TOUT EST DIT

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samedi 30 octobre 2010

Cahin-caha

A sauts de cabri, comme disait de Gaulle, l'Europe se jette à nouveau dans le brouillard. Pour la bonne cause, bien sûr. Échaudée par la crise grecque, qui a failli la faire imploser, elle veut renforcer sa ligne de défense financière pour dissuader de nouvelles attaques. Louable objectif, mais c'est ensuite que les choses se compliquent. Pour rendre possible un mécanisme durable d'aide financière, il va falloir modifier une clause de ce diable de traité que les Européens avaient fini par ratifier après un long psychodrame.

Les 27 vont donc plonger encore dans une lourde incertitude car même une simple modification ouvrira la boîte de Pandore des surenchères, en particulier chez les plus euro sceptiques. Et comme les Européens ne s'étripent jamais à moitié, l'autre sujet de discorde portera sur les sanctions prévues en cas de dérapage des comptes publics. La survie de la zone euro passe par le renforcement de la discipline budgétaire et la coordination des politiques économiques, mais les débats à venir seront vifs.

D'autant que l'euro fort, qui pose déjà problème dans le bras de fer mondial des monnaies, n'améliore pas pour autant la visibilité sur les perspectives de croissance. Malgré les performances de l'Allemagne dont les clignotants sont au vert, les autres pays sont lancés dans des politiques de rigueur et de réduction budgétaire aux résultats moins probants. Le pilotage s'annonce donc à hauts risques dans cette zone de l'euro flou. Le contexte d'austérité ne facilitera pas non plus le débat sur le budget européen, donc sur la prochaine révision de la PAC.

L'Europe va donc se livrer à d'inévitables mais sévères empoignades sur une longue période, à un moment où la défense de ses intérêts dans la compétition mondiale exigerait au contraire une vision commune et plus offensive. On en est loin malheureusement, sur les enjeux industriels, agricoles ou ceux de la connaissance. Quant à la diversité des modèles sociaux, c'est peu dire qu'elle appelle une vraie pédagogie européenne. À commencer par la France qui s'est illustrée jusqu'à la caricature par sa crise des retraites.

HISTOIRE DROLE !

Réforme des retraites : ce que ferait l'opposition

 Le mouvement contre la réforme des retraites semble marquer le pas et, dans les manifestations, les opposants au texte entendent prendre leur revanche dans les urnes en 2012. Si le Parti socialiste et les autres partis de gauche sont présents dans les cortèges, ils ne proposent pas les mêmes solutions au problème du financement des régimes de retraites. Un seul point fait consensus : la "méthode Sarkozy" est jugée brutale et unilatérale, et tous promettent de véritables négociations avec les syndicats. Revue des principales positions de la gauche et du centre sur le mouvement et la réforme des retraites.
LES PATHÉTIQUES DE GAUCHE.

PARTI  SOCIALISTE
Faut-il poursuivre le mouvement ?
"La suite de la lutte, ça ne dépend pas que de nous, mais je pense que la mobilisation enjambera les vacances de la Toussaint", estime Benoît Hamon, porte-parole du PS, qui a appelé à toutes les manifestations depuis le début du mouvement. Même après la journée d'action du 6 novembre, il faut "continuer à dire en quoi le texte est mauvais et exiger de vraies négociations". Sur les grèves, Benoît Hamon "comprend que la répétition, avec les jours non payés, soit difficile pour certains", mais soutient les décisions de l'intersyndicale. Et rappelle que le PS n'entend pas cesser la bataille politique : "Nous avons déposé un recours au Conseil constitutionnel, pour poursuivre la bataille sur le terrain juridique."
Le PS demande en premier lieu la non-promulgation du texte pour permettre "l'ouverture de négociations qui remettent tout à plat", rappelle Benoît Hamon. Quelle réforme en 2012 ?

