TOUT EST DIT

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samedi 6 septembre 2014

André Bercoff : Marine Le Pen et les pièges de la cour des grands



Pour André Bercoff, Marine le Pen a mangé son pain blanc. Deux obstacles, l'un sociétal, l'autre économique, se dresse
nt désormais devant le Front National.
 Les sondages ont ceci d'intéressant qu'ils incarnent des miroirs qui ne réfléchissent pas. Fulgurante priorité de l'instant. Ici et maintenant, selon la plus récente livraison de l'Ifop,Marine Le Pen battrait François Hollande au second tour des présidentielles si celles-ci avaient lieu dimanche prochain. Version policée, scientifique et aussi instructive que l'immortel adage: si ma tante en avait, on l'appellerait mon oncle. Cela permet au président que le monde nous envie, de déclarer pour la énième fois qu'il est ici par la volonté du peuple et qu'il n'en sortira même pas par la force des baïonnettes depuis que celles-ci figurent parmi les victimes de l'ablation partielle - et partiale - du budget de la Défense. Reste que la répétition de sondages allant dans le même sens, fait information. Actuellement, Marine Le Pen serait en tête, dans tous les cas de figure du premier tour. Qu'elle batte Hollande au second ne serait même plus une surprise. Dimanche prochain, si Nabila ou Ribéry se présentaient, leurs chances respectives ne seraient pas minces. Ne pas oublier cependant que dans le même sondage, il apparaît que Marine Le Pen serait battue nettement, au second tour, par n'importe lequel des favoris de l'UMP. En effet, la présidente du Front national a très largement réussi son opération de dédiabolisation, attirant à elle les classes populaires que la gauche divine a abandonné depuis des décennies, toutes ces classes en voie de sous-développement que think tanks et associations rêvent de remplacer par les bobos et les immigrés de la deuxième ou de la troisième génération. Madame Le Pen semble, par ailleurs, s'être débarrassée de la plupart des néo-nazillons encombrants qui peuplaient la voiture-balai.
Mais à présent, un double écueil se dessine sur le sentier de sa gloire: obligée de se notabiliser pour demeurer dans la cour des grands, ne risque-t-elle pas de perdre une partie de la hargne, de la grogne et de la rogne qui fut et reste quand même le fonds de commerce du Front national? Sur les questions sociétales et identitaires, elle a réussi à transformer les faiblesses et les outrances de son père en pôles d'attraction pour des millions de Français qui ne savent plus où ils habitent. Mais en même temps - second et essentiel écueil - ses positions économiques rencontrent le scepticisme de la majorité d'une population qui ne voit pas dans le retour du franc et l'implosion de l'Europe, les clés du salut et qui n'ont pas forcément tort. Une France qui ferait cavalier seul dans un monde où les plaques tectoniques se déplacent désormais à toute vitesse, deviendrait vite encore moins indépendante qu'elle ne l'est actuellement. Cette propension effrénée - que le FN partage avec la gauche de la gauche - d'attendre tout de l'État, effraye encore une bonne partie de ses électeurs potentiels ; à l'heure des indispensables grands ensembles, il ne s'agit pas d'avoir plus ou moins d'État, mais mieux d'État. L'indépendance commence avec l'autonomie financière et le désendettement. À cette aune, le flou reste, au Front national, de rigueur. Reconnaissons-le cependant: entre une droite frappée de sidération régressive et une gauche en implosion accélérée, la petite musique de Marine Le Pen séduit le ras-le-bol des victimes du descenseur social. Encore lui faut-il éviter le piège de la démagogie politicienne, notamment dans le domaine économique, ce qui est loin d'être joué.

