TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

jeudi 31 juillet 2014

L’individu face à ses choix (4) : L’infiniment petit est l’infiniment grand

Le meilleur argument pour la liberté est une vie bien vécue

Nous avons vu que la complexité du monde ne justifie pas qu’on décide pour l’individu, mais au contraire qu’on le laisse faire. L’histoire démontre d’ailleurs que la fragmentation est plus favorable à l’innovation que l’unité politique ; à tous les niveaux, il vaut mieux décentraliser. Le système politique idéal est donc celui qui rend l’individu libre et responsable de ses choix. Mais une fois rendu maître de son destin, comment l’individu doit-il se comporter ?
D’un point de vue moral, c’est-à-dire que l’on doit attendre de chacun, l’individu doit simplement ne pas empêcher son prochain d’être maître de son propre destin ; il ne doit attenter ni à sa sûreté, ni à sa propriété, et le laisser penser et croire ce que bon lui semble.
D’un point de vue éthique, chacun doit alors être maître de soi-même et faire bon usage de sa liberté. Comprendre sa responsabilité dans le monde : la liberté repose sur les hommes libres. Le bon fonctionnement de la société n’est pas assuré uniquement par des droits individuels qui sont autant d’interdictions envers les autres, mais aussi sur le comportement vertueux de ses membres. Autant que possible, le droit empêche de nuire ; autant que possible, chacun doit agir bien.
Non seulement en se tenant prêt à défendre ses droits, mais en veillant à défendre aussi ceux des autres. Être plus libre, c’est avoir plus de choix ; la « concurrence » des modes de vie et de pensée doit être assurée. Pas de liberté économique sans liberté sociale, et inversement.
Dans une société volontaire, nous sommes un individu et en tant que tel une partie du tout. Nos actions ont une influence sur les autres ; il faut se concevoir alors comme responsable du monde entier.
Sans culpabilité pour ce que nous n’avons pas fait, nous avons une responsabilité sur ce que nous pouvons y faire. Ce n’est, encore une fois, pas une obligation ; la morale nous interdit de contraindre autrui à adopter nos valeurs et visions. Mais cela a du sens pour l’individu, pour agir bien. Sans être nécessairement celui qui l’a laissé tomber, on peut ramasser un détritus pour améliorer le confort de tous ceux qui passeront après nous et que nous aurions pu être. De même, sans accepter l’idée que le succès des uns se fait toujours aux dépens des autres, se montrer généreux avec ceux que l’on souhaite soutenir est ce qu’il est bien de faire. Sans obligation.
Et on se rend compte alors que la plus grande contribution que l’on puisse apporter au monde, c’est de vivre sa passion, son talent, son don. Apporter au monde ce qui l’embellit, l’enrichit. Exceller en soi-même.
Cela requiert bien évidemment d’être dévoué à son propre accomplissement, car c’est par la pratique que s’acquiert la maîtrise, et seule la passion permet de supporter les efforts.
Le meilleur argument pour la liberté est une vie bien vécue.
Il faut montrer l’exemple de ce que serait une vie bien vécue dans une société volontaire. Il ne faut pas faire du manque de liberté la cause de tous nos maux, ni l’excuse à tous nos échecs.
Car nous avons aussi en nous la peur du changement et de la responsabilité. Prendre responsabilité sur sa vie, c’est considérer qu’aucun obstacle ne doit nous empêcher d’atteindre nos buts et que si un obstacle résiste, il faut l’écarter du chemin. Attendre que la liberté vienne à soi ne peut pas aboutir, l’histoire le montre. Il faut d’abord créer l’espace dont elle a besoin.
Et cet espace est d’abord en nous. Si nous sommes malheureux, est-ce uniquement la faute de l’État ? Quel syndicat, quel fonctionnaire des URSSAFF peut nous empêcher d’exercer nos talents, d’exprimer notre créativité et notre compétence ? Quelle censure, explicite ou implicite, nous empêche de diffuser nos idées et d’être patient et bienveillant envers nos proches ?
Quelle patience avons-nous envers ceux qui ne sont pas d’accord avec nous, aussi victimes que nous (et peut-être plus) d’un système qui les empêche d’être libres, et leur en éloigne l’envie ? La liberté est une idée si belle qu’il est difficile d’en faire la promotion ; une fois qu’on a compris sa beauté, elle semble aller de soi. Mais ce n’est pas le cas, loin de là ; en nous tous, il peut y avoir un homme intègre ou un homme mauvais, et souvent simplement un homme ignorant.
Et voilà notre responsabilité dans le monde : faire en sorte de pouvoir exprimer son talent, et qu’autrui le puisse aussi. Il n’y a alors plus aucune concurrence entre les individus, à proprement parler ; personne ne se considère en compétition avec autre que soi-même. Et pour cela, il faut vivre nos vies avec passion et diffuser nos idées avec discernement. Vivre autant que faire se peut comme si on était libre, et faire tout ce que l’on peut pour le devenir un jour.
Car alors, ce jour viendra.

