TOUT EST DIT

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ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

vendredi 16 octobre 2009

Peut-on interdire les liens hypertextes vers un site ?

La pratique est répandue : grandes entreprises ou institutions ont pris l'habitude d'interdire de faire un lien vers leur site sans autorisation préalable. "Tout utilisateur ou visiteur du site Web ne peut mettre en place un hyperlien en direction de ce site sans l'autorisation expresse et préalable de Coca-Cola Services France", peut-on par exemple lire dans les conditions générales d'utilisation du site français de Coca-Cola. D'autres vont plus loin, comme M6, qui précise que, "à défaut d'autorisation, un tel lien pourra être considéré comme constitutif du délit de contrefaçon".
Cette pratique est abusive et sans fondement, estime Benoît Sibaud, de l'April – une association qui promeut le logiciel libre –, qui maintient une liste des sites pratiquant le "pdlsa" (pas de lien sans autorisation préalable). "Le lien hypertexte est le fondement même du Web, explique-t-il. Et cette interdiction est impossible à mettre en place : si je clique sur un lien dans une messagerie instantanée, un e-mail, ou que j'utilise un service de raccourcisseur d'adresse, il est impossible de savoir qui a créé le lien." La pratique relève d'une certaine forme d'hypocrisie, les principaux pourvoyeurs de liens étant les moteurs de recherche. "Je ne crois pas que Google demande l'autorisation des possesseurs de site avant de faire des liens, s'amuse Benoît Sibaud. Or, ces entreprises et administrations ne bloquent pas leur indexation dans Google, bien au contraire : c'est leur intérêt d'être bien référencées."

Pour autant, cette interdiction a-t-elle un fondement juridique ? Pas directement, estime l'avocat Guillaume Sauvage, du cabinet Pierrat, spécialisé dans la propriété intellectuelle. "On ne peut pas faire n'importe quoi avec un lien hypertexte : par exemple, faire un lien pointant vers le site d'une société sur les mots 'bande d'escrocs' peut être assimilable à de la diffamation. Mais, dans l'absolu, interdire de faire un lien vers un site Internet n'a pas de véritable valeur légale et ne constitue pas une contrefaçon, qui suppose la reproduction d'un contenu ou sa représentation. C'est seulement si le lien est utilisé pour diffamer, parasiter économiquement un site, permettre d'accéder à un contenu en évitant la publicité, par exemple, que l'entreprise peut porter plainte."

"Bien sûr, il y a des cas d'abus, note Benoît Sibaud. Mais ces clauses restent une aberration : la seule protection pour les entreprises, c'est de s'en prendre directement aux cas de contrefaçon ou de diffamation."
Damien Leloup

Google transforme la géolocalisation en jeu de construction

Comment reconstituer, en trois dimensions, les milliers de bâtiments qui composent les principales villes du monde ? En faisant appel, à la manière de Google, à la main-d'œuvre bénévole de millions d'internautes.
Afin d'améliorer la qualité graphique de son service Google Earth, l'entreprise américaine a élaboré un nouveau module, appelé "building maker". Certains monuments de villes américaines existaient déjà en 3D, réalisés par les graphistes de l'entreprise. Mais, avec son nouveau service, Google peut potentiellement cartographier le monde entier en 3D, à moindre frais.

Conçue comme un jeu vidéo tel que Sim City, l'interface permet d'abord à l'internaute de choisir quelle partie de la ville il souhaite modéliser. Pour l'heure, une cinquantaine de lieux sont disponibles. A partir de la vue en deux dimensions, l'usager a pour tâche d'appliquer les volumes correspondant aux bâtiments. Le logiciel applique ensuite automatiquement la texture. Si le nouveau module créé par l'internaute est validé par Google, il apparaît ensuite sur Google Earth.

Ce n'est pas la première fois que les contenus générés par les utilisateurs sont utilisés par les grandes entreprises du Net. Facebook avait par exemple fait appel à ses membres pour participer à la traduction de ses pages, en français notamment. Mais pour Google, comme pour certains de ses concurrents, les ressorts du jeu sont souvent utilisés afin d'optimiser les services tout en motivant l'utilisateur. Depuis plusieurs mois, l'entreprise Mountain View propose ainsi une application, appelée Image Labeler, destinée à rendre plus pertinente sa recherche d'images. Avec Page Hunt, Microsoft compte aussi améliorer la pertinence de son moteur de recherche, avec une application ludique.

Avec Google, cette forme de collaboration bénévole peut aussi devenir un enjeu stratégique. En septembre, le groupe américain a racheté la société reCaptcha. Celle-ci propose un système de reconnaissance de caractères destiné à vérifier l'identité humaine de l'internaute et à lutter contre le spam. En reproduisant des mots difficilement lisibles, ce système permet aussi à Google d'améliorer l'efficacité de la numérisation des ouvrages. Un secteur dans lequel Google souhaite s'imposer.

Bénéfices en forte hausse pour Google

Avec un bénéfice net trimestriel en hausse de 27 % à 1,638 milliard de dollars, Google a dépassé largement jeudi les attentes, et la firme estime que "le pire de la récession" est désormais passé. Ce bénéfice important s'explique en grande partie par un chiffre d'affaires nettement supérieur aux prévisions : 5,944 milliards de dollars contre les 4,24 milliards de dollars attendus. Sur un an, le chiffre d'affaires de l'entreprise est en augmentation de 7 %.
Il y a douze mois (…) nous avons décidé de naviguer prudemment" face à la crise, a expliqué le PDG Eric Schmidt. "Maintenant, il est important de revenir à ce que nous faisons bien, innover et investir." Le groupe de Mountain View dispose d'un trésor de guerre de 22 milliards de dollars en liquidités au 30 septembre. Mais si l'entreprise annonce qu'elle est prête à investir, elle souhaite rester prudente en ce qui concerne les investissements stratégiques importants, comme le rachat d'autres entreprises à forte valorisation.

Alors que le groupe avait procédé au début de l'année aux premières suppressions d'emplois de son histoire, il a annoncé qu'il allait désormais accélérer le rythme des embauches, notamment dans les secteurs de l'ingénierie et du marketing. "Nous sommes maintenant très optimistes pour l'avenir", a insisté Eric Schmidt.

Après la clôture de Wall Street, l'action Google gagnait jeudi soir 2,94 % à 545,31 dollars, alors qu'elle a déjà progressé de 20 % depuis un mois. Sans aller dans le détail de ses activités, le groupe a affirmé une nouvelle fois qu'il était "très satisfait" des performances de sa filiale d'échange de vidéos YouTube, acheté 1,65 milliard de dollars en 2006. "YouTube a trouvé le chemin vers la profitabilité, qu'il atteindra dans un avenir proche", a déclaré la direction. Google n'a pas encore réussi à dégager un bénéfice sur ce secteur.

IDENTITÉ REMISE EN CAUSE ?

Parmi les plus grands mystères de l'Histoire, l'identité de la Joconde est l'un des plus passionnants. De nombreux historiens s'accordent pour dire que le modèle est l'épouse d'un marchand florentin, Lisa del Giocondo, mais un historien italien, Roberto Zapperi, vient remettre en cause cette hypothèse.

L'historien s'appuie sur le compte-rendu d'une rencontre entre Léonard de Vinci et le cardinal Louis d'Aragon, rédigé par le secrétaire de ce dernier. Lors d'une visite de l'ecclésiastique au Clos Lucé, Leonardo de Vinci lui aurait montré de nombreux manuscrits, mais juste trois toiles. "L'une d'elle est celle qui est actuellement exposée au Louvre", affirme le chercheur. L'artiste aurait expliqué que cette œuvre avait été commandée par Julien de Medicis et représenterait donc l'une des nombreuses maîtresses de ce dernier, Pacifica Brandani, avec laquelle il avait eu un fils illégitime, avant qu'elle ne décède peu après.

L'historien reconnaît que cette source est largement connue de tous les chercheurs, "mais presque toujours ignorée", en raison de la trop grand confiance accordée au livre de l'Italien Giorgio Vasari, qui avait identifiée le modèle dès 1550 comme étant Lisa del Giocondo. "Lisa n'est pas celle qui sourit au Louvre - et elle ne connaissait même pas Julien de Medicis", conclut le chercheur.

Les deux tiers des Français opposés à l'élection de Jean Sarkozy à l'EPAD

Près de deux Français sur trois (64 %) sont hostiles à la candidature de Jean Sarkozy à la présidence de l'établissement public d'aménagement de la Défense (EPAD), selon un sondage CSA, publié vendredi 16 octobre par Le Parisien-Aujourd'hui en France. D'après cette enquête, réalisée les 14 et 15 octobre auprès de mille quatre personnes, le malaise se ressent même à droite, puisque 51 % des sympathisants UMP perçoivent comme une "mauvaise chose" l'arrivée du fils du chef de l'Etat à la présidence de l'EPAD.
Au-delà de ce dossier, le sondage BVA-Le Parisien illustre ce que le journal qualifie de "malaise" de sympathisants de droite "déboussolés". Ainsi l'idée de la cagnotte pour lutter contre l'absentéisme scolaire est désapprouvée par 69 % des sympathisants de droite (67 % des Français). La taxe carbone est considérée comme une "mauvaise chose" pour 52 % d'entre eux (59 % des Français).

