TOUT EST DIT

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mercredi 18 mai 2011

Dix ans après

La décision de la juge américaine d'envoyer Dominique Strauss-Kahn en prison en attendant l'audience d'un grand jury a confirmé la gravité des charges retenues contre lui et le souci de le garder aux Etats-Unis jusqu'à son procès. Exit DSK comme candidat en France, ce qui justifie une fois encore le proverbe romain « La roche Tarpéienne (d'où l'on pousse les proscrits) est proche du Capitole », en l'occurrence de l'Elysée. La justice américaine a ses rigueurs et ses défauts, elle est très différente de la nôtre, mais elle traite de la même manière les puissants et les misérables, ce qui en soi est une différence positive. Les socialistes français sont donc orphelins de leur candidat favori des sondages et vont devoir lui trouver un remplaçant. François Hollande, qui était le challenger le plus sérieux de DSK, se retrouve donc en tête de la course, mais un front s'organise contre lui, et le « tout sauf Hollande » rassemble aussi bien Ségolène Royal, qui était prête à rallier DSK, que Laurent Fabius et Martine Aubry, qui avaient été les concepteurs du fameux « pacte de Marrakech ».Le hic, c'est que ce rassemblement, pour l'heure, n'a aucun candidat en situation de doubler François Hollande. D'où les tentatives pour sortir un inédit du placard : Bertrand Delanoë, par exemple, pourrait-il faire mieux que Hollande ? Cela reste à démontrer. Au fond, le seul candidat qui pourrait après ce drame rassembler derrière lui tous les socialistes s'appelle Lionel Jospin. Après le « vingt ans après » d'Alexandre Dumas, le « dix ans après » de Lionel Jospin, pourquoi pas !

Dette souveraine : Athènes ne s'en sort pas


L'hypothèse d'une nouvelle aide évoquée par les ministres hier à Bruxelles. Le scénario d'un rééchelonnement global de la dette n'est plus tout à fait tabou. 


Pendant que Dominique Strauss-Kahn comparaissait pour la première fois devant la justice américaine, les affaires européennes suivaient leur cours. Les ministres des Finances de la zone euro se sont réunis hier à Bruxelles pour aborder une nouvelle fois le problème des dettes souveraines, à commencer par celles du Portugal et de la Grèce. En l'absence du directeur général du Fonds monétaire international, qui joue un rôle clé sur ce dossier, c'est Nemat Shafik, directrice générale adjointe pour l'Europe, qui représentait l'institution à Bruxelles.

Selon des déclarations de diplomates, les ministres de la zone euro se seraient mis d'accord sans surprise sur un plan d'aide de 78 milliards d'euros au Portugal, qui s'était résigné fin mars à appeler au secours. Mais l'autre gros dossier de la soirée, celui de la Grèce, est a priori beaucoup plus épineux. Athènes a obtenu l'an dernier des engagements de 110 milliards d'euros, dont un tiers fourni par le FMI, pour faire face au remboursement de sa dette qu'elle risquait de ne plus pouvoir honorer.
La marée de la dette Mais, au fil des mois, l'hypothèse que ce premier plan d'aide soit suffisant a perdu de plus en plus de crédibilité. Car, tout en imposant une cure d'austérité très douloureuse à une bonne partie de la population, Athènes n'est pas parvenue à réduire son déficit 2010 dans les proportions qui lui étaient demandées. Bien qu'ayant fortement baissé par rapport à 2009 - où il atteignait 15 % -, il aurait encore été supérieur l'an dernier à 10 %.
Dans ce contexte, l'océan de la dette publique continue de grossir. Le seuil des 150 % du PIB (2,5 fois les objectifs du traité de Maastricht) devrait largement être dépassé. Dans ces conditions, les marchés bruissent de plus en plus de rumeurs d'une « restructuration » de la dette souveraine grecque, qui pourrait prendre la forme d'un allongement des délais de remboursement des obligations d'État ou d'une baisse des taux d'intérêt. Le tout, de préférence, dans le cadre d'une négociation internationale.
Un tel scénario n'irait pas sans dommage pour les détenteurs de titres d'État grecs, à commencer par la Banque centrale européenne ou de très nombreux établissements bancaires comme BNPParibas, engagée à hauteur de 1,2 milliard d'euros, et dont les créances se trouveraient partiellement dévalorisées.
Mais, dans le même temps, il paraît difficile de faire supporter aux Grecs beaucoup plus de sacrifices qu'il ne leur en est demandé depuis un an. Et ce, d'autant plus que, comme le souligne l'économiste Pascal Kauffmann, professeur à l'université de Montesquieu Bordeaux 4, la récession engendrée par cette cure d'austérité pèse sur les recettes fiscales de l'État.
Bijoux de famille en vente Dans ces conditions, même si elle n'est pas certaine, l'hypothèse d'un nouvel effort de la zone euro, prenant la forme d'une aide supplémentaire ou d'un allongement de la durée de remboursement des prêts octroyés l'an dernier, n'est plus tout à fait taboue. La ministre des Finances autrichienne, Maria Fekter, l'a évoquée hier devant la presse à Bruxelles. Son influent collègue allemand, Wolgang Schaüble, en avait parlé la veille en prévenant qu'en ce cas les créanciers privés (banques...) devraient eux aussi faire des sacrifices. Une façon comme une autre de mettre un scénario de restructuration globale sur le tapis. Il semble, cependant, qu'on n'en soit pas encore là pour autant. Une telle stratégie se heurte à l'opposition d'autres États en posture plus ou moins difficile (Espagne, Belgique), qui craignent de voir une restructuration de la dette grecque engendrer, par contagion, un surcroît d'attaques contre les leurs.
En attendant d'éventuelles décisions sur ce point et un nouveau concours européen, Athènes, qui a accueilli ces derniers jours une mission du FMI, va faire de nouveaux efforts. Le gouvernement va annoncer un nouveau programme de privatisations qui pourrait inclure des complexes olympiques, un opérateur téléphonique, etc. Mais cela ne suffira sans doute pas à calmer les marchés, ni peut-être à éviter un nouvel effort de Bruxelles, voire des créanciers privés.

