gai et résister à la médiocrité ambiante?
J. d'O. Les amis, comme disait Borges. Je n'écris ni pour moi-même, ni pour la masse mais pour un petit nombre d'amis.

Croyez-vous toujours en Dieu?
J. d'O. J'ai écrit beaucoup de livres là-dessus et j'en écrirai encore un, et il m'est très difficile de répondre par oui ou par non. Mais, si vous voulez que je vous réponde par oui ou par non, alors la réponse est: oui.

Comment envisagez-vous votre propre mort?
J. d'O. Je pense très peu à ma mort. Je ne vis pas du tout dans l'inquiétude de la mort. Sur ce point, je suis spinoziste: je crois à la vie.

Mais comment peut-on être un personnage public de premier plan sans jamais vraiment rien livrer de personnel?
J. d'O. A moins d'être Chateaubriand, il ne faut surtout pas se mettre entre la vie et soi. La vie de soi-même a très peu d'intérêt. On peut essayer de manoeuvrer au mieux, comme je l'ai fait, pour tâcher de profiter de cette vie, mais ce qui nous est donné vient d'ailleurs.

Comme toujours - et c'est délicieux - vous vous êtes réfugié, dès qu'il s'agissait d'une question trop personnelle, derrière une citation. Pourquoi?
J. d'O. Mais c'est ma charmante modestie! Il se trouve que beaucoup d'écrivains ont dit mieux que moi ce que je pouvais exprimer. Alors quand j'arrive à les placer, je me sers d'eux. Oui, c'est un bouclier. Je ne cherche pas à dévoiler quoi que ce soit sur moi, c'est ainsi. Degas disait: "Je voudrais être illustre et inconnu." Merveilleux, non?

H1N1 : des experts tentent d'inciter à la vaccination

Les formes graves commencent à apparaître, mettent en garde les réanimateurs.

Comment convaincre des citoyens globalement peu motivés de se faire vacciner contre la grippe pandémique ? C'est l'équation complexe qu'ont désormais à résoudre la plupart des pays qui ont commencé leur campagne de vaccination. En dehors des États-Unis, où l'afflux de volontaires a entraîné un début de pénurie de vaccins ; les réticences ne faiblissent pas. En France, elles sont même à la hausse. Il y a un mois, 4 Français sur 10 envisageaient de se faire vacciner. Selon les derniers sondages, ils ne sont plus que 30 %, a révélé jeudi la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, lors d'un colloque scientifique consacré à la pandémie à Paris. «L'opinion est oublieuse de ce qu'ont changé les vaccins pour des maladies comme le tétanos, la diphtérie ou la polio. C'est une réaction de gosses de riches», a lancé la ministre, visiblement excédée par les rumeurs persistantes sur le manque de fiabilité des vaccins anti-H1N1.

Les spécialistes présents à cette journée avancent d'autres arguments pour expliquer le malaise actuel et légitimer la vaccination. Le Pr Claude Hannoun, l'un des spécialistes historiques des virus grippaux - il a commencé à travailler sur le sujet dans les années 1940 - souligne le caractère exceptionnel de la situation. «Ce virus H1N1 a fait le tour du monde en deux mois, trois fois plus vite que celui de la grippe pandémique de 1957, explique-t-il. En outre, ce nouvel agent grippal n'est pas comme les autres. Il s'accommode assez bien de températures clémentes contrairement à la majorité des virus grippaux, note Claude Hannoun. La recrudescence importante observée aux États-Unis doit aujourd'hui nous inciter à assurer une vaccination convenable.» Cette stratégie est aussi une évidence pour les cliniciens qui ont à prendre en charge des formes graves de la nouvelle grippe.

Extrapolant l'expérience australienne, les réanimateurs français se préparent à accueillir plus de 2 000 patients grippés en soins intensifs, dont beaucoup pour une pneumopathie sévère due directement au virus H1N1. «Pour nous, ce n'est plus de la science-fiction, les cas sévères ont déjà commencé. Ils seront peu nombreux, mais nécessiteront une lourde prise en charge», confirme le Pr Pierre Carli, chef du service de réanimation de l'hôpital Necker (Paris) et patron du Samu de Paris.

Les services de réanimation se sont organisés pour pouvoir augmenter les capacités en lits de soins intensifs, et ils ont formé leur personnel aux techniques de circulation extracorporelle. En effet, selon les prévisions nationales, 160 patients, peut-être plus, pourraient avoir besoin d'un tel traitement. Exceptionnelle pour les pneumopathies des grippes saison­nières, cette stratégie a été utilisée avec succès en Australie chez 68 malades qui ne répondaient pas aux techniques habituelles de réanimation. 80 % d'entre eux, parfois mourants, ont ainsi été sauvés, raconte le Pr Carli.

Pour illustrer ses propos, le Pr François Bricaire, du service des maladies infectieuses de la Pitié-Salpêtrière (Paris), montre des radios de poumons prises la veille parmi les quatre malades hospitalisés en réanimation dans cet établissement. Sur les clichés, les poumons ne sont plus noirs (gorgés d'air) comme chez une personne saine mais complètement blancs. Ces images specta­culaires ont convaincu les infirmiers les plus sceptiques de se faire vacciner, selon François Bricaire.

