mercredi 2 mars 2011
Minc condamne les propos de Jacob sur DSK
Que valent les sondages à un an de la présidentielle?
Sarkozy devancé par DSK dès le premier tour dans les sondages
Une cote de popularité très basse
Gorbatchev, mal-aimé des Russes, fête discrètement ses 80 ans à Moscou
Le dernier dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev, célébré dans le monde pour avoir mis fin à la guerre froide, fête discrètement, mercredi 2 mars, ses 80 ans en Russie, où il suscite l'indifférence, voire le mépris. M. Gorbatchev, Prix Nobel de la paix en 1990, doit accueillir trois cents amis et proches dans une salle de banquet d'un centre commercial moscovite.
Les télévisions publiques russes ont diffusé des émissions sur la perestroïka et l'évolution de la carrière politique de Mikhaïl Gorbatchev. Les journaux ont publié des interviews, où il critique le régime russe actuel, et des commentaires sur son rôle pour la Russie, sans lui rendre un hommage particulier.
UN "LOURD HÉRITAGE ÉCONOMIQUE"
Le quotidien de référence Kommersant n'accorde aucune couverture à l'événement, alors que le journal économique Vedomosti analyse dans un éditorial les raisons de la chute de l'URSS, que la majorité des Russes attribuent à Gorbatchev. "Ce ne sont pas les réformes de Gorbatchev qui ont provoqué la chute de l'URSS, mais les problèmes économiques", écrit Vedomosti en soulignant que l'ex-dirigeant avait reçu "un lourd héritage économique".
Le quotidien officiel Rossiiskaïa Gazeta donne la parole à l'académicien Rouslan Grinberg, un ancien collaborateur de M. Gorbatchev, pour qui il reste "celui qui a dirigé le pays, entre espoirs et déceptions". A Ekaterinbourg, fief de l'ex-président russe Boris Eltsine, ennemi juré de M. Gorbatchev, l'avenue Lénine a été rebaptisée mercredi en avenue Gorbatchev, et un panneau où il est écrit "Merci Gorbatchev" y a été affiché, a rapporté l'agence Interfax.
Mais le jugement des Russes reste sans appel : près de la moitié d'entre eux éprouvent de l'indifférence envers Gorbatchev, 20 % éprouvent du "mépris" et seulement 10 % du "respect" pour l'ancien dirigeant. M. Gorbatchev ne désespère pas pour autant. "La lutte n'est pas finie. De plus en plus de Russes comprennent que Gorbatchev avait raison", estime-t-il dans un entretien à Komsomolskaïa Pravda publié mercredi.
"LES RACINES POURRIES" DU POUVOIR RUSSE
Il se souvient, dans cette interview, de son enfance dans "un bled perdu" dans le sud de la Russie "où il n'y avait ni radio ni électricité", où il a travaillé pendant cinq ans sur une moissonneuse-batteuse avec son père tout en rêvant de voyages. Il confie aussi que le moment le plus heureux de sa vie a été sa rencontre avec Raïssa, qu'il épousera à 22 ans et avec qui il vivra 46 ans. "J'ai pris 20 kilos après sa mort. La vie m'est devenue indifférente", témoigne-t-il.
Dans une autre interview au journal Argoumenty i Fakty, M. Gorbatchev critique un pouvoir russe dont "les racines sont pourries" et met en garde contre la répétition des scénarios des révolutions qui secouent les pays arabes. "Il ne faut pas agacer les gens et continuer de les priver" de liberté, prévient-il.
Les nouvelles frontières de l’Europe
Quoiqu'il en soit, […] les évènements d'Egypte, de Tunisie et maintenant de Libye causeront une surprise qui nous envoie loin dans l'avenir. Ce sont les conséquences pour l'Union Européenne de la révolution démocratique qui s'étend dans une grande partie de l'Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Nous devons nous montrer patient avant d'évaluer jusqu'où ira cette révolution, comme nous l'avons été dans les premiers mois qui ont suivi la chute du mur de Berlin en 1989. Mais aujourd'hui comme à l'époque il est utile de réfléchir à ce qui va se passer et de faire des projets pour l'avenir.
L'évolution de l'UE s'est faite à partir d'une série d'idées qui semblaient tirées par les cheveux quand elles ont été proposées mais qui sont apparues par la suite comme inévitables. La prochaine de ces idées sera probablement l'élargissement de l'UE à la côte sud de la Méditerranée. Nul ne s'attend à une telle évolution actuellement : la France, l'Allemagne et plusieurs autres pays de l'UE ne peuvent même pas accepter l'idée d'une adhésion de la Turquie, qui est déjà une démocratie.