FMI : les appels à la démission de DSK se font plus pressants

Les Etats-Unis demandent une nouvelle direction générale. Angela Merkel a déjà annoncé qu'elle souhaitait qu'un Européen reste à la tête du Fonds monétaire international.

Timothy Geithner a clairement appelé Dominique Strauss-Kahn à démissionner mercredi 18 mai, jugeant qu'il n'était "pas en mesure de diriger le FMI". "Il est important que le conseil d'administration du FMI nomme officiellement quelqu'un pour une période transitoire et que cette personne agisse en tant que directeur", a ajouté le secrétaire d'Etat au Trésor américain. D'après Reuters, la Maison Blanche pousserait la candidature de David Lipton, actuellement employé par Citigroup, à la direction générale du FMI.
Lundi, c'est Angela Merkel qui, la première, a ouvert le débat sur la succession de DSK. "Dans cette phase, il y a de bonnes raisons pour dire que l'Europe a de bons candidats", a déclaré lundi 16 mai à Berlin la chancelière allemande, comme si elle avait déjà tourné la page DSK, inculpé pour viol et agression sexuelle. Didier Reynders, le ministre des Finances de la Belgique, n'a pas tardé à soutenir Angela Merkel en estimant "préférable que l'Europe continue à occuper ce poste." Le raisonnement d'Angela Merkel, en faveur d'un Européen, est simple. Alors que le Vieux Continent traverse une crise de la dette sans précédent, symbolisé par les plans de sauvetage accordés à la Grèce, l'Irlande et au Portugal, dont le FMI est un acteur essentiel, il est nécessaire d'avoir un Européen à la tête de l'institution. Si l'Allemagne s'est si rapidement prononcée sur la question, c'est parce qu'elle ne veut surtout pas perdre le soutien du Fonds, alors qu'un nouveau renflouement de la Grèce se dessine. Le désengagement du FMI signifierait immédiatement une plus large contribution de sa part, ce à quoi l'opinion est profondément hostile.

Axel Weber, Christine Lagarde, Gordon Brown...

Bien que Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe et chef du gouvernement luxembourgeois, ait jugé "indécent de voir que certains gouvernements ont engagé ce débat (...) qui n'a pas lieu d'être", les Européens poussent déjà leurs candidats respectifs. Côté allemand, on murmure le nom d'Axel Weber, ex-patron de la Bundesbank un temps pressenti pour prendre la présidence de la Banque centrale européenne, et de Peer Steinbrück, ancien ministre des Finances d'Angela Merkel. La France n'est pas en reste: le nom de Christine Lagarde était cité avant même l'affaire DSK.
Problème: les deux grands pays de la zone euro ont déjà placé un compatriote à la tête de l'institution ces dernières années. L'Allemand Horst Köhler a dirigé le FMI de 200 à 2004. Quant à la France, elle a été beaucoup représentée à la tête du Fonds, avant Dominique Strauss-Kahn, par Michel Camdessus de 1987 à 2000, Jacques de Larosière 1978 à 1987 et Pierre-Paul Schweitzer de 1963 à 1973.
Du coup, ce pourrait être le tour d'autres pays européens. L'ancien Premier ministre britannique Gordon Brown a été un temps plus ou moins candidat, avant que son successeur David Cameron ne l'assassine publiquement au mois d'avril en disant qu'il n'était "peut-être pas la meilleure personne" pour le poste. Sa faute, selon le leader tory? Avoir tardé à percevoir le problème de la dette souveraine de son pays quand il était aux responsabilités.
Parmi les autres Européens sur la grille de départ se trouvent selon les rumeurs le chef de la banque centrale polonaise, Marek Belka, un ancien dirigeant du FMI qui a été nommé à Varsovie il y a seulement un an, et le Turc Kemal Dervis, au CV idoine : ex-ministre de l'Economie et des Finances de son pays, ex-hiérarque de la Banque mondiale et récent administrateur du Programme des Nations unies pour le développement.

Le tour des pays émergents ?