Impliquer les médecins de famille

Dans un registre moins dramatique, le Dr Jean-Louis Bensoussan, généraliste à Toulouse et président des groupes régionaux d'observation de la grippe (Grog), estime «qu'on peut encore gagner le pari de la vaccination». À condition, selon lui, d'impliquer activement les médecins de famille dans la campagne. Depuis cet été, plusieurs enquêtes et sondages ont montré que ces professionnels de santé (comme les autres catégories de médecins et de soignants) étaient aussi peu motivés ou méfiants que le grand public vis-à-vis des vaccins anti-H1N1. «Les généralistes ont mal vécu la période de mai-juin où on leur demandait d'envoyer tous les enfants fébriles dans des hôpitaux spécialisés, estime-t-il. Leur méfiance vient peut-être de cette période-là. Et le Dr Bensoussan d'insister. «Les campagnes de santé publique qui fonctionnent bien sont celles qui incluent les généralistes. On devrait pouvoir proposer à ceux qui le souhaitent de vacciner leur patientèle.»

La situation est encore plus tendue dans d'autres pays. En Allemagne, les révélations par la presse que les hauts fonctionnaires, les militaires et les responsables de la santé n'auraient pas le même vaccin que le reste de la population ont provoqué une polémique intense ces derniers jours. Pour calmer le jeu, la chancelière Angela Merkel a fait savoir qu'elle aurait recours au vaccin «commun» plutôt qu'à celui réservé aux «personnels essentiels». En Belgique, un collectif de citoyens a déposé un recours en référé devant la justice pour faire suspendre la campagne, bien que celle-ci soit comme ailleurs basée sur le volontariat.
Ça me parait bizarre quand même, pourquoi nous poussent-ils à la vaccination ? C'est une histoire de gros sous ? Ça coûte cher une campagne de vaccination.

Nicolas Sarkozy. Pourquoi ça marche encore?

La confiance règne encore et toujours, malgré un bilan face à la crise jugé peu positif… Nicolas Sarkozy a beau éradiquer les acquis sociaux et respirer le mépris, il continue de faire plutôt belle figure. Est-ce son art d’user les mouvements sociaux, de raconter des fables, de faire taire les dissonances au sein de son propre parti? Quelques raisons d’un succès.
Depuis son arrivée à la présidence de la République, Nicolas Sarkozy impose son rythme, sa marque, ses contre-réformes. Il allie des mesures clairement libérales sur le plan économique, avec son lot de remises en cause des acquis sociaux, et une bonne dose de contrôle social. Très tôt, le paquet fiscal fut l’emblème d’une politique au service des vainqueurs du système. Et pourtant… Nicolas Sarkozy est toujours là et bien là. Même si ses courbes de popularité ont connu de vrais moments de faiblesse et si les Français jugeaient dans un récent sondage son bilan face à la crise peu positif (58 % d’opinions négatives), près d’une moitié de Français continuerait à lui faire confiance et son image reste peu écornée. Pire, face à la crise du capitalisme qui aurait dû invalider tous ses présupposés idéologiques, l’animal politique arrive à adapter son discours, à tourner à son avantage ce moment difficile. Voici le champion de la dérégulation qui se mobilise pour une « moralisation du capitalisme » ! Fini le Fouquet’s et les montres en or, l’heure est à la chasse au bonus et à la valorisation du rapport Stiglitz. Au total, non seulement il donne le sentiment qu’il y a un pilote dans l’avion quand la gauche est atone, mais il réussit à reprendre l’avantage, quitte à puiser quelques recettes, quelques formules à gauche pour donner le change. Les Verts cartonnent aux européennes ? Sarkozy dégaine la taxe carbone. Il y a à la fois une cohérence dans son projet politique, qui ne change pas de cap, et de la souplesse pour convaincre, séduire, s’adapter. « Changer pour que rien ne change », on connaît la formule. Pourquoi ça marche (encore) ? Regards vous soumet quatre clés d’explication.

L'ART DE RACONTER DES HISTOIRES

Pour être président de la République, sans doute faut-il savoir raconter des histoires… Nicolas Sarkozy l’a compris très tôt. Occuper l’espace, donner à voir des sentiments, des succès et des échecs, des romances : le Président excelle dans cet « art ». Christian Salmon a parfaitement décrit, dans Storytelling, ce phénomène qui consiste pour les politiques à endormir l’esprit critique public en mettant en scène leurs propres histoires. Cette méthode, qui se pratique dans la publicité ou le management et fut progressivement importée en politique par la Maison Blanche depuis Reagan, tente d’instrumentaliser l’art du récit. Le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, a parfaitement retenu la leçon américaine : « La politique, a-t-il déclaré au Monde, c’est écrire une histoire partagée par ceux qui la font et ceux à qui elle est destinée. On ne transforme pas un pays sans être capable d’écrire et de raconter une histoire. » Car il doit toujours se passer quelque chose, le Président doit contrôler l’agenda pour capter l’attention des médias et de l’opinion. Il s’agit non pas de faire appel aux convictions ou à la raison mais de capter et de synchroniser les émotions. C’est ainsi que nous passons doucement mais sûrement de l’opinion publique à l’émotion publique. Ce climat est gravissime pour la démocratie et contribue à dissoudre la politique. Mais en attendant, il profite au pouvoir en place.

Sarkozy a mis en scène son destin : c’est l’histoire d’un pauvre enfant de Neuilly, brimé, qui rêvait d’être président. Il a mis en scène son couple avec Cécilia, son divorce, sa rencontre sous forme de conte de Noël avec une nouvelle mannequin. Une vie privée faite de joies et de souffrances, pleine de rebondissements : une vraie série à l’américaine. Des personnages comme Rachida Dati, Fadela Amara ou Rama Yade font le miel du storytelling. Dans un autre registre, Bernard Kouchner fait partie des profils bien utiles. Sarkozy en use et en abuse. Il s’est aussi payé le luxe de se réapproprier des pans de l’histoire de France délaissés par la gauche, de lui piquer en quelque sorte ses emblèmes, ses référents tels que Guy Môquet, Léon Blum ou Jaurès. Là où l’imaginaire de gauche s’est essoufflé, asséché, la droite sait occuper l’espace. Même face à la crise du capitalisme, Sarkozy se donne des airs de justicier – façon Disney ! – au combat contre les méchants du G20, en guerre contre les bonus et les paradis fiscaux. La fable !

