TOUT EST DIT

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mardi 18 janvier 2011

La révolution de Jasmin ne s'exportera pas

L'onde de choc de la Révolution tunisienne ne risque pas de déstabiliser les autres régimes arabes. En tout cas pas immédiatement, selon Antoine Sfeir. Journaliste et directeur des Cahiers de l'Orient, celui-ci revient sur les bouleversements qui secouent le Maghreb depuis la « Révolution de Jasmin ».

France-Soir. La Tunisie prend-elle le virage démocratique réclamé lors de la révolution ?
A. Sfeir. Premièrement, le retrait du syndicat UGTT du gouvernement (mardi, trois ministres ont quitté l'exécutif en raison du maintien du RDC de Ben Ali au sein des ministères régaliens, NDLR) pose des problèmes révélateurs. Le fait qu'un pouvoir en partie issu du clan du président détrôné soit chargé des élections dans six mois jette la suspicion au sein de la population. Pour le reste, il ne faut pas jouer gratuitement au prophète. Les événements se succèdent à une vitesse étonnante et les inconnues sont nombreuses : la capacité d'action des fidèles de Ben Ali notamment et le rôle de l'armée dans les mois à venir.

Existe t-il une menace islamiste potentielle en Tunisie ?
Pour le moment, non. Le parti islamiste Ennahda n'est pas encore rentré au pays (Interdit sous Ben Ali, il a fait savoir lundi qu'il veut être légalisé, NDLR). Les thèses islamistes avaient beaucoup plus d'échos auprès de la population tunisienne à la fin des années 1980. Paradoxalement, la montée de l'islamisme radical ailleurs dans le monde a contribué à marginaliser encore plus l'islam politique en Tunisie parce que les classes moyennes en avaient peur.

Et concernant l'armée, y a t-il un risque de confiscation du pouvoir ?
L'armée tunisienne a une tradition républicaine forte. Mais ayant pris fait et cause pour le peuple contre Ben Ali, on aurait du mal à la voir uniquement comme une « grande muette ». Seul l'avenir nous dira ce qu'il en est.

Les autres régimes arabes peuvent-ils connaître une même révolution « à la tunisienne » ?
Cela me semble peu probable. Les conditions ne sont pas les mêmes. En Egypte, l'armée est garante de l'ordre public et totalement solidaire de Moubarak, dont ce dernier est issu. Elle ne basculera pas comme en Tunisie, parce que c'est elle qui est au pouvoir. En Algérie aussi l'armée règne main dans la main avec Bouteflika. Et dans ce pays, la classe moyenne n'existe pas. Il y a une classe indécemment riche et une paupérisation du reste de la société. En Syrie, le régime est tenu par une minorité mais il y a une certaine redistribution des richesses. Moindre qu'en Tunisie, mais redistribution tout de même. Là encore, les militaires contrôlent tout.

La relative « réussite économique » en Tunisie a t-elle contribué à la révolte ?
Tout à fait. Ce sont les classes moyennes qui font les révolutions. Le problème vient de ce que Ben Ali a totalement ignoré les critiques contre la corruption du pouvoir. Et que le développement de l'enseignement universitaire était en inadéquation avec le marché du travail tunisien.

Apple : la grogne monte chez les investisseurs

Les ennuis de santé de Steve Jobs soulèvent à nouveau le problème de la transparence des informations à ce sujet. Wall Street cherche à en savoir plus, alors que les questions relatives à l'utilisation du cash d'Apple restent sans réponse.


Le géant californien publie ce soir ses résultats trimestriels. Ils seront certainement excellents : les analystes anticipent un bond de 50 % du chiffre d'affaires, grâce au succès de l'iPhone et de l'iPad. L'examen de ces performances exceptionnelles -qui ne surprennent plus -devrait toutefois laisser place à des questions d'ordre médical. Les problèmes de santé de Steve Jobs sont revenus au premier plan de l'actualité d'Apple, depuis l'annonce lundi d'un nouvel arrêt maladie du PDG. 

Et ils inquiètent principalement les investisseurs, compte tenu de l'implication directe du patron fondateur dans la stratégie, et son impact sur les performances financières et boursières de l'entreprise. « La santé de Steve Jobs est l'un des facteurs de risque les plus importants pour le titre en Bourse », confirme Leslie Griffe de Malval, gérant chez IT Asset Management. Wall Street cherche donc à en savoir plus sur la santé de Steve Jobs que les simples informations distillées dans le communiqué de lundi. Et les critiques pourraient à nouveau apparaître sur le manque de transparence de la société sur ce sujet. 

Pas de règles précises pour communiquer

Il y a deux ans, déjà, certains grands investisseurs américains s'étaient plaints de ce manque d'informations lors de la dernière « absence médicale » du patron d'Apple. Le gendarme des marchés financiers, la SEC, s'était même penché sur la question, pour déterminer si, oui ou non, la société aurait dû procurer davantage d'informations sur l'état de santé de Steve Jobs. L'enquête n'avait finalement rien donné. 
Il n'existe pas de règles précises pour un tel cas. Mais « la société n'est pas obligée de donner plus d'indications que le simple fait que son PDG doive effectivement s'absenter pour raisons médicales », déclare James Cox, un professeur de droit américain, cité par l'agence Bloomberg. « Evidemment le statut de Steve Jobs est unique chez Apple. Mais cela ne doit pas pousser l'entreprise à communiquer davantage. Ce serait la porte ouverte à la spéculation sur ses bulletins de santé », prévient Christophe Foliot, responsables actions internationales chez LCF Rothschild.

Une trésorerie débordante

Si les questions sur la santé du patron d'Apple reviennent sur le premier plan, celles relatives à l'utilisation de la trésorerie du groupe sont récurrentes depuis plusieurs mois. Le problème devrait être à nouveau soulevé à l'occasion de la publication des résultats. Chaque trimestre, la firme à la pomme voit son cash augmenter. Il dépasse désormais les 50 milliards de dollars et pourrait bien s'établir à 70 milliards à la fin de l'année. Les investisseurs ont du mal à cacher leur impatience face à cet argent qui « ne travaille pas ». « Apple est en train de détruire de la valeur, réagit un gérant de portefeuille américain, interrogé par le Wall Street Journal. La stratégie produits est excellente. Mais l'entreprise laisse de l'argent sur la table avec une telle trésorerie. Cela ne rapporte rien. »
De plus en plus d'investisseurs incitent les dirigeants d'Apple à redistribuer davantage aux actionnaires. Les analystes de Bernstein Research ont ainsi calculé que si Apple décidait de verser 4 % de ses bénéfices en dividendes, de racheter 20 milliards de dollars d'actions, sa trésorerie augmenterait tout de même de 10 milliards cette année. D'importantes acquisitions pourraient être réalisées dans le même temps. Au mois d'octobre dernier, Steve Jobs avait laissé penser que la trésorerie pourrait être mobilisée pour financer d'éventuelles acquisitions. 
« La critique est plus légitime que celle sur les questions de santé, relève Christophe Foliot. Apple pourrait imiter Microsoft en 2004. » Pressé de toutes parts par les investisseurs, le géant informatique avait à l'époque reversé 32 milliards de dollars de dividendes à ses actionnaires. « Cela aurait le mérite de calmer les ardeurs du marché au sujet de la santé de Steve Jobs et la question de la succession, » estime Leslie Griffe de Malval. En décidant de redistribuer une partie de ses bénéfices, la société pourrait en outre élargir le panel des investisseurs, en attirant de nouveaux fonds actionnaires davantage intéressés par les valeurs de rendement. Cette décision reviendra de toute façon à Steve Jobs, qui reste seul maître à bord, malgré ses ennuis de santé. 

