TOUT EST DIT

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dimanche 9 mai 2010

Kouchner : «Il faut aider les Grecs»

Alors qu’on célèbre ce dimanche 9 mai le soixantième anniversaire de la déclaration Schuman, acte fondateur de l’Union, Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères, assure que les crises renforcent l’Europe.

Avec un changement de Premier ministre en Grande-Bretagne, craignez-vous une politique plus antieuropéenne ?

BERNARD KOUCHNER.

Avec les Britanniques nous avons développé en Europe et ailleurs des missions et des attitudes communes très particulières, très sincères, très humaines. C’est vrai pour le projet de financements innovants destinés au développement (NDLR : un prélèvement sur tous les mouvements financiers), pour les opérations navales antipirates, pour des initiatives diplomatiques visant à régler des conflits, notamment en Afrique, pour des réformes politiques essentielles… J’espère que ça continuera.

Mais le conservateur David Cameron est eurosceptique…
Nous ne lui demanderons pas, s’il devient Premier Ministre, de devenir un eurofanatique, mais simplement de ne pas s’opposer plus que de raison à la poursuite de la politique que nous avons menée avec le gouvernement travailliste précédent. Parce que la Grande-Bretagne, l’Allemagne et la France entraînent un formidable mouvement.

Comment arrêter la tempête financière en Europe ?
En continuant d’aider fermement la Grèce. Il y a de l’immoralité dans cet argent flottant, qui se glisse dans les interstices d’une monnaie ou d’une autre, jouant sur l’euro, le dollar, le yen… C’est un système que nous devrons réformer.

Le risque de contagion menace-t-il la France ?
Non. Nous avons entamé des réformes, notre signature bénéficie de la plus haute note possible. Les oscillations de la Bourse, ça s’est toujours vu, ça remontera. Le texte du sommet de Bruxelles est très important à cet égard.

La zone euro ne manque-t-elle pas d’une gouvernance politique ?
Mais on va le faire ! Vingt fois, nous avons alerté. Depuis trois ans, la France demande cela. C’est toujours comme ça, de crise en crise l’Europe s’invente. Nous ne pouvons demeurer à la merci des marchés, il faut donc bâtir un gouvernement économique, que la France propose depuis longtemps. D’ici là il faut aider les Grecs, rester à leurs côtés. Ainsi nous nous défendrons nous aussi.

Comment aider la Grèce ? Certains déconseillent déjà d’y aller en vacances…
Au contraire, allez en vacances en Grèce ! Faites confiance aux Grecs et soutenez-les. Expliquez-leur que c’est l’Europe et la France que nous sommes en train de soutenir.

Angela Merkel n’a-t-elle pas trop tergiversé pour soutenir Athènes ?
Nous aurions dû réagir plus vite tous ensemble, c’est vrai. Les Français, Nicolas Sarkozy, le demandaient. Mais n’attendez pas de moi que je mette la moindre feuille de papier à cigarettes entre la France et l’Allemagne. Non, non et non.

Cette crise a néanmoins révélé certains égoïsmes nationaux ?
Les Allemands vont vers la retraite à 67 ans et on leur demande de voler au secours de gens à qui on a proposé la retraite à 57 ans… Les Allemands ont voulu des garanties, et je salue le courage des Grecs et particulièrement celui du Premier ministre, Georges Papandréou.

On n’entend guère le nouveau président de l’UE, Herman Van Rompuy, censé incarner l’Europe…
Il a fait preuve en Belgique de beaucoup de talent, voyez ce qui se passe depuis qu’il n’est plus là. Je suis sûr qu’il en aura autant pour l’Europe. Il faut une période d’ajustement. Mais restons vigilants et exigeants.

L’Europe se complaît-elle trop dans le dénigrement ?
Oui. Le dénigrement d’elle-même par elle-même. Le pessimisme permanent. Or ce qui caractérise l’Europe, c’est la démocratie, la culture et la protection sociale. Quel continent exceptionnel ! La tentation du repli, du nationalisme, constitue toujours un réel danger. Je dis aux Européens : Soufflez-vous dans les bronches, reprenez de la hauteur !

