mardi 13 mai 2014
Giscard à la barre
Le concert de mépris, de médisance et de caricature médiatique qui a suivi l'interview de Valéry Giscard d'Estaing ne pouvait qu'inciter à lire ses véritables propos dans Le Point. Outre que l'on souhaite à beaucoup de critiques d'être capables de formuler à 88 ans des jugements aussi lucides sur le passé, le présent et l'avenir, force est d'admettre qu'il n'est pas sans intérêt de connaître les opinions du seul président économiste qu'ait connu la Ve République - celui-là même qui avait surmonté en son temps un double choc pétrolier d'ampleur abyssale, sans pour autant plonger son pays dans la récession et le chômage. Reprenons l'essentiel de ses propos :
"Le pacte de responsabilité contient toujours cette idée que l'État peut et doit contrôler la création d'emplois. C'est une hérésie !"
Difficile de le contredire : l'État sait créer des emplois publics aux frais du contribuable et des emplois d'avenir sans lendemain, il peut décourager l'embauche par des lois et règlements aberrants, mais il est incapable de se substituer à l'entreprise privée pour créer de véritables emplois productifs et créateurs de richesses. La double influence d'une propagande marxiste trop bien ingérée et d'un keynésianisme trop mal digéré (1) a englué depuis trente-trois ans notre pays dans une impasse économique, que les bonnes âmes mal inspirées continuent à appeler "modèle français", et les mauvaises langues bien informées "préférence pour le chômage".
"Après le double traumatisme de la guerre et de la défaite, notre pays s'est retrouvé plus à gauche qu'il ne l'était dans sa structure profonde. L'OPA des communistes sur la Résistance, qu'ils n'avaient pourtant rejointe que tardivement, a encore précipité le mouvement. Tout cela a profondément marqué notre fonctionnement politique, économique et social. Je me souviens qu'à l'Ena nos professeurs célébraient souvent avec admiration les succès de l'économie soviétique."
Rien n'est plus vrai : à Sciences Po, vingt ans plus tard, ils le faisaient encore - avec en prime un cours sur le génie de Mao Zedong et les fabuleuses réalisations des Cent-Fleurs, du Grand Bond en avant et de la Révolution culturelle... On pouvait espérer que, depuis lors, les cours d'économie dispensés au lycée mettraient un peu de bon sens dans ce fatras idéologique, mais si l'optimisme doit être tempéré à cet égard, c'est que l'on entend bien trop de lycéens parler de leur "prof d'éco trotskiste qui radote sur les suppôts du grand capital à la solde de l'impérialisme américain exploiteur du prolétariat en lutte".
"Pendant mon septennat, il n'y a pas eu une seule intervention politique ni une écoute téléphonique contre un de mes concurrents. Il n'y a pas eu non plus de suicide à l'Élysée."
N'exagérons rien : il y a tout de même eu l'affaire Boulin et l'affaire de Broglie, pas très loin de l'Élysée. Il est vrai par contre que les maîtresses et les familles parallèles des présidents n'étaient pas entretenues aux frais du contribuable, et que les ministres s'abstenaient de faire des discours moralisateurs tout en jonglant avec l'argent public et en dissimulant leur magot en Suisse...
"Je n'étais pas convaincu qu'il fallait supprimer la peine de mort. J'ai toujours été du côté des victimes. [...] Au fil du temps, la peine de mort ne s'appliquait plus qu'aux cas les plus abominables, et je croyais en son caractère dissuasif. Ce que m'avait notamment confirmé Edgar Faure, grand avocat, pourtant très libéral, après une rencontre avec un détenu à Fresnes. Ne l'oubliez pas : ce n'était pas le chef de l'État mais la justice qui condamnait à la peine de mort. Le président n'avait qu'un droit de grâce."
Comme De Gaulle et Pompidou avant lui, le président Giscard d'Estaing était un pur produit de son époque : c'était un temps où l'article 2 de la Convention européenne des droits de l'homme de 1950 autorisait la peine de mort ; un temps où l'écrasante majorité du peuple français considérait qu'au-delà d'un certain degré de noirceur dans le crime on avait forfait à son droit à la vie ; un temps où l'on était persuadé de protéger les futures victimes grâce à un remède souverain contre la récidive ; un temps où personne ne versait une larme sur l'exécution de Landru ou du docteur Petiot ; un temps où l'opinion mondiale n'aurait pas compris que les chefs nazis jugés à Nuremberg soient admis à faire valoir leurs droits à la retraite plutôt que d'être pendus haut et court ; un temps où les truands tentés par l'assassinat de sang-froid ne disaient jamais "de toute façon, je n'ai rien à perdre", car ils avaient toujours quelque chose à perdre : leur tête, à laquelle beaucoup avaient la faiblesse de tenir. (2)
De nos jours, au nom des mêmes droits de l'homme, la mode est à la compassion pour les criminels les plus féroces, qui peuvent même se payer le luxe d'agresser leurs gardiens en prison et de récidiver à la sortie. C'est au nom de cet angélisme "moderne" que nos compatriotes auront le privilège de croiser un jour dans la rue - ou sur leur palier - quelques victimes de la société comme Francis Heaulme ou Youssouf Fofana. Les héros de l'abolitionnisme se contenteront de changer de trottoir - ou de palier - en espérant courageusement que la récidive frappera plutôt leur voisin. C'est le progrès...