Ces réfugiés qui hantent l’Europe

Karina et Rouslan ont fui la Tchétchénie pour la France, avant d'être expulsés vers la Pologne, leur porte d'entrée en Europe, dont ils ne peuvent sortir. Un itinéraire absurde parmi tant d’autres, dicté par le règlement Dublin II sur le droit d’asile. 

Elle se rappelle le marché de Tours sous le soleil d'août 2008. "C'était si joli, si propre." Un rire lui échappe. Elle se rappelle le parc, où ils se sont promenés avec leurs amis, des Tchétchènes comme eux, arrivés en France via la Pologne, quelques années plus tôt. A l'époque, elle était enceinte. Ils se croyaient hors de danger. Las ! Leur bonheur n'a pas duré longtemps, avant que leur vie ne bascule à nouveau. Pas en enfer, non. Dans l'errance ordinaire des rejetés du droit d'asile.
En quelques jours, Karina, 25 ans, et Rouslan, 27 ans, ont rejoint l'armée invisible des zombies de l'Europe. Par leur faute ou presque. Ne sont-ils pas allés d'eux-mêmes à la préfecture de Tours se faire enregistrer – y retournant, quelques jours plus tard, invités à venir "chercher des papiers" ?
La suite, ils s'en souviennent comme si c'était hier : les policiers en civil qui surgissent près du guichet, la nuit au commissariat, les voitures de police où on les fait monter, au matin, menottés, l'aéroport de Roissy, la fin du rêve. Karina ne sourit plus. Varsovie est à une bonne demi-heure d'ici, en voiture. La France, à des années-lumière.
Ce sont les policiers de Tours qui leur ont révélé la cause et le nom de leur malheur : Dublin. La ville irlandaise a donné son nom, en 2003, au règlement dit "Dublin II", qui s'applique à tous les pays de l'Union européenne — dont la Pologne est membre depuis 2004.

"On croyait que le plus dur était de passer la frontière"

Selon ce règlement, le pays d'entrée, c'est-à-dire le premier pays de l'UE où un étranger demandeur d'asile pose le pied (et ses empreintes), est celui où sa demande doit être instruite. Si le demandeur d'asile ne se trouve pas dans l'Etat désigné comme responsable de l'examen de son dossier, il doit y être transféré. "On croyait que le plus dur, c'était de passer la frontière et d'arriver en France. On n'avait rien compris !", sourit tristement Rouslan.
La maison basse, bordée d'un pré, où le couple et leur enfant ont fini par atterrir, est située en pleine campagne, à l'ouest de Varsovie. Ils y louent à prix d'or une chambre minuscule. Deux autres familles tchétchènes habitent la maison. Les "Dublinés", comme on dit dans le milieu associatif, sont plusieurs milliers en Pologne.
Pour avoir tenté de s'installer ailleurs, en Europe de l'Ouest, et s'y être fait pincer, voilà les Dublinés " renvoyés à la case départ. Avec une seule idée : repartir. Car la Pologne, entrée dans l'espace Schengen en 2007, "demeure un pays de transit" pour les migrants, notent Krystyna Iglicka (Centre de relations internationales de Varsovie) et Magdalena Ziolek-Skrzypczak (université Ludwig-Maximilian de Munich), dans une étude sur les migrations en Pologne, mise en ligne, en septembre, par le Migration Policy Institute (MPI).
L'adhésion à Schengen est un "jeu de dupes", qui a surtout servi à un "redéploiement des dispositifs répressifs", estime, de son côté, la chercheuse polonaise Paulina Nikiel, dans le rapport du réseau Migreurop, "aux frontières de l'Europe", mis en ligne début novembre. Les verrous, posés à ses frontières, font de la Pologne un "Etat tampon", appelé à devenir, ajoute Mme Nikiel, un "pays de destination" – à l'instar du Maroc, où sont bloqués de nombreux candidats à l'émigration.

Le régime carcéral des centres de rétention

La Pologne est un pays "pauvre, plus démuni que la France, la Belgique ou l'Allemagne , remarque Anna Kuhn, présidente du comité Pologne-Tchétchénie. Bien que les conditions d'accueil des étrangers, en particulier des réfugiés, se soient sensiblement améliorées, au cours des cinq dernières années, leur sort n'a rien d'idyllique. 
Dans les centres de rétention, un régime quasi carcéral est imposé : "La liberté de se déplacer est durement entravée et réduite à des séjours aux toilettes et à une heure de promenade par jour", note Paulina Nikiel. La majorité des pensionnaires de ces centres fermés, parmi lesquels des "familles entières, mineurs compris", sont généralement des sans-papiers ou des demandeurs d'asile, coupables d'avoir traversé ou essayé de passer la frontière irrégulièrement. A l'issue de leur séjour, de plusieurs mois jusqu'à un maximum d'un an, tout ce petit monde se retrouve à la rue. 
Sur quelque 10 500 demandeurs d'asile enregistrés en 2009, rares sont les "élus". "De 1992 à 2009, seuls 3 113 demandeurs d'asile ont obtenu le statut de réfugié", soit 3,5 % du total des demandeurs, indiquent Mmes Iglicka et Ziolek-Skrzypczak dans leur étude. Moins de 4 % ! Parmi ces miraculés, quelques Tchétchènes, mais aussi des ressortissants de Bosnie-Herzégovine, de Somalie, de Biélorussie, d'Afghanistan, du Sri Lanka et d'Irak.

La France et l'Autriche : premiers pays à renvoyer les Tchétchènes

Quant aux Géorgiens, dont plus de 4 000 ont demandé l'asile à la Pologne en 2009, aucun ne l'a obtenu. Rien d'étonnant, dans ces conditions, à ce que beaucoup de migrants préfèrent tenter leur chance plus à l'ouest. Grossissant ainsi, pour les plus malchanceux, les rangs des "Dublinés".
 "La France et l'Autriche ont été les premiers pays à renvoyer massivement les Tchétchènes en Pologne", assure Issa Adayev, qui vient d'ouvrir, à Varsovie, au sein de la fondation Other Space, un centre d'accueil pour réfugiés. Selon ce militant tchétchène, les cas de "déportation" de Tchétchènes vers Moscou ne sont désormais "pas rares". Plusieurs de ces "déportés" auraient "disparu", ajoute Issa Adayev.
Varsovie, pas plus que les autres capitales de l'UE, Paris, Vienne ou Berlin, ne souhaite se mettre à dos le régime de Vladimir Poutine. Le temps est loin où, comme l'a rapporté l'association Forum Réfugiés, le ministre français de l'immigration, Brice Hortefeux, indiquait aux préfets qu'"une réadmission vers la Pologne au titre du règlement de Dublin n'était pas souhaitable", compte tenu de la situation en Tchétchénie et des risques, précisément, de renvoi en Russie, via la Biélorussie ou l'Ukraine. C'était en juillet 2007. Un an avant que Rouslan et Karina ne prennent la route. Et que le gouvernement français ne fasse volte-face.