André Bercoff : in bed with François Hollande…

Pour André Bercoff, la publication jeudi du livre de Valérie Trierweiler, «Merci pour ce moment», est le dernier coup apporté à la protection de l'intimité du président de la République et à la personne de François Hollande.
Silence, on privatise. Le dernier clou dans le cercueil de la prétendue protection de l'intimité, vient d'être planté par Valérie Trierweiler dans son reportage vengeur dont le sous-titre aussi évident que subliminal est: «In bed with François Hollande». Sur le plan strict de l'anecdote, constatons tout de même que notre chère auteure n'a pas supporté de se voir appliquer le même traitement que l'actuel président de la République prodigua àSégolène Royal en 2005 et qui motiva en partie, fût-elle faible, la candidature de celle-ci aux Désirs d'avenir. Remarquons également que la «première dame» - titre qui n'a jamais existé - obtint bureau et collaborateurs à l'Élysée où, pendant dix-huit mois, elle joua un rôle quasiment officiel. Terminons ce court inventaire de l'écume des jours, par la soumission généralisée à la déesse de l'accélération: désormais, l'on peut régler son compte à un chef d'État sans attendre la fin de son mandat. Une fois de plus, dans ce domaine, les États-Unis auront ouvert la voie: mais Monica Lewinsky fut tout de même plus éphémère que Valérie Trierweiler, et Bill Clinton beaucoup plus vilipendé médiatiquement que François Hollande. Il suffit de se remémorer l'hallucinante confession télévisée de l'ex-président américain.
Au-delà de la vengeance d'une femme trompée et dont le vaudeville à la Feydeau - modernité oblige - prit des dimensions planétaires (la Corée du Sud ira jusqu'à diffuser des vidéos tristement désopilantes), se dessine un portrait à la fois féroce et inquiétant du prince qui nous gouverne. Si l'on en croit son ex-compagne, il serait machiste, misogyne, lâche, froid, n'aimant pas les pauvres, vivant dans une bulle, menteur et sans scrupules. Cela fait beaucoup pour un seul homme. N'en doutons pas une seconde: les choses étant ce qu'elles sont, cette réponse de la bergère au berger en fait un livre éminemment politique, eu égard aux sondages de popularité de l'impétrant et de la situation économico-socialo-identitaire de notre cher et vieux pays. D'où la question: ce petit conte de la lune vague après la pluie, rédigé dans un style - d'après les extraits que l'on a pu lire - qui ferait les délices de la collection Harlequin et de Barbara Cartland, ne grandit en fait, ni l'auteure, ni l'unique objet de son ressentiment.
Conséquence de cet étalage quotidien de basse-cour qui, en quelques années, est devenu quasiment doctrinaire: la politique apparaît de plus en plus, entre affaires privées et scandales publics, comme l'équivalent d'un couteau sans lame auquel il manque le manche. On aurait pu faire l'économie de cet enterrement de seconde classe.