En revanche, 62 % des électeurs de droite approuvent le soutien affiché par Nicolas Sarkozy à son ministre de la culture, Frédéric Mitterrand. Ce chiffre tombe à 40 % pour l'ensemble des sondés. L'extension du revenu de solidarité active (RSA) aux moins de 25 ans est soutenue elle par 71 % des sympathisants de droite (le chiffre est identique pour l'ensemble des sondés), l'ouverture à gauche saluée par 77 % (63 %) et la fermeture de la "jungle" de Calais accueillie favorablement par 66 % (42 %).

ET ÇA VOUS ÉTONNE ? QUEL EST LE PÈRE QUI REFUSERA TOTALEMENT DE FAVORISER SON REJETON POUR UNE PLACE "HONORIFIQUE", MÊME S'IL EST TROP JEUNE ?

Nourrir la planète en 2050, un défi déjà d’actualité

La faim continue de progresser dans le monde. Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) – qui organise, vendredi 16 octobre, la Journée mondiale de l'alimentation sur le thème de la "sécurité alimentaire en temps de crise" –, la barre du milliard de personnes souffrant de sous-nutrition a été franchie en 2009.
Et ce phénomène risque de s'aggraver encore, notamment à cause de l'augmentation démographique. Selon les projections des Nations unies, le monde devrait compter 9,1 milliards d'habitants en 2050, contre 6,8 milliards aujourd'hui. Soit 34 % de bouches à nourrir de plus.

Pour anticiper ce choc, la FAO a réuni à Rome, les 12 et 13 octobre, près de trois cents universitaires, chercheurs ou responsables d'organisations non gouvernementales, à l'occasion d'un forum d'experts de haut niveau intitulé Comment nourrir le monde en 2050. Une question qui suscite un certain nombre de débats.

Quels aliments dans les assiettes en 2050 ?

L'évolution des comportements alimentaires aura un impact sur les besoins futurs en matières premières agricoles. "Sous l'effet des hausses de revenus et de l'urbanisation croissante des populations, l'ensemble des experts réunis à Rome s'accordaient sur le fait que les régimes alimentaires allaient évoluer", précise Hafez Ghanem, le sous-directeur général de la FAO chargé du département économique et social.

Si les céréales (blé, riz, maïs…) restent la principale composante des régimes alimentaires, la consommation de viande a tendance à croître fortement. Notamment dès qu'un pays voit son niveau de vie progresser. Entre 1970 et aujourd'hui, la consommation de viande est ainsi passée de 25 kg par personne et par an à 38 kg, sous l'impulsion d'abord des pays développés, mais aussi de la Chine et de certains pays d'Amérique du Sud.

Ces conversions à des régimes carnés accroissent encore les besoins en matières premières agricoles : en tenant compte de l'alimentation des bêtes, il est généralement admis qu'il faut 4 calories végétales pour produire 1 calorie animale dans le cas du porc ou du cochon ; un ratio qui monte à 11 calories végétales pour le bœuf ou le mouton.

Une étude prospective réalisée conjointement par l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et le Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement (Cirad), présentée le 7 octobre, estime que la planète serait capable de nourrir tous ses habitants en 2050, sans mettre en péril l'équilibre environnemental de la planète, en associant une réduction des gaspillages et une rupture des habitudes de consommation.

Les "disponibilités alimentaires" par habitant seraient alors ramenées à 3 000 calories par jour, dont 500 d'origine animale, contre environ 4 000 actuellement dans les pays développés, dont plus de 1 000 issues de la viande ou du poisson.

Augmentation des rendements ou hausse des surfaces cultivées?

La FAO, dans un rapport publié fin septembre, estime qu'il faudra augmenter de 70 % la production agricole de la planète pour répondre, en 2050, aux besoins alimentaires de tous ses habitants. Cela sans tenir compte de l'essor des agrocarburants, qui entraînera des besoins encore plus importants.

Pour y parvenir, deux solutions : améliorer les rendements des productions ou accroître les surfaces cultivées.

Aujourd'hui, environ 1,5 milliard d'hectares, soit environ 10 % des terres émergées, sont cultivés. Quelque 2,7 milliards d'hectares pourraient l'être également. Problème, comme le note la FAO : ces surfaces se situent pour la plupart en Amérique latine et en Afrique subsaharienne et ont "d'importantes fonctions écologiques".

L'agence des Nations unies préfère donc miser sur une intensification des modes de production, qui devrait permettre de couvrir, selon elle, 90 % des nouveaux besoins. Et ce même si la croissance des rendements a considérablement ralenti, ces dernières années, dans de nombreux pays. Pour les céréales, ce taux de croissance est ainsi passé, selon la FAO, de 3,2 % dans les années 1960 à 1,5 % dans les années 2000.

"Il y a encore des marges de manœuvre, car les écarts de rendement sont très importants entre les régions du monde, estime Bernard Bachelier, directeur de la Fondation pour l'agriculture et la ruralité dans le monde (FARM). Cela passe beaucoup par une meilleure gestion de l'eau, mais aussi par les nouvelles technologies ou l'amélioration génétique continue." Et de souligner l'importance des investissements de proximité à réaliser dans les pays du Sud, pour aider les petits paysans.

Des investissements qui n'ont pas cessé de diminuer depuis presque trente ans: alors même que 18 % de l'aide publique au développement était destinée à l'agriculture en 1980, cette part ne s'élève plus aujourd'hui qu'à 5 % environ.

Quels modèles d'échanges commerciaux ?

Le sujet est largement débattu actuellement, notamment en perspective de la reprise prochaine des négociations à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), en vue d'une nouvelle phase de libéralisation des échanges. Certains plaident pour davantage d'ouverture; d'autres mettent en avant la notion de "souveraineté alimentaire" d'un pays ou d'une région, et poussent à développer des cultures vivrières plutôt qu'exportatrices.

"Il est très probable que l'on aura encore un fort besoin d'échanges, avec des régions très importatrices et d'autres très exportatrices, estime Patrick Caron, un des directeurs scientifiques du Cirad. Mais, dès lors que l'on introduit les questions de sécurité alimentaire et d'environnement, revient la question de la régulation du marché."

La question de la sécurité alimentaire se pose dès à présent. La FAO y consacrera un sommet mondial du 16 au 18 novembre.
Clément Lacombe

France Télévisions doit se mettre au régime

Dans un rapport corrosif, la Cour des comptes souligne qu'en contrepartie du soutien financier de l'État, le groupe audiovisuel français doit s'attaquer à deux gisements d'économie : l'information et les programmes.

C'est un rapport qui enfonce un coin dans la réforme de France Télévisions. Depuis l'adoption de la loi du 5 mars 2009 et la renégociation du plan d'affaires 2009-2012 entre le groupe audiovisuel public et l'État, tout semble sur les rails. Mais la Cour des comptes, dans un rapport de 222 pages intitulé «France Télévisions et la nouvelle télévision publique», demande que l'on aille plus loin dans les économies. «Aide-toi, l'État t'aidera», dit en substance le rapport.

Examinant la période 2005-2008, l'institution présidée par Philippe Séguin pointe «l'instabilité chronique du pilotage stratégique» qui fait de France Télévisions un groupe incohérent. La Cour questionne même la stratégie d'un «bouquet offensif» de cinq chaînes (France 2, France 3, France 4, France 5 et RFO). Aujourd'hui, France Télévisions est, selon le rapport, une «entreprise fragilisée» tout à la fois par la baisse de son audience de cinq points en quatre ans, par une situation financière préoccupante fin 2008 (perte de 138 millions d'euros sans prévision de retour à l'équilibre avant 2011) et par une refonte de ses missions et de son organisation.

Objectifs contradictoires

Selon la Cour, la réforme de 2009 n'a pas levé toutes les ambiguïtés. Avant, France Télévisions devait répondre à trois objectifs contradictoires : offrir des programmes différents de ceux du privé, augmenter son audience et soutenir la production audiovisuelle privée. Après, une contradiction demeure : il faut soutenir la production privée tout en trouvant un équilibre financier.

À l'examen des comptes, la Cour souligne que les dérives financières du groupe audiovisuel datent de 2007, soit avant l'annonce de l'arrêt de la publicité. Mais, depuis l'an­nonce du 8 janvier 2008, le trou s'est accentué. Certes, l'État a garanti une compensation financière du manque à gagner (150 millions d'euros en 2008, 450 millions en 2009 puis 650 millions après l'arrêt total de la publicité en 2012). Mais la Cour presse le groupe dirigé par Patrick de Carolis de tout faire pour accélérer le retour à l'équilibre. Elle a été en partie entendue puisque 70 des 100 millions d'euros de surplus publicitaires de 2009 resteront dans les caisses de France Télévisions.