Le Califat est une menace pour la France

Au chevet des chrétiens d’Irak avec Mgrs Gollnisch et Dubost, le cardinal Barbarin a déclaré mardi qu'il fallait encourager les chrétiens d'Irak persécutés par les jihadistes à rester dans ce pays où ils ont développé depuis des siècles « un art de vivre ensemble qui est aussi une grande richesse pour l'humanité ». Les ministères des Affaires étrangères et de l'Intérieur français ont en effet annoncé être prêts à accorder l'asile aux chrétiens d'Orient menacés par les islamistes. C’est un peu tout ce qu’ils savent faire. Mgr Barbarin s’est dit inquiet de telles mesures « parce qu'on va aggraver l'exode et on va aggraver la situation ».
Louis Aliot, rejette, lui aussi, l'initiative du gouvernement. « La France ne peut plus recevoir d'immigration ».
Dans un pays où la politique d’immigration aurait été pensée et contrôlée (et ce depuis des décennies), il est bien évident que les chrétiens d’Irak devraient être accueillis en priorité. Au nom de leurs racines chrétiennes et des liens historiques qui unissent la France aux Eglises d’Orient. On sait que c’est loin d’être le cas. C’est même tout l’inverse qui a été mis en place par toute une génération de responsables politiques pour lesquels « la foi est un objet non identifié », selon la formule de Famille Chrétienne. Le gros malaise de François Hollande face à la question est manifeste. On a accueilli en priorité et en masse les immigrés dont les religions, les cultures et les coutumes étaient les plus éloignées, les plus opposées voire les plus hostiles aux nôtres.
Ne pas les accueillir tous ne signifie pas les abandonner. Ce qui est le cas actuellement. La France n’est absolument « pas à la hauteur de l'enjeu », comme l’a justement fait remarquer l'ancien ministre UMP des Affaires européennes Bruno Le Maire, qui appelle à une intervention diplomatique et politique sur un pertinent argument :
« L'installation d'un califat islamique à Mossoul est une menace pour nos intérêts, pour nos valeurs, on ne peut pas laisser passer ça sans intervenir et prendre les initiatives diplomatiques nécessaires ».
« Il n'y a pas d'initiative forte avec Barack Obama, avec Angela Merkel, ni avec d'autres Européens, pour appeler à la défense des chrétiens d'Orient », poursuit Lemaire.
La vie sous la charia
Le Père Anis Hanna, prêtre irakien, a dressé un bilan détaillé et horrifiant de la situation à Mossoul au 28 juillet, jour de l’Aïd el-fitr (fête de la rupture du jeûne) :
« Tous les habitants de Mossoul ont été informés des nouvelles lois (…) Les pantalons sont interdits et toute mode occidentale interdite. Les hommes s’habilleront à la manière afghane, d’une sorte de chemise longue jusqu’aux genoux et d’un sarwal. Ils devront se laisser pousser la barbe et se raser la tête et les moustaches. Quant aux femmes, qui n’ont plus le droit de travailler à l’extérieur de leur maison, elles doivent être voilées de la tête aux pieds. Et si jamais une femme désire sortir de chez elle, un homme de sa famille doit l’accompagner, sinon elle n’a pas le droit d’être dehors.
Les magasins vendant de l’alcool, les salons de coiffure, de beauté, les magasins de produits de beauté sont désormais interdits. La télévision ne peut plus diffuser ni des programmes culturels, ni des comédies. Pas de chaînes télévisées, pas de chanson ni de musique, pas de théâtre, pas d’artistes, ni de poètes. Bref, tout art est interdit. Aucune place pour les artistes dans l’Etat islamique de Mossoul ! »
« Un de mes amis de faculté, Wathiq, précise le père Hanna, a été mis à mort avec d’autres personnes parce qu’ils travaillaient pour une chaîne de télévision à Mossoul ».
L’État islamique a aboli le système judiciaire de la ville. C’est la seule loi de la charia qui vaut désormais. Celle des mariages forcés… « Les jihadistes de l’Etat islamique obligent les habitants de Mossoul à leur offrir leurs jeunes filles. Les parents doivent obéir sans poser de question ; les jeunes filles ne doivent absolument pas donner leur avis».
A part ça, « le grand soir jihadiste », « le rêve de l’Oumma » tel que Ben Laden n’aurait même pas osé l’imaginer, et qui s'étend de la province d'Alep, dans le Nord de la Syrie, jusqu'à celle de Diyala dans l'Est de l'Irak (à trois heures d’avion de chez nous) est un pur fantasme d’islamophobe. 

La faillite du monde occidental

La faillite du monde occidental
Bien entendu, les grandes tendances historiques n’apparaissent à la pleine lumière du jour qu’avec le recul des décennies ou des siècles. Et pourtant, nous vivons peut-être une phase nouvelle de l’histoire de l’humanité qui serait celle de l’effondrement du monde occidental. L’abandon des chrétiens d’Irak et de Syrie en est l’un des symptômes les plus épouvantables, les plus significatif. Dans l’indifférence et l’inaction de la communauté internationale, les chrétiens victimes de persécutions ont disparu de la ville de Mossoul où ils vivaient depuis plus de 1000 ans sans que jamais, d’ailleurs, les mots d’épuration ethnique n’aient été prononcés. Et pourtant… Le monde occidental, dont le christianisme est l’un des piliers, avec la culture grecque, la civilisation latine et les Lumières, se renie à travers cet abandon invraisemblable.https://www.portesouvertes.fr/informer/presse/communique-de-presse/2014/3238337/urgence-irak
Le monde occidental, nous le voyons aujourd’hui, totalement désemparé,  incapable d’esquisser le moindre geste significatif, dans un monde en pleine désintégration: Irak, livré au jihadistes, Libye, Ukraine, Afrique subsaharienne. En réalité, le monde est privé d’ordre, de leadership et la déstabilisation le gagne de part en part. Vingt à trente ans auparavant, nombreux étaient ceux qui croyaient à l’avénement de la démocratie universelle, de la loi universelle des marchés et la fin de l’histoire:" Le triomphe de l’Occident, de l’idée occidentale, éclate d’abord dans le fait que tout système viable qui puisse se substituer au libéralisme occidental a été totalement discrédité." (Francis FukuyamaLa fin de l’histoire, Commentaire, 1989). Les causes de cette débâcle du monde occidental dont on célébrait la victoire au début des années 1990, sont sans doute multiples: la mauvaise conscience, au coeur de l’idéologie dominante, la violence de la crise financière et économique de 2008-2012, une succession de dirigeants médiocres (Clinton, GW Bush, Obama).
Et puis, un facteur qui nous échappe, "le secret de la force de l’histoire" dont parle Charles Péguy dans Cliodialogue de l’histoire et de l’âme païenne . Ben Laden est le grand vainqueur de ce début du XXIème siècle: les attentats du 
imagesP8ZKBLA9
11 septembre 2001, entraînant l’intervention occidentale de 2003 en Irak ont ouvert une ère de chaos sans fin. Cette instabilité conduit sans doute au retour des Nations, ultime protection dans la tourmente. Quelle forme prendra-t-il? Celui de Nations repliées, aigries,  revanchardes, frileuses; ou celui de Nations ouvertes sur l’extérieur, le dialogue, la modernité, prêtes à affronter les réalités, même dans la douleur, l’effort, et à relever les défis? Nul n’en sait rien…

Une coupe dans laquelle aurait bu Périclès a été découverte en Grèce

ARCHEOLOGIE - Le puissant homme d’état Athénien a signé la coupe, tout simplement...
Une coupe à vin ayant très probablement été utilisée par Périclès, l'homme qui fit la renommée d'Athènes dans l'Antiquité, a été découverte sur le chantier d'un parking dans le nord de la capitale grecque, a rapporté mercredi le quotidien Ta Nea.
Après avoir reconstitué la coupe en céramique brisée en douze morceaux, les archéologues ont eu la surprise de lire sous l'une des poignées le nom de «Périclès» gravé aux côtés de cinq autres noms visiblement inscrits par ordre d'âge, explique le quotidien.