François Fillon annonce le gel des dépenses de l’Etat mais refuse de parler de plan de rigueur. Ne joue-t-on pas sur les mots ?
Non. La rigueur est connotée, c’est le souvenir de Raymond Barre, le Premier ministre de Giscard qui avait augmenté les impôts et gelé les salaires. Là, il ne s’agit pas de ça. Il faut faire des économies raisonnables. L’objectif, c’est de rentrer dans les clous du pacte de stabilité en 2013 avec un déficit public ramené à 3 % du PIB.

Le Quai donnera-t-il l’exemple ?
Nous n’avons pas attendu ces derniers mois pour nous serrer la ceinture. Le budget général est contrôlé. Une mise à la retraite sur deux n’est pas remplacée. Nos effectifs ont baissé de 12 % en dix ans. Les frais de réception du ministère à Paris ont baissé de 26 % entre 2007 et 2009. Soit une économie de près d’un million d’euros !

On dit que vous avez de plus en plus de mal à supporter la tutelle de l’Elysée et de ses conseillers, que vous seriez prêt à quitter votre poste au prochain remaniement…
On dit beaucoup de choses, méfiez-vous. C’est un dur et beau ministère, un dur et beau métier. Sous la V e République, tous les ministres des Affaires étrangères ont été ainsi malmenés. Roland Dumas avant moi, sous François Mitterrand, a eu le même genre de rapports délicats avec la présidence. Je ne vous dis pas que c’est facile, ce serait mentir, je ne vous dis pas que de temps en temps je n’enrage pas, mais j’ai l’impression de travailler tout à fait correctement. Certaines décisions me conviennent, d’autres moins. J’argumente, je fais valoir mon point de vue, même avec le président de la République. J’ai regretté de ne pas avoir les mains plus libres à certains moments, mais je suis fier du travail accompli à mon poste. Nous avons retrouvé notre rang et notre rôle dans la politique internationale. Croyez-vous que j’y sois complètement étranger ?

Comment jugez-vous la gauche aujourd’hui ?
Elle me fait enfin plaisir. Les parlementaires socialistes ont voté l’aide financière à la Grèce sans hésiter, ils ont eu raison. Sur la réforme des retraites, on sent une volonté d’ouverture… même si Martine Aubry a fait machine arrière après avoir reconnu, à juste titre, qu’il faudra nécessairement allonger la durée du travail.

Aubry, DSK… Les prétendants pour 2012 sont sur la ligne de départ…
C’est très bien d’avoir des bons candidats. Cela dit je n’ai pas été exalté par l’ébauche de programme rédigée par mon ami Pierre Moscovici. Il y a surtout des idées générales généreuses. Il faut arrêter de vouloir faire payer à l’Etat des sommes qu’il ne peut plus débourser. Arrêter d’être dans le manichéisme et de dire que les méchants sont les riches et que les bons sont les pauvres. C’est un peu court. Mais il faut reconnaître que Martine Aubry a réussi à unir le PS autour d’elle. Quant à DSK, il se garde bien de se prononcer, même si ses amis s’agitent beaucoup en ce moment. Trop, peut-être. Dominique est un très bon directeur général du FMI, il occupe un poste très important, il a façonné une stature internationale. On verra.

Avez-vous des nouvelles de Clotilde Reiss, toujours retenue en Iran ?
Oui, je l’appelle souvent. Elle résiste bien, pour une jeune enseignante de 24 ans scandaleusement retenue. Elle vit et travaille à la résidence de France au milieu des diplomates. Elle sort même de temps en temps accompagnée par nos diplomates. Elle n’est pas heureuse de cette situation, évidemment, et nous non plus, elle aimerait rentrer en France. Il faut s’armer de détermination, nous ne l’abandonnerons pas. Pas plus que les autres otages français.