"On mesure aujourd'hui les limites de l'Union européenne telle qu'elle a été construite lors du traité de Nice. [...] On ne peut pas diriger une organisation avec 28 pays dont chaque représentant veut parler plus haut que l'autre. L'égalité entre les petits et les grands États n'est pas réaliste. Chypre ne pèse pas autant que l'Allemagne. C'est pourquoi on a tant de mal à avancer. L'Europe à 28 va évoluer pour devenir une sorte d'ONU régionale à vocation commerciale."
En d'autres termes, un immense couloir de libre circulation, sans frontières, sans protections douanières, sans politique économique, étrangère, sociale, fiscale ou militaire communes - "une machine à caqueter", pour reprendre le vocabulaire gaullien. Mais même Jean Monnet et Robert Schuman auraient sans doute été effarés par cet aboutissement démesuré de leur idéal - et il n'est pas certain que l'entrée de la Turquie et du Kosovo dans cet édifice bariolé aurait été de nature à les rassurer...
"Tout ce qui faisait notre force, tel notre système éducatif, est en panne. Il ne permet plus de réussir au mérite, il est même de plus en plus inégalitaire. Les 35 heures ont cassé la valeur du travail. On passe son temps à prendre des vacances les unes après les autres. [...] Et la France est, de tous les pays industrialisés, libéraux ou socialistes, celui qui a l'âge de la retraite le plus bas, même pour des tâches qui ne sont pas particulièrement pénibles. [...] J'observe de nombreux signaux de décadence. [...] Autant de symptômes d'affaiblissement."
Difficile à contester, mais plusieurs de ces concepts sont devenus inintelligibles pour nos ministres en général, et pour leur président en particulier : "panne du système éducatif", "réussite au mérite", "valeur du travail", "signaux de décadence" et "symptômes d'affaiblissement" ont été éclipsés par "loisirs", "allocations", "obligations d'embauche", "théorie du genre" et "compte pénibilité". En 1981, le réaliste qu'était Giscard d'Estaing avait été chassé de l'Élysée par un illusionniste qui prétendait changer la vie ; trente-trois ans plus tard, il retrouve à l'Élysée un somnambule qui croit réenchanter le rêve. Sa perplexité est aussi visible que compréhensible.
Bien sûr, en tant que président, VGE a fait des erreurs - qui n'en fait pas ? En tant que romancier, on peut également lui préférer Jean d'Ormesson. Mais il est difficile de nier qu'à l'approche de sa neuvième décennie, Giscard reste un témoin lucide à la barre de l'histoire...
(1) Ceux qui reliront Keynes dans des traductions acceptables constateront que, contrairement à ce qui est enseigné en France, le noble lord prônait un déficit budgétaire destiné aux investissements productifs à moyen et long terme, et non une distribution d'argent public sans contrôles ni contreparties. Également oubliée chez nous cette affirmation dans Means to Prosperity : "Il ne faut pas s'étonner que la fiscalité puisse être suffisamment élevée pour être contre-productive, et qu'avec le temps [...], la réduction de l'impôt puisse avoir de meilleures chances d'équilibrer le budget que son augmentation."
(2) Mais les statistiques sont impuissantes à comptabiliser ceux qui se sont abstenus de passer à l'acte dans ce souci de conservation élémentaire.
Giscard, le moderne éternel
L'Histoire ressemble à ces vieilles dames lunatiques qui refont sans cesse leur testament : elle n'arrête pas de réviser ses jugements. Elle encense, brûle, puis réhabilite à un tel rythme que, souvent, on ne retrouve plus ses petits. Ce n'est pas vrai pour Giscard : quarante ans après son élection à la présidence, le 19 mai 1974, son bilan a été considérablement réévalué.
Si la postérité a bien réussi à Giscard, c'est que cet homme d'État, réputé conservateur, savait faire fonctionner les deux hémisphères de son cerveau, le droit et le gauche. Il ne s'est pas laissé enclouer dans sa famille politique. Il a continuellement enfreint les règles. Aujourd'hui, avec le recul, il apparaît ainsi comme l'une des grandes figures du XXe siècle. Loin après de Gaulle, bien sûr, mais au même titre que Clemenceau, Mitterrand et quelques autres.
Le legs principal de Giscard est d'avoir montré que, contrairement à la légende, la France n'est pas un pays ingouvernable, accroché à son passé et rétif aux réformes. Ou bien VGE les a conduites au pas de charge. Ou bien il les tricotées avec soin, en veillant bien à ne pas casser les fils. En tout état de cause, il avançait : la France d'avant sa présidence n'avait plus rien à voir avec celle d'après.
Une main d'acier dans un gant de velours : c'est ce mélange de souplesse et d'inflexibilité qui a permis à Giscard de réussir là où tant d'autres ont, par la suite, échoué. Dans Une modernisation interrompue (1), une somme très complète sur son septennat, Raymond-François Le Bris, ancien directeur de l'Éna, donne presque le tournis quand il énumère toutes les réformes mises en oeuvre sous la République giscardienne.
