Le suspense était inexistant : pas une voix n’a manqué à droite et à l’extrême-droite pour voter la censure, ni au Parti socialiste pour la rejeter. La logique procédurale a prévalu : aucune majorité ne s’est dégagée contre le gouvernement.
Nous voici donc à un tournant du quinquennat avec l’installation d’un étrange rapport de force : il n’y a plus de majorité pour soutenir les grandes réformes structurantes dont la France a besoin et que réclament ses partenaires, et il n’y en a pas contre non plus. Une sorte de nouveau ni-ni. Cela ne menace pas directement la survie du gouvernement : il peut parfaitement tenir en maniant l’arme du « 49.3 ». Mais cette pratique du coup de force permanent a des limites, si bien que le pouvoir sera naturellement enclin à s’autocensurer dans son action réformatrice pour éviter autant que possible de provoquer de nouveaux conflits.
En moins de trois ans d’exercice du pouvoir, François Hollande a perdu le soutien du Parti communiste, celui du Parti de gauche, puis celui des Verts d’EELV, et maintenant celui de la partie activiste de son propre parti. Pas de majorité, pas de chef non plus pour la diriger : Manuel Valls, celui qui, pour faire bouger la France, promettait de secouer le plus sa famille politique, est désormais contesté dans son rôle naturel de leader de la majorité. Même le Premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, le soutient du bout des doigts, avec ce qu’il faut d’ambiguïté pour le fragiliser.
Tout cela rend dorénavant le travail gouvernemental à peu près impossible, sauf à pratiquer la politique de l’eau tiède. Alors qu’un soupçon de croissance semble revenir de l’extérieur, alors qu’il reste d’immenses réformes à mener pour sortir la France du cycle dépenses publiques-impôts-chômage, c’est l’assurance d’une terrible perte de temps.