Elargir l'UE à la côte sud de la Méditerranée
Mais repensez au début des années 1990 : il est vite devenu évident que l'Europe occidentale avait vivement intérêt à favoriser la stabilité, l'amitié et le développement économique de ses voisins anciens satellites soviétiques. C'est ce qu'elle a fait au cours d'un long et lent processus qui a culminé par l'adhésion pleine et entière à l'EU de dix d'entre eux plus de dix ans plus tard. Tous les anciens satellites de l'Union Soviétique ne sont pas devenus des démocraties et tous n'ont pas rejoint l'UE. On verra probablement le même phénomène pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient.Songez toutefois aux parallèles qui existent entre la chute de l'Union Soviétique, à l'Est de l'UE, et la chute des dictatures arabes de la côte méridionale de la Méditerranée. Comme après 1989, le réveil arabe d'aujourd'hui présente pour l'Europe un vif intérêt et une occasion historique qui deviendront de plus en plus évidents au fil des mois et des années à venir, pour le meilleur et pour le pire.
Les Etats-Unis sont confrontés à des problèmes militaires délicats dans la région et seront tenus pour responsable de ce qui se produira ou ne se produira pas en Palestine. L'Europe a, comme après 1989, essentiellement des liens économiques et culturels à offrir, ce qui est plus positifs. Les pays européens sont déjà les plus grands partenaires commerciaux de la plupart des Etats d'Afrique du Nord ; l'Italie a des relations privilégiées en matière de gaz et de pétrole avec la Libye et l'Algérie par exemple. La logique de ces liens ne peut pointer à long terme que dans une direction : l'adhésion à l'UE, sous une forme ou une autre, de certains pays nord-africains.
Vers une Union européenne et Méditerranéenne
Plus qu'une adhésion pleine et entière telle qu'on l'entend aujourd'hui, on aura probablement une nouvelle sorte d'union qui connaîtra plusieurs formes d'adhésion. C'est déjà le cas actuellement avec la zone euro, qui ne regroupe que certains des 27 membres de l'UE, ou l'espace Schengen. Il faudra donc trouver une nouvelle formule pour permettre l'intégration économique, puis la libre circulation des biens et le marché unique, des pays démocratiques d'Afrique du Nord. On s'arrêtera probablement avant la libre circulation du travail. Avec tout ceci, l'Union Européenne devra encore changer de nom pour devenir par exemple l'Union Européenne et Méditerranéenne.
Sans une telle proposition, sans ce projet à long terme, qu'est-ce que l'Europe aura à offrir aux nouvelles démocraties nord-africaines quand elles feront leur apparition ? Un peu d'aide et quelques places dans les universités, c'est tout. Pourtant, comme après la chute du mur de Berlin, nous avons une chose très précieuse à offrir pour inciter aux réformes démocratiques : la possibilité de nous rejoindre.
Cela paraît difficile, même sans parler de l'islam. N'oublions pas cependant que cette évolution serait logique politiquement et économiquement pour l'Europe. Après tout, la Méditerranée, en latin, c'est le centre de la terre, pas une sorte de frontière méridionale ni une barrière. Ce fut le centre de notre monde pendant des siècles. Elle fait partie du voisinage de l'Europe.
Un horizon néolibéral
On se souvient de la "stratégie de Lisbonne" lancée en 2000, qui avait pour objectif de faire de l’Union européenne "l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde d’ici à 2010". Elle se donnait des objectifs en matière d’innovation, de "cohésion sociale" et d’emploi. A peu près aucun n’a été atteint, bien que les taux d’emploi se soient rapprochés des 70% (de la population âgée de 20 à 64 ans) espérés. Mais les dépenses en recherche et développement ont faiblement augmenté et restent loin de la cible de 3% du PIB. Quant à la cohésion sociale, il suffit de remarquer que le risque de pauvreté (après transferts sociaux) a augmenté.
Ce bilan médiocre n’a pas empêché la Commission d’attribuer à la stratégie de Lisbonne la création de 18 millions d’emplois dans l’Union européenne. Ce chiffre ne mesurait cependant que l’augmentation de l’emploi en Europe entre 2000 et 2008. Créditer la stratégie de Lisbonne de l’ensemble de cette augmentation était donc un peu héroïque. Au passage, la moitié de ces créations correspondait à des emplois à temps partiel.