C'était il y a si longtemps déjà. En ce mois de mai 1974, le groupe suédois Abba vient de gagner le concours de l'Eurovision avec sa chanson Waterloo et Michel Sardou caracole en tête des hit-parades avec Je veux l'épouser pour un soir. À l'époque, les femmes ont certes le droit de vote mais, en fait, surtout celui de se taire. Considérées comme des sous-êtres, elles ne peuvent même pas ouvrir un compte en banque sans l'autorisation de leur mari. Si elles commettent l'adultère, c'est un délit pénal dans tous les cas de figure, alors que les maris sont seulement coupables quand ils les trompent au domicile conjugal. C'est sous la République giscardienne que les femmes sont enfin sorties de l'ère de Mathusalem avec, pour couronner le tout, la loi Veil sur l'avortement.
Il reste toujours en nous quelque chose de Giscard. Son empreinte reste forte dans la société française, qu'il a tant "féminisée". Mais, sur le plan économique aussi, il a laissé la France en bien meilleur état qu'il ne l'avait trouvée, notamment parce qu'il sut mettre fin au courtelinesque contrôle des prix.
Certes, la République giscardienne a connu des loupés ou des ratés : par exemple, la peine de mort n'a pas été abolie et le regroupement familial n'a pas été bien pensé. Mais quelques arbres ne peuvent cacher la forêt de réformes de toutes sortes, comme la réalisation du parc électronucléaire civil, les premiers plans d'économies d'énergie, le lancement du TGV, la création de la CNIL (Commission de l'informatique et des libertés), et j'en passe.
Quand Giscard et Barre transmettent les clés de l'État à Mitterrand en 1981, la France se porte bien, la désindustrialisation n'a pas encore commencé. Les statistiques économiques leur sont favorables, ce qui leur fait une belle jambe. En dépit des deux chocs pétroliers qui ont coûté très cher au pays, le déficit budgétaire est resté quasi inexistant et la dette publique a été contenue au niveau tout à fait acceptable des 20 % par rapport au PIB. Quant au taux de chômage, il tourne, à la fin de la République giscardienne, autour de... 6 %.
C'était un temps où les gouvernants se préoccupaient surtout du long terme et de l'intérêt général. Mais, apparemment, les Français voulaient autre chose. C'est ainsi que, pendant les trois décennies qui ont suivi, tout a déraillé. Les déficits budgétaires. L'endettement public, surtout dans les années 90. Ou encore le commerce extérieur avec les stupides "relances par la consommation".
Un mystère demeure : pourquoi Giscard, fort de son bilan, a-t-il perdu l'élection présidentielle de 1981 ? Peut-être était-ce le tour de Mitterrand. Sans doute VGE avait-il braqué contre lui une partie de la droite tandis que la solitude du pouvoir l'éloignait du peuple. Sans parler de l'explication aussi déjantée que métaphysique de l'écrivain Jean Cau, qui, après avoir rappelé son image de "surdoué ayant une case en trop", écrivait : "On a tout dit, sauf qu'il était physiquement trop propre et croyait qu'il entraînerait la France derrière lui en laissant dans son élégant sillage un parfum délicat de savonnette."
Mais ce parfum délicat n'est-il pas toujours celui des bonnes gestions, quand les comptes sont tenus ?
1. France-Empire.
L’échec politique par l’absence de preuve
L’échec politique par l’absence de preuve
Les impôts baisseront-ils en 2014 comme le dit Manuel Valls, en 2017 comme l’assurait Jean-Marc Ayrault, entre les deux dates comme l’affirme François Hollande ? Et d’ailleurs, les impôts baisseront-ils vraiment ? Et pour combien de gens ?
Les dépenses publiques reculeront-elles de 50 milliards d’euros ? Ou bien augmenteront-elles de 50 milliards de moins que prévu ? Et d’ailleurs, ce chiffre sera-t-il même atteint ? Et en combien de temps ?
Où qu’ils se tournent, François Hollande et Manuel Valls ont aujourd’hui un redoutable problème à résoudre : faire la preuve de ce qu’ils avancent. Au moment où les Français remplissent leurs feuilles d’impôts, le maniement de la calculette fait des ravages dans les foyers, y compris dans les ménages des classes moyennes à qui le gouvernement avait promis une sorte de neutralité fiscale. Et côté dépenses, Bruxelles a déjà laissé entendre que la crédibilité perdue de la France n’encourageait pas à imaginer qu’elle allait respecter ses engagements de réduction des déficits.
C’est le piège dans lequel s’est enfermée la gauche, à force de promesses intenables et d’engagements approximatifs. Un piège que chaque déclaration –nombreuses en ce moment- aiguise un peu plus par le flou qu’elle installe. Un piège dont elle ne pourra sortir qu’en affichant des résultats. Pas seulement sur le chômage, promu à tort unique thermomètre de l’efficacité de la gauche au pouvoir : sur la baisse des impôts, sur le retour de la vraie croissance, sur la liberté d’entreprendre sans se faire assommer de paperasse et de taxes, sur la sécurité des biens et des personnes, les Français réclament des preuves. Tant qu’elles ne seront pas là, mesurables, quantifiables, opposables, la gauche courra en vain derrière son pouvoir de persuasion.
