TOUT EST DIT

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jeudi 9 janvier 2014

Hollande, l'homme de toutes les sauces

Le "virage libéral" annoncé par le président lors de ses voeux est la preuve que, comme pour Mitterrand, "le socialisme à la française n'est pas une bible".


Le coup de l'indignation quant à l'overdose fiscale, Mitterrand nous l'avait déjà fait. On a encore en mémoire l'une de ses interventions où il feignait de découvrir et de s'offusquer d'une réalité dont il était l'auteur. Il y a trop d'impôts, disait-il en substance, c'est intolérable. Hollande n'a rien inventé, ils sont très forts à ce jeu-là. C'est une manie socialiste : ils s'engagent avec arrogance dans une politique, elle rate, ils changent alors de direction sans vergogne, sans états d'âme, sans s'excuser, ce n'est pas de leur faute, ce n'est jamais de leur faute. En général, pour se déjuger il leur faut un an et demi. 
On est frappé en effet de cette régularité d'horloge. Rappelez-vous la fin de l'année 1982. Dix-huit mois après mai 81. Dès l'été, les ennuis commencent pour Mitterrand et Mauroy. L'automne venu, dans un contexte comparable à beaucoup d'égards à celui d'aujourd'hui (croissance inférieure à 1 %, faillites multiples des PME, endettement et chômage en hausse, problèmes relatifs à l'immigration, etc.), Mitterrand fait à Figeac, dans un discours resté célèbre, une caresse aux entreprises, non sans avoir naturellement rendu Giscard et Barre responsables de la situation. Il demande au gouvernement Mauroy d'"agir pour écarter" un alourdissement des charges patronales. Deux mois plus tard, le blocage des prix et des revenus est suspendu. Le CNPF (Conseil national du patronat français, ex-Medef, NDLR) respire ! Quelques semaines plus tard, Mitterrand, dans ses voeux aux Français, s'engage à "modérer les charges sociales et financières des entreprises".

Du Sarkozy tout craché

Exactement le même schéma qu'emprunte aujourd'hui Hollande, selon le même calendrier : dans les deux cas au bout de dix-huit mois de pouvoir, dans les deux cas à quelques semaines des élections municipales. Avouez que la coïncidence est troublante. Depuis quelques mois, Hollande s'efforce de donner des gages aux patrons jusqu'à se présenter comme le "président des entreprises" (sic !) après les avoir accablés de sa morgue pour conquérir le pouvoir. Et mardi dernier, lors de ses voeux, il franchit le Rubicon : "Moins de charges sur le travail, moins de contraintes sur les activités des entreprises." Et le Medef respire ! Dans Le Monde de samedi, Pierre Gattaz exulte. Un peu imprudemment ? 
Reste à savoir si, à l'instar de Mitterrand qui garda Mauroy à Matignon au lendemain des municipales de mars 1983, Hollande maintiendra Ayrault. C'est une autre affaire, secondaire au demeurant, puisque, si l'on a bien compris le sens de ses propos de mardi dernier, François Hollande prend le pouvoir et n'a plus besoin d'un Premier ministre : "J'assumerai moi-même la responsabilité et le suivi de ce programme d'économies durant tout le quinquennat." Du Sarkozy tout craché, on croit rêver ! Intéressant, cet apprentissage du pouvoir, ce reniement effronté de soi-même !

L'ère du social libéralisme 

Et les électeurs socialistes dans tout ça ? Bof, ils sont habitués. Cocus par nature, cocus par inceste. Lors du changement de cap des années 82-83, Lionel Jospin disait : "Les socialistes vivront mal ce plan, mais ils vont s'inoculer le réalisme." Version élégante de l'aveu cynique de Mitterrand en septembre 82 : "Le socialisme à la française, je n'en fais pas une bible." Nous, nous ne ferions pas une histoire de cette souplesse d'échine, qui après tout est une marque d'intelligence politique, s'ils ne nous fatiguaient pas, jusqu'au mépris, avec leurs protestations de vertu morale et de cohérence idéologique. 
Le Hollande nouveau est donc arrivé. Miracle de Noël : nous entrons dans l'ère du social libéralisme. La gauche de la gauche y trouvera, une fois de plus, motif à l'écoeurement. Mais que peut-elle, privée de représentation, sinon tenter de soulever une opinion que la crainte du chômage rend frileuse ? Pour leur part, les ministres les plus hostiles à ce virage avaleront la couleuvre, comme à l'ordinaire. On leur donnera quelques gages compensatoires. Des réformes en trompe-l'oeil dans le domaine sociétal, de quoi faire jouir l'électorat bobo.