Vers la parité euro-dollar


L'économiste en chef de la première banque allemande, Deutsche Bank, dit s'attendre dimanche à ce que l'euro continue de s'affaiblir. "Je pense que nous allons bientôt voir (l'euro) à 1,20 dollar et une poursuite du recul vers la parité avec le dollar est absolument possible", estime Thomas Mayer, dans le quotidien Bild am Sonntag. Eckhard Cordes, le patron de Metro, numéro trois mondial de la distribution, prévient pour sa part qu'un euro durablement faible peut mettre en jeu la cohésion économique de l'Europe et aussi le début de reprise de l'économie allemande.
Un Allemand sur trois estime qu'il n'y aura plus d'euro dans dix ans, selon un sondage publié dans le quotidien dominical. Ils sont 59 % à se dire favorables à ce que la première économie européenne étudie la possibilité d'un retour du Deutsche Mark, ancienne monnaie allemande, si l'euro devenait durablement une monnaie faible, selon cette enquête de l'institut Emnid. Plus de la moitié des Allemands (52 %) disent avoir peur d'une inflation. Le président du Centre financier bavarois, Wolfgang Gerke, s'attend "non pas à une hyperinflation mais autour de trois à quatre pour cent, à cause des déficits budgétaires élevés des Etats". Pour le moment, l'inflation est sous contrôle en Allemagne, les prix à la consommation ayant augmenté de 1 % sur un an en avril.

Cacophonie autour du Fonds d'urgence européen

Nicolas Sarkozy a convoqué une réunion interministérielle, dimanche, à 18h45, pour faire le point sur la crise financière que traverse la zone euro, annonce l'Elysée dans un communiqué. Le premier ministre ainsi que les ministres des affaires étrangères, du budget et des affaires européennes participeront à cette réunion de travail, précisent les services présidentiels. La ministre de l'économie sera représentée par son directeur de cabinet. Christine Lagarde doit assister dans la journée à la réunion des ministres des finances de l'UE sur la crise de la dette grecque et la création d'un fonds de soutien financier inédit en faveur des pays de la zone euro en difficulté, dans l'espoir de stopper la contagion d'une crise qui menace les fondements l'Union monétaire.

LE REFUS DE LONDRES

La réunion doit commencer à partir de 15 heures à Bruxelles. Elle est précédée par une convocation extraordinaire du collège des commissaires de la Commission européenne à partir à 13 heures pour "discuter et adopter" le projet de dispositif qui devait ensuite être proposé aux ministres.
Il s'agira d'un "mécanisme européen de stabilisation destiné à préserver la stabilité financière en Europe", selon la déclaration publiée à l'issue d'un sommet des dirigeants des seize pays de la zone euro vendredi. Ceux-ci ont demandé qu'un tel fonds soit prêt avant l'ouverture des marchés lundi. Une réunion extraordinaire des ministres des finances de l'ensemble de l'UE est nécessaire car il s'agit d'approuver un dispositif garanti par les 27 pays du bloc, même s'il est destiné aux 16 de la zone euro.

Mais le sujet ne va pas sans poser de difficulté : la Grande-Bretagne, en pleine transition, refuse de participer, en y apportant sa garantie, au Fonds d'urgence envisagé pour aider les pays de la zone euro en difficulté, a indiqué dimanche une source diplomatique britannique à l'AFP. "Ne ne voulons pas participer à un Fonds de secours européen", a souligné cette source.

L'idée de départ était que la Commission européenne puisse emprunter en bénéficiant de la garantie de tous les pays de l'Union européenne, y compris ceux comme la Grande-Bretagne qui n'utilisent pas l'euro, puisqu'il s'agit d'un mécanisme de l'UE, selon des sources diplomatiques.
Pour valider un tel dispositif au niveau de toute l'UE il faudrait l'approbation d'une majorité qualifiée suffisante des 27 ministres européens qui se réunissent à Bruxelles, mais l'objectif serait d'avoir un consensus. Le refus de Londres d'y participer pourrait contraindre la zone euro à se rabattre sur un mécanisme de prêts garantis par les seuls pays utilisant la monnaie unique, une option également à l'étude.