Mais il reste encore deux gros gisements d'économie. «France Télévisions doit impérativement réaliser des synergies sur deux centres de coûts importants : l'information et les programmes.» Deux sujets pudiquement mis sous le boisseau par la réforme. Pour apaiser les tensions, les politiques ont décidé qu'il n'y aurait pas de fusion des rédactions. Or l'information représente un tiers du coût de grille (557 millions d'euros) et mobilise 45 % des effectifs du groupe, soit 4 987 équivalents temps plein selon les estimations de la Cour. Le tout pour une audience qui ne cesse de s'éroder. Sans préconiser la fusion des rédactions, la Cour recommande «d'étendre la mutualisation de l'information». L'autre sujet qui fâche est celui des programmes. Là encore, les politiques poussent France Télévisions à soutenir la création audiovisuelle. Mais la Cour souligne que ce système favorise plus les producteurs que France Télévisions. Le rapport pointe de graves lacunes dans l'analyse des devis des programmes, la transparence des achats et le contrôle des coûts.

» Le plan de départs à la loupe

» DOCUMENT - Le rapport de la cour des comptes

La Cour des comptes européenne au secours des producteurs de lait

La Cour des comptes européenne est venue jeudi à la rescousse des producteurs laitiers en colère et a infligé un camouflet à Bruxelles en dénonçant la libéralisation de l'agriculture dans l'UE qui comporte des risques jugés "majeurs".

Dans un rapport, la Cour des comptes de l'Union européenne a jugé nécessaire de "continuer à superviser l'évolution du marché du lait et des produits laitiers pour éviter que la libéralisation du secteur ne conduise à la réapparition d'une situation de surproduction".

Cette libéralisation, qui aboutira en 2015 à la suppression des quotas de production introduits en 1984 pour limiter les volumes, présente des "facteurs majeurs" de risque, a averti lors d'une conférence de presse jeudi 15 octobre le juge Julius Molnar. Il s'agit notamment de la volatilité des prix qui peut "recréer rapidement des excédents importants".

Et "l'accélération de la restructuration" du secteur présente le "risque d'une concentration géographique toujours accrue de la production et la disparition d'un très grand nombre de producteurs" dans les zones rurales défavorisées, a-t-il estimé. "A défaut, l'objectif de la Commission (européenne) de s'en tenir à un niveau de régulation minimal, du type filet de sécurité, pourrait rapidement s'avérer impossible à respecter", met en garde la Cour.

Elle critique ainsi de manière à peine voilée les réformes européennes du marché du lait menées sous l'impulsion de Bruxelles. Celles-ci prévoient, outre la suppression des quotas pour libéraliser le secteur en le faisant dépendre de la loi de l'offre et de la demande, de restructurer le secteur en encourageant les reconversions d'agriculteurs.

Les quotas laitiers ont jusqu'ici "limité efficacement la production", note la Cour, même si leur niveau a été "trop élevé" pour empêcher les excédents. Pour autant, "il serait inapproprié pour la Cour de dire que les quotas devraient être maintenus, même si c'était son point de vue", a souligné Edward Fennessy, expert agricole à la Cour.
Bruxelles refuse toujours de maintenir les quotas

Ces remarques vont dans le sens de la campagne menée depuis plusieurs mois par les producteurs de lait européens. Confrontés à un effondrement des prix, ils réclament un retour à la limitation administrative des quantités de lait produites pour y remédier. La chute des tarifs, qui menace aujourd'hui l'existence de nombreuses exploitations, est dû en effet selon eux à une surproduction, imputable à la dérégulation progressive du secteur.

"Ce rapport est une contribution au débat, mais nous n'en partageons pas toutes les conclusions", a rétorqué le porte parole de la commissaire à l'Agriculture, Mariann Fischer Boel. A ses yeux, il n'y a pas surproduction mais simplement une baisse conjoncturelle de la demande de produits laitiers liée à la crise économique. Et elle refuse de maintenir mes quotas, qui en attendant leur disparition à terme, sont augmentés d'année en année.

La publication de ce rapport vient jeter de l'huile juste avant une réunion lundi à Luxembourg des ministres de l'Agriculture européens où doivent être décidées des mesures d'urgence en faveur du secteur. Les Européens sont divisés. La présidence suédoise de l'UE, le Danemark ou la Grande-Bretagne, pays traditionnellement libéraux, plaident pour la stricte poursuite de la dérégulation du secteur.

Face à eux, la France et l'Allemagne sont parvenus à constituer un front de 21 pays qui réclament la mise en place d'un "cadre régulatoire". Ils réclament aussi une aide supplémentaire de 300 millions d'euros en faveur des producteurs en 2010. Ces derniers maintiennent pendant ce temps la pression. Ils promettent d'être "plusieurs milliers" à Luxembourg.

Les fondateurs de Skype déposent un recours contre le futur acquéreur

Les fondateurs de l'opérateur de télécoms sur internet Skype ont déposé un recours en justice contre de futurs acheteurs pouvant conduire à un blocage de la vente du groupe, rapporte jeudi le Wall Street Journal.

Début septembre, eBay, la maison mère depuis 2005, avait annoncé la cession de 65% de Skype pour 1,9 milliard de dollars à un consortium d'investisseurs.

Dans leur recours, les fondateurs, Niklas Zennstro et Janus Friis, mettent en cause Mike Volpi, ancien directeur exécutif d'une société de vidéo en ligne leur appartenant, et travaillant actuellement pour le fonds londonien Index Ventures, membre du consortium d'investisseurs.

Les fondateurs de Skype l'accusent d'avoir glané, lorsqu'il travaillait pour eux, des informations confidentielles sur le logiciel et de les utiliser dans l'offre de rachat.

Les plaignants ont demandé au tribunal d'instance du Delaware (nord-est) de se saisir du dossier, et d'empêcher M. Volpi et Index Ventures de participer au rachat jusqu'à ce que l'affaire soit résolue.

Les fondateurs ont par ailleurs un autre procès en cours. Ils avaient annoncé mi septembre qu'ils poursuivaient Skype et ses futurs acquéreurs pour violation de son code source, réclamant des dommages et intérêts s'élevant à 75 millions de dollars par jour.

Carrefour vend ses activités en Russie

Le groupe français de distribution Carrefour, numéro deux mondial, a annoncé jeudi son intention de vendre ses activités en Russie "en l'absence de perspectives de croissance organique suffisantes" et "d'opportunités de croissance externe".

Cette décision s'inscrit "dans la stratégie du groupe qui consiste à bâtir des positions de leadership de nature à assurer une croissance forte et pérenne de ses résultats", explique le communiqué du groupe mondial de distribution publié jeudi 15 octobre. Carrefour est présent en Russie depuis 2008 et y exploite deux supermarchés, à Moscou et Krasnodar, rappelle-t-il.

Carrefour avait démenti la semaine dernière des informations de presse selon lesquelles il envisageait "la cession de ses activités dans les marchés en croissance", soulignant que le Brésil et la Chine en particulier restaient des priorités. Le quotidien Le Monde avait affirmé que "la cession des implantations en Amérique latine" était "une piste sérieusement envisagée" et que la "vente en bloc des +pays émergents+", que le quotidien avait évoquée dans un premier temps, était "écartée".

Carrefour a par ailleurs annoncé jeudi un chiffre d'affaires en baisse de 2,9% à 24,02 milliards d'euros au troisième trimestre, mais s'est dit "en bonne voie pour atteindre les objectifs 2009".

Autre annonce en interne, selon le site des Echos : Guillaume Vicaire, 40 ans, est nommé à la tête des quelque 200 magasins de l'Hexagone. Il succède à Alain Souillard moins de deux ans après la nomination de ce dernier à un poste crucial.

Les (bonnes?) idées vertes : promenades flottantes à New York

L'an 2000, vu des années 80, paraissait lointain et futuriste. Aujourd'hui, 2023, c'est demain. Pourtant, il y a fort à parier que nos modes de vies seront radicalement différents...
Quand les promenades flottantes auront remplacé Central Park...

Le designer américain Brian Novello vient de dévoiler son projet pour étendre de futures stations modulables d’énergie marine à Manhattan.
Ces stations hydroélectriques, censées fournir une partie des besoins énergétiques de l’île (si le projet voit le jour) grâce à de grosses turbines alimentées par le courant, seraient incorporées à un réseau de passages couverts flottants. Dans le prolongement de la jetée, ces tubes jaunes assemblés les uns aux autres tels des Legos, ne seraient pas statiques. Ils resteraient souples pour optimiser la prise aux vagues. Cet assemblage aux couleurs vives, qui tranchera certainement avec l’atmosphère un peu grise des docks newyorkais, pourrait former un véritable parcours sur l’eau, qui parsemé d’espaces verts, constituerait un lieu de retraite agréable, loin des rues bruyantes du centre de la ville.

Pour vous faire une idée, regardez la vidéo du projet
Où irons-nous en 2023?