François Hollande n’a rien obtenu en Allemagne, voilà pourquoi
François Hollande a encore passé une semaine épouvantable. Entre une interview ratée à BFMTV, mardi et un week-end chez Angela Merkel qui ne comprend plus rien de ce qui se passe en France, l’actualité ne lui a apporté aucun motif de satisfaction. A tel point, que le monde des affaires n’attend plus rien de l’Elysée et se raccroche à Manuel Valls (à Matignon) et à Michel Sapin (à Bercy) pour trouver des solutions pragmatiques.
La situation de François Hollande est épouvantable. La stratégie de communication qui consiste à reconquérir sa majorité n’a eu aucun écho. L’interview qu'’il a proposé à BFMTV lui a fait plus de mal que de bien. Il était pourtant demandeur. Cette émission a été suivie (2 millions de personnes environ), beaucoup commentée sur les chaînes d’info mais pratiquement pas reprise par les grandes chaînes et par la presse et complètement inaudible par l’opinion. Pas étonnant. Une fois de plus, il s’est trompé de cible. Il s’est essentiellement adressé à son électorat qui ne l’écoute plus, alors qu’il est président de tous les français. François Hollande n’est plus le chef de la majorité. C’est donc l’ensemble des Français qu’il devrait essayer de convaincre. Peine perdu, 80% des Français sont mécontents.
La cérémonie du 8 mai a été désastreuse de ce point de vue. D’ordinaire, les chefs d’Etat mesurent leur popularité au nombre de curieux qui se massent sur les Champs Elysées. Cette année, il y avait beaucoup de CRS (normal), beaucoup de barrière de sécurité (habituel) sauf que toutes ces précautions n’ont servi à rien, il n’y avait pas un chat.
En fin de semaine, l’invitation d’Angela Merkel à venir goûter les charmes de la mer Baltique, avec dîner et balade en bateau, ne l’emballait guère. Son service de presse a donc fait dire que le président français avait beaucoup de sujets à aborder , l’Ukraine , Alstom, la BCE, les nominations à la commission… la Chancellerie a fait dire pour sa part, que cette invitation était personnelle et amicale, les sherpas n’étaient d’ailleurs pas présents, mais que le but était surtout d’améliorer la compréhension mutuelle , sous-entendu, l’Allemagne a vraiment besoin de comprendre comment fonctionne le président français, parce que ça commence à être inquiétant.
La presse allemande vendredi ne parlait pratiquement pas de cette visite mais a consacré des pages à la situation économique française catastrophique. La presse financière demandait à Angela Merkel de tout faire pour ouvrir les yeux des Français. Sur le fond, les dossiers listés par l’Elysée sont évidemment importants mais en réalité, il n y a guère de marge de manœuvre. Sur chacun d’eux les jeux sont faits.
Par conséquent, François Hollande qui espère l’appui et le soutien de l’Allemagne, se trompe grandement. Il n’a apporté aucune proposition.
La position allemande est claire, il faut que la France fasse le ménage chez elle, dans ses comptes et ses structures avant de revendiquer des avancées européennes. Les promesses ne suffisent pas. Pour les Allemands, le plan de restructuration budgétaire français n’est pas suffisant. Angela Merkel l’a dit et répété. Surtout que pour l’instant, personne n’a l’assurance que le plan sera exécuté.
La position allemande est claire, il faut que la France fasse le ménage chez elle, dans ses comptes et ses structures avant de revendiquer des avancées européennes. Les promesses ne suffisent pas. Pour les Allemands, le plan de restructuration budgétaire français n’est pas suffisant. Angela Merkel l’a dit et répété. Surtout que pour l’instant, personne n’a l’assurance que le plan sera exécuté.
Pour les chefs d’entreprise français et allemands, encore faudrait-il délivrer des résultats. Le monde patronal attend désormais beaucoup plus de Manuel Valls à Matignon et de Michel Sapin à Bercy pour avoir une petite chance de voir quelques solutions pragmatiques émergées. Le Premier ministre a convaincu les patrons que son objectif était d’obtenir des résultats en termes d’activité et d’emploi. Il a donc une obligation de résultats... Alors que le président de la République, a donné le sentiment lui, d’avoir des obligations de moyens. Les moyens étant forcément de gauche. Or ce n’est plus le sujet. Le sujet est de sortir de ce piège où on est enfermé, depuis deux ans, sans aucune visibilité.
La conclusion est que sur tous les dossiers que François Hollande a emportés en Allemagne et qu’il considère comme sensible, la position française est peu crédible.
Sur l’Ukraine, les Etats-Unis reprochent à la France ses ambiguïtés liées à l’intérêt commercial. (Le coup de frégates françaises vendues aux Russes était un coup bas, mais plutôt que d’assumer l’activité commerciale, le gouvernement s’est excusé en expliquant que cette affaire avait été initiée par le gouvernement précèdent, ce que Gérard Longuet a assumé clairement).