Le rare Ariphron comme garant

Les scientifiques se disent sûrs à «99%» que la coupe a été utilisée par le général et homme d'Etat du Ve siècle avant JC car le nom d’Ariphron, qui était celui du frère aîné de Périclès, figure également sur l'objet.
«Le nom d'Ariphron est extrêmement rare et son inscription au-dessus de celui de Périclès nous rend sûr à 99% qu'il s'agit là des deux frères», a déclaré dansTa Nea Angelos Matthaiou, secrétaire de la Société grecque d'épigraphie.

L'orthographe et les jeunes

Selon l'expert, le jeune Périclès, alors âgé d'une vingtaine d'années, aurait partagé un verre de vin avec ses cinq compagnons qui auraient gravé leurs noms en souvenir de ce moment de convivialité.
«Ils devaient être un peu ivres car celui qui a écrit le nom de Périclès a fait une erreur qu'il a corrigée», a observé Angelos Matthaiou.

«Une trouvaille rare»

«La coupe a vraisemblablement été offerte à un septième homme nommé Drapetis («évadé» en grec, ndlr) qui était sans doute un esclave travaillant comme serveur ou le propriétaire de la taverne», a expliqué l'archéologue Galini Daskalaki dans Ta Nea.
«C'est une trouvaille rare, le témoignage vivant d'un moment d'intimité» de Périclès dont le nom est identifié à l'âge d'or de la démocratie athénienne, celui qui vit l'Acropole acquérir sa physionomie actuelle.

La vengeance de Sparte

Ironie de l'histoire: la coupe a été trouvée rue de Sparte, la grande rivale d'Athènes durant la guerre du Péloponnèse qui a déchiré les deux cités pendant trente ans (431-404 avant JC)
Périclès en fut l'une des victimes, mort en 429 avant JC. d'une épidémie qui ravagea la cité assiégée.
La coupe sera exposée à l'automne au Musée épigraphique d'Athènes, selon Ta Nea.

« Le chef de l'Etat se transforme en manager compassionnel »

François Hollande a décrété trois jours de deuil national suite au crash de l'avion d'Algéria Air lines. Que vous inspire cette décision?
Jean-Pierre LE GOFF: Depuis des années, les politiques, de droite comme de gauche, jouent sur le registre victimaire en se voulant proches de la «vie des gens», de leurs souffrances et de leurs sentiments. En juillet 2002, après sa réélection, Jacques Chiracouvrait trois «chantiers prioritaires»: la lutte contre le cancer, la sécurité routière, la condition des handicapés, objectifs qui antérieurement relevaient plus des ministères de la santé et des transports que des fonctions du chef de l'État. Le thème de la souffrance et des victimes a été un thème privilégié
le sous préfet aux champs...
de Ségolène Royale comme de Nicolas Sarkozy lors des élections présidentielles de 2007, chacun des deux candidats étant particulièrement sensible aux catégories de victimes convenant le mieux à ses thèmes de campagne et à son électorat. Aujourd'hui, nous sommes arrivés à un point limite de cette valorisation politique de l'émotion victimaire et de la réaction «communicationnelle» à des «événements» dont beaucoup relevaient antérieurement des accidents de toutes sortes et des faits divers.


Le président de la République est-il en train de devenir une cellule de soutien psychologique à lui tout seul?
La déclaration du Président de la République après la rencontre avec les familles des victimes du crash aérien pousse à l'extrême ce délitement du politique. La figure du chef de l'État se transforme en celle du manager compassionnel qui prend tout en main. Le «partage du chagrin» s'accompagne d'une série de décisions émanant de sa personne: la sécurisation du lieu de l'accident, l'identification des corps, l'enquête, l'accompagnement et le soutien psychologique des familles… Par-delà la compassion sincère et l'expression de lasolidarité, la confusion des fonctions et des genres est poussée à l'extrême. Cela me paraît symptomatique d'une recherche pathétique pour tenter de retisser un lien avec le pays, alors que l'incohérence et l'impuissance de la politique suivie dans nombre de domaines - au premier rang desquels la question de l'emploi -, creuse chaque jour un peu plus le fossé. François Hollande tente tant bien que mal de recoller les morceaux d'un pays morcelé, en érigeant les victimes et leur souffrance en nouveaux thèmes d'une unité nationale qui fait défaut. C'est une «politique de l'ambulance» dans un pays malade du chômage de masse et de la perte de l'«estime de soi», faute de projet structurant.
La politique est-elle en train d'épouser l'information continue qui se fonde, elle-même très souvent, sur l'émotion?
C'est une course à n'en plus finir à l'image pour montrer qu'on se soucie des malheurs des gens et, tout comme les journalistes qui sont «en direct», les représentants de l'État se rendent au plus vite sur les lieux des drames, ou d'une possible catastrophe, comme Ségolène Royal sur un bateau de la marine nationale pour veiller à la pollution possible par l'épave du Costa Concordia… Leur présence donne l'impression d'une proximité de tous les instants et peut faire croire que les bons sentiments et les déclarations agissent comme par miracle sur la réalité. Cela permet un maximum de visibilité pendant un court laps de temps - celui de l'«actualité» médiatique où un «événement» chasse l'autre presque quotidiennement. L'«écoute de la souffrance» et les déclarations d'intentions peuvent même servir d'argument d'autorité pour faire taire l'adversaire politique, écraser tout recul réflexif au nom de l'authenticité des sentiments. L'étalement spectaculaire de la souffrance dans les grands médias audio-visuels qui fonctionnent en boucle n'impliquent pas de longs débats ; l'émotionnel écrase tout et empêche de penser.
Que reste-t-il de l'art de gouverner dans cette obsession émotionnelle?
C'est la fonction même du politique qui est en question. L'écart entre l'État et la société, entre gouvernants et gouvernés est constitutif de la vie politique et de la démocratie. C'est précisément ce qui permet à l'État de se placer au-dessus des fluctuations et des émotions de l'opinion amplifiées par les grands médias, tout en étant au fait de l'état de la société et des préoccupations des citoyens. Dans le même temps, le politique se doit de renouer les fils du «roman national» dans le nouveau monde dans lequel nous vivons, en traçant un avenir discernable dans lequel le pays puisse se retrouver. Ce sont les conditions pour sortir d'une «souffrance» et d'une «victimisation» qui n'a cessé de se développer dans la société. Faute de quoi, on renforce le climat d'angoisse et de démoralisation dans un pays déboussolé qui ne sait plus d'où il vient et où il va. Et, quoi qu'on en dise, on verse dans la démagogie et on fait le jeu des populistes.