Cependant, la nomination d'un Européen n'a rien de certain. Si depuis 1944 le FMI est dirigé par un Européen et la Banque mondiale par un Américain, le tour des pays émergents pourrait venir. Barack Obama avait fait un pas en ce sens dès 2009. Dominique Strauss-Kahn lui-même militait pour que son successeur ne soit pas Européen. Pour un tel scénario, plusieurs noms reviennent avec insistance: les Indiens Duvvuri Subbarao et Montek Singh Ahluwalia, le Singapourien Tharman Shanmugaratnam et le Sud-Africain Trevor Manuel.
La Chine, qui envisage de présenter un candidat après être devenue l'an dernier le troisième plus gros contributeur du Fonds, a appelé à "l'équité, la transparence et le mérite" dans le choix du nouveau patron de l'organisation.

Enterrement tragique rue de Solférino

C’est un deuil pathétique ! Comme une étonnante majorité de Français (voir le sondage ci-dessous), les socialistes s’accrochent encore aux espoirs d’une manipulation contre Dominique Strauss-Kahn, psalmodiant à l’infini le refrain «Seule l’accusation a parlé», gémissant sur «les images insoutenables» du tribunal de New York, vouant aux gémonies une justice américaine «dénuée d’humanité», convoquant «le respect des droits de l’homme» pour défendre la dignité outragée de leur champion. Avec juste, à la fin, un petit mot laborieux et au conditionnel, pour la victime et pour la gravité des faits retenus par la police. Ils semblent tellement abattus, désorientés, sans ressort, ces dirigeants portés jusque-là par l’espoir d’une victoire en 2012, que leur désarroi est plus lourd de conséquences, sans doute, que l’élimination prématurée de DSK dans la course à la présidentielle.

S’il était lucide, le PS éviterait de donner durablement l’image d’un parti orphelin de son homme providentiel. C’est dur, certainement, cynique peut-être, mais vital : il lui faut sans délai tourner la page Strauss-Kahn et le dire clairement. L’innocence ou la culpabilité du directeur général du FMI ne sera pas formellement établie avant longtemps. Faudra-t-il attendre jusque là pour que le parti prenne acte que son champion des sondages est définitivement hors jeu ? Bien sûr que non ! Et avec d’autant moins de regrets que l’affaire fait remonter à la surface des comportements avérés qui, eux, valaient disqualification pour le grand rendez-vous avec le peuple. C’est fini, et bien fini pour DSK. Son combat, désormais, n’est plus pour la France, ni en France, mais pour lui-même, et à Manhattan.

Alors autant aller vite, maintenant. Sinon, tout délai supplémentaire pour prendre ses distances avec le détenu de Rikers Island sera inévitablement interprété comme une hésitation complice, la preuve de cette «défaite morale» sur laquelle spéculerait déjà, en privé, Nicolas Sarkozy derrière le paravent de la décence officielle. Les socialistes s’efforcent bien de montrer un visage uni - une performance en soi - mais sans pour autant se résigner à fermer la boucherie des primaires, où les crocs des uns et des autres sont d’autant plus affûtés qu’ils ont été aiguisés par l’incertitude du combat. Si seulement ces préliminaires lacrymaux et autres pleurnicheries - compréhensibles mais nombrilistes - pouvaient déboucher sur une candidature unique de la famille socialiste, la mort politique de «Dominique» aurait servi à quelque chose :elle pourrait être un antidote contre la division et le risque d’un autre 21 avril. Mais non. Pour le moment le faire-part de décès, qu’on tarde à accepter, est encore un passeport pour un très périlleux voyage au pays des rivalités meurtrières contre lesquelles il n’y pas de loi, de droit, ni de foi.


DSK : une étoile très brillante mais… filante

La venue de Dominique Strauss-Kahn en Haute-Savoie, en 1986, avait tout d’un parachutage en règle. « Mis à part ma passion pour le ski, je n’ai aucune attache en Haute-Savoie » disait-il lui-même.
Ce qui ne l’a pas empêché de réussir l’atterrissage. L’homme, alors âgé de 36 ans et déjà père de cinq enfants, est élu aux législatives avec 17,43  %. Voilà trente ans que le département n’avait eu aucun député socialiste.

Un cadeau empoisonné

Précautionneux, il avançait dès mars 1985. « La Haute-Savoie est un département présentant l’avantage d’avoir, du fait de la proportionnelle, un siège de plus. Donc, j’ai la certitude de ne pas prendre la place de quelqu’un. Certes c’est un endroit possible pour implanter un ministre ou un dirigeant mais ma candidature, reconnue par le PS au niveau national, a été soumise au vote des militants responsables du courant mitterrandiste… » Il devait déjà pressentir que le cadeau était empoisonné.
Cette venue surprise va effectivement semer le chaos entre la fédération départementale et les instances nationales. Car la fédération avait déjà nommé un candidat en la personne du maire d’Annemasse, Robert Borrel. Jospin impose le sien. Une véritable explosion dans la famille socialiste, dont elle parle encore 25 ans après. Robert Borrel quitte le parti et crée même une liste dissidente. L’évincé n’a toujours pas réintégré le PS.
Quant à la campagne menée par Dominique Strauss-Kahn, elle est musclée. “Il organise de nombreuses réunions type tupperware” écrit un journaliste de l’Express en janvier 1986.
Gabriel Grandjacques, alors premier secrétaire fédéral, se souvient qu’il avait loué une maison vers Menthon-Saint-Bernard pour être plus proche des Haut-Savoyards. Jean Excoffier, alors simple membre du PS (et qui lui a ouvert sa table), dit qu’il « couchait à l’hôtel. »
Au-delà des anecdotes, tous gardent le souvenir d’un homme politique particulièrement brillant notamment en économie. « Il concoctait des réponses percutantes… le temps d’allumer une cigarette » se souvient Gabriel Grandjacques.
En revanche, peu lui pardonnent encore aujourd’hui de s’être investi durant deux ans pour le département et d’être ensuite parti pour Sarcelles, aussi vite qu’il était arrivé. Ville ou il s’est fait élire maire mais seulement au bout de la troisième tentative. Au parti, plus d’un a vécu ce départ comme un abandon.