A quoi ressembleront les vacances dans les prochaines décennies ? C’est la question posée par le site Forum for the Future et ses associés, divers voyagistes (dont Thomas Cook), pour réaliser le projet Tourism 2023. Le point de départ : plusieurs scénarios futuristes combinant à chaque fois trois facteurs : les évolutions de population, le réchauffement climatique et le prix du pétrole. Présentés lors de la Conférence sur le climat de Barcelone le 8 octobre dernier, ces scénarios ont pour but d’essayer de créer et de faire partager une vision dans laquelle les voyages seraient au service de l’environnement, de l’économie (bien évidemment !) et du client. Ces quatre histoires prévisionnelles ont été mises en image par des étudiants du Goldsmith College, à Londres, et sont visibles sur le site de l’évènement.

Et si demain les nouvelles technologies nous permettaient d’aller plus vite, plus loin, plus souvent ? La réponse en image...


Ou plutôt, imaginons un futur où voyager au delà des océans serait mal vu, à cause de la pollution atmosphérique et des déséquilibres économiques engendrés par ce tourisme « chez les pauvres », et où , les voyageurs seraient très exigeants vis-à-vis de leur destination de vacances… et prendraient un engin appelé hydro express…

Faire de l'eau avec du vent

Une jeune PME française, Eole Water , vient de breveter son dispositif éolien de production d’eau par condensation, sans rejet de CO2, qui génère également de l’électricité, après dix ans de recherche. Comment ? Car l’air contient de l’eau à l’état gazeux, dont la quantité dépend à la fois de la température ambiante, et du taux d’humidité relative. Son modèle d’éolienne mobile, le "WMS 500", haut de 14 mètres et muni d'une turbine de 8,5 mètres, produirait 514 litres d'eau en 24 heures dans des conditions normales. La jeune société cherche aujourd’hui des partenaires financiers pour lancer l’industrialisation de ce produit, dont le potentiel commercial pourrait être énorme : il y a autant d’eau douce sous forme de vapeur d’eau dans l’air, que d’eau sur terre à l’état liquide...Si leur projet est ingénieux, les ingénieurs Eole Water ne sont pas les premiers à en avoir eu l’idée. Les néerlandais Dutch Rainmaker (« créateurs d’eau ») avaient mis au point un prototype, installé à Wetsalt en Allemagne, capable de produire 500 litres d’eau potable par jour.

Faire payer les banques, une idée qui gagne du terrain

La Commission des finances de l'Assemblée nationale a voté mercredi un amendement pour créer une taxe additionnelle de 10% sur les banques. Elle veut faire payer aux banques le mécanisme assurentiel dont elles ont profité pendant la crise.
Les banques françaises ont pu compter sur l'Etat pour les aider à surmonter la crise. Les pouvoirs publics pourraient-il leur faire payer l' addition un an après? Mercredi, la Commission des finances de l'Assemblée nationale a voté un amendement pour créer une taxe additionnelle à l'impôt sur les sociétés sur les établissements financiers. Cette sur-taxe aurait vocation à se pérenniser dans le temps et serait fixée à 10%. Selon les estimations de la Commission des finances, elle pourrait rapporter chaque année aux alentours de 2 milliards dans les caisses de l'Etat.

Pour la gauche, cela semble évident, il faut faire payer aux banques le mécanisme assurentiel dont elles ont profité pendant la crise. "L'Etat ayant joué un rôle d'assureur de dernier ressort au cours de la crise bancaire de l'automne 2009, il est normal qu'il reçoive une contrepartie de cette couverture exceptionnelle en faveur de l'intérêt général", explique Didier Migaud, le président de la Commission et auteur de l'amendement. Pour le député PS, l'idée n'est d'ailleurs pas nouvelle. Il y a un an déjà, il publiait un essai dans lequel il développait l'intérêt de taxer d'avantage les banques. "Les actionnaires privés ne doivent pas être systématiquement mis à l'abri des défaillances, mais en payer le prix, contrairement par exemple aux clients ; en majorité modestes ; des banques de détail. C'est d'ailleurs l'une des critiques fortes que l'on peut adresser au plan de recapitalisation des banques", écrivait-il alors.

Le moment est des plus approprié pour relancer le débat d'une surtaxe sur les banques. Un an après la mise en place du plan de soutien, les banques semblent s'être données le mot pour rembourser les 19,8 milliards qu'elles doivent à l'Etat. Dernière en date le Crédit Agricole a annoncé mercredi qu'elle restituerait dans les 15 jours les 3 milliards d'euros de titres hybrides souscrits par l'Etat. L'Etat n'en sortira d'ailleurs pas perdant : au total, ce sont environ 2 milliards d'euros qui vont rentrer en supplément dans les caisses de Bercy. Mais cette somme est insuffisante pour de nombreux membres de l'opposition qui dénoncent le mécanisme des actions de préférence remboursable à un prix fixe. Selon eux, si l'Etat s'était comporté en véritable actionnaire, avec droit de vote, il aurait pu récupérer 5,8 milliards uniquement grâce au remboursement des titres BNP."Une générosité coupable", dénonce alors Didier Migaud, qui s'appuie sur les exemples américain et suisse dans lequel l'Etat est parvenu à gagner des milliards en revendant les actions des banques aidées.

Une idée qui fait école

Par ailleurs, l'opposition a pour elle un précédent qui pourrait faire école en Europe. La semaine dernière, l'Etat belge annonçait la mise en place d'une taxe qui grèvera les dépôts bancaires et les placements en assurance vie à remboursement garanti. A partir de 2012, les banques, Fortis BNP en tête, mais aussi les société de bourse et les compagnies d'assurance en seront redevables à hauteur de 540 millions d'euros par an.

De leur côté, les banques françaises s'abstiennent de tout commentaire à l'égard de la proposition de l'opposition. Elles soulignent néanmoins que la situation décrite par Didier Migaud n'a rien à voir avec ce qui s'est passé par exemple en Belgique. "Les banques françaises n'ont jamais été au bord de la faillite. Le plan de soutien au secteur avait pour seul vocation de stabiliser les encours de crédit et cela a fonctionné", rappelle-t-on au sein de l'une d'entre elle.

Si cet amendement était voté par l'assemblée, certains député UMP de la Commission des finances s'étant eux-même déclaré en faveur de la mesure, il posera nécessairement la question de la compétitivité des banques françaises par rapport aux banques étrangères. Au bout du compte, c'est le client qui pourrait finir par payer.

Malgré Internet, les Français continuent de sortir

Un rapport établit nos habitudes culturelles à l'ère du numérique. Le cinéma est roi, les expositions et le théâtre se portent bien, mais la lecture baisse.
Qui sort et où ? La télévision a-t-elle été détrônée par l'ordinateur ? Quelle proportion de Français lit ? Depuis 1973, le ministère de la Culture sonde les foyers français pour établir un panorama des pratiques culturelles.

La dernière enquête datait de 1997, époque où on achetait encore des CD, où il n'y avait ni YouTube, ni Google, et tout juste le téléphone portable. Douze ans plus tard, le paysage a drastiquement changé. Les magnétoscopes ont disparu, l'ordinateur s'est invité dans plus de 80 % des familles et les téléphones multimédias permettent de naviguer entre culture, divertissement et communication personnelle.

Or, si «la montée en puissance de la culture écran » a changé le paysage culturel, elle n'en a pas étouffé la pratique. Ainsi, la fréquentation d'une salle de cinéma, de théâtre, d'un musée ou même la lecture croissent avec la fréquence des connexions Internet. Jusqu'à un certain degré, situé à quatre heures par jour, plus on est rivé sur son écran, plus on sort !

• Moins de télévision et de radio chez les jeunes

Le temps moyen passé devant la télévision reste stable, à vingt et une heures par semaine. Mais entre Internet et la télévision, il y a un phénomène de vases communicants. Plus on passe de temps devant ses jeux vidéo - comme les 15-24 ans et les hommes -, moins on regarde la télé. Les plus de 45 ans, et a fortiori les plus de 60 ans, moins concernés par l'avènement du numérique, passent, eux, de plus en plus de temps devant les programmes télévisés.

Côté radio, l'écart générationnel se creuse d'année en année. La part des 15-24 ans qui écoutent la radio tous les jours ou presque a drastiquement diminué, au profit de l'écoute en ligne. En revanche, les 65 ans et plus sont de plus en plus nombreux à être fidèles à leur poste.

• Des nouvelles préférences musicales

La population «vit désormais dans un bain musical plus ou moins permanent ». Mais, là encore, il se crée un gap entre les générations : plus on est jeune, plus la préférence pour la musique anglo-saxonne, r'n'b, techno en tête, est marquée. Le classique fait pâle figure et perd du terrain, ignoré des moins de 45 ans. Les classes sociales s'affrontent ; le rock, qui a considérablement modifié les «contours de la mélomanie », a ses lettres de noblesse chez les diplômés, mais pas dans les milieux ouvriers.