La parole de Sarkozy se veut performative et l’homme ne manque jamais une occasion d’aller lui-même au « front » – soutenir telle entreprise en faillite, rencontrer une association de victimes, serrer la main aux services de police. Comme l’actualité bouge sans cesse, nous suivons le zapping orchestré par le Président. Que ses paroles soient sans effet, que les actions ne suivent pas, que les promesses d’un jour soient oubliées le lendemain, importe moins que la capacité du Président à être réactif et à sembler toujours à l’endroit où il faut, au moment où il faut. Et il n’hésite pas à dire tout et son contraire. Or, comme l’explique fort bien Bertrand Méheust dans La politique de l’oxymore. Comment ceux qui nous gouvernent nous masquent la réalité du monde, cette utilisation des oxymores, cynique et à grande échelle, peut conduire à la destruction des esprits et devenir un outil de mensonges. Des termes tels que « flexisécurité », « moralisation du capitalisme » ou « vidéo protection » visent à brouiller nos repères. Nicolas Sarkozy recourt également aux oxymores dans les faits : souvenez-vous de sa visite au Vatican avec… Jean-Marie Bigard ! La promotion de la libre circulation des capitaux mais pas des êtres humains, la lutte contre le chômage comme priorité dans un système qui a besoin d’un taux de chômage pour fonctionner, etc., sont autant de façons de masquer les actes politiques, dans un contexte où la contestation sociale grandit.

Sa force est d’avoir su « moderniser » la droite et le style présidentiel. Le footing comme l’omniprésence du Président impriment sa marque, l’installent comme un homme de son temps. Il se veut l’homme de l’action, du mouvement. Et Sarkozy sait s’adapter au contexte, évoluer en fonction des rapports de force dès lors qu’il ne s’agit pas de remettre en cause les fondements de son projet libéral et autoritaire. Récemment, la taxe carbone ou le renoncement à recourir aux tests ADN pour les immigrés montrent qu’il ne veut céder aucun espace à ses adversaires, qu’il est capable de petits arrangements politiques pour séduire au-delà de son électorat acquis.

LE ROULEAU COMPRESSEUR COMME MÉTHODE

La droite cultive son triste adage selon lequel « la rue ne gouverne pas ». Il est arrivé ces dernières années qu’elle le fasse à ses dépens. En 1995, le plan Juppé a dû être enterré devant l’ampleur de la mobilisation. En 2006, les jeunes ont obligé Dominique de Villepin à retirer son CPE. Pour le reste, et singulièrement depuis que Nicolas Sarkozy est président, force est de constater que les luttes sociales peinent à engranger les victoires. Au-delà des interrogations sur la stratégie des confédérations syndicales et sur le manque de perspective politique qui pèse négativement sur la combativité sociale et l’issue des conflits, il y a bien cette manière de la droite d’avancer frontalement, brutalement, en désignant des ennemis, en opposant les uns aux autres, qui possède une part d’efficacité. Le passage en force est devenu une méthode, comme une habitude. La ligne de conduite, c’est un gouvernement qui ne cède pas, en tout cas pas de manière significative, devant les manifestations unitaires ou les durs conflits sociaux. Il poursuit sa feuille de route, sûr de ses choix comme de sa capacité à vaincre le mouvement. Et Sarkozy a même osé l’arrogance suprême, en juillet 2008 : « Désormais, quand il y a une grève en France, personne ne s’en aperçoit ». Le refus de la discussion, la provocation, l’humiliation et la détermination à imposer nombre de contre-réformes sont déstabilisants et permettent de contenir une révolte plus grande encore. Finalement, le gouvernement nous aurait-il à l’usure ? Emblématique, l’université s’est mobilisée comme jamais, la ronde s’est obstinée la nuit et le jour, mais n’a pas réussi à avoir la peau de la loi Pécresse. Au diable le mouvement de résistance des soignants, les hôpitaux doivent s’avaler le projet Bachelot qui importe les logiques du marché. Le monde de la justice fut vent debout ? Qu’importe, les juges d’instruction risquent bel et bien d’être supprimés, la mainmise du parquet d’augmenter. Quant au « pouvoir d’achat », il restera en l’état (pas d’augmentation des salaires et minima sociaux), malgré les grands rendez-vous de l’hiver et du printemps derniers qui, dans l’unité syndicale, avaient porté cette revendication. De La Poste aux Molex, les foyers de contestation ne manquent pas mais la capacité à gagner reste faible. Assommant. Accablant aussi. Car, à force de ne rien arracher, de prendre des jours et des jours de grève – qui signifient du salaire en moins – sans obtenir d’avancées, le peuple se désespère et se demande à quoi bon. Par la convergence des luttes – unité syndicale, « Appel des appels » –, d’aucuns pensaient que les mouvements gagneraient en efficacité. Ce ne fut pas suffisant. Pour l’heure, seul le LKP en Guadeloupe a réussi à atteindre une alchimie et un niveau de contestation porteurs d’espoir et de victoire. A méditer.