Sortie de crise: Dans quel état sont les économies du sud de l’Europe?

EURO - L’Espagne, l’Italie, la Grèce, le Portugal, et Chypre vivent des destins différents…
La crise économique n’est toujours pas finie dans la zone euro. L’Espagne, la Grèce, le Portugal et Chypre n’en sont pas encore sortis. Chacun y allant à son rythme pour se remettre. Tournée d’Europe des pays du Sud, six ans après le début de la crise…
L’Espagne redémarre. De l’autre côté des Pyrénées, les réformes et l’orthodoxie budgétaire commencent à payer après six années de crise. Lire par ici notre analyse en profondeur du renouveau encore fragile de la quatrième économie européenne.
L’Italie reste en crise. La croissance ne repart pas, le chômage reste élevé (12,6 % en mai), la consommation atone et la production industrielle en berne. Le gouvernement a tout de même décidé de renvoyer à plus tard la réforme du marché du travail, pourtant considérée comme essentielle par les partenaires de l’Italie. Parvenir à 0,8 % de croissance du PIB cette année comme le prévoit le gouvernement sera «très difficile», a reconnu ce mois-ci le président du conseil Matteo Renzi. «Notre priorité est l’emploi. Mais je crois que les statistiques ne commenceront à s’améliorer qu’en 2015. Que la croissance soit de 0,4 ou 0,8 ou 1,5 % ne change rien à la vie quotidienne des gens». Le centre de recherche du lobby patronal italien a pour sa part noté que «l’Italie était en crise avant la crise et continue de l’être».
La Grèce, plombée par sa dette publique. La Grèce s’efforce laborieusement de sortir de la crise en appliquant depuis 2010 un plan draconien d’austérité dicté par l’UE et le FMI, en contrepartie de son renflouement (le pays a bénéficié jusqu’ici de deux prêts successifs de 240 milliards d’euros). Ces mesures ont considérablement réduit le niveau de vie de toutes les catégories de la population. Ainsi, le salaire minimum est gelé jusqu’en 2016 à 580 euros par mois. De même, le salaire moyen net dans le secteur privé grec s’est élevé à 817 euros par mois en 2013, soit 20 % de moins qu’en 2009. L’économie, minée par un chômage qui atteint 27 %, devrait néanmoins amorcer une légère reprise cette année. Le gouvernement grec espère une croissance de 0,6 % après six ans de récession. Ce progrès est principalement lié à la bonne performance des exportations en début d’année.
Le Portugal peut faire pire. L’agence d’évaluation financière Moody’s a relevé la note de la dette du Portugal à Ba1 en juillet, la plaçant à un cran de la catégorie investissement, label très recherché que le pays avait perdu en 2011. Le PIB a subi au premier trimestre une baisse surprise de 0,6 %, marquant une rechute pour le pays qui était sorti au printemps 2013 de deux ans et demi de récession. Moody’s salue toutefois l’engagement des autorités à poursuivre la réduction des déficits en dépit de «revers répétés» infligés par la justice. Fin mai, la Cour constitutionnelle portugaise a en effet invalidé plusieurs mesures d’austérité inscrites au budget 2014. Mais le gouvernement a déjà annoncé de nouvelles mesures «contrebalançant» l’impact de cette décision. Cependant,l’effondrement de l’empire financier Espirito Santo, aux ramifications tentaculaires dans l’économie du Portugal, risque d’emporter dans sa chute d’autres entreprises et freiner le redressement du pays, tout juste sorti de son plan de sauvetage international.
Chypre attend 2015. L’économie a été ébranlée par une crise financière qui a obligé l’île à recourir en mars 2013 à un plan de sauvetage de 9 milliards d’euros d’ici 2016 assorti de conditions draconiennes. Début juillet, la zone euro a approuvé formellement lundi le versement de 600 millions d’euros. L’île devrait renouer avec la croissance l’an prochain après deux années de dure récession.Les bons résultats du secteur du tourisme et les revenus associés attisent les espoirs que le tourisme aide à redresser l’économie.

mercredi 30 juillet 2014

Sous le chaos, l’espoir

Sous le chaos, l’espoir

Non, à la fin ! Ni les Français ni les Anglais ne sont responsables de la guerre civile qui ravage la Libye et leur impose de rapatrier leurs ressortissants. L'intervention militaire, même un peu rapidement préparée, même sous-tendue d'arrière-pensées de politique intérieure, a eu pour mérite primordial de faire tomber le tyran. Sous prétexte de chercher des chapeaux à faire porter, on en serait presque à regretter Kadhafi, son totalitarisme et ses tortures ? C'est un peu court ! L'intervention a sauvé des milliers de vies et mis à bas un intolérable régime. C'était beaucoup plus qu'un service minimum et il n'était pas forcément dans les devoirs des Occidentaux d'assurer l'après-vente et de contribuer à l'émergence d'une démocratie après avoir détruit les stocks d'armes que se sont ensuite partagés les milices.
Des élections libres ont eu lieu en juillet dernier. Les libéraux de Djibril l'ont emporté devant les islamistes, ce qui permettait d'espérer une évolution positive dans le processus de transition politique et marquait un coup d'arrêt à la percée des Frères musulmans. Comment dire, dès lors, que les affrontements entre milices et chefs de guerre qui mettent le pays à feu et à sang engagent la responsabilité des Occidentaux ?
Dans un pays sans Etat, la confusion prend souvent le pas sur la reconstruction, l'exemple irakien est là qui en atteste. D'autres exemples sont à méditer. En particulier celui de la Syrie, où l'on n'a pas su ou voulu faire chuter Bachar le barbare. Cela n'a pas empêché une guerre de religion fratricide, fomentée et alimentée par l'odieux dictateur lui-même. Au moins l'intervention militaire en Libye a-t-elle supprimé un fou sanguinaire. Peut-être aussi a-t-elle permis de le faire taire : la justice suit son coursæ En vérité, installer un semblant de démocratie dans un pays où règnent, armes lourdes à la main, plus de 1.500 milices hétéroclites et incontrôlables, est mission impossible.
Les islamistes radicaux ont perdu les élections. Ils sont, dit-on, en train de perdre aussi sur le terrain de la guerre. Si la Libye avait cette chance, son parlement pourrait alors redessiner les frontières coloniales, artificielles et géométriques, du pays et en finir avec l'ingérable géopolitique des tribus.