Un programme de réformes structurelles néothatchériennes
Le plus comique dans cette histoire est que la stratégie de Lisbonne avait été inspirée par des universitaires majoritairement classés "à gauche" et initialement mise en œuvre par des gouvernements supposés "de gauche". Mais l’affaire était tellement mal conçue dès le départ que cela avait été un jeu d’enfant pour la commission Barroso de récupérer le mouvement et de transformer une affaire gentiment social-démocrate tendance technologies de l’information en un programme de réformes structurelles néothatchériennes.Ceci dit, la stratégie de Lisbonne à elle seule n’a eu qu’un faible impact sur les réformes structurelles menées dans les différents pays, ces dernières résultant de compromis politiques principalement nationaux. Mais elle a quand même joué un rôle de ressource politique et idéologique à disposition des acteurs nationaux.
La suite de l’histoire s’appelle "Europe 2020", "une stratégie pour une croissance intelligente, durable et inclusive". D’ici 10 ans, tout en Europe est supposé être "intelligent" : la croissance et l’économie bien sûr, mais aussi la réglementation, la spécialisation, les maisons, les réseaux, la gestion du trafic… Tout est supposé être durable aussi : l’économie, la croissance…
Pour le reste, peu de surprises : l’objectif de taux d’emploi passe à 75%, une politique industrielle visant à améliorer l’"environnement des entreprises", une réglementation "intelligente", forcément, qui doit diminuer le "fardeau administratif pesant sur les entreprises", l’approfondissement du marché unique notamment grâce à la directive "services" (née directive Bolkestein) et plus généralement la réaffirmation que la concurrence (comprendre : déréglementation, privatisations, démantèlement des services publics) favorise la croissance et l’innovation, ce qui reste douteux.
"Europe 2020" vient d’un document du lobby patronal européen
Bref, que du connu. Comme l’a montré le Corporate Europe Observatory, l’inspiration d’Europe 2020 vient en partie d’un document produit par le lobby patronal européen : "ERT’s Vision for a competitive Europe in 2025".Ce qui est un peu nouveau concerne la gouvernance de la chose et doit se comprendre en lien avec une innovation récente dans ce domaine, le semestre européen, qui fait passer un examen aux budgets nationaux devant la Commission et le Conseil avant adoption par les parlements nationaux. La "discipline budgétaire" et les réformes structurelles sont ainsi réunies dans une "gouvernance plus forte": "L’assainissement budgétaire et la viabilité financière à long terme devront aller de pair avec d’importantes réformes structurelles, notamment dans les domaines des retraites, des soins de santé et des systèmes de protection sociale et d’éducation" (Europe 2020, page 28).
Sur le plan des réformes structurelles, rien de véritablement contraignant ne peut être mis en œuvre, mais de nouvelles ressources politiques sont mises à disposition des acteurs nationaux souhaitant suivre la voie néolibérale et il vaudra mieux avoir des finances publiques "saines" si on souhaite préserver son système de protection sociale.
Présidentielle : Pourquoi Sarkozy y croit toujours
« Ridicule ! »
Devant l'état-major de l'UMP réuni lundi à l'Elysée, Sarkozy n'a pas eu un mot sur le remaniement et le départ du gouvernement de Michèle Alliot-Marie et Brice Hortefeux. « C'était assez bizarre. Nous n'avons parlé que de fiscalité et de laïcité », témoigne un participant. Pourtant, il n'y a pas l'ombre d'un doute chez Sarkozy, assure son amie Isabelle Balkany : « Le Président est en pleine forme, serein et combatif. » Les sondages ? « On a connu bien des gens qui brillaient au firmament des sondages, mais dès que la campagne est lancée... »Toute la majorité n'a pas pour autant la foi sarkozyste chevillée au corps. Certains, du coup, s'interrogent à voix basse. Le président sortant, candidat « naturel » de la droite, étant à la peine, un François Fillon ou un Alain Juppé, plus populaires, devraient-ils reprendre le drapeau ? « Ridicule, s'agace-t-on à l'Elysée. Les députés savent très bien qu'il n'y a qu'un seul candidat qui peut les faire gagner : Sarkozy. » La preuve ? Le sondage CSA pour BFMTV/RMC/20 Minutes publié jeudi dernier montre que, même en piteuse forme, Sarkozy est le seul à devancer Marine Le Pen au premier tour, contrairement à... Fillon. « Fillon meilleur candidat ? Il n'arrive même pas au second tour ! » ironise le député de Belfort Damien Meslot.