Dans son contre-projet sur la réforme des retraites, le PS propose un retour à l'âge légal de départ à 60 ans et à 65 ans pour la retraite à taux plein. Il défend également une prise en compte de la pénibilité plus importante que celle prévue par le gouvernement. Surtout, rappelle M. Hamon, il insiste sur une "meilleure répartition du financement entre capital et travail", avec une mise à contribution des revenus du capital et une augmentation "modérée et étalée dans le temps" des cotisations patronales et salariales.
Le PS prévoit également un allongement de la durée de cotisation, qui passerait à 41,5 ans d'ici à 2020. Lors d'un "rendez-vous en 2025", une nouvelle augmentation est envisagée, "limitée à la moitié des gains de l'espérance de vie". Martine Aubry s'est engagée à ce que la nouvelle réforme soit votée en 2013.
LES VERTS-EUROPE ÉCOLOGIE
Faut-il poursuivre le mouvement ?
"Il faut attendre le 6 novembre pour voir si la mobilisation faiblit tant que cela, souffle Jean-Vincent Placé, secrétaire national adjoint des Verts. Et attendre de voir la suite, si des jeunes bougent notamment." Pascal Durand, délégué général Europe Ecologie, est plus prudent, soulignant qu"il ne [lui] appartient pas en tant que parti de mener le mouvement, il faut être respectueux des syndicats et des manifestants. On soutient, appuie, relaie", rappelle-t-il.
Après le remaniement du gouvernement, "le nouveau premier ministre devra s'interroger s'il veut ouvrir un nouveau round de négociations", estime Jean-Vincent Placé. "Il y a eu des cas comme le CPE, de lois promulguées mais pas appliquées."
Quelle réforme en 2012 ?
"Il faut construire une alternative, une contre-réforme d'ici à 2012", affirme Pascal Durand. Mais des divergences persistent au sein d'Europe Ecologie et des Verts, qui s'étaient illustrées par un accrochage entre Daniel Cohn-Bendit et Jean-Vincent Placé au printemps dernier. Pascal Durand estime aujourd'hui que les écologistes doivent se distinguer "en n'affirmant pas comme les autres partis avoir des solutions toutes faites, mais en construisant avec les syndicats, dès maintenant, en vue de 2012, une contre-réforme". En respectant le "marqueur de solidarité" du départ à 60 ans, mais en ne disant pas non plus que "tout est figé".
Jean-Vincent Placé renvoie lui vers la "position officielle" du parti, plus marquée à gauche, qui prévoit notamment un retour à l'âge légal de départ à 60 ans et à 65 ans pour la retraite à taux plein. Il évoque même un retour à une durée de cotisation de quarante ans, "un point à négocier avec nos partenaires, dont le PS". Pour assurer le financement, les tracts des Verts proposent des "solutions écologistes durables", de taxer les plus-values, les revenus boursiers et du patrimoine, de revenir sur les exonérations de taxation des heures supplémentaires et une hausse des cotisations sociales, patronales et salariales.
FRONT DE GAUCHE
Faut-il poursuivre le mouvement ?
Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche) a été très clair, jeudi matin, sur RTL : "Le rendez-vous c'est le 6 novembre prochain et malheur à qui rompt les rangs au moment où l'intersyndicale nous appelle au combat." Pour le Parti de gauche comme pour le PCF, il faut poursuivre la mobilisation et soutenir les syndicats. Le Front de gauche a également lancé des collectes de soutien aux grévistes.
Pour Jean-Luc Mélenchon, le temps n'est pas à la présidentielle, mais bien à la poursuite du mouvement : "Là, nous sommes dans la bataille, donc ce n'est pas le moment de commencer à spéculer sur demain, après-demain et le reste."
Quelle réforme en 2012 ?
Le Parti de gauche comme le Parti communiste, qui participent au Front de gauche, ont déjà annoncé qu'ils reviendraient sur toutes les mesures de l'actuelle réforme : retour sur le droit à la retraite à 60 ans et à 65 ans à taux plein. Les communistes veulent tenir compte de la pénibilité par branche d'activité pour permettre des départs anticipés. Les députés PCF et PG avaient déposé en septembre une proposition de loi qui propose une réforme alternative à celle du gouvernement avec un changement radical du financement. Il s'agit notamment d'assujettir les revenus financiers des entreprises à une contribution d'assurance-vieillesse (30 milliards d'euros), de moduler les cotisations patronales selon que les entreprises privilégient l'emploi ou la spéculation, de revenir sur l'exonération des heures supplémentaires.
La proposition visait également à taxer d'avantage les stock-options, les parachutes dorés et autres indemnités de départ. Le Parti de gauche propose également (voir ses propositions) d'"assurer un taux de remplacement moyen d'au moins 75 % du dernier salaire".
MOUVEMENT DÉMOCRATE Faut-il poursuivre le mouvement ?
Le parti centriste n'a pas participé au mouvement contre la réforme des retraites, "mais nous avons soutenu ceux qui considéraient comme nous que cette réforme est injuste et insuffisante", nuance Robert Rochefort, vice-président du MoDem et responsable de l'économie au sein du "cabinet fantôme" du parti. François Bayrou avait estimé, au début du mouvement, que le passage à 67 ans à taux plein était une injustice pour de nombreux salariés, notamment les femmes.
"Nous avons trouvé que les directions des syndicats ont été responsables", assure-t-il, même s'il souligne que "le MoDem n'a pas trouvé que les blocages des raffineries était quelque chose de très astucieux. La mobilisation des jeunes a aussi pu sembler étrange". "On sent que le mouvement est en train de reculer et que les syndicats ont un problème pour gérer la fin de la mobilisation car le gouvernement les a pratiquement humiliés en ne lâchant rien", tranche-t-il.
Aujourd'hui, "il ne faut pas ne pas promulguer le texte. C'est mauvais pour la démocratie", assure Robert Rochefort.