• Le cinéma fédère

57 % des Français sont allés au moins une fois au cinéma dans les douze derniers mois, 90 % d'entre eux ont un magnéto­scope ou un lecteur de DVD. Toutes les classes d'âge et tous les milieux sociaux sont concernés. Les films comiques arrivent toujours en tête des genres préférés (44 %), suivis des films d'action, puis des films policiers. Les moins de 35 ans favorisent ­nettement les films américains, tandis que le cœur des plus de 45 ans penche nettement en faveur de la production française.

• Musées, concerts et théâtres séduisent les Parisiens

Depuis douze ans, les sorties et les visites culturelles sont stables. Les Parisiens intra-muros, gâtés par une offre très abondante, sont les premiers à se rendre au cinéma, dans un musée ou au théâtre (60 %). Ils sont d'ailleurs les seuls à se rendre plus souvent dans un musée (65 % contre 30 %) et au théâtre (56 % contre 19 %) en 2008 qu'ils ne le faisaient en 1997. Ce dernier genre, que l'on croyait en panne, résiste : 13 % des Français de plus de 15 ans sont allés une ou deux fois au théâtre dans l'année, contre 9 % il y a douze ans. Le succès des one-man-show et des comiques y serait pour beaucoup.

• Le livre perd des points

De plus en plus de Français ne lisent aucun livre dans l'année. La proportion de «non-lecteurs » atteint 30 %, et ceux qui lisent peu lisent de moins en moins d'ouvrages. De fait, chaque génération lit moins que la précédente. L'honneur du livre est sauvé en partie par les femmes (34 % ont lu dix livres ou plus dans les douze derniers mois). Conséquence logique de la baisse de la lecture : les bibliothèques souffrent.

» VOTRE TEMOIGNAGE - Dans quelle mesure l'ère du numérique s'est-elle installée au sein de votre foyer ? Au cours des dernières années, pensez-vous avoir délaissé certaines activités culturelles et artistiques au profit de la révolution Internet ?


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» DOCUMENT - L'étude du ministère de la culture (en pdf)

Internet bouscule les choix culturels des Français

Les milieux culturels risquent de prendre comme un choc les 280 pages d'une enquête menée par Olivier Donnat, sous le titre Les Pratiques culturelles des Français à l'ère numérique, dévoilée par le ministère de la culture, mercredi 14 octobre. Dans quelle mesure les Français vont-ils au théâtre ou au musée ? Lisent-ils toujours des livres et lesquels ? Regardent-ils encore beaucoup la télévision ? Comment va-t-on au cinéma ou au concert selon que l'on est un homme ou une femme, jeune ou vieux, riche ou pauvre, parisien ou provincial ?La première étude de ce genre date de 1973. D'autres ont suivi en 1981, 1988 et 1997. Il a donc fallu attendre onze ans avant que ne soit réalisée cette enquête 2008. Un travail d'autant plus attendu qu'entre-temps les ordinateurs et Internet ont débarqué en force dans les foyers. "En 1997, à peine un ménage sur cinq disposait d'un ordinateur, et la proportion d'internautes dans la population française était inférieure à 1 %", écrit Olivier Donnat, auteur de cette étude, comme de celles de 1988 et 1997. Aujourd'hui, 83 % des gens ont un ordinateur à la maison. Hors scolarité et travail, deux internautes sur trois se connectent pendant douze heures en moyenne par semaine. Les pratiques culturelles des Français s'en trouvent évidemment modifiées.

Une nouvelle culture de l'écran . Pendant des décennies, analyse Olivier Donnat, la télévision fut un repère. Les analystes opposaient une culture domestique - les classes modestes qui regardent massivement la télévision à la maison - à une culture de sortie - les classes moyennes et supérieures qui vont au concert ou au théâtre. Plus on regarde la télévision, moins on sort. Et moins on se "cultive".

L'arrivée massive de nouveaux écrans aurait pu intensifier ce "repli sur l'espace domestique", dit Olivier Donnat. Il n'en est rien, au contraire. Une nouvelle culture de l'écran est apparue, qui bouscule le vieux postulat. Les internautes qui vont tous les jours sur la Toile sont ceux qui vont le plus au théâtre, au cinéma, lisent plusieurs livres. Et même si globalement, les jeunes générations, souvent "numérisées", vont moins au théâtre ou au musée, les baby-boomers compensent, écrit Olivier Donnat.

Alors, l'ordinateur au secours de la culture ? Pas si simple. Un jeune passe en moyenne deux heures par jour sur Internet. Jusqu'à quatre heures, il continue de sortir beaucoup. Au-delà de cinq heures passées devant l'écran, il va moins au cinéma, moins au musée, moins au théâtre. Le temps n'est pas extensible, même si les jeunes d'aujourd'hui, pour faire plus de choses, dorment moins qu'auparavant.

Cette nouvelle culture de l'écran sert aussi à se cultiver chez soi : beaucoup écoutent des CD sur l'ordinateur (51 %), téléchargent de la musique (43 %), regardent des DVD et des films téléchargés, etc. Ce tandem ordinateur-sorties fait toutefois des victimes : les pratiques domestiques, et d'abord la télévision. Mais aussi la radio, la lecture des livres et des journaux, ou encore la fréquentation des bibliothèques. Avec, comme souvent, les 15-24 ans en éclaireurs.

Effet générationnel. C'est nouveau et c'est lié à la culture de l'écran : l'effet générationnel joue plus que l'âge dans les pratiques culturelles. Autrement dit, ce que l'on fait à 20 ans, on le fait toujours à 40 et ce qu'on ne fait pas à 20 ans, on ne le fait pas non plus à 40. "C'est vrai pour la lecture d'un livre ou d'un journal", explique Olivier Donnat. Vrai pour la musique classique, que les jeunes ont abandonnée. Vrai pour le rock, qui ne perd pas son public, mais attire de plus en plus des gens mûrs et aisés. Et pour le cinéma ? La fracture est forte entre les jeunes qui plébiscitent les séries et films américains, et les seniors qui optent pour les films français. Ainsi, suivant le principe générationnel, Olivier Donnat trouve "plausible" que dans vingt ans la part de marché du cinéma français - 50 % environ - plonge fortement.

Quelle influence du piratage ? Le piratage des films et des musiques fait partie de cette nouvelle culture de l'écran. Parce que l'acte est illégal, la question a dû être évacuée du sondage et donc de cette étude. Les chiffres montrent que le téléchargement illégal des films n'altère pas, pour l'instant, la fréquentation des cinémas. Selon Olivier Donnat, l'acte d'achat (ou de piratage) d'un film ou d'une musique, à usage domestique, n'a pas d'effet sur l'acte de sortie - aller au cinéma ou au concert. En revanche, la location et l'achat de DVD souffrent. Et les ventes de CD, comme on le sait, sont sinistrées.

Moins de gros consommateurs. Peut-être est-ce un effet de la nouvelle culture d'écran : la multiplication des pratiques, à la maison et à l'extérieur, provoque un émiettement de la consommation culturelle. Et donc une baisse du nombre de gros consommateurs de films ou de livres.

La tendance, il est vrai, était déjà constatée lors des précédentes études. Au cinéma, la fréquentation occasionnelle a augmenté entre 1997 à 2008. Mais elle flanche chez ceux qui se rendent en salle plus de douze fois par an, plus particulièrement les jeunes : leur proportion passe de 33 % à 29 % des 15-24 ans, et de 18 % à 15 % des 25-34 ans.

C'est encore plus vrai avec les livres et journaux. Les moyens et surtout forts lecteurs de livres sont en recul, de 19 % à 17 % de la population. Cette tendance, particulièrement nette chez les jeunes (- 5 points), connaît une exception : les 55-64 ans (+ 2 points). Au total, le livre assiste à un glissement progressif de la catégorie des forts lecteurs vers celle des lecteurs occasionnels, et de cette dernière vers les non-lecteurs.

Le même phénomène se retrouve dans tous les secteurs. La part de visiteurs réguliers est passée de 9 % à 7 % dans les bibliothèques et médiathèques, de 24 % à 22 % dans les lieux de spectacle vivant, de 25 % à 22 % dans les lieux d'exposition et de 18 %
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Michel Guerrin et Nathaniel Herzberg

Echec culturel

Tout ministre de la culture, à peine nommé, n'oublie jamais de citer, parmi ses priorités, la démocratisation de l'accès aux oeuvres culturelles. Autrement dit, que les livres, théâtres, opéras ou musées ne soient pas monopolisés par les gens diplômés, riches et habitant dans les grandes villes. Une enquête sur les pratiques culturelles des Français vient d'être rendue publique. En matière d'accès à la culture, les résultats sont cinglants pour l'action de l'Etat, mais aussi pour les collectivités locales.
La situation, en effet, a empiré par rapport aux enquêtes similaires de 1988 et 1997. Hormis le cinéma, l'art le plus démocratique, les gens modestes abandonnent toujours plus les pratiques et désertent les lieux culturels. La lecture est le domaine le plus alarmant. Les non-lecteurs chez les ouvriers ont augmenté de façon spectaculaire. L'autre échec est lié à l'aménagement du territoire. En dix ans, le fossé s'est creusé entre les Parisiens, toujours plus consommateurs de culture, et les "provinciaux", qui le sont de moins en moins.