LA MACHINE UMP UNIFICATRICE DES DROITES

Le pari n’était pas gagné d’avance mais le résultat est là : la création de l’UMP a permis d’unifier solidement les différents courants de la droite. Créée en 2002 pour les besoins de Jacques Chirac, candidat à l’élection présidentielle, le sigle signifiait au départ : Union pour la majorité présidentielle. Il regroupait alors le RPR, Démocratie libérale et une bonne partie des députés de l’UDF. Rebaptisé Union pour un mouvement populaire, ce grand parti réussit à rassembler différentes familles de la droite, des conservateurs libéraux aux gaullistes en passant par les chrétiens démocrates. En novembre 2004, Nicolas Sarkozy prend la tête de l’organisation, à l’occasion d’un vote interne où il obtient plus de 85 % des voix. Face à lui, les candidats déchus Nicolas Dupont-Aignan et Christine Boutin font pâle figure… Avec cette assise militante confortable travaillée de longue date par l’entretien de réseaux internes et la construction d’une identité politique médiatique, le leader a les mains libres. Objectif : la présidentielle de 2007. L’échéance est pour Nicolas Sarkozy une vraie réussite : il remporte l’élection, toutes les autres composantes de la droite s’affaissent et la disparition de l’UDF rebat une partie des cartes à droite. Ce n’est pas le tout de devenir président, encore faut-il le rester, convaincre durablement l’opinion et gagner les différentes échéances électorales qui émaillent le mandat. Autrement dit, la « machine UMP » doit être confortée et l’unité des droites renforcée.

En juin 2009, un Comité de liaison de la majorité présidentielle est lancé par Sarkozy pour coordonner les partis qui soutiennent son action. La feuille de route est claire : « Intensifier le travail en commun et préparer les futures échéances électorales ». Ce Comité est composé de représentants de l’UMP et de présidents des différentes organisations et clubs politiques de droite. On y trouve la gaulliste Michèle Alliot-Marie qui préside « Le Chêne », Jean-Louis Borloo pour le Parti radical, Christine Boutin avec son jeune Parti chrétien-démocrate ou encore les amis de Charles Pasqua (RPF-IE). S’y ajoutent les nouvelles recrues issues des rangs de la gauche : Jean-Marie Bockel pour La gauche moderne (LGM) et Les Progressistes autour d’Eric Besson. Le Nouveau Centre, cette fraction de centristes qui avaient fait la campagne de François Bayrou mais ont rejoint la majorité gouvernementale, siège également. Les chasseurs du CPNT sont aussi de la partie. Et, dernière recrue de poids (symboliquement en tout cas) en vue des régionales, le Mouvement pour la France de Philippe de Villiers a rejoint la dynamique de rassemblement.

Cette large unité, la droite en a rêvé au XXe siècle, elle y est parvenue en ce début de XXIe siècle. Certains pensaient la structure UMP éphémère, bâtie pour les circonstances. Elle se révèle une vraie usine à unité, une machine à gagner. Elle est le fruit d’un effacement relatif des divergences fondamentales entre les courants de la droite – les clivages hérités du gaullisme se sont estompés – et d’une adhésion large – plus ou moins forcée mais globalement acceptée – à un chef, Nicolas Sarkozy. L’efficacité est là : un parti en ordre, où les dissonances apparaissent moins fortes que les capacités de rassemblement. Reste, bien sûr, Dominique de Villepin, qui se pose en homme de l’alternative à Sarkozy – sait-on jamais ! Mais ses réseaux et sa popularité, entachée par l’affaire Clearstream, ne lui permettent pas de jouer réellement dans la « cour des grands ». Il semble ne faire aucun doute que Nicolas Sarkozy sera le candidat unique de la droite en 2012. Jean-François Copé tente bien également de faire entendre sa voix, une petite musique qui se veut différente du sarkozysme. Mais chacun sait que la « jeune garde » se prépare surtout pour 2017. Tous ont un intérêt commun : réussir aux régionales de mars prochain. L’UMP entend devancer significativement la gauche au premier tour pour enclencher une dynamique suffisante au second. La force des scores de l’UMP aux premiers tours peut d’ailleurs créer une interprétation un peu erronée des résultats, comme nous l’avons vu aux élections européennes : la gauche était majoritaire en voix, le seul parti soutenant la majorité présidentielle ne recueillait « que » 28 % des voix mais le camp du Président est sorti vainqueur de l’échéance, devant un PS en peine avec ses 16,8 %.

UNE OPPOSITION EN BERNE

Le dira-t-on assez ? L’une des clés de la réussite de Nicolas Sarkozy, c’est la faiblesse de la gauche. Une opposition qui n’arrive pas à s’opposer efficacement, c’est vraiment du pain béni… La critique efficace est celle qui réussit à donner à voir une autre manière d’appréhender les problèmes, une logique alternative pour l’action publique. Or, pour l’essentiel, la gauche et le Modem concentrent les attaques sur le style, la méthode, le manque de moyens et plus rarement sur le sens et les finalités de la politique de la droite – et sur le terrain du style, c’est finalement François Bayrou qui apparaît le plus radical, toujours prompt à dénoncer la connivence avec les médias ou la présidence « bling-bling » ! La droitisation d’une bonne partie de la « gauche » et la baisse de la conflictualité politique sont passées par là. En cette rentrée politique encore, le Parti socialiste reste embourbé dans ses querelles internes et peine à dégager une ligne alternative audible. Quant à l’autre gauche, si elle parlait d’une seule voix – de manière polyphonique mais cohérente –, si elle faisait durablement cause commune, si elle n’avait plus peur de gagner, Nicolas Sarkozy aurait enfin un adversaire digne de ce nom.