François Hollande, les «sans-dents» et le cynisme de la gauche morale



Un extrait du livre de Valérie Trierweiler sur François Hollande souligne, de façon glaçante, la schizophrénie qui existe entre discours public et propos privés.
 On peut ne pas avoir l'âme d'un inspecteur, savoir qu'un homme n'est que contradictions, reconnaître qu'il y a toujours un décalage entre les mots et les choses et être stupéfait par l'extrait du livre de Valérie Trierweiler sur François Hollande et les pauvres. «En réalité, il n'aime pas les pauvres. Lui l'homme de gauche dit en privé: “Les sans-dents” très fier de son trait d'humour.» Par bienveillance, on peut y voir une énième blague du monsieur qui est en est le spécialiste, mais la bienveillance a des limites. En lisant ces mots, on ne peut s'empêcher de penser à la lettre d'Antoine de Saint-Exupéry à André Breton dans laquelle il fustigeait une société de surveillance où «l'homme n'est plus jugé sur sa qualité d'être mais sur son formulaire, où les manifestes tiennent lieu de cœur». Des manifestes, François Hollande en a signé. Des formulaires, il en a rempli. Toujours impeccables. Pas un mot qui dépasse: le Bien à toutes les pages. Ami des petits, des sans-grade. Ennemi de la finance. «J'aime les gens», on est riche à «4000 euros». A un million, c'est 75%!
Mais derrière le sourire qui accompagne, en général, ces déclarations, il faut sans doute voir la satisfaction de celui à qui on ne la fait pas. Une forme low-cost de Talleyrand confiant à l'abbé Louis lors de la messe de la fête de la Fédération: «Par pitié, ne me faites pas rire.» La vérité est que le chef de l'Etat est le représentant ultime d'une génération politique fascinée par Mitterrand et qui, sans avoir ni sa finesse, ni sa culture, a confondu le cynisme et le talent, désappris tout ce qui ressemblait à de la loyauté, du courage, de la profondeur et en est réduite aux déclarations d'estrades, au serment de canton, aux complots d'arrière-boutiques. Un machiavélisme middle-class. Tout cela n'est pas nouveau, mais sans invoquer les grandes vertus, il est juste de rappeler que cette génération n'a cessé, elle, de la faire, la morale. Qu'elle a dit le bien et le mal. Sans nuance et sans précaution, elle est la reine de l'invective, de l'anathème, de la condamnation. De Théâtre du Rond-Point en concerts solidaires, elle a passé trente ans la main sur le cœur. Était-il sec? Les sans- dents, les sans-influence, les sans-combines, les sans-carrières connaissent désormais la réponse.
Les sans un sou aussi, ceux que nous sommes, n'achetons pas ce truc qu'on nomme pompeusement livre....c'est à chier !

Cherchez l’erreur

Ce n’est pas bien de copier dès la rentrée ! Nos confrères de Valeurs actuelles titrent leur numéro du 4 au 10 septembre : « L’ayatollah ». Ils parlent de Najat Vallaud-Belkacem. Toute ressemblance avec la une de Présent du 28 août dernier serait évidemment fortuite.
Et le directeur général de Valeurs actuelles,Yves de Kerdrel, accusé d’incitation à la haine raciale (bienvenue au club !), invite, le dictionnaire à la main, les responsables du Parti socialiste comme de SOS Racisme à relire avec lui la définition que le dictionnaire Larousse donne du mot « ayatollah » : « personne aux idées rétrogrades qui use de manière arbitraire et tyrannique des pouvoirs étendus dont elle dispose ».
N’est-ce pas que c’était bien trouvé ?
« Il n’y a donc dans ce titre choisi par Valeurs actuelles, comme dans les huit pages que notre hebdomadaire consacre à la Ministre de l’Education nationale, pas la moindre allusion de nature raciste ou confessionnelle », conclut Kerdrel.
Il aurait pu ajouter (mais la culture de sa famille d’idées est davantage celle du Figaro) qu’il y a quelques années, une personnalité du Front national tout ce qu’il y a de plus Français de souche avait été surnommée « l’ayatollah Cassoulet ». Ce qui est bien la preuve de la non-confessionnalité de l’expression. Qui d’ailleurs avait été prise avec humour.
Nous ne demanderons pas de « droits d’auteur » à Valeurs actuelles qui fait le buzz avec cet emprunt. Après tout on ne copie que les meilleurs. 

La charge de Philippe Bilger contre le livre de Valérie Trierweiler

Philippe Bilger a pris le temps de lire le livre de Valérie Trierweiler, «Merci pour ce moment». Il nous donne ses impressions sur une œuvre qu'il juge dévastatrice et indécente.
Quel gâchis que ce livre!
Je ne me suis pas contenté des extraits et je suis allé au bout et puis-je dire que je suis à bout?
Il se murmure qu'aux côtés de Valérie Trierweiler, Laurent Binet y aurait contribué, mais cela ne change rien à mon point de vue.
Ces pages écrites dans l'urgence, composées dans le secret et publiées sans vergogne représentent à la fois une sale action et une indécence humaine. Ce n'est pas l'étrange bienveillance quasiment corporatiste dont deux journalistes éminentes duMonde ont fait bénéficier l'ouvrage qui me fera modifier mon appréciation.