L’unique timonier

L’unique timonier

Que n'aurait-on dit si Sarkozy, comme vient de le faire le président de la République, avait saisi l'occasion d'une catastrophe aérienne pour surjouer la compassion et prendre les affaires en main ? A coup sûr, ce n'était pas le rôle d'un chef de l'État de s'occuper de tout, jusque dans les détails du rapatriement des corps, de la mise en berne des drapeaux, du retour des boîtes noiresæ À coup sûr, encore, c'était la meilleure façon d'avouer qu'il ne pouvait compter sur personne. Ce déploiement d'affliction n'était pas forcément justifié, même s'il est parfaitement dans sa fonction de témoigner son soutien et son aide aux familles dans la détresse. Pas justifié et dangereux car ses adversaires ne manqueront pas de lui rappeler, puisqu'il est l'unique timonier, que l'économie et l'emploi mériteraient aussi des prises de décisions exceptionnelles.
De la capacité du président à s'immerger dans les désarrois intimes, dans les drames qui frappent l'opinion, dépend, croit-on, sa cote dans les sondages. Les réformes, le parler vrai, le courage de l'intérêt général ne sont plus des arguments en politique. Le malheur pour dernier refuge de la popularité. Pauvre Jaurès !
Fatigués de mauvais indices, accablés de renversements de tendances qui ne viennent jamais, les Français aimeraient avoir le sentiment que la barre est tenue par une équipe unie, soudée au service du bien commun, une équipe qui ne montre pas ses divisions à la moindre occasion et qui n'oblige pas le président de la République à jouer le chef secouriste. Sans compter qu'il va enchaîner avec le centenaire de la Grande Guerre dont on a eu la mauvaise idée de commémorer le début plutôt que la fin. Et le tout sans doute entre une déclaration sur Gaza et une autre sur les chrétiens de Mossoul. Pourvu qu'il ne vienne pas à l'idée d'un conseiller en proximité de lui suggérer de nous souhaiter de bonnes vacances.
Crêpe noir aux drapeaux, l'été va essayer de reprendre ses droits en espérant que le destin ne lui inflige pas encore quelque grande douleur que nous serions contraints de partager collectivement en passant par profits et pertes les 3.000 victimes de la route.

On est gouverné par des Thénardier…

On est gouverné par des Thénardier…

D’accord… Pas question de dire que tous les députés et les sénateurs qui viennent (plus ou moins et plutôt moins pour certains) de rendre publiques, sur le Net, leurs déclarations d’intérêts (1), sont des Thénardier (lesquels avaient fait leur beurre en allant détrousser les cadavres de Waterloo). N’empêche que cette opération “Transparence” permet de découvrir, çà et là, quelques joyeux rapaces.
Henri Guaino, qui a toujours l’air aussi franc qu’un âne qui recule, ne décolère pas : « La folie de la transparence met en danger la vie privée et l’intimité. » Ah bon ? Et la sournoiserie de l’opacité, elle, elle ne met pas en danger la vie politique ? Ces députés, ces sénateurs, qui vivent à nos crochets et qui, pour certains, sont des cumulards de revenus, sont des hommes publics (2). Ils nous doivent donc des comptes, que ça leur plaise ou non.
Dans un pays où, le 15 du mois, des familles ne savent pas comment elles vont le finir, ce mois, où les chômeurs se comptent par millions, où des gens, qui ont pourtant un emploi, ont à peine de quoi se nourrir après avoir payé leur loyer, on ressent, à la découverte de ces Picsous bourrés de thunes, comme de la nausée. Une sorte d’antiparlementarisme ? Oui. Même si ça fait de la peine à Guaino et consorts. Quand certains députés gagnent plus de 100 000 euros par an en plus de leurs indemnités, on n’est pas obligé de trouver ça “normal”…
La loi, et les parlementaires nous le répètent à l’envi, n’interdit pas que lesdits parlementaires (députés et sénateurs) emploient un collaborateur de leur famille ? Non. Mais, légal ou pas, moi j’appelle ça du népotisme. Claude Bartolone emploie sa femme. Jean-François Coppé emploie la sienne (qui est par ailleurs et en plus psychologue pour enfants). Patrick Devedjian emploie sa moitié. Comme le font le très gaullard à tête d’empeigne Dupont-Aignan et le centriste Yves Jégo. La sénatrice UMP Sophie Joissans a embauché Papa (c’est pas une bonne fifille, ça ?). Le Vert-Rouge Sergio Coronado (ce n’est pas la bière que je préfère…) a embauché son frangin. D’autres emploient leurs enfants, leurs cousins, quelqu’un de leur parentèle. Et La Tantina de Burgos chantait naguère Dario Moreno…
D’autres, plus retors, ont mis au point un deal : « Tu embauches mon fiston et j’embauche ta femme. » Ce qui permet de rémunérer un collaborateur en s’exonérant des règles d’encadrement des salaires, les emplois concernés n’étant dès lors pas considérés comme “familiaux”…
Le malheureux et la malheureuse qui fréquentent Pôle Emploi, le travailleur qui est au Smic, le chômeur en fin de droits, n’ont pas à s’inquiéter, en revanche, pour François Fillon : gérant de son agence 2F Conseil, il a touché 142 500 euros en 2013. Pas d’inquiétude non plus pour Luc Chatel : conseil en stratégie, il s’est goinfré 188 135 euros pour la même année. Pas d’inquiétude encore pour Jean-Michel Baylet, qui va son train de sénateur : en 2013, il a touché 377 159 euros en tant que PDG du Groupe Dépêche du Midi ; 155 163 euros en tant que président de la SA Midi Olympique ; 23 575 euros en tant que président de la SA Nouvelle République des Pyrénées ; 144 983 euros en tant que président d’une société de communication. Et je pourrais allonger la liste ad nauseam.
Rien d’illégal, nous assure-t-on. Soit. Mais faudrait pas – en plus – que des Thénardier limite Auberge Rouge nous donnent des leçons de morale et viennent nous demander de faire un cran de plus à nos ceintures en simili-cuir quand les leurs de ceintures, siglées grandes marques, ne cessent de s’élargir…
(1) Professions exercées en parallèle, activités des conjoints, etc.
(2) Et des femmes publiques, mais là c’est plus équivoque… 