Le plan d'urgence pour défendre la monnaie unique sera-t-il au bout du compte garanti par tous les pays de l'UE ou les seuls Etats de la zone euro? "C'est une question en débat", a reconnu une source diplomatique d'un autre pays européen. Les Britanniques, s'ils refusent d'apporter leur garantie aux prêts européens, sont en revanche disposés à approuver, sur le principe, la création du Fonds de stabilisation, selon la source britannique. La dernière proposition sur la table parle d'un montant de 60 milliards d'euros pour le fonds, a-t-elle précisé. La zone euro doit impérativement aboutir à un accord avant l'ouverture des marchés financiers en Asie dans la nuit de dimanche à lundi, afin d'être en mesure de rassurer les investisseurs qui après la Grèce ont pris dans leur mire l'Espagne, le Portugal ou encore l'Italie.
Les marchés s'inquiètent du niveau de déficits et d'endettement des pays de la zone euro.

SOUTIEN D'OBAMA

La crise prend aussi une dimension internationale. Le président américain Barack Obama s'est dit "très préoccupé" par la crise budgétaire grecque et son impact sur les économies européenne et américaine, dans une interview à la chaîne russe Rossiya diffusée samedi. "Mais je crois que les Européens ont pris conscience que c'était très grave. La Grèce prend des mesures très difficiles, en tout cas ils ont mis en place un plan qui appelle à des mesures difficiles", a observé le président américain. "Si nous pouvons stabiliser la situation en Europe, ce sera bien pour les Etats-Unis, et ce sera bien également pour la Russie", a ajouté Barack Obama, soulignant que la crise grecque et l'impact qu'elle avait sur les marchés mondiaux étaient des "menaces sérieuses" pour les Etats-Unis. Les Bourses mondiales ont terminé en baisse vendredi, sur fond de craintes de contagion de la crise grecque à d'autres pays de la zone euro.

RÉUNION DES BANQUIERS CENTRAUX

Des banquiers centraux ont entamé dimanche une série de réunions à Bâle dans le cadre d'une rencontre bimensuelle au siège de la Banque des règlements internationaux (BRI) où la crise grecque et la fragilité de l'euro devraient s'imposer. Cette réunion de gouverneurs des principaux instituts d'émission fait partie de l'agenda annuel de l'institution considérée comme la "banque centrale des banques centrales".

Habituellement très discrète, la rencontre du groupe de banquiers doit se conclure lundi en début d'après-midi par une déclaration de leur porte-parole, qui est actuellement également président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet. Une conférence organisée par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque national suisse (BNS) lui emboîte le pas mardi, cette fois à Zurich. Une nouvelle fois, les problèmes de l'euro devraient s'imposer lors de ce meeting d'une journée orchestré notamment par le patron du FMI, Dominique Strauss-Kahn.

"Avec la volonté politique, l'Europe peut faire face aux crises qu'elle traverse"

Crise de l'euro, remise en cause de la politique agricole commune, euroscepticisme... L'Union européenne célèbre, dimanche 9 mai, dans une atmosphère de crise, les 60 ans de son acte de naissance. Le 9 mai 1950, sur proposition de Jean Monnet, Robert Schuman, alors ministre des affaires étrangères, prononce le discours fondateur de l'Europe, au Quai d'Orsay, à Paris. Depuis 1986, la fête de l'Europe est célébrée ce jour-là. Gérard Bossuat, professeur d'histoire du monde contemporain et spécialiste de la construction européenne, dresse le bilan de l'Europe.

En 1950, Robert Schuman prononçait le discours fondateur de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, l'ancêtre de l'Union européenne. Pouvait-il imaginer l'Europe d'aujourd'hui ?

Il ne pouvait pas imaginer le développement remarquable que l'Europe a pris, notamment dans son élargissement à l'Europe orientale. Et ne pensait pas non plus à toutes les difficultés qu'elle allait rencontrer. Il faut replacer ce discours prononcé par des élites dans le contexte de l'époque. En 1950, l'animosité des Français contre les Allemands est d'envergure. Au moment du projet élitiste de Jean Monnet et Robert Schuman, la réconciliation politique est loin d'être celle des peuples français et allemand. Sans cette construction, je n'ose pas imaginer où en serait l'Europe.