Il avait skié avec Lionel Jospin… en costume de ville

Dominique Strauss-Kahn avait un bureau rue Carnot et le soutien sans faille d’un jeune attaché parlementaire, Jacques Langlade.
Désormais directeur de cabinet de la communauté de communes du Val de France, l’homme est resté en lien avec Dominique Strauss-Kahn. Et avance que le président du FMI se souvenait, de temps à autre, de son passage à Annecy. Surtout de ce jour où il avait skié avec Lionel Jospin… En costume de ville. Ce dernier avait oublié ses vêtements d’hiver dans une voiture. Les jours heureux…

DSK, la preuve par les images

Sous Voltaire, l’équation de l’inquisiteur se trouvait ainsi posée : “Donnez-moi dix lignes d’un homme, et je le fais pendre !”. Aujourd’hui, par la grâce du progrès, quelques images suffisent. Offrant le suspect DSK en pâture aux caméras du monde, la justice américaine a précipité sa perte. Le voici condamné sans appel quand bien même, dans six mois, un verdict viendrait à l’acquitter. Des blagues crapoteuses envahissent la blogosphère, nouvel espace de libre ragot. La vérité, souvent, se nourrit de nuances, mais pas le chasseur de buzz. Sur tous les continents, la presse à scandale se régale abondamment. Le patron du FMI, hier encore loué pour ses compétences, devient un ignoble “pervers”. Des psychiatres, déjà, analysent son cas. Un Dutroux sommeillait chez cet économiste distingué. La preuve ? Il croupit dans la pire prison de New York, parmi les assassins. Et puis sa mine hagarde, déconfite, entre le commissariat et le tribunal…

Qu’importe, alors, si seule la version de l’accusation arrive à nos oreilles. Le débat contradictoire, précieux acquis démocratique, semble un “chichi procédural” presque inutile. La culpabilité de Dominique Strauss-Kahn, démontrée nulle part, a été montrée partout. Ne pas y croire revient à nier l’évidence médiatique. Quiconque ose brandir la “présomption d’innocence” passe maintenant pour un fieffé hypocrite. L’empêcheur de lyncher en rond bafoue les droits de la victime et s’applique à “couvrir” un notable. Comme jadis à Bruay-en-Artois…

Impossible


C’est impossible ! Et si c’est vrai, c’est un piège. Mais si c’est un piège, comment a-t-il pu tomber dedans, lui, si intelligent ? On ne cesse ainsi de tourner et retourner les hypothèses, pour trouver un peu de raison dans cette histoire de fou. Comment un homme aussi brillant, aussi expérimenté, qui peut espérer devenir président de la République, qui accessoirement a bien assez de charme pour séduire sans contraindre — oui, comment cet homme-là pourrait-il commettre pareille folie ? Il y a dix ans, DSK avait déjà chuté sur une incroyable bêtise, une cassette compromettante oubliée dans son bureau. François Hollande avait eu alors ce terrible commentaire : « L’intelligence ne protège pas. Les gens bêtes ont des réflexes, quand les gens intelligents ont tendance à faire les malins ». Tout de même : c’est impossible ! Et si c’est vrai, c’est un piège…

Le FMI, enjeu vital pour l'Europe


Depuis 1944, c'est un accord tacite. Un Européen dirige le Fonds monétaire international, un Américain la Banque mondiale. Les Français en ont largement bénéficié, puisque plus de la moitié du temps, c'est l'un de nos compatriotes qui a dirigé le Fonds àWashington. Dans un monde caractérisé par la définition de nouveaux équilibres internationaux, avec la montée en puissance des pays émergents, cet accord tacite est de moins en moins destiné à durer.

En novembre dernier, sur proposition du G20, les Européens ont déjà abandonné deux des neuf sièges qu'ils occupaient au conseil d'administration, pour rééquilibrer la gouvernance au profit des émergents. Dans la suite logique, avant même que n'éclate le scandale Strauss-Kahn, les spéculations avaient commencé sur la nécessité ou non de lui trouver un successeur européen.

Longtemps, les attentions du FMI étaient portées essentiellement sur les économies en difficulté des pays dits du Sud. Il lui a d'ailleurs été souvent et vivement reproché d'imposer, au nom de la rigueur monétaire prônée par les pays riches, des cures socialement insoutenables pour les pays pauvres. Mais, depuis que la crise a éclaté en 2008, le FMI a dû venir en aide, chose longtemps impensable, aux pays européens.