Au-delà, faut dire que le monde des affaires français comprend mal l’attitude très anti-Poutine de Paris dans le sillage de l’Amérique. Les Etats Unis n’ont aucun intérêt à ménager la Russie de Vladimir Poutine. Pour les Européens, la situation est beaucoup plus compliquée à gérer. D’abord parce que les populations en Ukraine sont très russophones. En Russie, nous avons comme les industriels allemands, des intérêts économiques majeurs (le gaz, l’automobile, la banque). L’Allemagne plaide donc pour une position commune mais prudente. Jacques Attali qui serait, semble-t-il, encore écouté par François Hollande lui a fait dire en fin de semaine que d’écarter Poutine du jeu international n’était pas forcément judicieux. L’idée de l’exclure du G8, n’est pas forcément très habile. Contre l’avis des Etats-Unis, la France va se rattraper et l’inviter aux cérémonies commémoratives du débarquement.
Sur l’Ukraine, les Etats-Unis reprochent à la France ses ambiguïtés liées à l’intérêt commercial. (Le coup de frégates françaises vendues aux Russes était un coup bas, mais plutôt que d’assumer l’activité commerciale, le gouvernement s’est excusé en expliquant que cette affaire avait été initiée par le gouvernement précèdent, ce que Gérard Longuet a assumé clairement).
Au-delà, faut dire que le monde des affaires français comprend mal l’attitude très anti-Poutine de Paris dans le sillage de l’Amérique. Les Etats Unis n’ont aucun intérêt à ménager la Russie de Vladimir Poutine. Pour les Européens, la situation est beaucoup plus compliquée à gérer. D’abord parce que les populations en Ukraine sont très russophones. En Russie, nous avons comme les industriels allemands, des intérêts économiques majeurs (le gaz, l’automobile, la banque). L’Allemagne plaide donc pour une position commune mais prudente. Jacques Attali qui serait, semble-t-il, encore écouté par François Hollande lui a fait dire en fin de semaine que d’écarter Poutine du jeu international n’était pas forcément judicieux. L’idée de l’exclure du G8, n’est pas forcément très habile. Contre l’avis des Etats-Unis, la France va se rattraper et l’inviter aux cérémonies commémoratives du débarquement.
En tout état de cause, les chefs d’état et de gouvernement, le mieux placé pour négocier avec Poutine c’est Angela Merkel qui est d’une très grande prudence, depuis le début des événements en Ukraine.
Sur Alstom, le dossier est de plus en plus confus et la position française accroît encore la confusion. Le ministre de l’Economie et le président français ont recommencé à demander qu’on étudie une solution franco-allemande alors que Siemens n’a toujours pas déposé son dossier de candidature et que l’entreprise allemande ne le déposera sans doute pas. Le PDG de Siemens est venu à l’Elysée vendredi matin dire à Emmanuel Macron le conseiller économique du président que la présidence de Siemens et les syndicats étaient opposés à cette opération.
Angela Merkel sait tout cela. Elle ne prendra pas de position publique sur cette question qui est du ressort de la gouvernance d’entreprise. Dans ces conditions, on ne voit pas ce que François Hollande peut attendre de la chancelière. On ne voit pas, ce que le ministre français de l’Economie a pu obtenir de son homologue allemand hier après-midi à Berlin.
Angela Merkel sait tout cela. Elle ne prendra pas de position publique sur cette question qui est du ressort de la gouvernance d’entreprise. Dans ces conditions, on ne voit pas ce que François Hollande peut attendre de la chancelière. On ne voit pas, ce que le ministre français de l’Economie a pu obtenir de son homologue allemand hier après-midi à Berlin.
La Banque centrale européenne , la politique monétaire et le niveau de l’Euro , sont des sujets de débats permanents pour la classe politique française qui considère que la BCE ne soutient pas l activité, que la politique monétaire pourrait être plus généreuse à l’image de ce qui se passe aux USA, et que le niveau de l’euro est trop fort. Pour beaucoup de Français, ce débat serait un sujet de discorde avec l’Allemagne qui prône un respect des traités et de l’indépendance de la banque centrale européenne. Le problème, c’est que ce débat n’existe qu’en France. François Hollande n’obtiendra donc aucun assouplissement parce que pour la chancelière, le problème européen n’est pas monétaire. Le problème est dans l’acceptation de chacun des disciplines budgétaires. Le débat monétaire n’agite que les Français qui, comme par hasard refusent de se plier aux réformes structurelles et continuent d’emprunter massivement pour financer leur train de vie.
Comparer le fonctionnement de la BCE et celui de la réserve fédérale américaine en regrettant le dynamisme monétaire américain traduit une méconnaissance totale du système américain. La réserve fédérale opère sur un état fédéral, uni par une constitution américaine qui gère les rapports entre les Etats et la fédération. Ces rapports sont régis par un certain nombre de contraintes que chacun doit respecter. En gros, la FED, la banque centrale américaine qui crée de la monnaie en rachetant de la dette publique, n’a pas à choisir entre la dette californienne et celle du Wyoming ou de la Floride. Chaque Etat doit se débrouiller pour financer ses dettes dans le cadre des accords passés avec le gouvernement. Le gouverneur de chaque état est d’ailleurs responsable des finances de son Etat.Lorsqu’il y a quelques années, la Californie est tombée en faillite, elle n’a pas obtenu d’aide des autres Etats. Elle a restructuré sa dette, diminué ses dépenses de fonctionnement et augmenter ses impôts. La ville et l’Etat de New-York ont été redressés par Bloomberg en toute indépendance. Les travaux d’équilibre ont été douloureux mais les chantiers ont été ouverts. Demander à la BCE d’intervenir sur la dette publique reviendrait à lui demander de choisir entre la dette grecque et la dette italienne ou Française. Ce choix ne peut pas se faire, sans un système fédéral de gouvernance qui fixerait les contraintes de gestion à chacun.