Désormais, le 9 mai est le jour de la fête de l'Europe. Y a-t-il des pays où cette date a davantage d'importance ?

Le 9 mai est une date significative pour le couple franco-allemand et les quatre autres pays fondateurs [Italie, Benelux]. Elle a le mérite de fêter une volonté pacifique alors que la plupart des commémorations font références aux guerres. L'idée de rassembler le peuple européen est une victoire sur son passé belliqueux. A l'est de l'Europe, la date-clé est celle de la chute du mur, le 9 novembre 1989. Pour l'ensemble de l'Europe, la date du 11-Novembre serait beaucoup plus significative.

Remise en cause de la monnaie unique, de la politique économique commune... l'Europe est la cible de nombreuses critiques. Peut-elle s'en remettre ?

Chaque crise est différente. Mais Jean Monet déclarait que l'Europe avance dans la crise. Le premier échec est celui du Conseil de l'Europe. Juste après le plan Schuman, le projet de créer une Communauté européenne de défense s'est effondré lamentablement. D'autres crises ont été traversées. En 1971, le système monétaire international s'effondre. L'Europe crée un dispositif dit du "serpent monétaire européen", qui limite les fluctuations du taux de change entre les pays européens. En 1974, c'est le premier choc pétrolier qui met à mal l'économie européenne. Et l'Europe existe encore ! Avec la volonté politique, l'Union européenne peut faire face aux crises qu'elle traverse.

L'euroscepticisme est également en hausse avec la montée des partis d'extrême droite comme en Hongrie, où le parti Jobbik a fait son entrée en avril au Parlement, avec quarante-sept élus.

La montée des eurosceptiques est interpellant. C'est ce nationalisme à outrance qui a dérivé pendant l'entre-deux-guerre. Cette insatisfaction des citoyens européens semble émaner du questionnement : "Que m'apporte l'Europe ?" L'Union européenne apporte la liberté de circulation, elle permet le développement économique, elle ouvre des perspectives. Mais a priori, elle n'a pas réussi à mettre en avant ces avantages, mal perçus par les citoyens.

Comment imaginer l'Union européenne dans soixante ans ?

Personne ne peut affirmer qu'il y aura encore une Union européenne dans soixante ans, l'équivalent de deux générations. Peut-être que nous en serons à un gouvernement mondial ou pourquoi pas Atlantique. Pour beaucoup de bâtisseurs de l'union, Jacques Delors, Jean Monnet ou Emile Noël, l'objectif était avant tout de créer davantage d'union entre les peuples. Si la majorité des citoyens décident de poursuivre cette union, la volonté politique suivra.
Propos recueillis par Caroline Venaille

De Düsseldorf à Berlin

Rien de plus dangereux qu'un volte-face à la veille d'un scrutin, en qualifiant du jour au lendemain de « nécessaire » ce qui était encore « inacceptable » il y a peu ! C'est l'exercice de saltimbanque auquel se livre Jürgen Rüttgers, le chef du gouvernement régional de Rhénanie du Nord-Wesphalie (NRW dans son abréviation allemande), après avoir relayé de meeting en meeting toutes les peurs de la population sur une aide financière à la Grèce. Une peur attisée par les tabloïds clamant « nous ne paierons pas pour des fainéants ».
Pour Rüttgers, c'était « Nein », le même « Nein » qu'Angela Merkel avait longtemps décliné sur tous les tons. Mais maintenant que l'Allemagne a dit « Ja », il ne s'agit plus de sauver la Grèce, seulement de consolider l'euro, de le préserver de la spéculation ! Un tour de passe-passe difficile à exécuter...
Autant dire que les turbulences monétaires joueront dans l'élection d'aujourd'hui. Et, via une débâcle électorale à Düsseldorf, risquent de jouer contre la chancelière et sa coalition CDU/CSU - FDP au pouvoir à Berlin. Une coalition qui collectionne les ratés depuis sa formation. Les partenaires gouvernementaux sont à peu près d'accord sur rien. Entre les Bavarois de la CSU et les Libéraux, les accrochages sont quotidiens. Malgré les accords conclus, la politique fiscale, la politique énergétique et la réforme du système de santé ne trouvent aucun consensus.
Déjà, il semble évident que les promesses de l'automne 2009 ne seront pas tenues. La situation économique ne permet pas un véritable allégement fiscal, une proposition qui se heurte également aux Länder gouvernés par la CDU, le parti de la chancelière. Ils ont peur de perdre des recettes dans le système de péréquation fédérale... Quant aux ministres libéraux, avec leur comportement de néophytes, ils battent des records d'impopularité avec, en tête, leur chef de file Guido Westerwelle, très pâle ministre des affaires étrangères. Au Bundestag, l'ambiance est telle que les élus de l'opposition (SPD, Verts et Linke) se sentent souvent inutiles car devancés dans la critique par les députés de la coalition gouvernementale...
Cette situation qu'aggraverait encore le basculement de la majorité au Bundesrat (avec la chute du gouvernement CDU-FDP en NRW) pèse sur toute l'action politique. Confrontée aux problèmes internes, en proie aux luttes de clans et liée par les contraintes du fédéralisme, Angela Merkel n'assume plus entièrement son rôle sur la scène européenne : ses atermoiements dans les déboires de l'euro en sont l'illustration.
Et en ces temps de crise, une Allemagne absente qui donne l'impression de devoir être constamment secouée ne fait vraiment pas l'affaire de l'Europe.