Ainsi, l'Europe est, certes, le premier actionnaire du Fonds, mais aussi, à présent, son premier emprunteur. En un an et demi, depuis le déclenchement de la crise grecque, le FMI a prêté soixante-dix milliards d'euros à la Grèce, à l'Irlande et au Portugal. L'an passé, il a joué un rôle décisif dans la création du plan de sauvetage pour Athènes, et fortement appuyé celle du Fonds européen de stabilité financière, pour éteindre les risques de propagation de l'incendie grec.

Beaucoup considèrent même que sans l'action déterminée de Dominique Strauss-Kahn, à la tête du FMI, il aurait été beaucoup plus difficile de convaincre l'Allemagne, où l'envie de « lâcher » Athènes est perceptible depuis deux ans, à se rallier à un plan d'action concerté au niveau européen. Illustration de ce rôle, il y a moins de trois semaines, DSK et Jean-Claude Trichet, le président de la BCE, sont allés à Berlin plaider devant le Bundestag, et ses députés récalcitrants, pour un deuxième plan d'aide à la Grèce. Et soutenir ainsi la Chancelière d ans cet effort.

Le cyclone de l'affaire DSK, qui vient de s'abattre sur un homme, son parti politique, la présidentielle française et l'institution monétaire, investit donc aussi, et directement, la délicate gestion des dettes souveraines dans la zone euro. Aucune institution ne dépend totalement d'un homme. Mais l'autorité de DSK à la tête du FMI était reconnue autant à Berlin qu'à Washington. Un FMI plus fort, et plus sensible aux déboires de l'euro, incitait en outre les Européens, divisés sur beaucoup de choses et notamment sur la dette grecque, à plus de cohésion monétaire. De quoi sera fait l'après-DSK ?

La France étant contrainte au silence, c'est l'Allemagne qui a parlé. Angela Merkel, qui aura attendu en vain, dimanche, la venue programmée de DSK à Berlin, a brisé le silence en affirmant qu'il serait préférable que la direction générale du Fonds reste dans des mains européennes. C'est une question d'influence sur le moyen et le long terme, mais c'est d'abord et surtout une urgence dans le court terme. Car l'Europe est désormais autant assistée par le FMI qu'elle ne le copilote.





DSK: le choc des photos






Affaire DSK : la presse anglo-saxonne s'attaque à la culture française du secret

Le visage défait du directeur général du Fonds monétaire international (FMI) Dominique Strauss-Kahn"fascinée par ses séducteurs politiques", et de ses lois défendant la vie privée s'affiche encore à la une des journaux du monde entier. Particulièrement sévère, la presse anglo-saxonne met en lumière la responsabilité de la France dans ce scandale, 
 
Pour le journal britannique de centre gauche The Guardian, cette nouvelle affaire de mœurs soulève "la question gênante dans les médias français et la politique de deux monde parallèles : ce qui est imprimé, et ce qu'il y a derrière ; les commérages, et ce qui doit rester officiellement les non-dits."
CARICATURE DU "SOCIALISTE CHAMPAGNE"

Décrit par The Guardian comme "courtois, bronzé en permanence et jamais à court d'argent" Dominique Strauss-Kahn est perçu par la presse britannique comme la caricature du "socialiste champagne". Le quotidien rappelle aussi "que toute la classe politique et les médias savaient que sa relation aux femmes était le talon d'achille de Strauss-Kahn". Mais le silence "complice" sur cet aspect de la vie privé du socialiste prouve qu'en France, "une réputation d'homme à femmes ne constitue pas un obstacle pour réussir en politique, en fait c'est tout le contraire."
Plus incisif, le tabloïd conservateur Daily Mail titre quant à lui : "Un satyre sexuel, une conspiration du silence, voila pourquoi on ne doit JAMAIS avoir de lois sur la vie privée comme en France". Dans cet article, le journaliste s'emporte contre cette "loi du silence", et affirme que "si M. Strauss-Kahn avait été anglais ou américain, son appétit sexuel apparemment gargantuesque aurait été évoqué par la presse."
LA CULTURE DU SECRET

Sous le titre "Les questions que posent la loi du silence", le New York Times s'interroge sur la "complicité" des Français dans ce genre d'affaire, qui préfèrent fermer les yeux sur la vie privée des politiciens. Citant le proverbe "pour vivre heureux, vivons caché", le journal américain retrace les scandales de mœurs que la France a tolérés.
De la fille cachée de Mitterrand à la séparation – tenue secrète pendant la campagne de 2007 – de François Hollande et Ségolène Royal, le quotidien rappelle aussi qu'au moment de l'affaire Lewinsky, des hommes et femmes politiques français comme Christine Boutin avaient soutenu Bill Clinton, affirmant que cette affaire "prouvait qu'il était en bonne santé". Le journaliste conclut d'ailleurs qu'en France, "un homme politique qui révèle ses prouesses sexuelles prouve sa vigueur, et montre qu'il est pleinement capable de diriger le pays."
Si le Times reconnaît que "les Britanniques peuvent être trop prudes concernant le sexe", l'affaire montre, selon le journal, "que la fascination des Français pour les séducteurs politiques peut au moins être également de mauvais conseil". Pour conclure, le Times estime que ce scandale constitue "la mise en accusation d'un macho, de la culture politique française du secret qui considère que courir après les femmes fait tout simplement partie d'une longue tradition française : liberté, égalité, infidélité."

Christine Lagarde remplacera-t-elle DSK à la tête du FMI ?