Retraite des fonctionnaires : Bruxelles demande à la France de rembourser 5 milliards aux pères

Paris va répondre fermement à un avis motivé de la Commission européenne enjoignant la France de lever les discriminations visant les pères fonctionnaires. Bruxelles demande que les retraites des pères partis depuis 1990 soient recalculées.

Le gouvernement doit faire approuver par l'Assemblée nationale, la semaine prochaine, dans le cadre du budget 2010 de la Sécurité sociale, les nouvelles modalités d'attribution des avantages familiaux de retraite dans le secteur privé. La solution négociée avec les syndicats par le ministre du Travail, Xavier Darcos, est à peu près consensuelle (les pères pourront obtenir des trimestres au titre des enfants élevés dans des cas très limités).

Mais le gouvernement n'est pas encore tiré d'affaire concernant les fonctionnaires. Paris s'apprête à répondre, d'ici à lundi, à l'avis motivé de la Commission européenne enjoignant la France de lever les dernières discriminations visant les pères fonctionnaires en matière de retraite (« Les Echos » du 25 août).
Une forme de rémunération

Pour Bruxelles, la législation française enfreint le principe d'une égalité de rémunération entre hommes et femmes. La retraite est en effet considérée, selon une jurisprudence constante de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), comme une forme de rémunération. La France avait fait amende honorable en réformant le régime des retraites de la fonction publique d'Etat au 1er janvier 2004. Depuis, pour les enfants nés après cette date, les mères fonctionnaires reçoivent une bonification réduite de moitié, à deux trimestres de cotisation par enfant (au lieu de 1 an). Elles bénéficient aussi de trimestres additionnels si elles décident de prendre un congé parental, mais dans les mêmes conditions que les hommes.Problème : un autre dispositif a été prévu pour les mères d'enfants nés avant le 1er janvier 2004. Pour celles-ci, c'est l'ancien avantage qui demeure : quatre trimestres par enfant. L'avantage est certes lié à l'interruption d'activité de plus de deux mois. Il n'est donc, en théorie, pas réservé aux femmes. Mais la Commission constate que, dans les faits, ce sont quasiment exclusivement les mères qui se sont arrêtées de travailler. La discrimination demeure donc.
Une rétroactivité impossible

Dans ces conditions, Bruxelles demande à la France de réparer le préjudice subi par les pères, non seulement pour ceux dont l'enfant est né avant 2004 et qui doivent liquider leur retraite dans le futur, mais aussi pour ceux qui sont déjà partis depuis 1990 (c'est à compter de cette date que les Etats se devaient de respecter le principe d'égalité). Concrètement cela implique de recalculer les pensions et de rembourser le préjudice accumulé sur l'ensemble de la période, soit une dépense globale estimée par le gouvernment à 5 milliards d'euros pour la fonction publique d'Etat ! Et même 7,5 milliards d'euros en prenant aussi en compte les collectivités locales et les régimes spéciaux. Inacceptable pour Paris.

« Nous allons répondre point par point et nous battre pour maintenir le dispositif. On ne va quand même pas recalculer des pensions sur quinze ou vingt ans », réagit-on au sein du gouvernement. Dans sa réponse, la France va notamment mettre en avant le fait qu'en matière de retraite, une telle rétroactivité n'est pas possible. Le code des pensions civiles et militaires de l'Etat prévoit un délai de forclusion d'un an : une fois la retraite liquidée, la personne a douze mois pour effectuer un éventuel recours. Au-delà, aucune démarche n'est possible. Le gouvernement est confiant sur ses chances, car la Commission ne s'était visiblement pas rendu compte de l'ampleur du rattrapage. Cette dernière peut accepter l'argumentaire ou porter l'affaire devant la CJCE.
ETIENNE LEFEBVRE, Les Echos

La chronique d'Eric Le Boucher

Nicolas Sarkozy, chacun a pu le remarquer, traverse un moment difficile. A cause de ses histoires de famille qui provoquent des effets désastreux sur son image mais aussi en coïncidence, sur le fond, à cause d'une sortie de crise qui impose un douloureux changement de cap.

Nous avons connu, dans les premiers mois, le libéral de la « rupture », puis le dirigiste de la crise ; devrait venir le « rigoriste » de la post-crise. Et cette troisième transmutation, qui va devenir indispensable au fur et à mesure que la reprise se confirme au cours de 2010, représente une considérable difficulté personnelle. La rigueur représente tout ce qu'il déteste !

La période des réformes avait laissé entrevoir un Nicolas Sarkozy ambigu, plus motivé par le « changement pour le changement » que par l'imposition à la France de médecines libérales. Le président gaulliste, un jour sur deux mal à l'aise dans l'étoffe libérale, fut vite critiqué pour manquer de cap d'ensemble et pour la superficialité de ses réformes. Sitôt engagées, elles semblaient laissées en plan, inabouties. Même si le bilan chiffré reste à faire, retenons de cette phase Sarkozy I une conséquence économique : les réformes n'ont pas été conduites assez loin pour que la « croissance potentielle » du pays s'en trouve véritablement améliorée.

La crise a mis fin à l'ambiguïté. Elle a « révélé » Nicolas Sarkozy au sens où elle a autorisé sa nature bonapartiste à s'exprimer légitimement, sur la scène nationale et, plus valorisant encore, sur la scène internationale. L'homme des batailles s'est trouvé au plaisir des commandes ; il pouvait voir tout, décider de tout, manifester son volontarisme en tout (lire « Retombées de la crise », Alain Duhamel et Marcel Gauchet, in « Le Débat », n° 156, septembre-octobre 2009).