De l’autre côté du mur

La clôture que la Grèce a décidé de construire à sa frontière avec la Turquie pour arrêter les migrants éloigne un peu plus Istanbul de l’UE, estime le rédacteur en chef du quotidien stambouliote Sabah. 

Les premières réactions de la Turquie vis-à-vis du projet grec de dresser un mur le long d’une partie de la frontière commune ont été extrêmement prudentes et discrètes. Pourtant, nous pensons qu'il est faux de croire que cette décision relève seulement de la politique interne et de la souveraineté grecques.
En effet, ce mur ou cette clôture de fils barbelés qui sera dressé le long du fleuve Maritsa [Meriç en turc] va inévitablement affecter l'image internationale de la Turquie de manière négative.
Le mur qui court le long de la frontière sud des Etats-Unis, dont les autorités grecques disent vouloir s’inspirer, n'a d'ailleurs absolument rien apporté au Mexique. Bien au contraire, il a placé ce pays dans une situation d'Etat paria impuissant qui tente désespérément d'exporter ses problèmes économiques et sociaux de l'autre côté de la frontière.
Quant aux Palestiniens, ils sont humiliés par ces murs érigés tant du côté israélien qu'égyptien qui les condamnent à vivre dans une prison à ciel ouvert.

La frontière de l'Europe s'arrête sur les bords de la Maritsa

Le fleuve Maritsa ne délimite pas seulement notre frontière avec la Grèce, il le fait aussi avec l'Union européenne. Dans ces conditions, établir une telle clôture revient à placer entre nous et l'Union européenne des obstacles infranchissables qui renforcent le concept de zone Schengen, symbole concret d'une circulation limitée dans l'espace européen.
Vient alors s'ajouter aux difficultés de visa entre nous et l'UE, un obstacle physique supplémentaire. Ce mur n'est donc pas seulement le problème de la Grèce, mais aussi le nôtre.
En outre, la construction d'une telle clôture le long de la Maritsa serait malheureusement un moyen de concrétiser la vision sarkozyste des frontières de l'Europe que le Conseil des sages, présidé par l'ancien Premier ministre espagnol Felipe González, avait pourtant démentie en expliquant dans son rapport remis en mai 2010 que ce  n'est pas la géographie, comme le prétend le président français, mais bien "ses valeurs qui constituent les limites de l'Union européenne".
Dresser un tel mur serait ainsi une façon de faire passer un message selon lequel la frontière de l'Europe s'arrête sur les bords de la Maritsa.

Sans Jobs, où va l'action Apple ?

Privé de son PDG annoncé en arrêt maladie, le titre Apple pourrait entrer dans une zone de turbulence. Mais la marque à la pomme a pris ses dispositions pour protéger sa cotation.

La Bourse, thermomètre de la santé des patrons ? Le cas d'Apple et de Steve Jobs illustre ce constat. L'action Apple a mordu la poussière lundi, quelques heures après l'annonce du congé maladie de son charismatique patron. La troisième plus grosse capitalisation boursière du monde a reculé, le titre cédant 8% à la Bourse de Francfort. Quand la santé chute, les valeurs boursières suivent. D'autant qu'aux yeux des investisseurs, le visionnaire PDG et la firme californiennes sont indissociables.

Pour autant, l'irrationalité financière pourrait être seulement provisoire. Pour commencer, le boss d'Apple a pris soin d'annoncer son état de santé alors que Wall Street était fermé lundi pour cause de « Martin Luther Kind day ».

Les investisseurs ont donc eu le temps de se « rassurer » et, n'en doutons pas, de compatir à la situation de Jobs. Mardi, l'action Apple à Wall Street est même en hausse de 2,80%. Pas de quoi se mettre au chevet du titre Apple Inc.

Ensuite et surtout, Apple doit dévoiler ce mardi ses résultats trimestriels, attendus en forte croissance. Les derniers joujous de la marque à la pomme, iPad et iPhone, se sont arrachés dans tous les rayons de la planète. Bilan sur les six derniers mois : l'action Apple a grimpé de 50%, détrônant Microsoft.

Jeu de dupes

Échange 700 millions d’euros contre 3,9 milliards : personne n’aurait l’idée de proposer une transaction aussi farfelue. Personne ? Si. Le ministère du Budget étudie le plus sérieusement du monde une réforme de la fiscalité du patrimoine qui doit se traduire, à la fois, par l’abandon du bouclier fiscal (qui coûte 700 millions annuellement aux finances publiques) et par la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), qui rapporte 3,9 milliards. Que le troc soit déséquilibré au possible n’effraie pas Bercy, qui agit, en la matière, sur les instructions de l’Élysée. Il suffit de trouver l’argent manquant ailleurs !

Le président Sarkozy affirme qu’il veut taxer les flux des capitaux plutôt que la détention du patrimoine. Ce choix privilégie les plus fortunés, au détriment des classes moyennes. Le « glissement » de la législation ne sera pas seulement technique, il s’annonce surtout sociologique : l’impôt sur la fortune touche 562 000 foyers, soit moins de 2 % des contribuables. La taxation des plus-values sur la vente de la résidence principale, vers laquelle on se dirige, concernera potentiellement 57 % des Français.

À son entrée à l’Élysée, le chef de l’État avait expliqué qu’une imposition plafonnée des hauts revenus serait compensée par le retour des expatriés fiscaux réfugiés en Suisse ou dans d’autres paradis pour milliardaires, parce qu’ils seraient trop fortement taxés en France. Mais le bouclier fiscal, taillé sur mesure pour ces évadés de la solidarité nationale n’a pas fait revenir grand monde. Il a, au contraire, prouvé son injustice dans l’affaire Bettencourt : la femme la plus riche de France a touché un chèque de 30 000 euros de la part du Trésor Public alors même qu’elle avait caché une partie de son immense fortune à l’étranger. À qui fera-t-on croire qu’elle a jamais été réellement taxée à plus de 50 % ?

Le bouclier fiscal est de moins en moins justifiable, mais la volonté de choyer les plus riches reste. On peut douter de l’efficacité d’une telle politique, alors que nous vivons une crise qui a encore creusé le fossé entre les plus riches et la masse des Français. Les 400 traders les mieux payés de la place de Paris ont touché, en 2009, un bonus de 1,65 million d’euros par personne. Combien paient-ils d’impôts sur cette somme ?