Christine Lagarde est-elle la prochaine directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) ? L'hypothèse est envisagée, alors que les Européens avancent leurs pions pour conserver la direction du Fonds et que certains commencent à prendre leurs distances avec l'actuel détenteur du poste. L'arrestation et l'inculpation pour agression sexuelle et tentative de viol de Dominique Strauss-Kahn aux Etats-Unis a lancé plus tôt que prévu la bataille pour sa succession.
Le conseil d'administration du FMI chercherait actuellement à contacter son directeur général emprisonné, pour connaître ses intentions concernant ses fonctions, indiquaient mardi 17 mai deux de ses membres à l'agence Reuters. D'après une de ces sources, une démission serait idéale, mais ce sentiment ne serait toutefois pas partagé par les 24 membres du conseil, selon la seconde source.
UNE "CANDIDATE CRÉDIBLE" POUR UN DIPLOMATE EUROPÉEN
La ministre des finances française est "certainement une candidate crédible" pour remplacer "DSK" au poste de directeur général, mais "on attend de voir si (le président français Nicolas) Sarkozy la présente", a estimé mardi, un diplomate européen très au fait des discussions. Interrogée lundi soir à Bruxelles, la principale intéressée n'a pas voulu faire de commentaires, jugeant le débat prématuré. Selon un membre de son entourage, pour le moment, "ce n'est pas d'actualité, et l'hypothèse est jugée déplacée".
Toutefois, de manière générale, un autre proche ne cachait pas récemment l'intérêt de Christine Lagarde pour la fonction. Elle-même évoque régulièrement son attrait pour les Etats-Unis, où elle a longtemps travaillé. Elle est aussi très appréciée dans les milieux financiers. Selon une autre source, l'hypothèse de sa candidature pour la direction du FMI a d'ailleurs été testée récemment à Washington alors que le scénario d'une entrée en campagne de Dominique Strauss-Kahn pour l'élection présidentielle française de 2012, et donc son départ du FMI d'ici au mois de juillet, semblait de plus en plus probable.
La Française bénéficierait même du soutien de Berlin, affirme le quotidien Süddeutsche Zeitung en citant une source proche du gouvernement, ce qui n'empêche pas la presse allemande de citer une série d'autres prétendants potentiels. Sur les onze Européens qui ont dirigé le FMI depuis 1946, quatre étaient français, ce qui pourrait se révéler un handicap pour Christine Lagarde. Surtout, elle n'est elle-même pas à l'abri de démêlés judiciaires : un procureur français l'a récemment menacée d'une enquête sur un dossier lié à l'ex-homme d'affaires Bernard Tapie.
LES PAYS ÉMERGENTS RISQUENT DE FAIRE PRESSION
La presse allemande envisage d'autres prétendants, dont l'ancien président de la Bundesbank Axel Weber, ou le Suisse Josef Ackermann, à la tête de Deutsche Bank. Enfin, les pays émergents risquent de faire pression pour prendre à leur tour la direction du Fonds. Selon des diplomates, l'ancien ministre des finances turc Kemal Dervis pourrait alors être un candidat de compromis.
Les Européens ne semblent toutefois pas prêts à renoncer à l'arrangement qui leur assure la direction du FMI, tandis que celle de la Banque mondiale revient aux Américains. Face à la crise de la dette qui frappe les plus fragiles d'entre eux, ils veulent en effet pouvoir compter sur l'appui du FMI, dont le rôle, et celui de Dominique Strauss-Kahn en particulier, s'est avéré crucial depuis un an et demi.
La chancelière allemande Angela Merkel a évoqué "de bonnes raisons pour dire que l'Europe a de bons candidats". "Si une succession est nécessaire, les pays de l'Union européenne devraient présenter un candidat", a également jugé le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso. Le maintien d'un Européen à la tête du FMI aurait la "grande préférence" des Pays-Bas, a renchéri leur ministre des finances, Jan Kees De Jager. La ministre espagnole Elena Salgado a, quant à elle, plaidé pour une femme, en relevant que "la présence des femmes est faible dans des postes à responsabilité".
"PARCOURS EXCEPTIONNEL" ET BONNE COMMUNICATION, QUALITÉS DU CANDIDAT IDÉAL
Dans une déclaration adoptée avant la désignation de Dominique Strauss-Kahn à son poste de directeur du FMI, l'institution avait dressé le portrait type du candidat idéal.
"La personne choisie pour occuper le poste de directeur général devra avoir un parcours exceptionnel dans le domaine de la politique économique à un haut niveau de responsabilité, peut-on lire dans la déclaration. Elle aura à son actif une remarquable carrière professionnelle ; aura démontré les aptitudes de gestion et de diplomatie requises pour diriger une institution d'envergure mondiale et sera ressortissante d'un des cent quatre-cinq pays (ils sont désormais cent quatre-vingt-sept) membres du FMI."
Le candidat doit également savoir faire preuve de diplomatie, en se montrant "profondément déterminé à promouvoir les objectifs du FMI en encourageant le consensus sur les grandes questions de politique générale et de nature institutionnelle". Il doit naturellement être au fait des "enjeux de politique économique auxquels sont confrontés les pays membres de l'institution dans leur diversité", mais également se montrer "capable de communiquer efficacement".