J'avoue à ma grande honte que si le président Sarkozy avait pâti d'un tel traitement, j'aurais approuvé celui-ci avec un contentement laid et sadique. Mais force est de reconnaître qu'il a su mieux choisir et aimer que François Hollande. Cécilia Attias a écrit sur son ex-époux avec délicatesse et dignité et à un moment qui ne prêtait pas à équivoque et à polémique. Je n'imagine pas une seconde que Carla Bruni-Sarkozy, si son couple venait à se séparer, abandonnerait son occupation principale - parvenir à faire entendre sa voix et ses chansons - pour se livrer à une telle charge vulgaire.
Je comprends l'attitude de ceux qui à gauche comme à droite s'indignent devant ce déballage. Stéphane Le Foll, Claude Bartolone, Hervé Mariton et Nicolas Dupont-Aignan, notamment, ne le liront pas. Il n'y a que Brice Hortefeux, hypocrite, qui déplore tout en se félicitant de l'image négative donnée du président.
Pour ma part, contrairement à certains critiques, je préfère lire avant de juger.
Que cette chronique subjective et aigre soit le fait d'une «favorite répudiée» ulcérée plus que jamais de l'avoir été ne rend pas forcément absurde et partial l'ensemble de sa vision de François Hollande.
Que son entreprise ait été largement rémunérée et élaborée selon un processus qui révélait que Valérie Trierweiler avait évidemment conscience de ses effets ravageurs et qu'elle les désirait ne prive pas cependant de pertinence toutes ses analyses.
Etait-il toutefois absolument nécessaire de s'abandonner à cet exhibitionnisme dévastateur pour que la personnalité de François Hollande, pour ceux qui ont un peu le sens de la psychologie, soit enfin dévoilée? Faut-il être d'une sagacité indépassable pour deviner ce qu'il y a dans l'être intime de notre président à la fois de faiblesse et d'autorité, de peur, de méfiance et de défiance et en même temps d'aptitude au bonheur et de goût de la séduction? Est-il si difficile de percevoir que chez lui, comme chez tout séducteur qui sait ne pas pouvoir compter exclusivement sur lui mais sur l'aura et le pouvoir qui l'entourent, il y a eu et il y aura une part de misogynie? Convient-il d'être bouleversé parce qu'on nous affirme qu'il lui arrive de mentir dans l'intimité et d'être lâche quand il choisit de répondre à une question gênante par une désinvolture de fuyard? Il est obsédé par les sondages qui baissent et par les médias, paraît-il. Quelle nouvelle!
Le président de la République ne sort pas grandi par la relation de petites choses qui, en effet, font de lui moins un homme normal qu'une personnalité tristement banale.
Mais pour le reste qui est l'essentiel? Le quolibet - les «sans-dents» - qui manifesterait sa dérision à l'égard des pauvres, son mépris de la famille Massonneau, sa sécheresse et sa volonté permanente de la laisser sur «la touche», l'illégitimité qu'elle ressentait et qu'il aggravait, leur projet de mariage brutalement avorté parce qu'il avait commencé sa liaison avec Julie Gayet?
Pour ma part, aussi déplaisant que puisse apparaître François Hollande à ses adversaires et sans doute à nombre de ses alliés et soutiens - il lui en reste un peu! -, il me semble extravagant de lui imputer ce cynisme, cette haine, cette condescendance à l'encontre des humbles et des modestes, de lui refuser sa sincérité contre la misère, sauf à donner à des échanges provocateurs privés, qui peuvent surgir chez nous tous, une dimension politique et sociale sérieuse.