Quelle réforme en 2012 ?
Le MoDem assume le passage à 62 ans pour l'âge légal, étalé sur une durée de huit ans, mais prône un retour à 65 ans pour la retraite à taux plein. Comme le PS, il défend une augmentation de la durée de cotisation à 41,5 ans. Le parti centriste envisage "des taxes sur les revenus complémentaires au salaire, comme l'intéressement ou la participation", une "hausse de la contribution des salariés et de la contribution des revenus du capital, dans une proportion similaire", souligne Robert Rochefort.
Le vice-président du MoDem promet également que son parti "réfléchira à la mise en place d'un système de retraite à points, qui permet de gagner des points en fonction qu'on travaille plus ou moins, au lieu de comptabiliser uniquement les trimestres". Sur le long terme, François Bayrou plaide depuis longtemps en faveur d'une refonte de tous les régimes de retraite, dont les régimes spéciaux, avec la mise en place d'une "retraite à la carte". Une proposition qui figurait déjà dans ses propositions en 2007.
MAINTENANT QU'ELLE EST PASSÉE, AUCUN PARTI POLITIQUE N'OSERA Y RETOUCHER. 
FORFANTERIE ET DÉMAGOGIE : LES DEUX MAMELLES DE L'OPPOSITION

Les socialistes se disputent la jeunesse en pensant à 2012

Les manifestations lycéennes imposent le thème dans le futur débat présidentiel. 

Et si la jeunesse était la clé pour entrer à l'Élysée en 2012? Depuis la mobilisation inattendue des lycéens contre la réforme des retraites, les socialistes commencent à s'intéresser de beaucoup plus près au sujet. À moins de deux ans de l'élection présidentielle, pas question de passer à côté des jeunes en ne répondant pas à leurs attentes.
Mercredi soir, la réforme des retraites à peine votée, Ségolène Royal a demandé aux jeunes de ne pas laisser retomber leur fièvre mobilisatrice. «C'est cette fièvre qui maintiendra le monde à la bonne température. Car quand la jeunesse se refroidit, le reste du monde se glace», a-t-elle lancé lors d'une réunion de préparation de la convention du PS sur l'égalité réelle, à Décines, près de Lyon. Au passage, l'ex-candidate en a profité pour rappeler comment, en 2007, elle avait réussi à mobiliser les jeunes des quartiers. Elle a surtout lancé sa proposition d'un «pacte national de confiance pour l'emploi des jeunes».
Présente dans la salle, la présidente du Mouvement des jeunes socialistes a apprécié. Pour Laurianne Deniaud, «il y a eu un sursaut des socialistes sur la jeunesse. Cela fait du bien de voir que les leaders s'intéressent aux jeunes».

«Donner du contenu»

À vrai dire, ils se penchaient déjà sur le sujet avant les manifestations contre la réforme des retraites. Mais pas au point d'envisager de l'inscrire en tête de leurs préoccupations. Seul François Hollande en avait fait jusqu'alors le cœur de sa réflexion, avec l'idée que le thème pourrait s'imposer en 2012 comme celui du travail en 2007 ou de la sécurité en 2002. «Les manifestations ont donné de l'actualité à mes propos», note l'ancien premier secrétaire du PS qui, beau joueur, ne revendique aucune antériorité. «Les idées n'appartiennent à personne. Il ne suffit pas de dire “j'ai été le premier”, il faut maintenant donner du contenu.»
C'est là que ça se complique. Le PS doit arrêter sa position en décembre lors de la convention sur l'égalité réelle que préside Benoît Hamon. Dans le même temps, le MJS milite pour l'organisation d'une convention sur la jeunesse au printemps prochain. Depuis plus d'un an, le mouvement travaille sur trois chantiers dans le cadre de son programme «Perspective 2012» «Martine Aubry est très à l'écoute. Elle était présente à notre congrès où elle a prononcé un discours très offensif. Suite à notre travail sur l'emploi, j'ai présenté nos propositions en bureau national», raconteLaurianne Deniaud. L'allocation d'autonomie pour les jeunes, que demande le MJS, figure en principe dans le programme du PS. Mais cette idée devra d'abord être validée par le futur candidat. Or François Hollande, plus attaché à l'idée d'un prêt étudiant, ne la partage pas. En 2007, Ségolène Royal s'était aussi montrée réticente, en refusant le principe de «l'assistanat».
En dehors du cadre de la convention sur l'égalité réelle, François Hollande a prévu de s'exprimer à nouveau sur la jeunesse, en publiant un document ou en prononçant prochainement un discours pour réexpliquer son idée de «contrat de génération». Du côté de Ségolène Royal, on réfléchit aussi à l'idée d'éditer un document reprenant les propositions de l'ex-candidate. Pour les socialistes, il y a un autre intérêt à se pencher sur la jeunesse: c'est celui d'enjamber l'échec de leur opposition à la réforme des retraites. Et de passer à autre chose.

Sécu : le coup de sang de Nadine Morano à l'Assemblée

Mise en difficulté sur un article du projet de financement de Sécu 201, la secrétaire d'Etat à la Famille a eu des mots très vifs envers sa propre majorité, vendredi, à l'Assemblée.

Fait rare, vendredi soir à l'Assemblée nationale : les députés, y compris ceux de la majorité, ont décidé de supprimer une mesure du gouvernement dans le projet de loi de finances de la sécurité sociale. L'article retoqué concernait le report du versement des 178 euros de la Prestation accueil du jeune enfant (Paje) au mois qui suit la naissance de l'enfant.
Une décision qui a visiblement agacée Nadine Morano. La secrétaire d'Etat à la Famille a eu des mots très vifs envers sa majorité UMP et avec le président de séance Maurice Leroy, député du Nouveau centre. Hors micro, alors que le vote commençait, la représentante du gouvernement a reproché au centriste de ne pas lui avoir demandé l'avis du gouvernement.
«Je ne pouvais pas rester silencieuse et j'ai demandé à pouvoir donner l'avis du gouvernement. C'est d'ordre réglementaire», a réagi dans la soirée la secrétaire d'Etat. Pour obtenir le droit de donner cet avis, Nadine Morano s'est alors «mise à vociférer», a accusé une source parlementaire UMP, ce qu'elle a démenti. «Je démens catégoriquement avoir tenu des propos virulents devant l'Assemblée, les enregistrements ainsi que le compte rendu de séance sont là pour le prouver. C'est un simple incident de procédure», a-t-elle assuré.