A bonne distance

Comme pour se rattraper, après des semaines de silence, le gouvernement français s’emploie désormais à redresser le cap : il affirme se tenir au côté du peuple tunisien, condamne les bandes armées qui créent le chaos et promet sa coopération dans la traque des biens mal acquis par l’ancien président Ben Ali. La colère des Tunisiens, la répression policière violente, puis le départ du chef de l’État tunisien semblent avoir pris de court les autorités françaises. Est-ce la conséquence du soutien inconditionnel à un président censé faire barrage aux islamistes ? Est-ce indulgence coupable en raison d’intérêts économiques trop liés ? Est-ce mauvaise analyse de l’événement ? Ou prudence : la France, comptant une communauté importante de ressortissants de Tunisie et nombre de Français qui y ont des racines, craint d’importer sur son sol des tensions supplémentaires.

Quoi qu’il en soit de ces raisons, la diplomatie française – sur le dossier tunisien comme après la présidentielle ivoirienne – se voit sévèrement critiquée. À vrai dire, trop discrète ou trop impliquée, la France se trouve immanquablement sur la sellette. Indifférence ou ingérence coupables : les accusations sont vite sur les lèvres. Les liaisons ambiguës avec des pouvoirs corrompus ou/et autoritaires ne sont pas l’apanage d’un camp politique. Mais elles ont assez duré. Aujourd’hui, ces nations et leurs peuples, qui ont avec la France une longue histoire tourmentée, ont le désir de tracer leur propre voie et de ne pas se voir dicter la route démocratique à suivre. En témoignent les mesures de respect des libertés publiques annoncées hier à Tunis.

Ce n’est ni à Michèle Alliot-Marie de proposer de former les policiers tunisiens à un maintien de l’ordre républicain, ni à Ségolène Royal de se porter garante du caractère démocratique de futures élections. C’est à l’Europe de prendre le relais, comme l’a fait la chef de la diplomatie de l’UE, Catherine Ashton, en promettant de soutenir la Tunisie dans tous ses efforts pour construire une « démocratie stable », pour préparer et organiser les élections. Avant, un jour que l’on espère prochain, de conférer à la Tunisie nouvelle le « statut avancé » qui resserrerait les liens entre les deux rives de la Méditerranée, d’égal à égal.

Les principaux syndicats de l'éducation boycotteront les vœux de Sarkozy

Les principales fédérations syndicales de l'éducation, la FSU, l'UNSA et le SGEN-CFDT, ont annoncé mardi 18 janvier leur intention de boycotter les vœux de Nicolas Sarkozy mercredi. "Nous n'irons pas à ces vœux qui sont des vœux sur fond d'hypocrisie au moment où l'on annonce des suppressions de postes", a expliqué le secrétaire général de l'UNSA-Education, Patrick Gonthier.

Principale fédération de l'éducation nationale, la FSU a également indiqué qu'elle ne se rendrait pas aux vœux présidentiels. Le boycottage "est certain", a renchéri le secrétaire général du SGEN-CFDT, Thierry Cadart.

Pour la première fois de son histoire, la CGT avait boycotté le 6 janvier, les vœux traditionnels du chef de l'Etat aux syndicats, au patronat et aux associations. Les autres syndicats s'y étaient rendus. Les députés communistes et du Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon avaient eux aussi, une semaine plus tard, boycotté les vœux du président de la République aux parlementaires, mercredi 12 janvier, pour protester contre la politique de l'exécutif.

LA GAUCHE EST OUVERTE AU DIALOGUE, COMME ON LE PEUT CONSTATER.

Les femmes russes s'habillent comme des strip-teaseuses (prêtre orthodoxe)

En Russie, les femmes s'habillent comme des strip-teaseuses et se maquillent comme des clowns: c'est la vision d'un représentant de l'Eglise orthodoxe qui préconise la mise en place dans le pays d'un code vestimentaire pour enrayer ce phénomène.

"Il y a un problème (...), des personnes confondent la rue avec un bar de strip-tease", a écrit Vsevolod Tchapline, chef du département de synode pour les relations entre l'Eglise et la société, dans une lettre ouverte publiée par l'agence Interfax.

Or, "une femme qui est à peine habillée ou maquillée comme un clown (...) ne va certainement pas trouver un homme pour partager sa vie, un homme ayant un minimum d'intelligence et de respect pour soi", a-t-il renchéri.

C'est pourquoi il appelle à la création d'un code vestimentaire en Russie, suivant l'exemple de ceux déjà imposés dans certaines écoles et bureaux.

Ce n'est pas la première fois que M. Tchapline s'en prend à l'allure des femmes russes. En décembre, il avait déclaré que les femmes qui portaient des minis-jupes et buvaient de l'alcool juqu'à l'ivresse ne pouvaient s'en prendre qu'à elles-mêmes si elles se faisaient violer. Il avait alors appelé les femmes à s'habiller de manière plus "sérieuse".

Pour l'ancienne dissidente soviétique et défenseure des droits de l'homme, Lioudmila Alexeeva, cette idée contredit fondamentalement les principes de la Constitution russe.

"C'est une ingérence dans la vie privée qui est formellement interdite par notre Constitution", a-t-elle déclaré sur les ondes de la radio Echo de Moscou.

Le commentaire politique de Christophe Barbier



La mort de Jean Dutourd, réactionnaire et fier de l'être

L'académicien Jean Dutourd, romancier et essayiste, est mort lundi soir à l'âge de 91 ans. Ancien résistant, journaliste, auteur de romans mais aussi d'essais et de pamphlets, il était entré à l'Académie en 1978, élu au fauteuil de Jacques Rueff. 

«J'ai vécu dans le malentendu toute ma vie, disait Jean Dutourd. Je n'en souffre pas. J'en ai même pris philosophiquement mon parti. On m'a toujours prêté des intentions qui n'étaient pas les miennes. On a vu dans mes livres des choses que je n'avais pas mises. Vive les malentendus qui font vendre 200.000 exemplaires !»
Jean Dutourd, un incompris ? On aurait peine à croire que celui qui fut le poil à gratter des lettres françaises pendant plus d'un demi-siècle, provocateur parfois ébouriffant, membre éminent du club des ronchons, proclamant «en arrière toute !», défendant pêle-mêle Chevènement, Papon, les Serbes, le bon Français, le Pape, Louis XV, de Gaulle, les mal aimés et les «incorrects», fut le fruit d'une simple méprise…
Pourtant, il naquit sous le signe du paradoxe, puisque l'état civil mentionne la date du 14 janvier 1920 alors qu'il était né deux jours plus tôt et que son père, distrait, avait oublié de l'aller déclarer. Ce qu'on appelle un baptême !
Et c'est ce même père, dentiste bourgeois mais fils de paysan, qui va élever le petit Jeannot dans le XVIIe arrondissement de Paris. Sa mère ? Il la perd à sept ans, lorsqu'elle est emportée par une tuberculose. Son père l'élève donc seul, rêvant d'en faire un médecin, alors que l'enfant découvre Dumas, Féval, Malot, London, la Comtesse de Ségur… en cachette, et caresse le désir de devenir… concierge.
Au bout de trois essais, ce «cancre» obtient le baccalauréat. Depuis plusieurs années déjà, il fréquentait une jeune femme de trois ans sa cadette, Camille, qu'il épouse durant l'été 1942. Il entre alors en Résistance ( «j'étais devenu français, enfin, moi qui étais si sûr de ne croire à rien et qui me trouvais si intelligent») et participe à la libération de Paris, en «prenant» l'immeuble de Paris Presse, aujourd'hui siège du Figaro .