Surtout, à plus d'un an de la présidentielle, il est bien trop tôt pour s'inquiéter, insiste-t-on dans le camp sarkozyste. L'histoire l'a montré, le favori dans les sondages quatorze mois avant le scrutin est rarement le vainqueur à l'arrivée. Jacques Chirac en particulier a été systématiquement donné battu, en 1994 comme en 2001, pour finalement l'emporter. « Les Français se décident de plus en plus tard, souligne le député UMP de l'Oise, Edouard Courtial. Des études ont montré que 50 % le font dans la semaine qui précède l'élection, et 25 % le jour même du vote ! » Il en est convaincu : la donne changera dès que l'adversaire socialiste sera connu. « Pour l'instant, Sarkozy prend tous les coups, mais le jour où il y aura un candidat PS, ça dispersera le tir. » Et puis, « dire que c'est plus difficile aujourd'hui avec Sarkozy, c'est avoir la mémoire courte, renchérit Meslot. En 2004, avec Chirac et Raffarin, on se faisait beaucoup plus engueuler ! »
« Petit troupeau des peureux »
Signe qu'il existe pourtant bien une angoisse sourde au sein de la majorité, le Premier ministre François Fillon a appelé ses troupes, mardi, à resserrer les rangs sans « états d'âme » derrière « un président expérimenté, qui n'est pas né de la dernière pluie ». « Que des élus s'inquiètent à un an et demie des législatives, c'est normal, relativise un proche de Sarkozy. Mais ils savent qu'ils ont un socle solide : Copé à l'UMP, Fillon à Matignon, Sarkozy à l'Elysée, il n'y a pas mieux ! » Et un député fidèle de grincer : « Le petit troupeau des peureux sera le premier à brandir l'étendard Sarkozy quand il remontera dans les sondages. »A treize mois du premier tour de l’élection présidentielle de 2012 le microcosme bruisse de rumeurs et de fantasmes.
La mode dominante qui ruisselle de partout c’est « Nicolas Sarkozy est cuit… avec une cote aussi basse il ne pourra pas redresser la barre » ; chez certains de ses amis et députés UMP on va encore plus loin en assurant qu’il a neuf chances sur dix de perdre.
Deuxième affirmation du microcosme, la vague bleu Marine Le Pen emporte tout, elle est autour de 20 % dans certains sondages elle va monter à 25 et arriver première devant Nicolas Sarkozy et le candidat socialiste. D’où la troisième certitude des mêmes, l’UMP va lâcher le Président et se trouver un sauveur à droite ! Et d’énumérer dans le désordre MM. Juppé, Fillon, Copé.
Au risque de contredire ces péremptoires vendeurs de la peau de l’ours il me semble qu’ils oublient plusieurs facteurs :
1. Nicolas Sarkozy est une formidable bête de campagne il l’a démontré en 2007. Quoi qu’il arrive il se représentera et personne à droite n’ira contre lui hormis Villepin. Si Nicolas Sarkozy accepte dans sa tête de reconnaître qu’il est le challenger et pas le favori il peut gagner.
2. Le sort d’une élection dépend des candidats en lice et on ne connaît pas le principal adversaire, le candidat PS ni le candidat écolo.
3. Les idées de la droite ne sont pas forcément minoritaires et les réformes accomplies non négligeables.
4. Le noyau dur du sarkozysme est à 25 %, celui de Chirac était à moins de 20 %. Tout peut donc arriver en 2012.
Pour 81 % des Français, la voix de la France faiblit dans le monde
La grande majorité des Français (81 %) estime que le rôle de la France dans le monde est en train de s'affaiblir, après que Paris a paru incapable de prendre la mesure des soulèvements populaires dans le monde arabe, selon un sondage diffusé mercredi par la chaîne de télévision Canal+. Seules 7 % des personnes interrogées pensent que le rôle de la France se renforce, 7 % considérant qu'il n'y a pas de changement, révèle cette étude réalisée par l'institut TNS Sofres pour Canal+.
Cette appréciation générale de déclin se retrouve quelles que soient les préférences politiques des sondés : sympathisants d'extrême droite (90 %), de gauche (86 %), de la droite présidentielle (65 %). Pour Canal+, "l'impact des récents évènements liés aux conséquences des révoltes dans les pays arabes est donc patent : attitude de la France vis-à-vis des dictatures renversées, voyage controversé de Michèle Alliot-Marie en Tunisie avec ses parents, remise en cause de la politique étrangère de la France par certains diplomates".