«Le gouvernement ne supprime rien»

Lors de cet échange hors micro, Maurice Leroy lui a soutenu qu'elle venait de s'exprimer longuement. La secrétaire d'Etat avait en effet expliqué en substance que cette mesure permettrait d'économiser 64 millions d'euros en 2011, sans supprimer aucune prestation.
Après un premier vote qui ne lui a pas été favorable, Nadine Morano a demandé une suspension de séance. Dans les couloirs de l'hémicycle, elle a poursuivi son explication avec Maurice Leroy qui lui a concédé un nouveau vote. Il «a lui-même reconnu avoir fait une faute», a affirmé la secrétaire d'Etat.
De retour dans l'hémicycle, avant ce nouveau vote, tournée vers les députés UMP, elle a repris son argumentaire avec énergie, expliquant en substance qu'il n'y a pas de petites économies. «Le gouvernement ne supprime rien», a-t-elle argumenté , évoquant des «mesures d'harmonisation» avec d'autres prestations. «La France consacre 100 milliards d'euros à sa politique familiale», a-t-elle poursuivi, rappelant «une prime exceptionnelle de 150 euros versée en juin aux familles modestes».
Las, le nouveau vote a confirmé le premier, maintenant le versement de l'allocation de base de la Paje à la naissance de l'enfant, et non le mois qui suit.

Georges et le kitsch

Georges Frêche a échappé aux cons qui le chassaient à courre, lui qui s’amusait à en être un autre, de con, et un sévère parfois, pour exaspérer ses ennemis.
Georges conjuguait ses horreurs pour leur dire un peu plus qu’il les méprisait, tous ceux qui dénonçaient son racisme, son antisémitisme, sa vulgarité. Georges ne voulait pas en souffrir, d’être pris pour ce qu’il n’était pas, il préférait le tonitruer.

Il poussait son immense carcasse, le corps et la canne raides comme ses saillies; il conchiait un adversaire en proclamant qu’il l’avait jadis cocufié - et ravi d’avoir choqué, rebondissait en parlant d’histoire, du mouvement de sa région, de son Montpellier assoupi devenu le partenaire de la Chine, de Shanghai! De son Languedoc, il voulait saisir le monde, lui qu’une gauche étriquée n’avait jamais fait ministre en France. Dans ses ambitions et ses outrances, Georges se rendait odieux à ceux qui l’avaient négligé: c’était tragique et superbe à la fois, de le voir défier l’époque et son kitsch dans un combat forcément perdant.

C’est Kundera qui a le mieux décrit cette passion convenable: "Le kitsch, c’est la traduction de la bêtise des idées reçues dans le langage de la beauté et de l’émotion." Transmuter l’antiracisme en lapidation d’un progressiste, c’était l’idiotie des anti-frêchistes. Il y aurait eu mille manières de le contester: ce politique novateur était devenu, vieillissant, l’élu des parvenus du Sud-Ouest, infichu d’entraîner les Maghrébins ou les Gitans de la Paillade et autres cités du soleil… Cet échec-là - Frêche le bâtisseur finalement encalminé dans sa sociologie - était réel : sa diabolisation fantasmatique salit ceux qui lui ont survécu.

On pense à Frêche et au kitsch au moment où une poignée d’indignés kitschissimes tambourinent pour que Guerlain soit boycotté afin que la marque expie un vieil homme venu du passé. Ce qu’a fait l’inventeur de Samsara sur France 2 tient moins de l’offense contemporaine que d’un éclairage historique, quand les bourgeoisies gloussaient sur la paresse des nègres… Jean-Paul Guerlain atteste notre sale Histoire, pas notre présent. Le racisme anti-Noirs ne se nourrit pas aujourd’hui de Tintin au Congo mais de peurs sociologisées sur les violences des banlieues, des cadenas de l’Europe, des logements insalubres et qui brûlent parfois, de la blancheur verrouillée des élites. C’est là qu’il faut combattre, et laisser en paix d’aimables fragrances qui n’y sont pour rien.

Le kitsch, si l’on ose compléter Kundera, est une manière de se tromper de cible ou d’abîmer ses combats en quelques mots de trop. On le sent monter ces jours-ci, dans les proclamations de certains confrères sur les "guerres" que le pouvoir mènerait contre les journalistes, dans un pays en quasi-dictature. Les vols des ordinateurs de nos amis du Point et du Monde, le cambriolage de nos amis de Mediapart, sont des faits suffisamment inquiétants pour qu’on s’épargne le kitsch des conclusions sans preuve. La vigilance n’est pas une griserie.