Les vraies victimes de l'affaire DSK


Il n'y a que deux victimes: la femme de chambre, qui a droit à la présomption d'innocence elle aussi, et Anne Sinclair. Et les précautions oratoires que réclament les internautes ont leur place dans la bouche des politiques - pas sous la plume des journalistes.




L’Irlande vers le naufrage

Le gouvernement irlandais est bien parti pour devoir assumer une dette de près de 250 milliards d’euros en 2014. Le spectre d’une faillite nationale durable et chaotique se précise, prédit l'économiste Morgan Kelly. 

L’Irlande est menacée de ruine économique. Six mois après le renflouement de 85 milliards d’euros orchestré par l’UE et le FMI, alors que la dette publique irlandaise se retrouve classée à peine un cran au-dessus du néant et que la ruée sur les banques irlandaises commence à menacer les comptes privés, on pourrait croire que l’opération de sauvetage déclenchée en novembre dernier a déjà lamentablement échoué. Au contraire, du moins du point de vue de ses architectes de la BCE, elle a connu un succès retentissant.
Il y a une chose que vous devez comprendre à propos du renflouement irlandais. Il n’avait pas pour but de redresser suffisamment les finances du pays pour que le gouvernement puisse recommencer à emprunter sur les marchés obligataires à des taux raisonnables. Pour la plupart des gens, c’est ça, théoriquement, un renflouement.
Au lieu de cela, le renflouement irlandais n’avait qu’un seul objectif, c’était de faire peur aux Espagnols pour qu’ils rentrent dans le rang, en démontrant de façon frappante que les sauvetages de l’UE ne sont pas pour les timorés. Et jusqu’à preuve du contraire, le plan de la BCE a fonctionné. Ayant le choix entre finir pieds et poings liés comme l’Irlande — objet de la dérision internationale, contrainte de payer des taux exorbitants sur les fonds du renflouement tandis que ses ministres rendent des compte à un maître de conférence hongrois — et s’amender, ils ont évidemment choisi cette dernière solution.

Une dette de 120 000 euros par salarié

Mais pourquoi était-il nécessaire, ou du moins opportun, pour l’UE d’imposer un effondrement économique à l’Irlande afin d’effrayer l’Espagne ? La réponse tient à un défaut fondamental, et potentiellement mortel, dans la conception de la zone euro : elle ne dispose d’aucun moyen de faire face à de grandes banques insolvables.
Du temps où l’euro était en projet, vers le milieu des années 90, il ne serait venu à l’esprit de personne que des banques prudentes et robustes comme AIB ou la Banque d’Irlande, dirigées par d’anciens rugbymen un peu lents, pourraient un jour emprunter des dizaines de milliards à l’étranger, puis tout perdre sur des prêts immobiliers louches.
Si le naufrage n’avait concerné que les banques irlandaises, il aurait été possible de concocter un vague plan de sauvetage. Or, d’aucuns soupçonnent encore les banques espagnoles — qui ont accouché d’une bulle immobilière presque aussi boursouflée que celle de l’Irlande, mais au sein de la neuvième économie de la planète — de dissimuler des pertes aussi énormes que celles qui ont fait sombrer leurs homologues celtes.
Fait unique au monde, la Banque Centrale Européenne ne s’appuie sur aucun gouvernement capable de lever des impôts. Pour sauver un système bancaire aussi étendu que celui de l’Espagne, il faudrait que des pays d’Europe engagent des ressources massives dans un Fonds Monétaire Européen : une idée si complexe sur le plan politique, et si coûteuse sur le plan financier qu’elle ne sera envisagée qu’en dernier recours, pour éviter l’effondrement de la zone euro. Pour la BCE, il est plus simple aujourd’hui de croiser les doigts en espérant que l’Espagne s’en tirera toute seule, aiguillonnée par l’Irlande, dont on a fait un exemple.
L’insolvabilité irlandaise est désormais moins une question d’économie que d’arithmétique. Si tout se passe comme prévu, ce qui est d’ailleurs toujours le cas, la dette publique irlandaise atteindra les 250 milliards d’euros, mais ces différences sont sans importance. D’une façon ou d’une autre, on parle d’une dette publique supérieure à 120 000 euros par salarié, soit 60 % plus élevée que le PIB.
D’après les règles empiriques des économistes, quand la dette publique dépasse le revenu national, une petite économie est menacée de défaut de paiement (les grandes économies, comme le Japon, peuvent aller beaucoup plus loin). L’Irlande est tellement dans le rouge que des modifications de détail dans les termes du renflouement ne feront aucune différence : nous allons boire la tasse.
Satisfaite, la BCE a prêté à l’Irlande l’argent nécessaire au remboursement des banques qui avaient prêté à l’Anglo et à la Nationwide. Elle se retrouve maintenant dans une situation où, par conséquent, les banques qui ont prêté au gouvernement irlandais risquent de perdre l’essentiel de leur argent. Autrement dit, la crise bancaire irlandaise s’inscrit dorénavant dans une crise de la dette souveraine européenne plus générale.