La version de Valérie Trierweiler est-elle d'ailleurs exacte? L'Elysée dément et conteste ces allégations. On comprend que François Hollande soit «atterré»: on le serait à moins sans que cela valide en quoi que ce soit les coups ciblés de cette dernière. Même si elle n'a pas eu tort de mettre en lumière les ambiguïtés de l'histoire amoureuse et politique entre Ségolène Royal et François Hollande, j'attache cependant infiniment plus de crédibilité à celle qui a été sa compagne durant longtemps, la mère de ses enfants et qui est autant imprégnée d'humanisme que Valérie Trierweiler. Ségolène Royal a formellement contredit cette image d'un François Hollande sarcastique et dédaigneux des affres de la misère.
Ainsi, une compagne du président durant vingt mois à l'Elysée, majoritairement détestée par les Français, écrirait un livre et elle devrait être crue sur parole? Oublie-t-on qu'elle a trouvé le moyen de commencer à affecter sa présidence par un comportement ridicule à la Bastille le 6 mai 2012, qu'elle a sciemment dégradé l'autorité présidentielle le 12 juin 2012 par son tweet de soutien à Olivier Falorni et qu'elle n'a cessé de répéter par la suite qu'elle était en train de s'habituer à son nouveau statut sans qu'à l'évidence elle y parvienne? Faut-il alors s'étonner que François Hollande, échaudé, ait eu tendance à se mettre à l'abri en tentant autant que possible de l'exclure, elle, de moments officiels importants et même d'une rencontre avec Nelson Mandela? Est-il choquant de se mettre à la place de François Hollande en l'approuvant d'avoir favorisé sa tranquillité personnelle au détriment d'une emprise jalouse et d'une susceptibilité souvent blessée?
La pantalonnade de la rue du Cirque, ce qu'elle révélait de la vie intime du président, certes, n'étaient pas reluisants, et la France était moquée comme si elle était dans le placard de ce vaudeville. La souffrance, l'humiliation de Valérie Trierweiler étaient évidemment authentiques, mais heureusement passagères, puisque l'indécence de ce livre, pour une femme qui avait bataillé pour l'intimité de leur vie privée, montre qu'elle s'est guérie par une lamentable vengeance. On sait que l'arrangement financier dont elle a bénéficié lors de son départ de l'Elysée le 25 janvier 2014 n'était pas à son désavantage et qu'il semblait exclure tout livre de ce type et en de telles circonstances où elle jouit de son coup de force éditorial.
La focalisation sur les attaques perfides qu'elle distille l'ont fait réagir et affirmer qu'elle avait éprouvé «une vive admiration» pour le président et qu'elle ne regrettait rien. L'amante offensée qui a écrit cherche à faire illusion: ce serait la journaliste qui devrait avoir le dernier mot! Et on a droit à «… Je ne compte plus ses reniements. Sait-il encore où est sa gauche?» Mais l'apothéose est toute de nostalgie et de passion: «Puis-je seulement avoir été aimée autant que j'ai aimé»!
Comme c'est grand, sincère et émouvant! Le fin mot de tout cela n'est-il pas, derrière la mousse apparente, de montrer qu'elle serait encore désirée par cet inconstant qui lui aurait transmis la bagatelle de 29 SMS le 3 juillet 2014 et qui aspirerait «à la regagner comme une élection» .
Mais, pour qui a ce livre entre les mains, c'est une honte. Il ne lui demandait que d'être belle: il pressentait que le pire était à venir.