Le marché du foie gras français se porte bien

Les ventes de foie gras français ont continué à progresser au premier semestre 2010 sur le marché intérieur tout comme à l'exportation, a appris vendredi l'interprofession. Après une hausse annuelle de 7,5% l'an dernier, les achats des ménages ont progressé de 19% entre le 25 janvier et le 5 septembre, par rapport à la même période en 2009, ce qui représente 1.869 tonnes vendues. Les exportations ont augmenté à un rythme un tout petit peu inférieur (+ 17% pour les foies gras crus, + 11% pour les foies gras transformés) tandis que les importations marquaient un fléchissement de 15% sur le foie gras de canard et de 28% sur le foie gras d'oie. Sur cette période, la balance commerciale affiche un excédent de 12,4 millions d'euros (34,8 millions d'euros à l'export, 22,4 millions d'euros à l'import), selon les données des Douanes/Ubifrance.

Attention patrons, ils sont en colère

Des sociologues mettent en garde : les tensions sociales vont se répercuter dans les entreprises.
Les opposants à la réforme contre les retraites n’ont pas obtenu gain de cause et risquent de le faire payer à leurs patrons. C’est en tout cas ce que craint Denis Monneuse, sociologue et directeur de projet chez "Entreprise & personnel", une association qui réunit 130 groupes français parmi lesquels Renault, L'Oréal, Axa, la Société générale, EDF ou encore la SNCF.

Frustrations = plus grandes revendications

Selon lui, les tensions sociales qui se sont développées face à la réforme des retraites vont peu à peu se reporter ailleurs et notamment au sein de la cellule professionnelle. Le phénomène est le même qu’avec la mauvaise humeur qu’un rien envenime, note Denis Monneuse.
"La frustration qui peut exister chez certains peut nourrir des revendications encore plus fortes, notamment sur les négociations obligatoires sur les salaires", qui devraient intervenir sous peu, explique Denis Monneuse à Europe 1. Le risque est donc que les employés en colère reportent "des revendications sur les retraites vers la question des salaires", s’inquiète-t-il.
Un dialogue musclé risque ainsi de s’installer dans les semaines à venir dans les entreprises. Et pas seulement sur les questions salariales. Pour Denis Monneuse, l’emploi des seniors sera probablement un sujet portant à discussions.

Pour Mme Dati, la grosse artillerie

Sa langue a fourché, on en fait des gorges chaudes. Sur le désormais fameux lapsus de Rachida Dati, le catalogue des blagues semblait épuisé. Les plus courtes sont les meilleures, ce plaisantin de la Drôme devrait le savoir. Il a pourtant choisi de contacter l’ex-garde des Sceaux par e-mail. Pour lui demander quoi? “ Une petite inflation”.

Chez l’économiste amateur, ici, il y a sans doute un cochon qui sommeille. Et un sacré lourdaud. Reste que la justice aussi utilise la grosse artillerie. L’interpellation du suspect au petit matin, la perquisition de son appartement, la saisie de son ordinateur, passe encore. Mais pourquoi lui infliger 48 heures de garde à vue, alors qu’il reconnaît les faits? On ignorait que le délit “d’outrage” méritât tant de rigueur et d’investigations.

En France, les nécessités de l’enquête ont bon dos. C’est le genre d’abus que la cour européenne sanctionne régulièrement. Et que le gouvernement a d’ailleurs promis de faire cesser.

Du coup, le procureur de Valence se trouve suspecté à son tour par l’opinion. De zèle intempestif. Il s’en défend, bien sûr, et ne voit “rien de disproportionné” dans la procédure. N’empêche, à Nanterre, son collègue Philippe Courroye s’est montré nettement plus mesuré avec les protagonistes de l’affaire Bettencourt. Quel doigté, là-haut, que de prévenances !

A croire que la gauloiserie menace davantage la société que les entourloupes politico-financières.

Abuser

La réforme passe, l'affaire continue: les retraites sont réformées, mais la retraitée la plus célèbre de France demeure sur l'avant-scène. Est-elle d'ailleurs retraitée, Liliane Bettencourt ? Prend-on sa retraite, quand on est la rentière la plus riche de France ? Peu importe, l'essentiel est son affaire, qui nous distraie par ses rebondissements quotidiens. Après avoir perturbé la grande réforme du quinquennat, et plombé un ministre naguère d'avenir, l'affaire Bettencourt a ces derniers jours obligé le juge Courroye à jeter la toge, déclenché une épidémie de vols d'ordinateurs de journalistes, et réveillé le spectre des barbouzes... «Je ne bois pas trop de vin, parce que je fatigue», commente notre retraitée, qui cependant fanfaronne: «Si on m'abuse, c'est que je me laisse abuser». Et nous, Français, si on nous amuse avec cette affaire, c'est qu'on se laisse amuser ?

Assez !

Assez de sang, assez de morts et d'exécutions capitales dans cet Irak meurtri, ravagé par la guerre.

Après tant de souffrances, on pouvait s'attendre à quelques efforts en vue de la paix intérieure et de la réconciliation. Apparemment, il n'en est rien. Les règlements de compte vont bon train. Les exactions sont nombreuses et de toutes origines.