Plan de sauvetage des banques, plan de relance puis G20 : cette phase Sarkozy II a été riche de succès. Sur les choix : la France a judicieusement porté ses efforts sur les entreprises, refusant les traditionnelles mais inappropriées « relances de la consommation » ou hausses du SMIC. Une bonne entente a été trouvée avec les syndicats pour écarter les surenchères gauchistes : c'est une première que l'on ne salue pas assez, 2009 efface les grèves de 1995. En revanche, le débat interne au gouvernement sur la taille de la relance n'a pas été tranché : sous l'influence de Bercy et de Matignon, la France a trouvé suffisant d'injecter des dépenses publiques à hauteur de 1,5 % de son PIB seulement, contre 3,7 % en Allemagne ou 3,9 % en Grande-­Bretagne (chiffres du FMI). Avec raison, elle s'en est tenue à 30 milliards, dont 20 en 2009 et 10 à venir en 2010. Mais cette victoire n'a été que provisoire : Nicolas Sarkozy a relancé la relance en annonçant le « grand emprunt » dans son discours au congrès de Versailles en juin dernier. Ses 30 milliards (selon Michel Rocard) s'ajouteront aux 30 précédents. Puis, tout au plaisir de sa phase II, il a fait préparer un budget 2010 de couleurs keynésiéno-bonapartiste : le déficit n'importe pas, on verra plus tard. Et la France est le seul pays à n'avoir pas encore prévu de chemin de retour à l'équilibre.

Cette phase II va s'achever à son tour, le débat sur la suivante s'est ouvert au sein de la majorité. Comme le FMI et la Commission européenne ont averti que la reprise n'était pas si solide qu'on puisse déjà abattre la toile et retirer les soutiens publics, le président trouve là un premier argument pour attendre. Il en trouve un deuxième dans l'« utilité » des dépenses. Le grand emprunt et la réforme de la taxe professionnelle sont supposés créer des « chocs de compétitivité ». La stratégie est de « préparer l'avenir », d'investir pour que la croissance potentielle du pays regagne le 0,5 point que la crise lui a fait perdre (la faisant retomber de 1,7 % environ à 1,2 %).

On objectera que les réformes bien conduites auraient déjà dû apporter ce 0,5 point de compétitivité. Pourquoi ne pas les avoir achevées ? Et surtout que l'état des comptes est tel que même un surcroît de croissance n'empêchera plus la dette de s'alourdir. La ri­gueur va s'imposer durement et le plus tôt fera le moins mal. « Cette politique a toujours échoué », se défend Nicolas Sarkozy. On comprend surtout qu'il va repousser, au-delà du raison­nable, l'entrée dans la réalité honnie d'un bonapartisme sans moyens.

ERIC LE BOUCHER EST DIRECTEUR DE LA REDACTION D'« ENJEUX-LES ECHOS ».

Nicolas Sarkozy, chacun a pu le remarquer, traverse un moment difficile. A cause de ses histoires de famille qui provoquent des effets désastreux sur son image mais aussi en coïncidence, sur le fond, à cause d'une sortie de crise qui impose un douloureux changement de cap.

Nous avons connu, dans les premiers mois, le libéral de la « rupture », puis le dirigiste de la crise ; devrait venir le « rigoriste » de la post-crise. Et cette troisième transmutation, qui va devenir indispensable au fur et à mesure que la reprise se confirme au cours de 2010, représente une considérable difficulté personnelle. La rigueur représente tout ce qu'il déteste !

La période des réformes avait laissé entrevoir un Nicolas Sarkozy ambigu, plus motivé par le « changement pour le changement » que par l'imposition à la France de médecines libérales. Le président gaulliste, un jour sur deux mal à l'aise dans l'étoffe libérale, fut vite critiqué pour manquer de cap d'ensemble et pour la superficialité de ses réformes. Sitôt engagées, elles semblaient laissées en plan, inabouties. Même si le bilan chiffré reste à faire, retenons de cette phase Sarkozy I une conséquence économique : les réformes n'ont pas été conduites assez loin pour que la « croissance potentielle » du pays s'en trouve véritablement améliorée.

La crise a mis fin à l'ambiguïté. Elle a « révélé » Nicolas Sarkozy au sens où elle a autorisé sa nature bonapartiste à s'exprimer légitimement, sur la scène nationale et, plus valorisant encore, sur la scène internationale. L'homme des batailles s'est trouvé au plaisir des commandes ; il pouvait voir tout, décider de tout, manifester son volontarisme en tout (lire « Retombées de la crise », Alain Duhamel et Marcel Gauchet, in « Le Débat », n° 156, septembre-octobre 2009).

Plan de sauvetage des banques, plan de relance puis G20 : cette phase Sarkozy II a été riche de succès. Sur les choix : la France a judicieusement porté ses efforts sur les entreprises, refusant les traditionnelles mais inappropriées « relances de la consommation » ou hausses du SMIC. Une bonne entente a été trouvée avec les syndicats pour écarter les surenchères gauchistes : c'est une première que l'on ne salue pas assez, 2009 efface les grèves de 1995. En revanche, le débat interne au gouvernement sur la taille de la relance n'a pas été tranché : sous l'influence de Bercy et de Matignon, la France a trouvé suffisant d'injecter des dépenses publiques à hauteur de 1,5 % de son PIB seulement, contre 3,7 % en Allemagne ou 3,9 % en Grande-­Bretagne (chiffres du FMI). Avec raison, elle s'en est tenue à 30 milliards, dont 20 en 2009 et 10 à venir en 2010. Mais cette victoire n'a été que provisoire : Nicolas Sarkozy a relancé la relance en annonçant le « grand emprunt » dans son discours au congrès de Versailles en juin dernier. Ses 30 milliards (selon Michel Rocard) s'ajouteront aux 30 précédents. Puis, tout au plaisir de sa phase II, il a fait préparer un budget 2010 de couleurs keynésiéno-bonapartiste : le déficit n'importe pas, on verra plus tard. Et la France est le seul pays à n'avoir pas encore prévu de chemin de retour à l'équilibre.