Quitte ou double décisif 

La seule question qui vaille concerne les chances de succès de cette nouvelle donne. Et d'abord celles de la conclusion de ce pacte de responsabilité entre le gouvernement et les entreprises. Les positions de chacune des parties semblent pour l'heure très éloignées. Les exigences et les objectifs patronaux sont bien ambitieux. Ils vont faire grincer les dents du peuple. Leur réalisation suppose de la part de Hollande des efforts considérables en matière de budget social et de réduction de la dépense publique. Sa conversion soudaine au libéralisme va-t-elle suffire à lui donner l'audace nécessaire ? Dispose-t-il de l'autorité qu'il faut, au point désastreux où est tombé son crédit ? C'est un quitte ou double décisif qu'il joue là. Qu'il s'engage personnellement et en solitaire sur la conduite de sa nouvelle stratégie en est la preuve.
À moins qu'il ne trompe tout le monde par une manoeuvre en forme de rideau de fumée, en attendant un hasard incertain qui lui permettrait de se dégager du bourbier où il est enlisé, au prix d'une nouvelle volte-face. Hollande, ou l'homme de toutes les sauces. Le socialiste qui ne fait une bible ni du socialisme ni de la fidélité à soi-même.

France : problème réel de liberté ou politique de double standard ?

France : problème réel de liberté ou politique de double standard ? 

Dernièrement, deux événements ont déclenché une vive polémique sur la liberté dans la France actuelle. Ou plutôt sur la façon « d’appliquer » cette même « liberté ». Vraisemblablement une politique plus que contradictoire règne sous le gouvernement Hollande sur une question pourtant essentielle et tellement mise en avant par les décideurs de l’Hexagone, prêchant à chaque bonne occasion leur attachement aux valeurs démocratiques et ce aux quatre coins du monde.

D’un côté, le 20 décembre dernier, nouvelle « action » des FEMEN. Une certaine Eloïse Bouton avait alors mimé un « avortement de Jésus » dans l’Eglise de la Madeleine, à Paris. Le tout devant toutes les personnes présentes à la messe. Un « geste », si l’on peut appeler ainsi, vivement condamné aussi bien par la communauté des croyants, catholiques en premier lieu, mais également de toutes les personnes censées. Le curé de l’Eglise de la Madeleine, le père Bruno Horaist, avait alors porté plainte. Jusqu’ici, sa plainte n’avait pas eu de suites. Inna Schevchenko, la cofondatrice de la branche française des Femen, a même eu le culot d’en rigoler : « Rien ne s’est passé, Eloïse n’a pas été appelée par la police. Cela montre combien l’Eglise est devenue faible en France ».
Monseigneur Vingt-Trois, archevêque de Paris, a lui regretté le peu de réactions au plus haut niveau de l’Etat, et plus particulièrement de Manuel Valls, ministre de l’intérieur et des cultes… Il a fallu attendre ce 7 janvier pour que la responsable de cet acte soit enfin placée en garde à vue au commissariat du 8ème arrondissement de Paris. Néanmoins et connaissant l’amour des autorités françaises pour ce mouvement ouvertement extrémiste, les FEMEN n’ont vraisemblablement pas à s’inquiéter quant à leur avenir sur le sol français. On ne peut pas en dire de même de l’humoriste franco-camerounais Dieudonné, inquiété quant à lui plus que sérieusement et notamment via le même Manuel Valls, si silencieux (voire supportant) face aux activités des FEMEN mais qui dans le cas Dieudonné en a fait une affaire pratiquement personnelle, à savoir à tout prix faire interdire les spectacles du talentueux comédien.

La faute de Dieudonné ? Etre devenu et ce depuis plusieurs années l’ennemi et la bête noire du lobby sioniste sur le sol hexagonal. Et ça bien évidemment, aucun représentant du pouvoir français ne le laissera passer. Mais si l’on regarde la vérité en face, l’humoriste attire beaucoup plus de sympathie de la part de ses concitoyens que les fameuses sextrémistes, pour certaines call-girls à leurs heures perdues. Pour revenir donc à Dieudonné, à en croire Valls et compagnie, il serait un dangereux extrémiste attisant la haine dans la société. Un « extrémiste » pourtant si apprécié par nombreux représentants de la société française, que ce soit de la part des Français de souche que ceux issus de la diversité. Ainsi, plusieurs associations, notamment de jeunes issus des banlieues, ont exprimé ouvertement leur soutien à Dieudonné face à l’hypocrisie des tenants du pouvoir en France.