L'avenir de l'Europe dépend des Européens

Voici 60 ans, Robert Schuman appelait les Européens à s'unir alors que les blessures de la guerre étaient encore vives : « La paix mondiale ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la menacent, déclarait-il. La contribution qu'une Europe organisée et vivante peut apporter à la civilisation est indispensable au maintien des relations pacifiques. »

Ce 60e anniversaire est assombri par la crise : les Européens sont-ils condamnés au déclin ? Vont-ils se laisser ballotter par les événements ou au contraire franchir une étape décisive en s'unissant davantage ?

Ces questions étaient au coeur du colloque organisé à Metz sur « L'avenir de l'Europe » organisé l'association « le neuf en Europe » (1). Pour Jacques Barrot, membre du Conseil constitutionnel : « Il faut dépasser les égoïsmes nationaux, surmonter le risque de repli sur soi, exercer la souveraineté en équipe. Sinon, l'Europe ne comptera pas dans le monde et renoncera à sa mission : préparer les chemins d'une gouvernance mondiale empreinte des valeurs européennes. »

Pour cela, il est nécessaire que les Européens se réveillent : « Nous devons nous retrousser les manches sinon l'Euro, la protection sociale et même notre richesse fonderont comme neige au soleil. Ceux qui doutent de l'Europe, attendent qu'elle démontre son efficacité et son utilité », explique Jean Dominique Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman.

Un grand courage politique est indispensable, explique l'ancienne présidente de Lettonie, Mme Vike-Freiberga : « Notre développement dépend de nous. Le potentiel européen est remarquable. Il s'épanouira si nous prenons conscience de nos atouts et de nos valeurs, si nous mettons ensemble nos forces et surmontons nos faiblesses. »

Sortir du court terme et regarder l'horizon est nécessaire : « A l'image des bâtisseurs des cathédrales, il faut construire de nouveaux arcs-boutants pour tenir l'édifice européen afin qu'il résiste sans dommage à la tempête qui nous vient du nouvel ordre du monde mais aussi de l'intérieur », déclare Jeanne Françoise Hutin, présidente de la Maison de l'Europe de Rennes.

Imagination politique et éducation sont les clés de la réussite : « L'Europe a été grande quand elle a su transmettre le savoir, la culture et les valeurs, déclare Pour Mgr Tauran. L'Europe c'est une culture et un esprit respect des personnes et refus de l'inhumain. » Alors que Shanghai brille de mille feux éphémères et qu'Athènes, berceau de la Démocratie, semble crouler sous le poids de son imprévoyance, révélant celle des autres peuples les Européens doivent prendre en main leur avenir. C'est à ce prix qu'il leur sourira.