À cela, le gouvernement et la justice irakienne ajoutent des rafales de peines de mort, incluant des personnes déjà jugées et condamnées à des années de prison. Comme si cela ne suffisait pas, on ajoute des procès nouveaux aux procès anciens, comme si on voulait à tout prix obtenir une condamnation à la peine de mort.

C'est ce qui vient d'arriver à Tarek Aziz, ex-vice-Premier ministre de Saddam Hussein et chef de la diplomatie irakienne. Il vient d'être condamné à la peine capitale avec deux dignitaires de l'ancien régime. Cela ressemble à une vengeance plus qu'à une expression sereine de la justice. De toutes parts dans le monde, s'élèvent des demandes de grâce. Le Vatican a demandé qu'il ne soit pas exécuté, non parce qu'il est chrétien, mais parce que le Vatican s'affirme désormais opposé à la peine capitale. Du reste, il était déjà intervenu en faveur de Saddam Hussein pour tenter d'empêcher son exécution.

Malgré ces appels à la clémence, depuis six ans, des centaines d'exécutions capitales ont eu lieu. D'après Amnesty International, un millier de condamnés, dont dix-sept femmes, attendent leur exécution dans les prisons irakiennes et quelles prisons ! 120 personnes auraient été pendues en 2009, s'ajoutant aux 120 000 morts irakiens depuis 2003.

La peine de mort avait été abolie par les Américains. Elle a été rétablie par le gouvernement irakien, désireux sans doute de faire place nette. Désormais, ce pays est l'un de ceux où l'on applique le plus la peine de mort qui pourtant ¯ et heureusement ¯ régresse dans le monde.

Le gouvernement irakien se grandirait en cessant ces pratiques d'un autre âge, au lieu de continuer par ce moyen inhumain à terroriser ses opposants. Ce n'est pas ainsi qu'il réconciliera les communautés et favorisera la réhabilitation du pays. Ce n'est pas ainsi qu'il fera renaître la confiance des nations à son égard.

Un sursaut très byzantin




En politique européenne, il est toujours difficile de faire la part du « vrai » de celle du « flou »... appelé à devenir un jour du « vrai ». Rien d'étonnant si le citoyen a du mal à comprendre cette succession de compromis sur des compromis arrêtée hier à Bruxelles. Ainsi, que retenir de ce Conseil ? La mini-réforme du traité de Lisbonne présentée en paravent ? Ou - enfin - une timide ébauche d'un gouvernement économique de la zone euro ?
Théoriquement, la réforme du traité et la future gouvernance économique sont liées. Pour ne pas être démentie par sa Cour constitutionnelle, l'Allemagne doit obtenir un amendement au texte de Lisbonne qui autorisera en quelque sorte la création d'un « Fonds exceptionnel provisoire permanent » destiné - pour la sauvegarde de l'euro - à venir en aide aux États en difficultés, comme la Grèce au printemps dernier.
Et, mais c'est encore à voir, les fauteurs de la crise - banques, fonds spéculatifs... - devraient être associés à ce mécanisme. Toutefois, pour ne pas ouvrir la porte à tous les laxismes, les pays en délicatesse avec les critères de Maastricht risqueront de « vraies » sanctions. Or il est étonnant que la France, pourtant grande pécheresse question déficits, ait approuvé cette procédure dans la fameuse déclaration franco-allemande de Deauville qui a fait hurler les « petits » de l'UE.
En réalité, il y a un « lézard », et de taille : les sanctions, toujours du ressort de la Commission, seront désormais « automatisées »... et non plus « automatiques ». Traduction : l'ultime décision sera prise par le Conseil des chefs d'État et de gouvernement qui reprend ainsi la main sur la technocratie. Ce retour en force des politiques ressemblant fort à l'Europe « intergouvernementale » du passé ébranle aussi la tour d'ivoire de la BCE de Francfort.
Le nouveau « Fonds » ou « parapluie financier » quasi permanent taille par sa seule existence une brèche dans les doctrines monétaristes à la base de l'euro. Ce qui explique les échanges aigres-doux entre Jean-Claude Trichet et Nicolas Sarkozy à Bruxelles...
Mais que de compromis pour en arriver là ! Le « oui » des 27 à la difficile révision du traité de Lisbonne a pour une bonne part été obtenu en s'entendant sur une réduction du budget de l'UE. Au grand dam du Parlement européen qui, par ailleurs, dans un artifice juridique, serait plus ou moins écarté de cette révision. Et comment va réagir la Commission Barroso rabrouée dans ses pouvoirs ? Enfin, quelle sera en fin de course l'attitude des États qu'irrite le « directoire » franco-allemand ?
Il y a du tangage dans l'air avec quelques belles querelles byzantines en perspective... et très éloignées de cette « Europe transparente » promise aux citoyens de l'UE.