Il est vrai que la puissance des industries culturelles, les évolutions techniques, les mouvements démographiques, les tendances sociétales pèsent plus lourd que l'action publique dans la façon dont une nation s'empare ou non de son offre culturelle. Et la situation serait sans doute plus grave si l'Etat n'avait rien fait. Il faut, par exemple, saluer le mouvement de construction de bâtiments culturels - musées, salles de concerts, théâtres, bibliothèques - lancé depuis le début des années 1980, notamment sous l'impulsion du tandem François Mitterrand - Jack Lang. Ou encore la mesure récente offrant aux jeunes un accès gratuit dans les musées.

Il n'empêche : en matière de culture, offrir plus ne suffit pas à élargir la demande. Les spécialistes savent que cette politique profite surtout aux mordus de théâtre ou d'art. En fait, l'Etat ne s'est jamais vraiment donné les moyens de toucher les exclus de la culture. Ses actions envers les adultes sont sans cesse rognées. Et la sensibilisation des jeunes à l'école reste un serpent de mer.

Le ministère de la culture a l'image d'une forteresse repliée sur les "beaux-arts", déconnectée du large public imprégné par la culture d'écran. Ainsi, l'Etat aurait dû s'emparer, très vite, du problème du piratage des musiques, en poussant les majors du disque à offrir une riche offre légale sur le Net. Il ne l'a pas fait. Mais, hors la défense du droit d'auteur, peu de responsables du ministère de la culture semblent s'occuper des nouveaux médias.
(Illustration non contractuelle.)

INTERNET- L'écran : toute une nouvelle culture

La généralisation d'internet depuis 10 ans a modifié les conditions d'accès à la culture des Français, qui continuent néanmoins à fréquenter en masse les cinémas, les théâtres ou les musées. L'évolution des pratiques culturelles se fait en revanche au détriment de la lecture ou de la télévision chez les jeunes

(Rédaction internationale) - Douze ans après le dernier rapport, le ministère de la Culture a dévoilé les résultats de son enquête* sur les pratiques culturelles des Français. En 1997, seuls 1% des foyers avaient Internet, le téléphone portable était balbutiant et l'on achetait encore des CD. Aujourd'hui, à l'ère du numérique, tout a changé.
Si dans les années 1990, les pratiques de l'écran se limitaient à la consommation de programmes télévisés, les Français consacrent aujourd'hui environ 10 heures par semaine aux écrans (AFP) hors programmes télé. Plus de la moitié des Français utilisent aujourd'hui Internet quotidiennement en dehors de leurs obligations professionnelles. Et il y a un phénomène de vases communicants entre le web et la télé. Le temps moyen passé devant la télévision (21 heures par semaine) reste stable car les séniors, eux, restent fidèles à leurs programmes de télé préférés. Mais pour la première fois, le temps que les Français lui consacrent a cessé d'augmenter, et il a même diminué chez les jeunes. Les plus jeunes et les plus diplômés sont les plus assidus devant les écrans, et les hommes délaissent plus la télé que les femmes, au profit des jeux vidéo.

Les Français aiment les sorties culturelles
Malgré Internet, la fréquentation des cinémas, les concerts, les expositions ou même le théâtre ne faiblit pas. En gros, plus on aime son écran, plus on sort! Ceux qui téléchargent continuent à aller voir les films en salle. De bons chiffres surement liés au boom des multiplex, qui ont permis de récupérer un public occasionnel.

La musique est partout
Les ventes de CD sont sinistrées, mais l'écoute de la musique progresse, pour toutes les tranches d'âge. La nouvelle culture de l'écran sert aussi à se cultiver chez soi : beaucoup écoutent des CD sur l'ordinateur ou téléchargent de la musique. La radio est un média délaissé par la jeunesse, qui ignore le classique, et préfère le rap ou l'électro au rock et la pop, qui s'embourgeoisent.

La lecture en baisse
Le lectorat, des livres comme des journaux, vieillit. Chaque génération lit moins que la précédente. De plus en plus de Français (30 %) ne lisent aucun livre dans l'année. Le roman, très mal en point, est "sauvé" par les femmes (34 % ont lu dix livres ou plus dans les douze derniers mois). Conséquence logique, les bibliothèques sont moins fréquentées.

Il ressort de ce rapport que la pratique culturelle en France est encore implacablement liée aux générations, au milieu social, à l'emplacement géographique. La démocratisation de la culture reste un vœu pieux.

«Ce n'est pas mon fils qui est visé, c'est moi»

La majorité traverse une zone de turbulences. Que pensez-vous de cette détérioration du climat politique ?

Il n'est pas interdit de prendre un peu de recul. Je suis aujourd'hui à mi-mandat. Je vous invite à comparer la situation politique dans laquelle nous nous trouvons avec celle de mes prédécesseurs au même moment. En 1967, deux ans après la réélection du général de Gaulle, la majorité de l'époque ne l'emporte que d'un siège aux législatives. L'année suivante, ce sont les événements de Mai 1968. Deux ans après l'élection de Valéry Giscard d'Estaing, en 1976, il rompt avec son premier ministre Jacques Chirac. Son septennat ne s'en remettra pas. En 1983, deux ans après l'élection de François Mitterrand, c'est le tournant de la rigueur, qui se solde par l'échec de la majorité socialiste, trois ans plus tard. Deux ans après l'élection de Jacques Chirac en 1995, c'est la désastreuse dissolution. Deux après son élection de 2002, 20 régions sur 22 sont perdues par la majorité. La situation de l'actuelle majorité est bien différente puisqu'elle vient de gagner les élections européennes. Le front social est apaisé malgré une crise économique sans précédent. Quant aux élections partielles qui sont traditionnellement mauvaises pour le gouvernement en place, nous en avons gagné l'immense majorité et notre candidat David Douillet a fait 45 % au premier tour dimanche dernier. J'en tire la conclusion qu'il ne faut pas confondre le climat du milieu médiatique, qui est par construction politisé et agité avec la réalité de la société française qui attend du gouvernement qu'il apporte des solutions concrètes aux problèmes des Français : le chômage, la sécurité, l'éducation de leurs enfants, le pouvoir d'achat.

Depuis trois jours la polémique monte, y compris au sein de la majorité, sur la future élection de votre fils Jean à la tête de l'Epad. Que répondez-vous à ceux qui vous accusent de «népotisme» ?

Il y a 45 conseillers généraux dans le département des Hauts-de-Seine, élus par le suffrage universel. Ils ont tous le droit de postuler à un poste d'administrateur à l'Epad. Sauf un ! Et pourquoi ne peut-il pas ? Parce qu'il est mon fils. La présidence de l'Epad, est un poste non rémunéré. Il ne s'agit donc pas d'une prébende. C'est une élection, il ne s'agit donc pas de népotisme. A travers cette polémique, qui est visé ? Ce n'est pas mon fils. C'est moi. Ceux qui ne se sont jamais faits à mon élection et qui n'ont rien à dire sur le fond essayent d'attaquer sur tous les sujets avec une mauvaise foi et une méchanceté qui ne trompera pas les Français.

Vous avez été élu sur un certain nombre de valeurs : le travail, le mérite, la République irréprochable. Votre fils n'est-il pas, à 23 ans, trop jeune pour accéder à cette responsabilité ?

Y a-t-il un âge pour être compétent ? Je souhaite le rajeunissement de nos élites politiques qui ont bien vieilli. J'ai été le premier surpris lorsque Jean a voulu se lancer en politique. Mais il m'a impressionné par sa ténacité, il travaille énormément et fait face avec beaucoup de courage à la dureté et à la brutalité des attaques. J'ajoute qu'il faut avoir 21 ans pour être candidat à l'élection cantonale. Il a réussi. Une fois élu il n'a pas plus de droit qu'un autre mais pas moins non plus.

A vos yeux, l'affaire Frédéric Mitterrand est-elle désormais close ?

Je suis président de la République. Je dois défendre certaines valeurs. Je ne laisserai donc personne assimiler homosexualité et pédophilie. C'est un retour au Moyen-Age qui fait honte à ceux qui ont employé cet argument. Quand je vois le porte-parole du PS, emboîter le pas à Marine Le Pen et avec quel enthousiasme ! Je me demande où sont passées les valeurs humanistes de ce grand parti républicain. Frédéric Mitterrand n'a jamais fait l'apologie du tourisme sexuel et il l'a même condamné en termes très forts. Il ne faut pas confondre confessions intimes avec prosélytisme. Le livre est intitulé La Mauvaise Vie, c'est assez clair.

Mais Frédéric Mitterrand n'en a-t-il pas trop fait ?

Frédéric Mitterrand a reconnu que sa déclaration était une erreur et a dit qu'il la regrettait. Je ne saurais mieux dire. Je comprends que l'on soit choqué par la gravité des accusations contre Roman Polanski. Mais j'ajoute que ce n'est pas une bonne administration de la justice que de se prononcer 32 ans après les faits alors que l'intéressé a aujourd'hui 76 ans.