(1) www.9mai2010.
Jeanne Emmanuelle Hutin

À qui la faute ?


L'indice Dow Jones, jeudi dernier, a connu une chute historique, absurde et incompréhensible. En l'espace de quelques heures, il a cédé plus de 1 000 points, soit une baisse de 9 %. Du jamais vu sur la place new-yorkaise. Seul un évènement extraordinaire peut justifier pareille dégringolade. Al Qaida au Capitole, Obama assassiné, la Chine qui entre en guerre ? Mais non. L'actualité, ce jour-là, n'offrait que des calamités quelconques. La crise budgétaire grecque, qui a bon dos, ne saurait tout expliquer.

On s'en remet donc à la Securities and Exchange Commission, gendarme de la Bourse américaine, pour y voir clair. La SEC - comme un coup de trique - ouvre aussitôt une enquête cinglante. À l'image du crash aérien, le krach financier autorise deux hypothèses. Il s'agit de choisir entre l'erreur humaine et la défaillance technique.

Tous les regards se tournent vers un trader de Citigroup que désigne la rumeur. On soupçonne le maladroit d'avoir tapé "b" au lieu de "m". Transformant les millions en milliards, il aurait ainsi, par son faramineux ordre de vente, déclenché l'hystérie des marchés.

Voilà où nous en sommes. Un obscur "pianiste" commet une faute de main à Wall Street, et le concert des nations part en vrille !

La seconde hypothèse évoque "un problème informatique". Gérées par internet à la vitesse grand V, les transactions ne sont pas à l'abri d'un "bug". Le système permet une spéculation plus rapide que l'éclair, mais ne dispose d'aucun garde-fou. Les ordinateurs s'emballent, la planète aussi.

Ici, on ignore encore si l'erreur incombe à la machine ou au courtier. Dans l'un et l'autre cas, de toute façon, il y a du souci à se faire...


Gilles Debernardi

Le maire d'Hénin-Beaumont démissionne, le FN dénonce une "basse manœuvre"

Le maire divers gauche d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) Daniel Duquenne a démissionné vendredi 7 mai de son mandat de maire pour raisons de santé, a-t-on appris samedi de source préfectorale. M. Duquenne n'ayant toutefois pas quitté ses fonctions de conseiller municipal, les élus de la commune devront se réunir prochainement pour élire un nouveau maire.

Dans un communiqué, le conseiller municipal Front national Steeve Briois, qui a déposé un recours contre M. Duquenne devant le Conseil d'Etat, affirme que l'élu avait appris par son avocat que le rapporteur public s'apprête à demander lundi son inéligibilité. "Pour éviter de nouvelles élections, Duquenne s'est autoamnistié avant la décision du Conseil d'Etat", accuse M. Briois, qui va "saisir les autorités pour faire constater cette basse manœuvre et annuler toutes les futures décisions de la majorité municipale".

NOUVELLE PÉRIODE "D'INCERTITUDES" À HÉNIN-BEAUMONT

M. Duquenne, élu avec plus de 52 % des suffrages devant M. Briois au second tour en juillet 2009, était "chargé de mission" au conseil régional du Nord - Pas-de-Calais avec le grade de directeur territorial. Or le code électoral déclare inéligibles "les directeurs généraux, directeurs, directeurs-adjoints, chefs de service et adjoints au chef de service (...) des conseils régionaux".

En première instance, le tribunal administratif de Lille avait rejeté les recours déposés par le FN et l'ancien maire socialiste Gérard Dalongeville.
Ce dernier avait été révoqué en mai de ses fonctions de maire après sa mise en examen dans une affaire de fausses factures présumées.

Dans un communiqué, Pierre Ferrari (PS), président de l'association "Un nouvel élan pour Hénin-Beaumont", a estimé que la démission de Daniel Duquenne va "de nouveau plonger la ville dans un état d'instabilité". Le PCF local a estimé que cette démission "ouvre une nouvelle période d'incertitudes à Hénin-Beaumont", soulignant que "depuis maintenant treize mois, c'est le chaos à la tête de la ville, alimenté par l'attitude destructrice du Front National".