Le Talk : Nathalie Kosciusko-Morizet



Poigne de fer à Bruxelles

Voilà un sommet de Bruxelles qui aurait pu mieux démarrer. Nicolas Sarkozy arrive, laissant derrière lui un feu qui couve encore. La crise sociale, née d'un projet de loi sur les retraites, n'en finit pas. Tous les dirigeants européens vont se retrouver ainsi, laissant leurs pays confrontés à la plus grande purge d'austérité jamais imposée. Et si l'ordonnance est à peu près partout identique, les corps ne réagissent pas de la même façon aux pharmacopées proposées. En sus, Angela Merkel, son alliée du mois d'octobre, n'a pas pris de gants pour préparer ce qu'elle considère comme essentiel à ses yeux : un plan d'action d'une sévérité sans précédent pour renforcer la discipline budgétaire européenne. Elle a eu gain de cause. Comment ? En déclarant que « sans un accord entre la France et l'Allemagne, pas grand-chose n'était possible en Europe ». Autant dire que pour elle l'affaire était close depuis son entrevue avec Nicolas Sarkozy, le 17 octobre.

Mais, au fond, quel est le souci de cette nouvelle « dame de fer », sinon de ne pas se retrouver en porte à faux devant son pays quand l'Allemagne devra se porter solidaire d'une nation relevant de l'Union européenne, comme elle le fit avec la Grèce ? On voit ici toute l'ambiguïté de ce rassemblement des Vingt-Sept, ses lignes de force en même temps que sa fragilité. Car on peut, d'un point de vue strictement économique, donner raison à Angela Merkel de refuser désormais toute fuite en avant et tout endettement inconsidéré à l'intérieur de l'Union. Mais cela revient également à considérer que chacun des pays pourrait se comporter comme peut le faire l'Allemagne, et surtout en aurait les moyens. Or, voilà qui nous ramène à notre France. Culturellement et historiquement, aucun pays d'Europe, dans la longue formation qui a présidé à sa naissance, ne peut être comparé à son voisin. Ni politiquement. Ni syndicalement. A fortiori ni socialement. Cette constatation équivaudrait-elle à une négation de l'Europe ? Non. Mais à se souvenir de l'esprit de ses pionniers, et de leurs souhaits, un rassemblement où les disparités pourraient être tolérées, les souplesses permises, les règles sociales et les intérêts économiques communs. Et non cette foire d'empoigne, où ce qui prévaut est l'alignement perpétuel, imposé par les plus riches et les plus forts.

Aucun pays d'Europe, dans la longue formation qui a présidé à sa naissance, ne peut être comparé à son voisin


Comment BlackBerry a séduit ados et étudiants

Le spécialiste des smartphones pros, menacé sur le segment des entreprises, s’est lancé dans le mobile grand public. Et vise les jeunes avec un impressionnant arsenal marketing.

Elle a 16 ans, vient d’entrer en première et piaffe devant une boutique de téléphones, près de l’Etoile, à Paris… «Le blanc, là, il est bombesque !» La jeune fille désigne du doigt le BlackBerry Curve 8520, un gros smartphone à clavier. A part la couleur, le modèle ressemble à ceux que l’on voit vissés à l’oreille des cadres en costume-cravate dans la rue, à l’extérieur du magasin. Mais l’adolescente n’en démord pas : «Il est vraiment trop classe, et pas cher. Et au lycée toutes mes copines en ont un.» Le phénomène a surpris le constructeur lui-même.

Coqueluche. Depuis deux ans, ses BlackBerry, réputés pour leur gestion des e-mails et destinés aux entreprises et aux particuliers aisés, sont devenus la coqueluche des jeunes. D’abord dans les arrondissements chics de Paris, où les ados récupéraient le vieux «BlackBé» de papa, puis dans toutes les villes de France. C’est le grand clavier azerty, pratique pour les SMS, et la messagerie instantanée BlackBerry qui les attirent. L’objet confère également un statut flatteur. «Il vient du monde pro, donc il fait mature, alors que l’iPhone d’Apple sert à se donner une image plus jeune», décode Laurent Lamé, le directeur marketing de SFR. Research In Motion (RIM), le fabricant canadien de BlackBerry, a tout de suite compris l’intérêt de surfer sur cette vague.
Cet engouement des jeunes tombe en effet à pic pour le fabricant de smartphones. Depuis 2006, ce dernier cherche en effet à compenser la perte de son hégémonie chez les pro (lire l’encadré page 28) en attaquant le marché des particuliers. Moins rentable, critiquent les analystes. Mais tellement plus vaste, avec ses 50 à 60 millions d’unités vendues chaque trimestre. Pour coller à cette nouvelle clientèle, BlackBerry a donc affiné sa stratégie. Avec succès : les 15-25 ans représentent désormais la moitié des nouveaux clients de la marque, estiment les opérateurs français. «Prenez le 8520 : chez nous, c’est le téléphone le plus acheté par les moins de 26 ans», constate-t-on au marketing d’Orange.
Résultat, le géant de Waterloo, dans l’Ontario, a gagné sa place auprès du grand public et a vendu plus de 36 millions de téléphones au total, pour plus de 15 milliards de dollars de chiffre d’affaires sur le dernier exercice (fin février). Et si ses parts de marché sur le segment des smartphones reculent un peu aux Etats-Unis sous les coups de boutoir d’Apple, en France elles ont progressé de 12 à 19%. En un an.
Le look et l’équipement. Le premier réflexe de BlackBerry a été de concevoir des mobiles plus adaptés à cette clientèle en jean-baskets. Avec le lancement du Pearl en 2006, son premier modèle pour particuliers, le fabricant a introduit une interface bien plus ergonomique, avec appareil photo, flash, baladeur MP3, jeux et applications grand public. Les derniers modèles sont parfois disponibles en cinq coloris différents, du classique blanc à l’inattendu lavande. «A chaque nouvelle teinte, on double les ventes», assure-t-on chez Orange.