Cette phase II va s'achever à son tour, le débat sur la suivante s'est ouvert au sein de la majorité. Comme le FMI et la Commission européenne ont averti que la reprise n'était pas si solide qu'on puisse déjà abattre la toile et retirer les soutiens publics, le président trouve là un premier argument pour attendre. Il en trouve un deuxième dans l'« utilité » des dépenses. Le grand emprunt et la réforme de la taxe professionnelle sont supposés créer des « chocs de compétitivité ». La stratégie est de « préparer l'avenir », d'investir pour que la croissance potentielle du pays regagne le 0,5 point que la crise lui a fait perdre (la faisant retomber de 1,7 % environ à 1,2 %).

On objectera que les réformes bien conduites auraient déjà dû apporter ce 0,5 point de compétitivité. Pourquoi ne pas les avoir achevées ? Et surtout que l'état des comptes est tel que même un surcroît de croissance n'empêchera plus la dette de s'alourdir. La ri­gueur va s'imposer durement et le plus tôt fera le moins mal. « Cette politique a toujours échoué », se défend Nicolas Sarkozy. On comprend surtout qu'il va repousser, au-delà du raison­nable, l'entrée dans la réalité honnie d'un bonapartisme sans moyens.
ERIC LE BOUCHER EST DIRECTEUR DE LA REDACTION D'« ENJEUX-LES ECHOS ».

Nicolas Sarkozy, chacun a pu le remarquer, traverse un moment difficile. A cause de ses histoires de famille qui provoquent des effets désastreux sur son image mais aussi en coïncidence, sur le fond, à cause d'une sortie de crise qui impose un douloureux changement de cap.

Nous avons connu, dans les premiers mois, le libéral de la « rupture », puis le dirigiste de la crise ; devrait venir le « rigoriste » de la post-crise. Et cette troisième transmutation, qui va devenir indispensable au fur et à mesure que la reprise se confirme au cours de 2010, représente une considérable difficulté personnelle. La rigueur représente tout ce qu'il déteste !

La période des réformes avait laissé entrevoir un Nicolas Sarkozy ambigu, plus motivé par le « changement pour le changement » que par l'imposition à la France de médecines libérales. Le président gaulliste, un jour sur deux mal à l'aise dans l'étoffe libérale, fut vite critiqué pour manquer de cap d'ensemble et pour la superficialité de ses réformes. Sitôt engagées, elles semblaient laissées en plan, inabouties. Même si le bilan chiffré reste à faire, retenons de cette phase Sarkozy I une conséquence économique : les réformes n'ont pas été conduites assez loin pour que la « croissance potentielle » du pays s'en trouve véritablement améliorée.

La crise a mis fin à l'ambiguïté. Elle a « révélé » Nicolas Sarkozy au sens où elle a autorisé sa nature bonapartiste à s'exprimer légitimement, sur la scène nationale et, plus valorisant encore, sur la scène internationale. L'homme des batailles s'est trouvé au plaisir des commandes ; il pouvait voir tout, décider de tout, manifester son volontarisme en tout (lire « Retombées de la crise », Alain Duhamel et Marcel Gauchet, in « Le Débat », n° 156, septembre-octobre 2009).

Plan de sauvetage des banques, plan de relance puis G20 : cette phase Sarkozy II a été riche de succès. Sur les choix : la France a judicieusement porté ses efforts sur les entreprises, refusant les traditionnelles mais inappropriées « relances de la consommation » ou hausses du SMIC. Une bonne entente a été trouvée avec les syndicats pour écarter les surenchères gauchistes : c'est une première que l'on ne salue pas assez, 2009 efface les grèves de 1995. En revanche, le débat interne au gouvernement sur la taille de la relance n'a pas été tranché : sous l'influence de Bercy et de Matignon, la France a trouvé suffisant d'injecter des dépenses publiques à hauteur de 1,5 % de son PIB seulement, contre 3,7 % en Allemagne ou 3,9 % en Grande-­Bretagne (chiffres du FMI). Avec raison, elle s'en est tenue à 30 milliards, dont 20 en 2009 et 10 à venir en 2010. Mais cette victoire n'a été que provisoire : Nicolas Sarkozy a relancé la relance en annonçant le « grand emprunt » dans son discours au congrès de Versailles en juin dernier. Ses 30 milliards (selon Michel Rocard) s'ajouteront aux 30 précédents. Puis, tout au plaisir de sa phase II, il a fait préparer un budget 2010 de couleurs keynésiéno-bonapartiste : le déficit n'importe pas, on verra plus tard. Et la France est le seul pays à n'avoir pas encore prévu de chemin de retour à l'équilibre.

Cette phase II va s'achever à son tour, le débat sur la suivante s'est ouvert au sein de la majorité. Comme le FMI et la Commission européenne ont averti que la reprise n'était pas si solide qu'on puisse déjà abattre la toile et retirer les soutiens publics, le président trouve là un premier argument pour attendre. Il en trouve un deuxième dans l'« utilité » des dépenses. Le grand emprunt et la réforme de la taxe professionnelle sont supposés créer des « chocs de compétitivité ». La stratégie est de « préparer l'avenir », d'investir pour que la croissance potentielle du pays regagne le 0,5 point que la crise lui a fait perdre (la faisant retomber de 1,7 % environ à 1,2 %).