Le nouveau traité de l’euro, qui commande une harmonisation budgétaire, puis l’application de la règle d’or, l’examen préalable par la commission de la loi de finances va dans le sens d’un plus grand fédéralisme. On aurait pu attendre de François Hollande, disciple de Jacques Delors, qu'il préconise une évolution de l’Europe, vers plus de fédéralisme et plus de gouvernance politique, moyennant quoi, la BCE aurait pu se rapprocher de la FED. François Hollande n’a rien proposé.
Faute d’initiatives politiques, l’Allemagne demande l’application du traité monétaire. Ce qui la protège de toute dérive financière qui pourrait lui coûter de l’argent. D’autant que la situation ne gêne pas l’économie allemande. Alors que l’économie allemande (très exportatrice) pourrait bénéficier le plus d’une baisse de l’euro, les entreprises ne le réclament pas parce qu’elles ont trouvé leur compétitivité ailleurs que dans la manipulation de la monnaie.
Pendant ce temps-là, les responsables politiques français en viennent encore à réclamer ce type d’expédients, alors que les entreprises elles, réclament des reformes structurelles de l’Etat.
Henri De Castries, le président d’Axa a l’habitude de dire que « la France est comme ces alcooliques qui promettent en permanence à leur famille qu’ils vont s’arrêter de boire mais qui demandent à chaque fois un dernier verre pour tenir debout. » D’une certaine façon, le président français est allé voir Angela Merkel, il lui a promis que le plan de compétitivité serait appliqué mais qu’’avant, il avait besoin d’un dernier petit coup à boire pour tenir le choc.
Les Femen seraient-elles des lopettes ?
Les Femen seraient-elles des lopettes ?
L’enlèvement de plus de 200 lycéennes nigérianes par les islamistes de Boko Haram, qui veulent les vendre comme esclaves, suscite, nous dit-on, « une émotion planétaire ». Il aura fallu du temps : les jeunes filles ont été kidnappées mi-avril…
Du coup, on s’aperçoit (alors qu’on massacre du chrétien au Nigeria depuis des années) que la moitié des Etats de ce pays au fédéralisme fantoche appliquent la charia depuis 2001 (ce qui explique que les dingos de Boko Haram n’aient pas été encore éradiqués). On s’aperçoit aussi – mais on ne le dit pas trop par crainte d’être zemmourisé – que l’esclavage pratiqué en Afrique plusieurs siècles avant le « commerce triangulaire » de sinistre mémoire, perdure impunément. Dans certaines zones (celles à majorité musulmane) de l’Afrique de l’Ouest il y aurait, à l’heure actuelle, plus de cinq millions d’esclaves (tous négroïdes, faut-il le préciser).
Des jeunes filles, menacées des pires horreurs, aux mains de tortionnaires pithécanthropes, voilà, m’étais-je dit naïvement, un thème de mobilisation significatif pour les Femen qui se piquent d’abhorrer les religions (mais le christianisme surtout) et de s’associer au moins aux déclarations désespérées (même si elles ne changeront rien au schmilblick) de Michelle Obama, Hollande, Angelina Jolie etc., contre cette abomination.
Eh bien, curieusement, aucune réaction des zombies dépoitraillées qui, en toutes occasions, n’hésitent pas à s’exhiber à tous vents ! Du coup, je me pose la question : les Femen seraient-elles des lopettes ? Car, tout bien pesé, si je repasse en revue leurs différents « exploits » (dont certains carrément blasphématoires et dégueulatoires), je m’aperçois qu’elles roulent surtout des mécaniques (si on peut dire) en Europe. A la seule exception d’une démonstration en Tunisie d’où elles se sont sorties (grâce à des protections diverses) les cuisses propres (rappelons que femen signifie « cuisse » en latin). Sûr que faire de la provoc dans nos pays, c’est plus fastoche et beaucoup moins risqué que de se porter, au Nigeria, au secours de vraies victimes d’un véritable obscurantisme et d’une barbarie cruelle.