RIM a également tenté de lancer son propre écran tactile, inspiré de celui de l’iPhone. Mais faute d’une technologie suffisamment au point, son premier modèle à en être équipé, le Storm, a fait un flop en 2009. «Surtout, les jeunes voulaient de l’azerty!» analyse Stéphane Dubreuil, du cabinet Sia Conseil. Le BlackBerry Torch, lancé aux Etats-Unis cet été – cet automne en France – dispose des deux : un écran tactile et un clavier coulissant au-des-sous. Entre-temps, le BlackBerry Curve 8520 continue à être champion des ventes chez les ados et les étudiants.
Pourtant, il n’a ni GPS, ni flash, ni connexion 3G. La clé de son succès ? Son prix. «Les jeunes y sont très sensibles, explique Karine Dussert-Sarthe, directrice marketing chez Orange. Avant, les BlackBerry coûtaient jusqu’à 500 euros avec des abonnements plutôt onéreux. Avec le 8520, la barrière tarifaire est tombée pour le téléphone et pour le forfait.» L’appareil basique a un coût de production de 103 dollars, selon le cabinet d’études iSuppli. «Nous l’achetons 150 euros pièce, contre 450 pour l’iPhone», détaille Vincent Leclerc, le directeur des achats du réseau The Phone House. Résultat : après subvention des opérateurs, le Curve 8520 est commercialisé à partir de 1 euro en boutique.
Forfaits jeunes. «RIM a également fait le forcing pour être associé à des forfaits bon marché», glisse un expert du secteur, selon qui les formules pour iPhone coûtent une dizaine d’euros de plus, environ. Parmi les arguments avancés par le fabricant canadien : ses flux de données, très compressés, consomment trois à huit fois moins de bande passante que le smartphone d’Apple. Les opérateurs, trop contents d’aiguillonner la marque à la pomme, ont joué le jeu. Et accepté, notamment, de ne pas ou peu répercuter dans leurs tarifs les frais mensuels que BlackBerry facture en moyenne pour l’utilisation de ses serveurs (e-mails et messagerie instantanée).

Pour une heure de communication, plus Internet et des courriers électroniques illimités, il faut compter 24,90 euros chez SFR, 28,90 euros chez Bouygues Telecom et 30,90 euros chez Orange, pour deux ans d’engagement. Seule condition, chez Orange et SFR : avoir moins de 26 ans. De son côté, RIM s’est plié de bonne grâce aux exigences commerciales des opérateurs. Les réseaux de boutiques étant fans d’exclusivités et de séries limitées, BlackBerry a commercialisé son modèle mauve en avant-première chez The Phone House. Le fabricant a aussi loué des stands réservés à ses modèles dans les boutiques SFR, offert des primes, classiques dans le secteur, pour chaque appareil vendu. Par ailleurs, des dizaines de consultants et de cadres du siège ont été envoyés chez les opérateurs pour former les vendeurs aux spécificités de ses terminaux.
Messagerie vedette. Mais c’est avec son énorme plan marketing que RIM a tapé le plus fort. Marché de masse oblige, la firme canadienne a fortement augmenté ses dépenses publicitaires. Rien qu’en France, son budget a triplé cette année, atteignant 13 millions d’euros brut (avant remise) au premier semestre, indique l’institut Kantar Media. Dans sa communication, BlackBerry a pris soin de s’adresser aux jeunes sans bousculer sa clientèle d’entreprise.
Si ses pubs ne mettent plus en scène de PDG vedettes mais des jeunes hilares, le noir et blanc leur donne un côté rétro, et les textes sont rédigés dans un style plutôt soutenu. Le fond, lui, se concentre sur la messagerie instantanée BlackBerry Messenger, plébiscitée par les ados, et astucieusement rebaptisée BBM pour l’occasion. Le système ne fonctionnant qu’entre téléphones BlackBerry, la marque joue à fond la carte communautaire.
L’effet stars. Le reste de son budget est englouti dans une gigantesque opération de sponsoring. Cible prioritaire : les vedettes de la musique, qui séduisent surtout les jeunes, surconsommateurs d’albums et de MP3. BlackBerry est ainsi le partenaire officiel de U2 pour la centaine de dates de sa tournée, comme il l’a été en 2010 pour le concert des rappeurs de Black Eyed Peas. Dans un de ses derniers clips, Will.i.am, le leader de ce groupe, chante d’ailleurs plus de 1 minute dans son téléphone BlackBerry, sur les quatre que dure la vidéo.
Pas très subtil, mais efficace. Comme lorsque les smartphones de RIM se retrouvent dans les magazines people entre les mains de vedettes telles que Paris Hilton, Rihanna, Lily Allen ou Emma de Caunes. Les stars reçoivent en général ce genre de produit gratuitement, et ne se privent pas d’en faire la promo. «Cela renforce le sentiment d'appartenance à une tribu analyse Stéphane Dubreuil, de Sia Conseil. Exactement ce que recherchent les jeunes.