Depuis deux ans et demi on a tout dit sur vos relations avec François Fillon. Vous avez dit vous-même qu'à mi-mandat, la question d'un changement de premier ministre se poserait. Où en êtes-vous de votre réflexion ?

Il est normal qu'on m'interroge sur mes relations avec le Premier ministre. C'est un grand classique de la vie politique depuis le début de la Ve République. François Fillon et moi nous travaillons main dans la main. Ni lui ni moi ne nous reconnaissons dans les commentaires qui sont faits sur nos relations. Il est partie prenante à toutes les décisions. J'ai confiance en lui. Nous sommes complémentaires. Pourquoi voudriez-vous que je prenne une initiative politique, voire politicienne, qui viendrait compliquer le travail de modernisation de la France qui est déjà bien assez complexe et sur lequel je ne céderai pas.

Regrettez-vous le forfait de plusieurs ministres pour les régionales de mars ?

Un ministre, et un seul, a déclaré forfait, et je l'ai regretté. Il s'agit d'Hubert Falco. Brice Hortefeux et Roselyne Bachelot, je leur ai demandé de ne pas être tête de liste. J'ai souhaité que le ministre de l'Intérieur se consacre à 100 % à la politique de sécurité, je le dois aux Français. Je ne céderai pas un millimètre de terrain sur la question de la sécurité qui est ma priorité. J'ai en outre demandé à Brice Hortefeux de relancer avec beaucoup d'énergie la lutte contre la délinquance routière. Les assassins de la route seront réprimés avec une grande sévérité. Quant à Roselyne Bachelot, c'est une excellente ministre de la Santé et son engagement se devait d'être total face au risque de pandémie de grippe H1N1. Elle ne pouvait être candidate.

Souhaitez-vous poursuivre l'ouverture ?

Autant il convient de se méfier de la cohabitation ou des coalitions, qui favorisent les manœuvres d'appareil et le système des partis, autant je crois plus que jamais à l'ouverture. Les ministres d'ouverture font un travail formidable. Ils démontrent chaque jour que les compétences et les talents n'appartiennent pas à un seul camp. Le sectarisme est un défaut rédhibitoire. Chaque jour j'essaye de demeurer ouvert aux idées comme aux autres c'est mon devoir.

Que pensez-vous du débat sur «la cagnotte scolaire», qui choque à gauche comme à droite ?

Je veux dire ma grande réticence à envisager une récompense financière pour les élèves qui renonceraient à l'absentéisme. Je ne peux accepter qu'on puisse récompenser des élèves simplement parce qu'ils vont à l'école. En revanche je partage l'idée de Martin Hirsch de valoriser et de récompenser ceux qui font plus que leur devoir. Le mérite doit être encouragé, le non respect de la règle doit être sanctionné.

Jean-Pierre Raffarin propose une évolution vers un régime présidentiel avec raccourcissement à quatre ans du mandat présidentiel, suppression du droit de dissolution. Etes-vous d'accord avec cette idée ?

Ici aussi le débat ne me choque pas mais quatre ans, ce serait une erreur car en réalité, il n'y aurait que deux années utiles, la première année étant consacrée à l'installation et la quatrième à la campagne. Par ailleurs, je ne suis pas favorable à la suppression du poste de Premier ministre. On n'est pas trop de deux pour assumer la responsabilité d'un pays de 65 millions d'habitants. Quant à la suppression du droit de dissolution, ce serait tourner le dos à la Ve République.

Regrettez-vous d'avoir commenté l'affaire Clearstream et l'emploi du mot «coupables», lors de votre dernière interview télévisée ?

Ce que je voulais, c'est que la vérité éclate. Elle est en train d'éclater. Le mieux à faire est de laisser se dérouler ce procès, de faire confiance à la justice et de s'abstenir de tout commentaire. J'aurais été mieux inspiré de le faire dès le début.

Faut-il durcir la loi sur les multirécidivistes ?

Il est profondément anormal qu'on laisse sortir de prison des malades sans leur imposer des règles très strictes au premier rang desquels un traitement médical. J'ai demandé que passe au Parlement, dès le mois de novembre, le texte sur les délinquants sexuels. Un criminel sexuel ne devra sortir de prison qu'après exécution de sa peine, c'est bien le moins, et après s'être engagé à suivre un traitement chimique qui contiendra sa libido.

La fermeture de la jungle de Calais a été difficile. Que vous inspire l'évolution des questions d'immigration en France ?

Eric Besson a eu raison d'être déterminé. Cette situation de non droit était intolérable. Il nous reste encore une question à traiter, celle des deux ordres de juridiction administrative et judiciaire - qui ont à se prononcer sur la rétention des étrangers en situation irrégulière. A mes yeux, il n'en faut qu'un. Et s'il faut une réforme de la Constitution pour cela, nous la ferons.

Vous êtes à mi-mandat. Serez-vous à nouveau candidat en 2012 ?

C'est une question qui se posera dans le courant de l'année 2011 pas avant. Je veux faire de mon mandat cinq années utiles pour la France. J'ai à mes côtés un très bon premier ministre, un gouvernement qui fait preuve d'une grande solidarité et un parti majoritaire qui a atteint un niveau que nous n'aurions jamais imaginé, alors qu'autrefois on regardait la CDU allemande comme un géant. Je suis déterminé à me battre contre toutes les forces de l'immobilisme et de la réaction. Je veux une France compétitive, juste, moderne, de plain pied dans le XXI ème siècle. Pour la suite, en conscience, je ne suis pas encore prêt à répondre. Et croyez bien que cette réponse est sincère.

L'économie montre quelques signes encourageants. Sommes-nous en train de sortir de la crise ?

L'année dernière à la même époque, on nous prophétisait la violence dans les banlieues, l'explosion sociale et la paralysie Outre-mer. Un an après ? La France doit revoir ses prévisions de croissance à la hausse parce qu'elles étaient trop pessimistes. La France est, de tous les pays industrialisés, celui qui a le moins souffert de la crise. Nous aurons cette année une récession de l'ordre de 2 % alors que nous avions prévu 3 % et les signes de reprise sont plus marqués que partout ailleurs en Europe, comme en témoigne la hausse de 1,8 % de la production industrielle au mois d'août. Le gouvernement a géré au mieux cette crise sans précédent. Nous avons mis en œuvre un plan bancaire, un plan auto, un plan de relance qui ont été imités dans le monde entier… Cette stratégie porte ses fruits : les résultats sont là mais on ne sera sorti de la crise que quand le chômage diminuera.

Mais les déficits se creusent et la dette s'envole dans des proportions dangereuses…

D'abord, avec un déficit de 8,2 % du PIB en 2009, la France fera mieux en valeur relative que les autres pays. Ensuite, ceux qui crient le plus fort sont ceux qui ont laissé déraper les déficits pendant des années et qui, curieux paradoxe, critiquaient notre plan de relance jugé trop timide. Avec la crise, la France a perdu 57 milliards d'euros de recettes, ce qui explique la dégradation des comptes publics. Nous sommes maintenant sortis de la dépression, mais si l'on relâche nos efforts, l'économie risque de rechuter et la situation des comptes sera pire. Le G20 a d'ailleurs été unanime sur ce point : il faut soutenir la croissance. Voici la priorité. C'est ainsi que nous combattrons les déficits. Par ailleurs nous continuerons de réduire les dépenses publiques courantes. Je rappelle que nous avons diminué de 100 000 le nombre de fonctionnaires, dont le coût représente près de la moitié du budget de la France. Alors que la France avait créé un million d'emplois publics depuis 1992. Qui pourrait imaginer qu'on puisse continuer ainsi ?

Même en cas de retour de la croissance, la France ne devra-t-elle pas, tôt ou tard, se résoudre à augmenter les impôts pour combler ses déficits ?

Je n'ai pas été élu pour augmenter les impôts et je ne les augmenterai donc pas. Nous avons fait ce choix déterminé pour rompre avec une politique menée depuis vingt ans et qui a conduit à détruire des emplois en handicapant la compétitivité de notre économie. Je ne toucherai pas au bouclier fiscal car je crois au principe selon lequel on ne peut prendre à quelqu'un plus de la moitié de ce qu'il gagne. Si on laisse passer une exception, comme par exemple la CSG, ce n'est plus un bouclier. S'agissant des niches fiscales, nous verrons au cas par cas. Certaines peuvent être modifiées. Dans l'immobilier, par exemple, il n'y aura plus d'avantage fiscal si l'immeuble concerné n'est pas labellisé basse consommation.

Une majorité de Français continue de s'inquiéter de l'instauration de la taxe carbone…

Les Français ont compris que l'environnement pèse sur la santé publique, c'est donc une priorité pour notre avenir. Il y a urgence à agir pour modifier nos comportements : produire propre et consommer propre. Cette taxe sera intégralement remboursée aux ménages à l'euro près dès février prochain. Pourquoi la France sera-t-elle écoutée à Copenhague ? Parce qu'elle a été à l'initiative. Nous allons entraîner le monde entier à prendre des engagements pour protéger l'avenir de la planète. Par ailleurs, nous obtiendrons la taxe carbone aux frontières de l'Europe. Ainsi, enfin, les importations financeront notre modèle social.