Quelle action spectaculaire pour ces Erynies pourtant si elles débarquaient au Nigeria, dans l’Etat du Bornou (où sévit particulièrement Boko Haram), commençaient par faire leur cirque dans deux ou trois mosquées, puis se proposaient aux joyeux drilles islamistes, roberts à l’air, à la place des jeunes Haoussas kidnappées (et évaluées à 8 ou 10 euros sur les marchés d’esclaves du coin, quand la Femen caucasienne se négocierait à prix d’or). On peut toujours rêver…
Puisqu’on en est au chapitre des lopetteries, une remarque en passant. Le député UMP Thierry Mariani, autre rouleur de mécaniques à usage médiatique, avait déclaré, à propos de l’affaire nigériane : « L’enlèvement par la secte Boko Haram rappelle que l’Afrique n’a pas attendu l’Occident pour pratiquer l’esclavage. » Il aurait même dû dire : « islam » plutôt qu’Afrique, mais il ne faut pas trop lui en demander…
Pour une fois qu’il sortait de la pensée unique, tout le monde, à commencer par les habituels chiens couchés, lui est tombé dessus. A continuer avec Copé, autre foudre de guerre armé d’un sabre de bois, qui a appelé Mariani pour lui tirer les oreilles. Et ça a marché : « Il m’a dit que ses propos avaient dépassé sa pensée. »
Lamentable ! Que les Femen n’aient pas de cojones, normal, mais Copé et Mariani, quand même…
CDI, temps de travail, smic et fiscalité des comportements : ces rigidités françaises qui coûtent tellement cher à ceux qu’elles sont censées protéger
Censées être des acquis sociaux au départ, les réglementations autour du monde de travail étouffent l'activité économique et desservent indirectement les premiers concernés que sont les salariés. Des sujets que le Premier ministre Manuel Valls, invité au 20h de TF1 du dimanche 11 mai, aurait été inspiré d'aborder.
Le temps de travail
Gilbert Cette : dans le domaine du temps de travail, le vrai problème est en France l'extrême complexité du Code du travail en ce qui concerne le droit de la durée du travail. Cela s'explique notamment par la superposition de lois communautaires, donc internationales, à un dispositif français déjà très abondant au niveau législatif. Cette complexité représente pour nos entreprises un coût concret de compréhension et de mise en œuvre qui est certes une aubaine pour la profession de juriste mais qui reste paralysante pour l'ensemble de l'économie et surtout pour les PME. A moins d'être un spécialiste de la question, il est devenu impossible aujourd'hui de comprendre le droit de la durée de travail dans toutes ses subtilités. Une fois que ce constat est fait, une réponse reste toutefois à trouver. Dans plusieurs des travaux que j'ai pu mener avec Jacques Barthélemy nous avions tenté l'idée suivante : donner aux partenaires sociaux, au niveau des entreprises et des branches, la possibilité de déroger, par accord collectif et donc désormais majoritaire, à toutes les dispositions spécifiquement nationales (une dérogation au droit communautaire étant évidemment inenvisageable). Au-delà de la simplification que cela pourrait offrir, les partenaires obtiendraient ainsi une plus grande souplesse dans la gestion du temps de travail dans les entreprises. La loi Fillon avait d'ailleurs déjà évolué dans cette direction, puisqu'il est par exemple déjà possible de majorer les heures supplémentaires de moins de 25%, jusqu'à 10%, si un accord collectif le décide. On pourrait néanmoins aller beaucoup plus loin sans affaiblir la protection des travailleurs en favorisant l'extension des possibilités pour les différents acteurs (patrons, syndicats...) de trouver par eux-mêmes le point d'équilibre entre efficacité économique et qualité de vie des employés.
Le SMIC
David Thesmar : On parle là d'une rigidité clairement préoccupante et qu'il suffit de constater en observant simplement la grille des salaires française qui se masse au niveau du SMIC.
Si l'on peut certes comprendre qu'il existe une "contrainte à minima" sur la rémunération des salariés au détriment du profit, on en arrive actuellement à des conséquences perverses en créant une réticence à l'embauche qui n'est pas sans impact sur notre taux de chômage. Ce constat se confirme par l'analyse du taux de chômage en fonction des qualifications, puisque l'on note que les titulaires d'un Bac+2 sont autour de 5% (leurs salaires dépassant ici la contrainte des minimas légaux) tandis que ceux qui ont un niveau inférieur au bac oscillent entre 10 et 15%.
On voit donc bien qu'il y a aujourd'hui deux France, l'une, peu ou moyennement qualifiée qui connaît le chômage, et l'autre, appartenant aux diplômes supérieurs, qui l'expérimente à des taux très marginaux. A tel point que le niveau du salaire minimum en vient à soulever des interrogations de premier ordre.
La fiscalité corrective
(où la manie française de croire que l'impôt est un outil de correction des inégalités)
Gilbert Cette : Dans un récent ouvrage (Changer de Modèle, Odile Jacob 2014) écrit avec Philippe Aghion et Elie Cohen, nous évoquions le besoin de lutter contre les inégalités en agissant autant que possible en amont de l'outil fiscal, notamment en utilisant les politiques favorisant la mobilité sociale. La promotion de la mobilité sociale est pour nous un facteur-clé dans la correction des inégalités. L'usage de l'impôt et de la redistribution est indispensable, mais il s'agit d'un moyen en réalité coûteux, limité, et qui ne parvient qu'à corriger certaines formes d'inégalités. Les politiques fiscales n'en sont pas moins souhaitables dans certains domaines, mais elles ne peuvent devenir l'alpha et l’oméga de la politique sociale. Sans promotion de la mobilité sociale, les inégalités sont plus fortes et plus durables, et la fiscalité ne peut les réduire que faiblement. On peut déjà mobiliser d'importants leviers de mobilité via l'éducation, et ce à tous les niveaux (formation initiale, formation professionnelle) et dans la gestion des minima sociaux qui ne soient pas réduire la mobilité sociale...