Effectivement, on se rend compte une fois de plus de l’application pratiquement non-voilée de doubles standards et ce sur un thème considéré comme sacré dans la République française : celui de la liberté… Une valeur qui soi-disant ne se négocie pas. Et pourtant dans la France actuelle on voit une nouvelle fois que cette « liberté » n’est pas accordée à tout le monde de la même manière, en fonction du « thème » abordé. Certains donneurs de leçon parlent aussi beaucoup d’égalité, l’autre valeur « inébranlable » de la cinquième république. Mais cette valeur a elle aussi un double sens et visiblement on n’est pas tous aussi égaux que cela. Du moment qu’un pseudo-mouvement, financé par des sources obscures attaque une église et insulte ouvertement les croyants, qu’ils soient chrétiens ou musulmans, on parle alors de la « liberté d’expression ». Mais lorsqu’une personne attaque un lobby raciste, intolérant et ultra-puissant, alors il devient le paria à éliminer à tout prix… 

Les Américains préparaient une guerre insensée en Syrie

En 2013, c’est tout juste si le président Barack Omaba n’a pas précipité son pays dans une nouvelle guerre insensée au Proche-Orient. Pourtant, c’est lui qui s’est vu décerner en 2009 le prix Nobel de la paix pour « les grands efforts en matière de renforcement de la diplomatie internationale et de coopération entre les nations ». Cette nouvelle a provoqué la perplexité générale dans la mesure où Obama était président depuis moins d’un an et n’avait eu le temps de faire quoi que ce soit qui mériterait une si haute récompense.
Les Etats-Unis n’ont jamais sympathisé avec le régime de Bachar Assad mais Washington préférait rester à l’écart des événements syriens. En effet, l’expérience des campagnes en Irak, Afghanistan et Libye lui suggérait que s’interposer dans le conflit entre le pouvoir syrien et l’opposition ne présageait rien de bon pour les États-Unis. Les militaires, c’est-à-dire ceux qui étaient directement impliqués dans ces campagnes, le comprenaient mieux qui quiconque.
Mais certains alliés des Etats-Unis les poussaient à intervenir militairement en Syrie, estime Sergeï Demidenko, expert de l’Institut d’évaluations et d’analyse stratégique :
« C’était précisément les États se tenant prêts selon le chef de la diplomatie américaine John Kerry à assumer les frais de cette campagne, qui se montraient les plus intéressés à attaquer la Syrie. Je pense aux États du golfe Persique, et au premier chef à l’Arabie Saoudite et au Qatar. Les États-Unis et l’Occident dans son ensemble étaient plutôt réticents parce que tous se rendaient compte que le régime d’Assad ne présentait aucun danger pour les pays occidentaux malgré son caractère autoritaire et ses tendances indépendantistes. »
 Par contre, le régime alaouite de Damas est un ennemi aussi bien géopolitique que religieux pour les monarchies sunnites. Mieux encore, si la destitution d’Assad faisait le jeu de Doha et d’Er-Riyad, c’est parce que l’Iran, leur principal adversaire dans la région, s’en trouverait affaibli. Aussi, aux premières nouvelles faisant état d’une attaque chimique dans une banlieue de Damas, se sont-ils empressés de rappeler à Obama sa déclaration de naguère. C’est que le leader américain avait promis que l’emploi des armes chimiques deviendrait « la ligne rouge » et que les États-Unis seraient obligés d’intervenir dans le conflit syrien si elle était franchie un jour. Finalement, vers la fin de l’été, les Américains ont renforcé leur groupement aéronaval au large des côtes syriennes et ont commencé à se préparer à l’attaque. Sergeï Demidenko raconte de quoi cette attaque pourrait avoir l’air :
« Au moment où le Congrès américain délibérait de la possibilité d’une frappe contre la Syrie, Kerry a caractérisé les plans militaires de la Maison Blanche comme « des efforts très limités ». Cela signifiait que la Maison Blanche préparait une opération plus retentissante que vraiment efficace. Si cette opération était approuvée et mise en oeuvre, elle aurait l’air de celle de « Canyon Eldorado » lancée en 1986 contre Kadhafi. Les Américains se sont sont alors limités à porter des frappes contre plusieurs sites militaires et le palais présidentiel à Tripoli. »
Ce scénario n'aurait pas changé la donne en Syrie mais aurait été en revanche le moins coûteux pour les États-Unis. En même temps, Washington et personnellement le prix Nobel Obama, auraient vu leur image passablement ternie. C’est alors que les diplomates russes lui ont fait un cadeau inespéré. En effet, alors que la décision sur la frappe contre la Syrie semblait être prise, Kerry a fait comprendre que les États-Unis étaient prêts à renoncer à l’attaque si Damas détruisait ses armes chimiques. Ces paroles du secrétaire d’État ont été entendues au Kremlin qui a immédiatement proposé un contre-plan. L’accord sur cette question a finalement été réalisé à la suite des longues et laborieuses consultations entre les ministres des AE des États-Unis et de la Russie. Finalement, Damas a procédé à la destruction de ses armes chimiques, Washington a évité la nécessité de s’impliquer dans une nouvelle aventure militaire et Moscou a pu renforcer ses positions dans l’arène internationale.   