L’austérité en Grèce, c’est concret : "Je dois prendre l’avion pour aller accoucher"

Aujourd’hui, quatre ans après, je suis enceinte de mon deuxième enfant, qui arrivera en janvier 2015, et l’histoire se répète. L’hôpital n’a toujours pas ouvert à cause des coupes budgétaires dans le budget de la santé, mais aussi du manque de médecins. À cause de mon diabète, je dois réaliser des tests sanguins toutes les trois semaines avec un médecin spécialisé. Je dois prendre le bateau ou l’avion pour aller à Athènes faire ces tests. J’ai calculé que chaque nouveau bébé me coûte donc environ 5 000 euros.
Santorin, dans l’archipel de Cyclades au sud de la Grèce, est considérée comme l’une des plus belles îles du monde. Un paradis pour les touristes, mais pas forcément pour ses habitants. Notre Observatrice nous explique qu’elle va devoir accoucher sur le continent tant les services médicaux de son île ont été laminés par la politique d’austérité."Chaque nouveau bébé me coûte 5 000 euros"



Georgia N. est une habitante grecque de l’île de Santorin. Enceinte de son premier enfant en 2011, elle découvre qu’elle est atteinte de diabète gestationnel, une forme de diabète qui apparaît lors d'une grossesse.
la construction d’un hôpital de 50 lits a démarré en 2008. Il devait être prêt déjà pour la naissance de mon premier enfant et disposer de tous les équipements nécessaires : plusieurs salles d’accouchement et de maternités, des salles d’examens… tout ce dont une personne comme moi, qui a été diagnostiquée avec un diabète de grossesse, a besoin. J’ai attendu le dernier moment, mais voyant que l’hôpital n’était pas opérationnel, j’ai décidé d’aller à Athènes pour accoucher. J’y ai passé un mois en observation, pour faire tous les tests, alors que si j’avais pu accoucher à Santorin je n’y serai resté qu’une semaine maximum. À l’époque, je me suis dit que mon prochain enfant naîtrait à Santorin.

"Même une infection urinaire pour un nouveau né peut être catastrophique à Santorin"
Le plus gênant, c’est que la moindre complication médicale ici peut avoir de graves conséquences. Un mois après sa naissance, mon premier enfant a fait une infection urinaire. Il a fallu prendre en catastrophe un vol pour Athènes pour qu’il reçoive le traitement approprié.

Il y a une clinique privée à Santorin, mais elle n’est pas adaptée pour les accouchements et est horriblement chère pour un Grec. Les seuls qui peuvent prétendre y être soignés sont les touristes, mais uniquement pour des "petits" problèmes. S’ils ont par exemple un accident de voiture, ils ne pourront pas être opérés là bas et devront être évacués vers Athènes.

Selon notre Observatrice, le matériel médical est encore sous plastique comme sur ces photos prises en 2011. Photo publiée ici.


L’hôpital de Santorin, symbole des restrictions budgétaires dans la santé publique

 Les finances du ministère de la Santé ont été durement touchées par l’austérité lancée dès 2009 par le gouvernement grec. Entre 2009 et 2011, le budget de l’hôpital public a été réduit de 25 % et un tiers des hôpitaux étaient menacés de fermeture. La Grèce est par ailleurs devenue l’un des pays de l’Union européenne qui a les dépenses de santé les plus basses. Une situation qui a provoqué plusieurs manifestations de médecins ces dernières années dans le pays.

Santorin n’est pas la seule île grecque à ne pas disposer de centre de santé et dont les malades les plus sérieux doivent être évacués vers Athènes. Elle est toutefois même la seule à disposer d’un hôpital flambant neuf - quoi que jamais ouvert.

En 2008, le ministre de la Santé grecque, Dimitris Avramopoulos, avait pris la décision de construire cet hôpital pour répondre aux besoins médicaux grandissants des 15 000 habitants de l’île, mais aussi des nombreux touristes. En 2007, 92 000 patients s’étaient rendus dans l’ancien centre médical de l’île, aujourd’hui fermé, qui était déjà totalement submergé par les demandes.

Depuis, le projet d’hôpital est au point mort, à tel point qu’un collectif d’habitants, dont Georgia Nomikou fait partie, ont lancé une pétition sur Internet pour en réclamer l’ouverture. Le collectif espère récupérer 15 000 signatures, soit le nombre symbolique d’habitants de l’île Santorin.

Les locaux de l'hôpital sont à l'abandon depuis la fin des travaux, mais le matériel n'a pas bougé. Photo publiée ici.