La suppression de la taxe professionnelle suscite un tollé dans les collectivités locales, qui craignent de perdre des ressources financières…

La taxe professionnelle était dénoncée de toutes parts comme un «impôt imbécile», qui taxait les investissements des entreprises. Cela a conduit à des délocalisations désastreuses, qui ont ravagé nos régions. La France doit rester une terre de production et d'industrie. Nous devons garder, préserver, défendre nos emplois. Pour cela, il faut supprimer la taxe professionnelle qui n'existe nulle part ailleurs en Europe. C'est une réforme difficile, qui suscite des inquiétudes dans les collectivités, mais elle est nécessaire. Une négociation s'est engagée avec les élus et je suis sûr que nous allons trouver des solutions. Mais, au même titre que l'Etat diminue ses effectifs, il va falloir que les collectivités corrigent des mauvaises habitudes : l'an dernier, leurs effectifs ont augmenté de 36 000 personnes, alors qu'aucun domaine de compétence nouveau ne leur a été transféré.

Le déficit de la Sécurité sociale atteindra 30 milliards d'euros l'an prochain. Comment le résorber ?

Ce déficit est imputable pour les trois quarts à la baisse conjoncturelle des recettes liées à la crise, la réponse est donc dans le retour de la croissance. Par ailleurs, nous avons pris des mesures d'économies supplémentaires comme la hausse du forfait hospitalier de 16 à 18 euros. Je note que la plupart de ces mesures ont été proposées au gouvernement par les conseils des caisses gérant les différents régimes c'est-à-dire les partenaires sociaux. Ainsi, ils font preuve d'un grand sens des responsabilités.

Allez-vous modifier le régime des retraites comme vous l'aviez promis ? Seriez-vous prêt à revenir sur la retraite à 60 ans ?

Nous ouvrirons le débat sans aucun tabou, je dis bien sans aucun tabou. Il sera lancé en 2010 et nous prendrons les décisions à la fin 2010. Je ne souhaite pas prendre position avant ce grand rendez-vous, où chacun s'exprimera sans aucune idée préconçue. Mais je dis aux Français que je n'éluderai pas mes responsabilités. Je garantirai la pérennité de notre modèle social.

Pourquoi ne pas privatiser, comme s'apprête à le faire la Grande-Bretagne ?

Puisque vous parlez de la Grande-Bretagne, vous noterez que son budget était excédentaire lorsque j'ai été élu, alors que le nôtre était en déficit d'un peu moins de 3 % du PIB ; elle est aujourd'hui dans le rouge à plus de 10 % et nous de 8 %. Nous n'avons donc pas à rougir de notre situation. Nous ne nous interdisons rien en matière de privatisation, mais ce n'est pas à l'ordre du jour et ce ne serait par exemple certainement pas le meilleur moment pour vendre une partie de nos actions dans Renault…

Sur les banques, vous avez été particulièrement dur ces derniers mois. Etes-vous aujourd'hui satisfait de leur comportement ?

Les banques ont répondu à nos attentes et deviennent exemplaires. Elles ferment leurs filiales dans les paradis fiscaux et le dispositif retenu par la France pour encadrer les bonus des traders s'est imposé au reste du monde lors du G20. L'aide que leur a fournie l'Etat a été profitable pour les contribuables. Les banques auront à la fin du mois remboursé 13 milliards sur les 20 que nous avions engagés. Au jour d'aujourd'hui cela a rapporté au budget de l'État 716 millions d'euros. Comme elle semble dépassée la polémique sur l'argent prétendu donné aux banques !

Qu'attendez-vous du grand emprunt ?

Un pays en crise a tendance à se replier sur lui-même. La France, qui sacrifie depuis trop longtemps l'investissement au profit des dépenses de fonctionnement, a besoin de projets porteurs d'avenir. Il nous faut avoir les meilleures universités du monde : encore faut-il leur donner les fonds propres nécessaires pour attirer les meilleurs. Même chose pour les PME. Seulement 400 indépendantes sont exportatrices, faute de fonds propres suffisants. Il faut impérativement y remédier. Par ailleurs, pourquoi ne pas mettre en œuvre un grand programme sur les énergies renouvelables, à l'image de celui qui a fait le succès du nucléaire français ? Pourquoi ne pas lancer un grand programme de recherche sur la dégénérescence des cellules, à l'origine de maladies comme le cancer, le sida ou Alzheimer, en associant public et privé ? Pourquoi, alors que les Chinois préparent des concurrents d'Airbus, ne pas travailler sur l'avion du futur ? C'est tout l'objet des réflexions autour de cet emprunt et j'attends beaucoup des travaux de la Commission Juppé-Rocard.

Quelles seront les modalités de l'emprunt ? Ferez-vous appel aux particuliers ?

Les modalités sont secondaires. Seuls comptera l'utilisation que nous en ferons pour préparer l'avenir.

Quelles réponses apportées après les vingt-cinq suicides qu'a connus France Télécom depuis deux ans ?

Il ne faut pas exploiter ces drames humains douloureux. Mais ils viennent rappeler que le travail des salariés doit être placé au-dessus du reste. Ils doivent évoluer dans un environnement de qualité et recueillir le fruit de leurs efforts à travers le salaire, l'intéressement et la participation. Trop longtemps, la vie des entreprises a tourné autour du cours de Bourse et du court terme, au détriment des conditions de travail et des relations sociales. C'est la raison pour laquelle j'ai voulu en finir avec les bonus excessifs des traders. Des salariés heureux au travail sont un élément de la compétitivité d'une entreprise. On a trop privilégié dans certaines entreprises l'avis des analystes financiers et ainsi on a oublié la qualité des relations sociales. La moralisation du capitalisme doit nous amener à changer cette détestable habitude.

Les agriculteurs organisent une grande manifestation ce-jour, en raison de la baisse de leur revenu ? Quelles réponses comptez-vous apporter aux difficultés répétées que traverse ce secteur ?

L'agriculture et la ruralité sont deux éléments de notre identité nationale. A ce titre ils doivent être au cœur des préoccupations du Chef de l'État. J'ajoute que l'agriculture est un élément décisif de notre compétitivité économique. Je n'accepterai jamais que l'agriculture française, comme européenne, soit sacrifiée sur l'autel d'une mondialisation anarchique. On a vu où a failli nous conduire la dérégulation de la finance. Il nous faut porter une nouvelle régulation agricole qui considérera les agriculteurs comme des entrepreneurs, qui ne craindra pas la préférence communautaire et qui assurera la sécurité alimentaire des consommateurs européens, et qui enfin garantira aux agriculteurs un juste prix de leur travail. La France sera au premier rang de ce combat. Avant la fin du mois, je prendrai des initiatives fortes sur l'ensemble de ces sujets.

Les Etats-Unis s'apprêtent à envoyer 13 000 hommes supplémentaires en Afghanistan. La France doit-elle aussi renforcer son contingent sur place ?

Faut-il rester en Afghanistan ? Je réponds oui. Et rester pour gagner. Pas contre l'Afghanistan, mais pour l'Afghanistan. Si nous partons, c'est le Pakistan, puissance nucléaire, qui sera menacé. Mais la France n'enverra pas un soldat de plus. Ma conviction, c'est qu'il faut davantage de soldats afghans. Ce sont eux qui seront les plus efficaces pour gagner cette guerre, parce que c'est leur pays. Mais il faut les payer davantage afin d'éviter des désertions au bénéfice des Talibans.

Si l'Iran n'accepte pas de coopérer avec l'AIEA avant la date limite de décembre que vous avez fixée, quelles sanctions faudra-t-il prendre ?

Attendons les contrôles de l'AIEA. L'Iran et ses dirigeants sont maintenant au pied du mur. Ce serait une bonne nouvelle qu'ils laissent ces contrôles s'effectuer jusqu'au bout. Sinon, ils auraient à en assumer toutes les conséquences. Et je me félicite en ce sens des déclarations récentes du président russe Medvedev.

Comment jugez-vous le refus du président tchèque Vaclav Klaus de signer le traité de Lisbonne ?

Ce refus est d'autant plus inadmissible que le Parlement tchèque a voté en faveur du traité et que le gouvernement tchèque est favorable à sa ratification. Mais le président tchèque ne pourra pas jouer sur les deux tableaux. L'heure du choix arrive pour lui et il ne sera pas sans conséquence. En tout état de cause, cette question sera réglée à la fin de l'année.

Une fois Lisbonne ratifié, Tony Blair peut-il être un bon candidat à la présidence de l'Union européenne ?

Il est trop tôt pour le dire. Il y aura un débat. Nous sommes en présence de deux thèses : faut-il un président fort et charismatique ou un président qui facilite la recherche du consensus et qui organise le travail ? Personnellement, je crois en une Europe forte politiquement et incarnée. Mais le fait que la Grande-Bretagne ne soit pas dans l'euro reste un problème.