Présidence spartiate

Présidence spartiate


Depuis le 1 er janvier, le drapeau européen flotte sur Athènes. Et si elle évite de trop pavoiser, la Grèce a quand même pris officiellement hier la présidence de l'UE pour six mois. De prime abord, on croit rêver. Donner les manettes de l'Union à la Grèce, c'est comme si l'on confiait les clefs du camion à un chauffard privé de permis pour conduite dangereuse. Mais arrêtons là le sarcasme, en dépit du caractère tragi-comique de la situation. Priver Athènes d'une présidence tournante prévue de longue date aurait ajouté l'humiliation à la crise. Et cela aurait également constitué un dramatique aveu d'impuissance de l'Union à quelques mois des élections européennes. Sauver le malheureux soldat grec, c'est peut-être aussi sauver l'Europe.
Bien sûr, il ne faut pas être dupe. Si la Grèce va un peu mieux et espère un faible retour de la croissance (0,5 %) en 2014, si elle pense même pouvoir réapparaître sur les marchés, les Grecs, eux, souffrent toujours autant des plans successifs d'austérité. Il est grand temps de leur redonner des raisons d'espérer.
En effet, si 60 % des Grecs veulent rester dans l'Union, ils sont seulement 10 % à lui faire confiance. Le Premier ministre, Antonio Samaras, à la tête d'une coalition fragile, entend bien sortir son pays de son statut « d'assisté » pour en faire « un État vraiment membre » de l'Union. Mais il appartiendra à tous ses partenaires d'aider la Grèce à réussir cette « présidence spartiate » s'interdisant toute dépense superflue.
Les signaux positifs envoyés par Athènes en matière budgétaire, sont une invite à un assouplissement des programmes d'assainissement de la dette (réduction des taux d'intérêt ou allongement de la période de remboursement). L'Allemagne, longtemps inflexible, y est prête. Il y va de l'intérêt de tous avant des élections qui pourraient voir le triomphe des populismes et des extrémismes. Dans la crise, il faut bien admettre que l'Europe n'a guère su se donner un visage avenant. Qu'il incombe aujourd'hui à une Grèce en souffrance de corriger cela n'est pas le moindre des paradoxes.

Pour un « Pacte de responsabilité » syndical

Pour un « Pacte de responsabilité » syndical


Au quatrième jour du blocage et de l’occupation par la CGT de l’usine Goodyear d’Amiens, on attend toujours une condamnation solennelle des méthodes du syndicat. Seul Arnaud Montebourg a émis une protestation, expédiée en quelques mots à l’Assemblée nationale. Mais au ministère du Travail, pas une voix ne s’est élevée, pas un mot même pour condamner la séquestration et les gestes d’intimidation exercés contre les deux cadres otages de cette violence syndicale. Pas un communiqué officiel, pas davantage de déclaration du ministre en charge, Michel Sapin, spectaculairement absent.
Un silence lourd de sens, aussi glaçant que les propos d’un Jean-Claude Mailly, le leader de FO, pour qui cette affaire « n’est pas un drame », aussi pesant que le déni du patron de la CGT, Thierry Lepaon, qui comprend-sans-cautionner-tout-en-refusant-de-condamner. Le ferait-il d’ailleurs que ça ne changerait probablement rien. Avec un mélange d’évidente mauvaise foi et de faiblesse intrinsèque, les organisations syndicales camouflent en effet derrière le paravent de leur statut confédéral un manque criant d’autorité de la tête sur les jambes, du centre national sur les sections locales et professionnelles.
A la recherche des clefs qui pourraient lui permettre un jour de déverrouiller l’emploi et de réduire le chômage, François Hollande avait déjà trouvé qu’il fallait réduire le coût du travail. Il vient de dénicher le deuxième passe en s’adressant directement, le 31 décembre au soir, aux entreprises et au patronat. Mais il lui manque toujours la troisième clef, indispensable elle aussi : celle qui permettrait enfin à la France d’avoir des syndicats à la hauteur du défi réformateur qui l’attend. Des syndicats responsables. C’est à eux que François Hollande doit maintenant proposer un « Pacte de responsabilité ». Ce serait là le vrai virage du chef de l’Etat.