Empêcheur de penser en rond 

En libérant les lettres, il y entrait comme en un temple. C'est dit : Jeannot sera écrivain. De 1944 à 1947 il est administrateur adjoint du journal Libération , de 1947 à 1950, il dirige deux programmes français à la BBC et de 1950 à 1966, il est conseiller littéraire chez Gallimard. Mais surtout, dès Le Complexe de César , en 1946 (un essai provocateur qui obtient le prix Stendhal), Dutourd ne va plus cesser de publier. Si sa Tête de chien obtient le prix Courteline en 1950, le succès colossal d'Au bon beurre (prix Interallié 1952) le hisse au rang des grands romanciers satiristes. Ce portrait au vitriol d'une famille de crémiers durant l'occupation allemande dérange, provoque et réjouit un public heureux de pouvoir enfin prendre au second degré quatre ans de souffrances et de malheurs. Mais c'est peut-être de là que vient la réputation de Dutourd, son «malentendu» ; car malgré ses romans les plus dégagés, dont l'imposant et magistral Les Horreurs de l'amour, en 1962, Dutourd gardera la réputation du polémiste, de l'empêcheur de penser en rond.
«Il y a évidemment deux hommes en moi : d'une part, le romancier qui voit tout, qui comprend tout, qui aime tout - pour être romancier il faut pouvoir tout aimer y compris les imbéciles et les salauds - et, d'autre part, le satiriste.» Dualité ? Schizophrénie ? Certes non, mais cette ambivalence est si marquée que, lorsque Maurice Schumann l'accueillera sous la Coupole en 1980, le vieux gaulliste dira : «Ce dont on fait grief, en vérité, au journaliste Jean Dutourd, c'est, au contraire, de ne pas être un polémiste mais un écrivain qui dépeint et critique les mœurs d'une époque puis, à partir de là, développe ses réflexions sur la nature humaine ; c'est en un mot de rester moraliste.»
Moraliste, Dutourd l'est, profondément. Car ses livres, qu'ils soient romans (2024 , 1975) essais (Les Taxis de la Marne , 1956), pamphlets (Le Socialisme à tête de linotte, 1983, Le Septennat des vaches maigres , 1984…) dressent le tableau d'une société, d'un monde, que l'auteur brocarde avec aigreur mais aussi tendresse. Surtout, il profite de sa position établie, installée, pour tout se permettre. Malgré l'attentat qui détruit son appartement en juillet 1978 (revendiqué par une obscure «section franco-arabe de refus» sous le prétexte que Dutourd - alors heureusement à Antibes - est un «homme de plume au service de la presse juive»  !) il est élu quelques mois plus tard au Quai Conti, au fauteuil de Jacques Rueff. Dès lors, usant du prestige de l'uniforme, il n'a plus de limites que celles du bon langage. «La société ne salue que les uniformes : ça l'impressionne. Et il est essentiel d'être salué par la société pour être à peu près tranquille.» Son habit vert devient donc «carapace de crocodile», et Dutourd fait feu de tous bois. «Je me sens comme un Peau-Rouge, une espèce de Géronimo, de Crazy Horse. J'ai l'impression que ma race, je veux dire mon peuple, est condamnée. Et je me battrai jusqu'au bout pour ne pas me laisser coloniser, pour que ma culture continue d'exister.» Est-ce cela qui le pousse à bramer, lorsque ses confrères veulent introniser une femme, Marguerite Yourcenar, en 1980 ? «Nous sommes une tribu de vieux mâles coiffés de plumes qui campent sur la Seine depuis trois cent cinquante ans. N'y touchez pas !» s'écria-t-il alors avec Claude Lévi-Strauss. Mais l'affaire devait bien s'achever.
En revanche, il ne tarit jamais de hargne au sujet des décadences de la France, des Français et de leur langue. «J'avais déjà, bien avant d'être académicien, l'amour de la langue française. Je l'aime comme un artiste aime la matière de son art. Comme un homme aime l'âme que Dieu lui a donnée.»
Mais Dutourd ce n'est pas seulement l'idée, le propos, c'est aussi le style. Comme l'écrivait Renaud Matignon au sujet de son très provocateur Feld-Maréchal von Bonaparte (étonnant pamphlet contre la démocratie, paru en 1996) «personne ne sait comme Jean Dutourd manier le paradoxe mêlé de bougonnerie, le naturel combiné à l'élégance, le sacrebleu et le saperlipopette ponctués de subjonctifs, avec des crudités, des familiarités savantes, et parfois une tournure rare, ressouvenue des meilleures garde-robes de la langue française, de La Fontaine à Saint-Simon».
Car si Dutourd fut un journaliste perçant, un chroniqueur piquant (il fut critique dramatique à France Soir de 1963 à 1970 puis éditorialiste dans ce même journal jusqu'en 1999), il fut un homme de lettres, un vrai. N'a-t-il pas traduit, dans les années 1950, Truman Capote, Ernest Hemingway ou Chesterton ? Ses provocations sont l'arbre qui cache la forêt. Alors que cet homme aimait tant la littérature et déclarait avec humour mais sincérité : «J'écris non seulement pour les gens qui m'entourent, mais également pour ceux qui ne sont pas encore nés, ainsi que pour ceux qui sont morts : je tiens essentiellement à l'estime de Flaubert !»

Sincérité pudique 

Flaubert, pourquoi pas ? Mais c'est à Rousseau que Lévi-Strauss songea, en lisant Jeannot, Mémoires d'un enfant (2000), les souvenirs du fils de dentiste parisien. «Je doute que le compliment vous plaise, mais en lisant Jeannot il m'a semblé que je retrouvais le ton des Confessions. » Dutourd, émule du bon sauvage ? On en doute, mais la fraîcheur, la sincérité pudique, l'innocence de ce livre ont désarmé ses plus ardents détracteurs.
«L'enfant n'est pas un résumé ou une préfiguration de l'homme, s'expliqua-t-il alors. L'enfant, c'est un être à part.»
Et pourquoi Dutourd ne serait-il pas un tendre, malgré tout ? Il est vrai que sa réputation l'a toujours précédé. Rendant visite au général de Gaulle, dans les années 1960, ne s'était-il pas entendu dire, comme si cela allait de soi : «Dutourd, on est là pour emmerder le monde, non ?»
Affirmatif, mon Général !