L'Irlande ou la version européenne de Porto Rico

Face à la paralysie politique dans l’UE, et avec une Banque Centrale Européenne qui estime avoir avant tout pour mission d’apaiser les rédactions de la presse allemande à scandales, il est plus que probable que du fait de la crise de la dette européenne, d’ici un ou deux ans, le temps que les banques françaises et allemandes reconstituent leurs réserves amoindries, les économies insolvables soient contraintes à la faillite sous une forme ou sous une autre.
Ne nous y trompons pas : si, dans des pays comme la Grèce ou l’Argentine, il est presque normal que le gouvernement soit en défaut de paiement, pour un pays comme l’Irlande, qui tirait parti de sa réputation de havre de sécurité financier, une faillite serait une catastrophe. Les faillites souveraines durent des années, les créanciers s’abstenant jusqu’à ce qu’ils soient sûrs d’obtenir de meilleures conditions, ou revendant leurs créances à ce que l’on appelle des fonds vautours, qui s’engagent dans des procédures interminables à l’étranger pour faire saisir des actifs nationaux comme les avions. Ces fonds d’investissement spécialisés n’ont qu’un but, extorquer de l’argent contre la promesse de ne plus nuire aux Etats concernés.
Pire encore, une faillite ne permettra en rien de redresser les finances de l’Irlande. Compte tenu des autres engagements de l’Etat irlandais (vis-à-vis des banques, de la National Asset Management Agency [NAMA structure publique de défaisance de l'Etat irlandais, chargée de racheter les actifs toxiques des banques], de l’UE, de la BCE et du FMI), pour qu’une faillite ramène la dette publique à un niveau gérable, il faudra plus ou moins éliminer les titulaires d’obligations régulières. Malheureusement, les obligations en question sont pour la plupart entre les mains de banques et d’assureurs irlandais.
En d’autres termes, nous nous sommes embarqués dans un jeu futile de passe à dix : l’insolvabilité a d’abord été transmise des banques à l’Etat irlandais, puis de nouveau de l’Etat aux banques et aux compagnies d’assurance. Il est probable que l’Irlande finira comme une sorte de protectorat de l’UE, version européenne de Porto Rico.
Et si nous ne voulions pas nous laisser entrainer sur la pente actuelle et dégringoler vers une faillite commanditée par la BCE et une ruine nationale inexorable, pouvons-nous y faire quelque chose ? Il nous reste un moyen d’en sortir. Un moyen qui n’est pas sans douleur, mais qui nous ferait quand même moins mal que ce que l’Europe est en train de nous préparer.
Que l'Irlande refuse le plan de sauvetage, c'est une question de vie ou de mort nationale. Et cela exige deux choses du gouvernement : qu'il se désengage des établissements bancaires, et qu'il remette son budget à l'équilibre immédiatement. Les banques, d'abord. Si la BCE ne veut pas sauver les banques irlandaises, elle ne peut pas non plus les laisser aller à la faillite et provoquer une vague de panique qui s'emparerait de toute l'Europe.

S'arracher aux griffes d'institutions malfaisantes

L'Irlande a intérêt à se retirer du système bancaire en rendant aux établissements bancaires les actifs rachetés par la NAMA et en reprenant ses billets à ordre aux banques. La BCE découvrira alors cette vérité économique fondamentale qui veut que, si vous prêtez 160 milliards d'euros à des banques insolvables soutenues par un Etat insolvable, vous n'êtes plus un créancier : vous devenez le propriétaire. La Banque centrale européenne pourra à terme prendre une gomme et, là où figurait le terme "Prêt d'urgence" dans les comptes des banques irlandaises, effacer et écrire “Capitaux” à la place. Et quand elle le fera, ce sera son problème à elle, pas le nôtre.
D'un seul coup, l'Etat irlandais diminuerait ainsi sa dette de moitié pour revenir à la somme plus vivable de 110 milliards d'euros. La BCE n'aura aucun moyen de sanction contre les banques irlandaises, à moins de vouloir déclencher une panique catastrophique en Espagne et dans le reste de l'Europe. Pour l'Europe, la seule réaction possible serait de couper ses financements à l'Irlande.
D'où le deuxième volet d'action pour la survie national : ramener le budget national à l'équilibre, et sans délai. Ramener les emprunts de l'Etat à zéro immédiatement n'est certes pas sans douleur, mais c'est le seul moyen de nous défaire de ces requins du crédit qui entendent nous punir pour l'exemple.
En équilibrant sans délai notre budget, nous montrons que les problèmes de l'Irlande sont dus presque exclusivement aux activités de six banques privées et, du même coup, nous nous arrachons aux griffes de ces institutions malfaisantes. Qui plus est, cette mesure envoie au reste du monde le message que l'Irlande (qui a montré il y a vingt ans comment un petit pays pouvait se sortir de la pauvreté grâce à l'énergie et travail de ses habitants, mais est tombée depuis aux mains de voleurs et de quelques politicards qui sont leurs sbires) est de retour et n'a aucune envie de plaisanter.
Evidemment, nous savons tous que rien de tout cela ne se produira. Le monde politique irlandais a trop pris l'habitude de recevoir des récompenses de Bruxelles pour se mettre à attaquer l'UE, même lorsqu'il s'agit d'une question de vie ou de mort du pays. Il est plus facile de se laisser conduire les yeux bandés, en attendant qu'on nous passe la corde au cou et qu'on ouvre sous nos pieds la trappe de la faillite.