Entre la Russie et l’Europe, une stratégie perdant – perdant

Etre acculé, Vladimir Poutine sait ce que cela veut dire. Enfant dans le Leningrad d’après-guerre, muni d’un bâton, il pourchassait les rats dans la cage d’escalier de son immeuble décrépit. Un jour, a-t-il raconté dans son autobiographie, il en coinça un gros dans un cul-de-sac. Privé d’échappatoire, le rongeur lui sauta au visage, lui occasionnant la peur de sa vie.
Aujourd’hui, c’est le président russe qui est acculé. Provoqué manifestement par un tir de missile sol-air de ses protégés ukrainiens, le crash du Boeing de la Malaysia Airlines, qui a fait 298 morts, a rebattu les cartes. En mars, les Européens avaient honteusement fermé les yeux sur l’annexion de la Crimée par Moscou. Là, ils ont réagi avec vigueur, étendant mardi, pour la première fois, leurs sanctions à des secteurs clés d’une économie russe déjà en piteux état : la haute technologie, la prospection et l’exploitation pétrolière, l’armement, l’accès au marché financier occidental.
Le raidissement européen, programmé, était inévitable. Il n’y a aucun doute que Vladimir Poutine, tout à ses chimères de restauration de la puissance russe, porte une lourde responsabilité dans l’escalade.
Mais l’Europe ne doit en aucun cas s’arrêter là. Car elle a autant à perdre que la Russie dans une spirale des mesures de rétorsion. Des dizaines de milliers d’emplois sont en jeu (rien que le contrat Mistral a créé 1 000 emplois à Saint-Nazaire). Seule une détente russo-occidentale peut stopper la guerre civile en Ukraine, offrir un avenir à ce pays charnière et garantir l’approvisionnement énergétique européen. Tout en restant ferme, l’Europe doit tendre la main à Vladimir Poutine. Pour lui offrir une échappatoire. En espérant qu’il aura l’intelligence de la saisir.

Quand Hollande et "Najat" draguent à droite...

Quand Hollande et "Najat" draguent à droite...



François Hollande est sans illusions: s'il ne se passe rien d'ici 2017 et s'il parvient à ce moment-là à se porter candidat à un second mandat, il ne pourra évidemment pas espérer rassembler sur son nom le totalité de ceux qui lui ont permis d'accéder le 6 mai 2012 à l'Elysée. Il y a aujourd'hui, dans la nature, trop de disciples de Mélenchon qui ne lui pardonneront pas ce qu'ils appellent, dents serrées, sa "trahison".

Le chef de l'Etat regarde donc ailleurs, forcément sur sa droite.
Son objectif est double.
1. Si Nicolas Sarkozy, malgré les juges à ses trousses, est en piste, réunir les conditions (psychologiques et politiques) pour pouvoir expliquer, le jour venu, aux gens de droite... "raisonnables" qu'ils doivent faire le bon choix. Qu'on saura leur tendre la main.
2. Si Nicolas Sarkozy est hors-course, tabler sur les divisions de la droite et l'incapacité de celui ou celle qui serait alors en piste à fédérer tout son monde. En préparant le terrain, contre le FN de Marine Le Pen, à un accord "républicain" entre le gros du PS, les fragiles centristes et une fraction de l'UMP.
C'est dans ce contexte qu'il faut lire et relire les récentes déclarations à Europe 1 de Najat Vallaud-Belkacem, ministre du Droit des femmes, de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. Car l'intéressée, au-delà de ses sourires, ne s'est jamais beaucoup intéressée à la droite. Elle en avait d'autant moins la tentation qu'elle a vu pendant vingt ans, à Lyon, Gérard Collomb multiplier efficacement les clins d'yeux dans cette direction. C'était une raison de plus pour Najat Vallaud-Belkacem, qui rêve un jour de succéder à Collomb, pour jouer la carte inverse.
Or voici que la ministre du Droit des Femmes -évoquant la "dérive" d'une fraction de l'UMP au Sénat- explique, sur un ton... maternaliste, que l'UMP "a donné" à voir (en cette occasion) une image "qui n'est pas à son son honneur". Qu'il y a dans ses rangs une minorité qui rêve d'imiter l'hétéroclite Tea Party américain (dont Sarah Palin fut, un temps, l'héroine). Et que -cette fois, on s'accroche - "à droite aussi on trouve des progressistes". Lesquels "progressistes" sont invités par ses soins à savoir s'unir avec "les autres progressistes" lorque sont en jeu des "choses fondamentales" (à commencer par le refus de dérives "réacs").
Eclairant propos. Acculé dans les cordes par une croissance en panne et des Européens qui lui demandent des comptes, François Hollande a nommé Manuel Valls à Matignon, et s'est séparé des plus gauchistes des Verts. Il tient en respect (en tout cas pour le moment) les "frondeurs" tout en donnant un coup de barre (idéologique) à droite. Il a gommé la quasi-totalité des sujets (notamment sociétaux) qui faisaient conflit avec l'UMP. Et voici, maintenant, qu'à ses côtés son ex-porte-parole Najat Vallaud-Belkacem découvre des "progressistes" à l'UMP, et leur dit en substance: "Pourquoi pas ?".
L'automne sera chaud.         

L'extrême droite en Europe : comment expliquer la naissance d'Aube dorée en Grèce

La montée électorale, dès le début des années 1980, du Front national avait fait de la France une exception en Europe. Depuis, des États comme l'Autriche et la Belgique ont aussi connu la percée de partis politiques d'extrême droite, revendiquant la préférence nationale, dénonçant le cosmopolitisme, le multiculturalisme et, plus directement encore, la présence des étrangers. Les démocraties de l'Europe du Nord, qui semblaient échapper à cette poussée politique nationaliste, sont à leur tour touchées. Et si les scores de l'extrême droite sont encore faibles en Grande-Bretagne et en Espagne, les conditions de leur essor sont malheureusement bien présentes. Extrait de "L'extrême droite en Europe", de Béatrice Giblin, publié chez La découverte.