MAM doit-elle partir ?

Évidemment la question est provocatrice. Elle pourrait même sembler partisane puisque c’est un député communiste qui, hier, a demandé à la ministre des Affaires étrangères de quitter le quai d’Orsay. Une pénitence pour expier sa propre faute : avoir proposé au gouvernement tunisien de Ben Ali, le «savoir-faire» d’experts français du maintien de l’ordre pour l’aider à gérer efficacement la répression de manifestations sanglantes.

C’est plus qu’une bévue qu’il s’agit de sanctionner. Plus qu’une de ces gaffes légendaires qui jalonnent l’histoire de la diplomatie française à l’image de cette déclaration de Claude Cheysson, le premier ministre des Relations extérieures de François Mitterrand, considérant publiquement, en 1981, que l’assassinat d’Anouar El Sadate, «horrible en lui-même» pouvait débloquer le processus de paix au Proche-Orient...

À chaud, on s’est demandé, la semaine dernière, ce qui avait bien pu passer par la tête de MAM (Michèle Alliot-Marie), cette bonne ministre, fiable, solide et compétente qui jusque-là avait fait la preuve de ses qualités de femme d’État à la Défense ou à l’Intérieur. Avec le recul, on s’aperçoit à quel point son étrange proposition a été symptomatique du décalage complet du gouvernement français par rapport à la situation à Tunis. À quel point, loin d’être un dérapage, elle a résumé la proximité naturelle de la France avec le régime de Ben Ali.

Au lendemain du triomphe de la Révolution, la citation de la ministre apparaît encore plus insupportable. Presque honteuse tant elle porte en elle tout le soutien implicite apporté jusqu’à la fuite de l’autocrate à son régime policier. Il y a fort à craindre qu’elle laissera des traces, et de l’amertume derrière elles, même si MAM s’emploie, maladroitement, à réécrire l’histoire de sa déclaration malheureuse à l’encre respectable.

En bloquant les avoirs de la famille Ben Ali après avoir refusé de recevoir l’autocrate en exil en France, le gouvernement tente d’oublier son trop grand silence et sa mollesse. Il se rend compte, un peu tard, qu’il y avait d’autres signaux à envoyer au Maghreb. Prétendre ne pas l’avoir fait pour éviter tout reproche de néocolonialisme dans l’ancien protectorat n’est pas sérieux. En 2005, les députés UMP n’avaient pas craint l’ingérence dans l’histoire algérienne en faisant voter un alinéa sur «les aspects positifs de la colonisation». Une initiative qui avait pulvérisé le traité d’amitié franco-algérien pourtant prêt à être signé, ou presque.

À vrai dire, la démission de MAM ne changerait pas grand-chose. Le mal est fait. Mais si la ministre avait eu le bon goût de faire amende honorable, son image - et l’honneur de la France - auraient été sûrement mieux sauvegardés des deux côtés de la Méditerranée.


L'Europe et les terres rares

Pour notre Europe, voici un nouveau sujet de préoccupation : son approvisionnement en « terres rares », ces éléments métalliques, appelés « lanthanides » et utilisés dans les TIC, les technologies de l'information et de la communication (écrans plats, portables, CD, DVD), les technologies vertes (pots catalytiques, éoliennes), certaines applications militaires (missiles, télémètres)... On en compte dix-sept. Les plus rares sont le thulium et le lutécium.

Leur rareté vient de leur dispersion, de leur découverte progressive et, actuellement, du quasi-monopole (95 %) chinois sur leur production. Celui-ci est dû à la richesse du sous-sol en terres rares, surtout en Mongolie. Mais il l'est aussi aux conditions économiques, financières, sociales et environnementales de leur exploitation, toutes conditions qu'aucun État occidental ne peut accepter. En outre, la Chine a réduit ses exportations de 48 % pour 2010 et les réduirait de 30 % pour 2011. Il y a d'autant plus urgence à chercher d'autres sources que la demande va exploser. Il faut donc explorer, trouver, investir et produire ailleurs, mais où ? Ou autrement, mais comment ?

Les experts nous livrent deux réponses qui peuvent surprendre. L'une : trouver dans les décharges (500 000 dans l'Union européenne) par un recyclage des déchets ; l'autre : trouver dans des plantes, dont les algues, capables d' « hyperaccumulation » de métaux. Il est impératif d'y recourir, d'autant plus que les processus de traitement des terres rares, en l'état actuel des techniques, comportent des dangers tant pour les personnes que pour l'environnement, en raison de l'emploi de produits chimiques toxiques et d'acides.

Néanmoins, dans l'immédiat, il faut produire à partir du sous-sol. La reprise de l'exploitation, aux États-Unis (la mine de Mountain Pass, en Californie) et en Afrique du Sud est sérieusement envisagée. En Australie, la compagnie Lynas a racheté à Rio Tinto, à Mount Weld, l'un des plus riches gisements du monde. Au Brésil (650 tonnes produites), au Canada, au Groënland, en Inde (3 000 tonnes) produites, en Russie et au Kazakhstan, il existe des réserves prouvées qu'il va falloir exploiter.

Le sous-sol européen n'est pas dépourvu de terres rares. La Commission européenne a engagé une « Initiative matières premières » qui en concerne quatorze, dont les terres rares. Trois orientations ont été retenues : la sécurisation des approvisionnements, l'inventaire des ressources internes par une exploration en grande profondeur, le recyclage. La Commission doit présenter ses propositions le 26 janvier.

En France, le gouvernement a adopté, en avril 2010, un plan d'action dont le Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) est le principal maître d'oeuvre. Il vise à assurer à nos industries un accès à ces métaux rares, à développer l'exploration (la prochaine à Wallis et Futuna) et le recyclage des déchets.

Sans doute l'importance du défi lancé à nos économies justifierait-elle que, au niveau du G20, l'on réussisse à installer une « gouvernance mondiale » sur les matières premières minérales. Toutefois, il faut surtout s'attendre à une rude compétition entre États, compagnies minières, fonds d'investissement, dont les fonds souverains. C'est pourquoi les institutions et gouvernements de l'Union européenne doivent unir, dans un effort commun, savants, ingénieurs, industriels, financiers, pour que notre Europe ne soit pas complètement marginalisée et dépendante.





Liberté de jasmin

Ils n'ont rien lâché. Ben Ali a fui. Le peuple tunisien ne pouvait croire au catalogue de miracles énoncé dans son incroyable et minable péroraison télévisée. Il ne pouvait accorder le moindre crédit à ce dictateur qui a affamé son pays, l'a privé des libertés fondamentales et a opprimé durement tous ceux qui ne sont pas dans le parti officiel. Comment entendre les promesses alors que pendant le discours les tirs sur la foule continuent ? Le limogeage du gouvernement et l'annonce d'élections anticipées, on le sentait bien, n'étaient rien d'autre qu'une fuite en avant. Une pitoyable tentative pour essayer de sauver ce qui pouvait l'être encore. Ben Ali devait partir, la Tunisie le demandait.