Le CDI
Gilbert Cette : Le CDI soulève en fait deux problèmes récurrents. Le premier d'entre eux est ce que l'on appelle la "dualité du marché du travail", à savoir le fait quecertaines protections fortes des CDI (insiders) incitent les entreprises à recourir fortement à des emplois précaires (interim et CDD) qui ne sont que très peu protégés (outsiders). Ce constat n'est pas entièrement faux, mais a besoin d'être élargi à une autre dimension essentielle, à savoir celle de la mobilité sociale (évolution du statut social des individus au cours d'une vie, Ndlr), et en particulier de l'insertion. La question devient alors celle de la facilitation de l'entrée sur le marché du travail de ceux qui ont pour l'instant de grandes difficultés à y entrer (on pense par exemple au chômage des jeunes ou des moins qualifiés). Des dispositifs comme la formation professionnelle (32 milliards d'euros par an, Ndlr), encore insuffisamment réformée suite à la loi de mars dernier et l'accord interprofessionnel de décembre 2013 qui l'a inspirée, pourraient déjà partiellement régler le problème en réussissant concrètement à rendre ces "outsiders" plus attractifs pour le monde de l'entreprise par des formations plus ciblées et actives. Une véritable reforme de la formation professionnelle reste à faire.
Le second problème du CDI relève de la peur des contentieux en cas de licenciements. Les procédures contentieuses sont chez nous longues (par exemple, comparution en première instance près d'un an en moyenne après la saisine du tribunal des prud'hommes), coûteuses, et incertaines. Rappelons que la France est avec le Mexique le seul pays de l'OCDE dans lequel on trouve au sein d'un tribunal des prud'hommes une parité entre les représentants des entreprises et les salariés, sans présence d'un juge professionnel. Cette spécificité renforce l'incertitude sur la décision de justice. Toutes ces difficultés brident surtout les comportements d'emploi des petites et moyennes entreprises. Les procédures contentieuses doivent en conséquence être plus rapides et mieux encadrées, et cela pourrait notamment passer par un recours plus récurrent à la médiation en amont de la saisine d'une juridiction. On peut aussi faire en sorte que la première étape de traitement du contentieux, à savoir la conciliation, soit plus performante, de nombreuses modalités étant à revoir dans ce sens. On devrait par exemple s'intéresser davantage au succès de la réforme de la conciliation qui a été menée au Royaume-Uni dans les années 1990, le taux d'aboutissement des conciliations y étant de 30% contre 8% de ce côté de la Manche. Enfin, pourquoi ne pas autoriser les partenaires sociaux a organiser au niveau des branches le traitement des contentieux par la technique de l'arbitrage ? Ces réformes indispensables faciliteraient les embauches dans les petites et moyennes entreprises qui sont souvent inquiètes de l'épée de Damoclès que représente un contentieux.
La fiscalité du capital
David Thesmar : On trouve généralement que nos entreprises ne créent pas assez d'emplois et plus largement que la France souffre d'un problème d'attractivité en termes d'investissements. A ce titre il est utile de réfléchir à un moyen de rendre le rendement du capital après impôt attractif pour les investisseurs à une époque où le taux d'investissement est loin d'être au plus haut (sept trimestres de recul consécutif en 2013 d'après l'Insee, Ndlr). Le gouvernement actuel, après son élection, est pourtant allé dans la direction opposée à travers deux mesures : l'augmentation de 35 à 38% de l'impôt sur les sociétés et l'augmentation de l'impôt sur le capital à travers la suppression des PFL (prélèvements forfaitaires libératoires). En conséquence il est devenu en France un "mauvais pari" d'investir dans les entreprises, où la pression fiscale s'ajoute au niveau de risque : si vous gagnez vous êtes ponctionné, si vous perdez c'est pour votre pomme. A l'inverse l'investissement dans l'immobilier, moins productif au niveau macro-économique, est de ce point de vue nettement favorisé. La majorité actuelle a pour l'instant choisi de baisser les charges sur les salaires pour relancer l'activité, mais une telle mesure n'aura finalement que peu d'impact (sauf à très court-terme) sur le profit des entreprises qui reste aujourd'hui défini par le poids de l'Impôt sur les sociétés (IS) et de l'impôt sur le capital. La dévaluation fiscale, comme toutes les dévaluations, ne marche qu'à très court-terme et à condition que l'on soit le seul à le faire (alors que tous nos voisins européens s'engagent aujourd'hui dans cette voie). Une réflexion de long-terme étendue aux logiques de l'investissement aurait pourtant bien plus d'impact. Sans perspectives de profits durables, rien de tout cela ne risque cependant de se produire.
Les rentes de différentes natures
Gilbert Cette : Elles peuvent déjà être des rentes éducatives, phénomène que l'on observe très bien en France, où le mode de sélection des élites n'est pas étranger à de telles pratiques. Ainsi les plus hautes-fonctions administratives sont basées sur le résultat de concours réalisés par des personnes qui ont entre 20 et 22 ans. On peut aussi parler de rentes professionnelles dans le cas de certains secteurs d'activités qui sont protégés par différentes barrières (principalement législatives) à leur entrée. Nous avons donc la sélection fermée des élites (ou "logique des grands corps") d'un côté et des professions protégées par le prélèvement de fonds sur l'activité économique de l'autre, et ce sont là deux freins de poids à une croissance qui se refuse toujours à repartir aujourd'hui.
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