Les élections municipales de 2010 marquent le premier succès électoral de l’AD. En obtenant 5,29 % des suffrages à Athènes, son leader est élu au conseil municipal. Le parti obtient même 8,5 % des suffrages dans le sixième arrondissement de la ville où réside une forte population étrangère. Rappelons qu’à Athènes, les immigrés ne se trouvent pas concentrés dans des quartiers périphériques ségrégués : ils habitent dans la ville qui, au fil du temps, fut désertée par les couches les plus aisées parties vers la banlieue.
Selon les politologues, l’AD a su capitaliser l’angoisse des couches populaires habitant les quartiers d’Athènes les plus touchés par l’immigration illégale, ce qui, conjugué à l’appauvrissement d’un L'extreme-bon nombre de foyers à cause de la crise économique, lui a valu des résultats électoraux inédits. Ainsi, l’AD a formé de pseudo-comités de quartier, censés sensibiliser et mobiliser les habitants des quartiers défavorisés de la capitale, et a ainsi pénétré des milieux inquiets, en mal de perspectives. En même temps, des groupes formés de militants du parti bien reconnaissables entreprenaient de « nettoyer » les quartiers en intimidant et en s’attaquant fréquemment aux immigrés.
De fait, l’AD s’est construit l’image d’un protecteur des citoyens faibles en formant des réseaux d’entraide. L’histoire d’une personne âgée accompagnée par des militants du parti à la banque pour y effectuer un retrait d’argent fit la une de plusieurs quotidiens, bien qu’en réalité il s’agisse de la mère d’un membre du parti que son fils amenait à la banque. Des distributions de vivres « exclusivement à des Grecs » furent également opérées, ainsi qu’une collecte de sang à utiliser seulement pour des personnes hospitalisées de nationalité grecque, ce que les associations de médecins athéniens ont refusé avec véhémence. Un service d’aide à la recherche d’emploi fut aussi projeté, mais il n’a pas encore vu le jour. Il semble que cette politique de l’AD soit fidèlement calquée sur l’activité entreprise par le parti néonazi allemand NDP (Parti national-démocrate) à la fin des années 1990, qui mit en oeuvre des actions d’aide sociale au profit des populations défavorisées dans le but de présenter un visage de bienfaiteur. Un « activisme » favorablement reçu par certains médias.
Il convient ici de rappeler que, à rebours du discours des formations de l’extrême droite en Europe, ce groupe extrémiste grec met l’accent sur l’insécurité physique qu’engendre l’« invasion », selon eux, de la Grèce par des immigrés plus que sur la menace qu’ils constitueraient pour les emplois des Grecs. Fidèles à leur credo irréductiblement xénophobe, ils voient dans l’immigration une atteinte grave à l’intégrité de la nation. En deux mots, pour faire le bilan du premier succès de l’AD, tout comme en France lors des élections municipales de 1983 où le FN obtint des scores inquiétants dans quelques villes, les élections municipales d’Athènes s’avèrent un excellent point de départ pour l’AD et marquent sa présence définitive, tantôt seulement bruyante, tantôt violente, dans la vie politique du pays.
Lors des élections législatives anticipées de mai 2012, l’AD a recueilli presque 7 % des voix, franchissant aisément la barre des 3 % indispensables pour entrer au Parlement. Un mois plus tard, elle a confirmé sa présence en obtenant le même score lors du scrutin de juin (remporté par la droite) et en devançant même des partis traditionnels, tels que le PC grec. Il semble que la campagne de sensibilisation menée par divers groupes politiques et médias et qui mettait l’accent sur le véritable danger que constituait l’AD pour la vie politique démocratique n’ait eu qu’un très faible impact sur les électeurs.
En ce qui concerne son ancrage régional, l’Aube dorée a obtenu ses meilleurs résultats dans les circonscriptions de la région de l’Attique (la capitale et ses environs), y compris le Pirée et sa banlieue. Son score se situe aux alentours de 8 % ou 9 %. Viennent ensuite certains départements du Péloponnèse qui votaient traditionnellement à droite et quelques départements qui abritent des centres de détention provisoire d’immigrés illégaux (Corinthe) ou des villes qui constituent des points de passage pour ces derniers vers des pays de l’Europe de l’Ouest. En règle générale, le parti semble solidement installé dans de grandes agglomérations urbaines et, fait notable et alarmant, chez les jeunes générations : dans la tranche d’âge 18-24 ans, il passe largement la barre des 10 % et, dans certaines circonscriptions, il est même le double de sa moyenne nationale. À l’inverse, parmi les électeurs d’âge mûr ses résultats sont plutôt faibles. Enfin, il a opéré une percée spectaculaire parmi les électeurs qui votaient pour la première fois (22 %, pas loin des 30 % de Syriza) et il a aussi bénéficié d’un transfert de voix massif d’électeurs du LAOS, 18 % de ceux qui avaient voté pour les candidats de ce parti lors des élections de 2009.
Cette percée électorale de l’AD s’explique aisément par la crise économique et la récession dont les effets sont ressentis par des couches de plus en plus larges de la population. La Grèce a perdu en cinq ans 25 % de son PIB, suite à six années consécutives de récession ; le chômage a atteint des taux exorbitants (27 % de la population active janvier 2014) qui selon les prévisions ne baisseront qu’à long terme ; enfin le retour à la croissance est très incertain.
Le sentiment que le fardeau de l’austérité est injustement réparti alimente la rhétorique de l’AD qui dénonce les « politiciens traîtres et corrompus ». En cela, l’AD ne fait que reprendre des slogans avancés dans le passé par d’autres formations populistes ou extrémistes, tel le LAOS. L’aggravation de la crise économique et sa gestion inefficace par les partis dits « traditionnels » ont assurément amplifié cette perception des responsables politiques.