La Tunisie n'en pouvait plus du racket de la famille. Le 17 juillet 2009, une note de l'ambassadeur des États-Unis annonçait l'inéluctable issue et évoquait le malaise de la jeunesse. Une certitude qui renvoie aux déclarations de Mme Alliot-Marie et à nos complicités objectives avec la dictature tunisienne. La France a-t-elle donc tant de dettes envers cet État mafieux qu'elle le protège en bafouant la lutte d'un peuple tellement exaspéré qu'il était prêt à donner sa vie pour la liberté ?

Dans le tourbillon d'hier soir, la situation n'était guère facile à décrypter. Qui a pris le pouvoir ? Le Premier ministre et le parlement soutenaient-ils encore ce système pourri et quel rôle a joué l'armée dans cette journée dont on mesure encore mal les conséquences sur la stabilité du Maghreb ? La fuite de Ben Ali, lâché par les militaires, ouvre une ère nouvelle pour la Tunisie. On remarquera au passage que les représentants de l'Islam n'ont joué aucun rôle dans la transition.

Faire confiance aux continuateurs de l'État policier pour instaurer une démocratie est un leurre. C'est oublier que c'est déjà dans un contexte d'émeutes de la faim que Ben Ali avait enlevé le pouvoir à Bourguiba au terme d'un coup d'État. Mais, entre mirage et désespoir, les Tunisiens ont, cette fois, décidé de jouer la transition démocratique. Ils ne demandent rien d'autre que la paix, la fin de la répression et le progrès. Qu'un gamin ne se soit pas immolé pour rien un soir dans les senteurs de jasmin en voulant écrire le nom de la liberté.

Propriétaire


Tous propriétaires ! Le slogan scandé hier par François Fillon n’a certes rien de révolutionnaire. Il sonnerait même plutôt réactionnaire aux oreilles des plus jeunes et des plus bohèmes, bourgeois ou non. Et pourtant, comment ne pas comprendre ce rêve de l’immense majorité des Français d’avoir son «sam’suffit» ? Un chez soi qui n’est peut-être pas bien grand ni luxueux, mais qui n’est à personne d’autre ? On le sait bien que la vie n’est pas la même quand il faut courir pour régler son loyer, et quand le toit est déjà payé. C’est même là sans doute la plus grande des inégalités françaises, au détriment des plus modestes, et aussi des plus jeunes: comment, quand on a trente ans, une famille et un CDD, s’offrir son logement ? Rien ne sert de se plaindre des «Tanguy» incrustés chez leurs parents: mieux vaut les aider à devenir propriétaire - et ouste, vive la vie !

“Baby Doc”, la cerise sur le gâteau

Au premier anniversaire du séisme, Haïti subit une autre secousse. On ne parlera pas de “réplique”, mais d’un ahurissant bégaiement de l’Histoire. Jean-Claude Duvalier, alias “Baby Doc”, est rentré au bercail ! Personne n’a oublié, là-bas, les quinze ans de terreur imposée par son régime. Les “tontons macoutes”, sinistres miliciens d’État, assassinaient alors à tour de bras. Jusqu’à ce que “le Président à vie” ne soit sommé de déguerpir en 1986. Bon débarras ! Il savourait, depuis, un exil doré sur la Côte d’Azur ; y dépensant sans compter le produit de ses prévarications. À savoir, grosso modo, 100 millions de dollars…

De cet argent volé, aujourd’hui, ses compatriotes auraient vraiment besoin. Sauf que l’ex-dictateur, aux dernières nouvelles, ne vient pas pour les rembourser. Il ne lâchera pas un centime mais veut bien, en revanche, “faire don de sa personne au pays”. Un homme providentiel, lui ! Le pire reste qu’une partie du peuple, considérant le chaos alentour, y croirait presque. “De son temps, au moins, l’ordre régnait”, commence-t-on à entendre. C’est un peu l’équivalent caribéen de la “nostalgie Staline” en Russie.

Le retour de Duvalier, encouragé par le gouvernement actuel, sent la manigance à plein nez. Il embrouille un peu plus le processus électoral déjà fort mal engagé. Les Haïtiens, dimanche, devaient élire un démocrate nouveau. Au lieu de quoi, scrutin reporté, ils virent débarquer un ancien tyran…

Airbus, une leçon d'Europe


Un peu de beaucoup vaut souvent mieux que beaucoup de pas grand-chose ! Le destin croisé d'Airbus et de Dassault est sur ce point révélateur. Au moment ou le premier triomphe une nouvelle fois face à Boeing sur la scène mondiale, il est cruel de constater que le second semble, lui, voir s'assombrir le ciel brésilien dans lequel son Rafale semblait pourtant susceptible de prendre son envol. Airbus, vitrine de l'unité industrielle européenne, s'impose. Dassault, symbole d'une Europe de la défense totalement morcelée, reste en partie cloué au sol.


Quels que soient ses mérites technologiques ou ses problèmes de compétitivité en termes de prix, l'avion de combat de Dassault souffre surtout de devoir affronter trop de concurrents. Qu'il trouve face à lui un chasseur américain n'a rien d'illégitime. Mais il doit aussi batailler, au Brésil comme ailleurs, face à un Gripen suédois, un European Fighter anglo-hispano-germano-italien et l'américain JSF soutenu par des Européens. Le ciel n'est pas assez vaste pour autant d'acteurs. Surtout que, même quand Dassault l'emporte et rafle sur le papier la totalité du marché, les victoires tant de fois anticipées ont tendance à ne déboucher sur rien. De la grosse part de gâteau, il ne reste même pas des miettes.


Ces revers répétés devraient retentir comme autant de signaux d'alarme pour les industriels et les pouvoirs publics européens. Car au-delà du Rafale, ce sont des pans entiers de nos industries déjà menacés aujourd'hui qui risquent de l'être encore plus demain. Des drones aux centrales nucléaires, en passant par les trains à grande vitesse, voire à terme la voiture électrique, sur plus d'un chantier stratégique majeur, l'Europe, à force de se faire concurrence à elle-même, risque de se retrouver prise en tenailles entre ses rivaux historiques américano-japonais et de nouvelles générations d'industriels issus des pays émergents. Les Coréens font déjà de l'ombre aux Français dans le nucléaire. Les trains chinois rivalisent avec ceux d'Alstom ou de Siemens.


A l'inverse, l'exemple d'Airbus mérite de faire école. Même s'il est imparfait et impose une gouvernance complexe. Même s'il contraint les dirigeants de l'avionneur européen à prendre en compte des logiques de retour géographique ou d'équilibres politiques teintés de natio-nalisme. Mettre tous ses oeufs dans le même panier comporte, bien sûr, une part de risque, mais le plus grand risque est bien celui de la désunion européenne.