On objectera que les réformes bien conduites auraient déjà dû apporter ce 0,5 point de compétitivité. Pourquoi ne pas les avoir achevées ? Et surtout que l'état des comptes est tel que même un surcroît de croissance n'empêchera plus la dette de s'alourdir. La ri­gueur va s'imposer durement et le plus tôt fera le moins mal. « Cette politique a toujours échoué », se défend Nicolas Sarkozy. On comprend surtout qu'il va repousser, au-delà du raison­nable, l'entrée dans la réalité honnie d'un bonapartisme sans moyens.
ERIC LE BOUCHER EST DIRECTEUR DE LA REDACTION D'« ENJEUX-LES ECHOS ».

Nicolas Sarkozy, chacun a pu le remarquer, traverse un moment difficile. A cause de ses histoires de famille qui provoquent des effets désastreux sur son image mais aussi en coïncidence, sur le fond, à cause d'une sortie de crise qui impose un douloureux changement de cap.

Nous avons connu, dans les premiers mois, le libéral de la « rupture », puis le dirigiste de la crise ; devrait venir le « rigoriste » de la post-crise. Et cette troisième transmutation, qui va devenir indispensable au fur et à mesure que la reprise se confirme au cours de 2010, représente une considérable difficulté personnelle. La rigueur représente tout ce qu'il déteste !

La période des réformes avait laissé entrevoir un Nicolas Sarkozy ambigu, plus motivé par le « changement pour le changement » que par l'imposition à la France de médecines libérales. Le président gaulliste, un jour sur deux mal à l'aise dans l'étoffe libérale, fut vite critiqué pour manquer de cap d'ensemble et pour la superficialité de ses réformes. Sitôt engagées, elles semblaient laissées en plan, inabouties. Même si le bilan chiffré reste à faire, retenons de cette phase Sarkozy I une conséquence économique : les réformes n'ont pas été conduites assez loin pour que la « croissance potentielle » du pays s'en trouve véritablement améliorée.

La crise a mis fin à l'ambiguïté. Elle a « révélé » Nicolas Sarkozy au sens où elle a autorisé sa nature bonapartiste à s'exprimer légitimement, sur la scène nationale et, plus valorisant encore, sur la scène internationale. L'homme des batailles s'est trouvé au plaisir des commandes ; il pouvait voir tout, décider de tout, manifester son volontarisme en tout (lire « Retombées de la crise », Alain Duhamel et Marcel Gauchet, in « Le Débat », n° 156, septembre-octobre 2009).

Plan de sauvetage des banques, plan de relance puis G20 : cette phase Sarkozy II a été riche de succès. Sur les choix : la France a judicieusement porté ses efforts sur les entreprises, refusant les traditionnelles mais inappropriées « relances de la consommation » ou hausses du SMIC. Une bonne entente a été trouvée avec les syndicats pour écarter les surenchères gauchistes : c'est une première que l'on ne salue pas assez, 2009 efface les grèves de 1995. En revanche, le débat interne au gouvernement sur la taille de la relance n'a pas été tranché : sous l'influence de Bercy et de Matignon, la France a trouvé suffisant d'injecter des dépenses publiques à hauteur de 1,5 % de son PIB seulement, contre 3,7 % en Allemagne ou 3,9 % en Grande-­Bretagne (chiffres du FMI). Avec raison, elle s'en est tenue à 30 milliards, dont 20 en 2009 et 10 à venir en 2010. Mais cette victoire n'a été que provisoire : Nicolas Sarkozy a relancé la relance en annonçant le « grand emprunt » dans son discours au congrès de Versailles en juin dernier. Ses 30 milliards (selon Michel Rocard) s'ajouteront aux 30 précédents. Puis, tout au plaisir de sa phase II, il a fait préparer un budget 2010 de couleurs keynésiéno-bonapartiste : le déficit n'importe pas, on verra plus tard. Et la France est le seul pays à n'avoir pas encore prévu de chemin de retour à l'équilibre.

Cette phase II va s'achever à son tour, le débat sur la suivante s'est ouvert au sein de la majorité. Comme le FMI et la Commission européenne ont averti que la reprise n'était pas si solide qu'on puisse déjà abattre la toile et retirer les soutiens publics, le président trouve là un premier argument pour attendre. Il en trouve un deuxième dans l'« utilité » des dépenses. Le grand emprunt et la réforme de la taxe professionnelle sont supposés créer des « chocs de compétitivité ». La stratégie est de « préparer l'avenir », d'investir pour que la croissance potentielle du pays regagne le 0,5 point que la crise lui a fait perdre (la faisant retomber de 1,7 % environ à 1,2 %).

On objectera que les réformes bien conduites auraient déjà dû apporter ce 0,5 point de compétitivité. Pourquoi ne pas les avoir achevées ? Et surtout que l'état des comptes est tel que même un surcroît de croissance n'empêchera plus la dette de s'alourdir. La ri­gueur va s'imposer durement et le plus tôt fera le moins mal. « Cette politique a toujours échoué », se défend Nicolas Sarkozy. On comprend surtout qu'il va repousser, au-delà du raison­nable, l'entrée dans la réalité honnie d'un bonapartisme sans moyens.
Eric Le Boucher.

Attention, Nicolas Sarkozy, dans certaines circonstances, peut se transformer en un redoutable EURYBIADE.