Mais la progression de l’AD ne s’explique pas uniquement par les difficultés économiques. On l’a vu : il y a des années que l’extrême droite a resurgi et s’est installée dans le paysage politique. Les autres partis n’en ont pas perçu la menace et ont même souvent adopté des politiques et des discours sur l’immigration qui, sans s’apparenter directement au discours de l’extrême droite, contribuaient à le banaliser. Si, après la dictature, le nationalisme était totalement discrédité, on assiste depuis la fin des années 1980, et notamment au cours des années 1990 à la propagation d’un nouveau discours nationaliste venu de l’extrême droite qui semble avoir pris racine dans certains milieux. Ce discours dénonce, parfois même violemment, les partenaires européens accusés d’avoir abandonné la Grèce, en lui imposant une politique d’extrême rigueur. Notons aussi que les leaders d’autres partis populistes ont eu presque tribune ouverte dans certains médias, ce qui a donné lieu à une propagation rapide de ce discours. Un terrain fertile dans lequel l’AD, naguère marginale, a bien su semer le discours de la haine raciale et du nationalisme le plus agressif. Il est nécessaire aussi de rappeler que l’AD a resurgi en tant que formation politique au début des années 1990. En effet, à cette époque, ses militants participaient à des manifestations nationalistes massives contre l’ex-République yougoslave de Macédoine car de nombreux Grecs, plus ou moins instrumentalisés par le gouvernement, manifestaient leur refus qu’un État ait le même nom qu’une de leur région historique, celle du grand Alexandre. Les militants de l’AD profitaient de ces manifestations pour agresser violemment des membres d’associations de gauche.
C’est un lieu commun de dire que l’AD a su parfaitement exploiter la méfiance des citoyens envers les partis traditionnels et l’inquiétude provoquée par la forte immigration clandestine qui frappe le pays depuis une décennie, contre laquelle elle a à plusieurs reprises utilisé la manière forte. Le leader de l’AD propose même de miner la frontière gréco-turque, au nord du pays, pour empêcher les immigrants de la franchir. Dans la capitale, des membres du parti ont été à maintes reprises traduits en justice pour agressions sur des étrangers.
Quant à la police grecque, elle a été souvent pointée du doigt, notamment pour sa passivité lors des attaques contre des étrangers. Notons qu’à Athènes, dans les bureaux de vote proches des casernes de police, le parti obtient d’excellents scores, à savoir 20 % ou même 30 %, bien au-dessus de sa moyenne nationale, et quand les autorités lancèrent une enquête judiciaire à l’encontre de l’AD, certains policiers soupçonnés de liens avec celle-ci ont été limogés.
Depuis les dernières élections de juin 2012, l’AD a toujours le vent en poupe dans les sondages, arrivant en troisième position, derrière la ND et le Syriza. Sa politique n’a pas radicalement changé même si, désormais, le parti s’efforce de montrer un visage plus présentable, en récusant les étiquettes de néofasciste ou de néonazi, mais son discours demeure extrémiste : « On nous a traités de nazis, mais on ne nous a jamais traités de voleurs. Ces mains parfois saluent comme ça [il fait le salut nazi], mais elles sont propres », s’écria le chef du parti lors d’une réunion en octobre 2012. La Shoah fut également mise en cause par le chef du parti, qui affirma à plusieurs reprises, et notamment dans l’intervalle des deux élections consécutives de 2012, que les chambres à gaz n’ont jamais existé. Il en va de même de son épouse, Eléni Zaroulia, elle aussi élue députée, qui, lors d’un discours parlementaire, a traité les immigrants de « soushommes » qui « ont envahi notre territoire, en le contaminant de toutes ces maladies qu’ils trimballent ».
Face à la montée constante de l’AD dans les sondages, diverses réponses furent envisagées. Interdire le parti fut l’une d’elles, également proposée par le Conseil de l’Europe qui s’est montré particulièrement soucieux de la montée du racisme en Grèce. Néanmoins, la Constitution hellénique ne prévoit aucune procédure d’interdiction judiciaire d’un parti politique même si son programme s’oppose aux principes de base du régime démocratique. De plus, comme ce fut signalé par de nombreux commentateurs, une telle démarche risquerait de renforcer son audience en lui donnant l’auréole d’un véritable parti antisystème, et cette interdiction ne l’empêcherait pas de renaître sous un autre nom. Vient ensuite l’adoption d’un nouveau cadre législatif concernant les crimes à motifs racistes et l’appel à la haine raciale, ce qui mettrait la législation nationale en conformité avec les standards européens. Le désaccord entre les trois partenaires gouvernementaux au printemps 2013 provoqua le gel du projet de la nouvelle loi ; un report qui peut apparaître stratégique pour la ND, qui peut craindre que l’entrée en vigueur d’une telle loi ne lui permette pas de reconquérir, dans l’avenir, une partie de l’électorat perdu au profit de l’extrême droite.
Formé à l’issue des élections de juin 2012, le nouveau gouvernement dominé par les conservateurs de la Nouvelle démocratie, adopta une politique plus rigoureuse envers les clandestins, en mettant en oeuvre un mois plus tard des opérations d’arrestation et d’expulsion d’illégaux. Cette opération semble avoir eu les résultats inverses. En faisant de la question de l’immigration clandestine la clef de voûte de sa politique, le gouvernement fournit une preuve irréfutable que non seulement les questions qu’aborde l’AD mais aussi son discours qui prône une politique musclée contre les illégaux, ont profondément imprégné le débat public.
Les militants du parti ont poursuivi, avec la bénédiction de ses dirigeants, cette politique d’hostilité violente à l’égard des immigrants : par exemple, ils ont manifesté contre la transformation d’un camp militaire désaffecté en centre de détention provisoire de clandestins, en prônant leur renvoi immédiat dans leurs pays d’origine. Ils sont allés même jusqu’à suppléer aux responsabilités étatiques, souvent mises à mal quand il s’agit de régler les problèmes quotidiens, en opérant des contrôles sur des marchés, en demandant leurs papiers à certains commerçants étrangers et en saccageant la marchandise de ceux qui ne pouvaient montrer un permis de séjour. Des gestes de ce type semblent trouver un écho favorable au sein de la petite classe moyenne qui s’est vue largement touchée et appauvrie avec la crise. Ainsi nombre de petits commerçants se sont montrés satisfaits de l’intervention de l’AD, qui à leurs yeux a tenté de mettre fin au marché noir, alors que l’État n’avait pas pu le faire.
Extrait de "L'extrême droite en Europe", de  Béatrice Giblin, publié chez La découverte, 2014.