La valeur d'un homme


Steve Jobs poursuit son chemin de croix. Voilà la troisième fois qu'il s'absente de son entreprise pour raison de santé. A chaque fois, le même scénario se déroule. Un communiqué laconique pour annoncer son retrait. Puis, à son retour, la révélation de la gravité de son mal ajoute à l'inquiétude. Il demande cette fois le respect de sa vie privée. Souhaitons-lui donc un prompt rétablissement et posons-nous peut-être la seule question qui vaille à ce stade : quelle est la valeur d'un patron dans une entreprise ?


Il n'y a pas de réponse unique bien sûr. Nombre de sociétés ont vu disparaître brutalement leur chef, avec des conséquences fort différentes. En France, on se souvient de la mort tragique d'Edouard Michelin en 2006 ou de la disparition de Jean-Luc Lagardère en 2003. Ce dernier incarnait profondément l'entreprise qu'il avait créée, mais n'avait laissé planer aucune ambiguïté sur le nom de son successeur, son propre fils. Il reste que le profil du groupe en a été profondément bouleversé.


Dans le cas d'Apple, on peut clairement attribuer à Steve Jobs la responsabilité du redressement de l'entreprise qu'il avait fondée en 1976. Quand il est revenu en 1997 aux commandes d'Apple, celui-ci était en très mauvaise posture et sa valeur boursière était inférieure à 3 milliards de dollars. Elle approche aujourd'hui les 320 milliards, plus de 100 fois plus. Certes la mesure est imparfaite, mais, dans le même temps, son chiffre d'affaires a été multiplié par près de 10.


Cette performance unique dans les annales doit beaucoup au talent de Steve Jobs. Il a eu la vision de l'explosion du numérique grand public, a su l'imposer en interne, motiver les troupes, recruter les talents, imposer des choix et les communiquer à l'extérieur. Sa valeur est donc considérable. Sans lui, elle ne serait sûrement pas devenue la plus grande entreprise de high-tech au monde en termes de valorisation boursière.


Comme un pays se retrouve à un moment de son histoire dans l'élan d'un Churchill ou d'un de Gaulle, une entreprise peut voir son destin basculer par la grâce d'une seule volonté humaine. Si la valeur d'un homme se mesure plus à sa capacité à donner qu'à celle de recevoir, comme le soutenait Einstein, celle de Steve Jobs est certainement immense.

La question nationale

Avec le talent qu'on lui connaît, Jean-Pierre Chevènement s'interroge, dans son dernier ouvrage, sur l'avenir de la France. Plus exactement, sa réflexion porte sur la nation française comme illustration particulière de l'idée de nation. Son analyse développe un syllogisme aux apparences robustes : la nation est la seule communauté historique d'appartenance des peuples, or elle est le siège des procédures démocratiques, donc sa mise en cause par toute instance supranationale est une menace pour la démocratie. Connaissant le long combat de Chevènement contre la construction européenne depuis son origine, on aura reconnu dans ce syllogisme une nouvelle pique contre l'Europe actuelle.

Même les partisans les plus convaincus de la cause européenne reconnaîtront qu'il y a quelques fondements dans cette critique. Il n'est que de mesurer la montée des prurits identitaires dans de nombreux pays d'Europe pour constater que la cause nationale, pour ne pas dire nationaliste, est vivace. Mais cela justifie-t-il une stratégie de retour à la nation comme réponse à l'angoisse des peuples ? Rien n'est moins sûr. Et ce pour au moins trois raisons. D'abord parce que la première proposition du syllogisme chevènementiste est erronée. La nation n'est pas la seule communauté historique ; c'est même une construction assez récente qui s'est répandue au XIX e siècle, en surplombant des régions, des ethnies, des religions, des cultures diverses. Ensuite, il n'est pas écrit que toute structure supranationale soit antidémocratique. Si les dirigeants nationaux consentaient à faire vivre plus activement le Parlement européen, les opinions n'en seraient sans doute pas là. Enfin et surtout, la question de l'échelle de la puissance nécessaire pour compter dans le monde qui vient est encore plus forte aujourd'hui face à la Chine qu'elle ne l'était en 1950 face à l'Union soviétique. On peut certes légitimement soutenir que l'Union européenne ne défend pas assez énergiquement ses intérêts ; mais laisser entendre que la nation française y pourvoirait mieux, c'est installer une nouvelle ligne Maginot.

L'académicien Jean Dutourd est mort

L'académicien Jean Dutourd, romancier et essayiste, est mort lundi soir à l'âge de 91 ans à son domicile parisien, a-t-on appris de source policière.
Né le 14 janvier 1920, ancien résistant, auteur du Complexe de César paru en 1946 qui obtint le prix Stendhal, Jean Dutourd avait été conseiller littéraire au sein de la maison d'édition Gallimard, éditorialiste et critique dramatique au quotidien France Soir. Il avait également obtenu le Prix Interallié en 1952 pour son roman Au Bon Beurre.
Auteur également de pamphlets, Jean Dutourd était entré à l'Académie française le 30 novembre 1978, élu au fauteuil de Jacques Rueff. Quelques semaines plus tôt, le 14 juillet 1978, il avait avait été la cible d'un attentat qui détruisit son appartement parisien, sans faire de victime.
Jean Dutourd était réputé pour son anti-conformiste et son franc-parler. Il est intervenu pendant de nombreuses années au cours de l'émission Les Grosses Têtes, sur la radio RTL, présentée par Philippe Bouvard. Il avait arrêté sa participation quotidienne à l'émission depuis septembre 2008.

Steve Jobs en retrait pour se soigner

Dans une lettre à ses équipes, Steve Jobs a annoncé mercredi soir son intention de se mettre temporairement en retrait de la direction opérationnelle d'Apple pour des raisons de santé. Son retour est prévu pour la fin juin. Tim Cook sera chargé d'assurer l'intérim (voir l'article Tim Cook l'autre génie d'Apple).

La cotation de l'action Apple a été suspendue dans les transactions hors séance, où elle y perdait déjà plus de 10%.

Voici la lettre, dans son intégralité:

"Je suis certain que vous avez tous lu ma lettre de la semaine dernière, où j'ai partagé quelque chose de très personnel avec la communauté Apple, écrit Steve Jobs. Malheureusement, la curiosité autour de ma santé continue d'être un motif de distraction, non seulement pour ma famille et moi-même, mais aussi pour tout le monde chez Apple. De plus, durant la semaine passée, j'ai appris que mes soucis de santé étaient plus complexes que je l'avais initialement pensé.

Afin d'échapper aux projecteurs et de me concentrer sur ma santé, et afin que chacun au sein d'Apple puisse se concentrer sur la sortie de produits extraordinaires, j'ai décidé de prendre un congé médical jusqu'à la fin du mois de juin.

J'ai demandé à Tim Cook de prendre en charge les opérations d'Apple au jour le jour, et je sais que le reste de l'équipe de direction fera un excellent travail. En tant que PDG, je prévois de rester impliqué dans les décisions d'importance stratégique, quand je serai en retrait. Notre conseil d'administration soutient pleinement cette décision.

J'ai hâte de vous revoir tous cet été.

Steve
"