Mais la chaîne de télévision lie aussi le sentiment de déclin de la France dans le monde au décrochage du président Nicolas Sarkozy dans l'opinion depuis 2007-2008. En août 2007, peu après l'élection de Nicolas Sarkozy, 50 % des Français estimaient que le rôle de la France dans le monde se renforçait. A l'heure actuelle, la France et notamment sa diplomatie se trouvent sous le feu des critiques, après l'incapacité à prendre la mesure du vent de liberté qui parcourt le monde arabe, et après des semaines de violentes critiques sur la proximité de Paris avec des régimes autoritaires.
Cette crise s'est traduite par un changement à la tête de la diplomatie française, avec la prise de fonctions mardi d'Alain Juppé au ministère des affaires étrangères, en remplacement de Michèle Alliot-Marie, qui a démissionné dimanche sous la pression, trois mois seulement après sa nomination. "Ma volonté sera de continuer de faire entendre la voix de la France parce qu'elle est forte d'ores et déjà", a assuré mardi M. Juppé.
Il a présidé à une profonde rupture de son pays. Il en a été haï par son peuple. Depuis, il est devenu riche... C’est qui ? Non, c’est pas lui, vous vous trompez, il n’est pas français, il est russe. Il s’appelle Mikhaïl Gorbatchev et célèbre aujourd’hui ses 80 ans - dont vingt années de détestation populaire, depuis qu’il a liquidé l’URSS. Gorbatchev restera dans l’Histoire comme l’icône d’une vérité politique: nul n’est prophète en son pays. Dans l’opinion des Russes, il est le fossoyeur d’un empire et l’affameur d’un peuple - l’assoiffeur, aussi, qui prétendait interdire la vodka. Dans le reste du monde, surtout en Europe ex-«de l’Est», il est le sauveur, qui a permis la libération en retenant ses soldats. Curieux destin, n’est-ce pas, qui pose une question à tous les dirigeants politiques: vaut-il mieux être populaire sans rien faire, ou détesté pour avoir trop fait, trop vite ?
La Tunisie, l'Égypte d'abord. Le régime du colonel Kadhafi qui vacille. Bahreïn secoué. Le pouvoir algérien qui lâche du lest... Nous nous interrogeons sur l'aveuglement des démocraties occidentales qui se sont montrées souvent complaisantes avec des dirigeants qui offraient, entre autres avantages, celui de la « stabilité ». Ils préservaient les équilibres diplomatiques délicats, assuraient les contrats économiques en cours, pétroliers notamment, etc. Des partenaires peu sympathiques, mais prévisibles.
Nous avons découvert que si, en public, on « se bouchait le nez », les fréquentations répétées de ces partenaires avaient fini par tisser des amitiés troubles ou du moins peu lucides.
Cet aveuglement ou cette complaisance font penser, dans un autre ordre, à la crise financière dont nous peinons à nous relever. Il a fallu la folie des subprimes pour qu'on s'avise que le monde de la finance et du capitalisme mondialisé avait perdu contact avec le sens élémentaire des réalités humaines. Toutes les leçons n'ont pas été tirées.
Parmi les grands interlocuteurs des pays occidentaux, il en est deux qui présentent des caractéristiques étrangement semblables à celles de la Libye, de la Tunisie, ou de l'Égypte. Ces pays limitent les libertés politiques, répriment les voix dissidentes, s'en prennent aux journalistes désobéissants, mettent les ONG sous surveillance, musellent les oppositions, y compris par la manière forte. La corruption de l'appareil d'État et des administrations locales y fleurit presque sans limites. Une petite minorité s'accapare la richesse, et la justice y est aux ordres. Ces deux pays s'appellent la Russie et la Chine.
On donne à Poutine et Medvedev du « mon ami », comme on le faisait, hier, avec Moubarak. On déroule le tapis rouge pour Hu Jintao, alors que le Prix Nobel de la paix croupit en prison et que les avocats, qui défendent les victimes du « modèle chinois », sont aujourd'hui la première cible de l'arbitraire... La Chine serait-elle déjà trop puissante ? Le gaz russe n'aurait-il pas d'odeur ? On nous explique parfois que les peuples russes et chinois ne sont pas prêts à la démocratie, on laisse sous-entendre qu'ils n'aspirent pas aux libertés fondamentales, que leurs mentalités sont différentes... Mais on a laissé la Russie installer son « ordre » chaotique dans le Caucase, devenu plus instable que jamais. Et les Jeux Olympiques à Sotchi (sur les bords de la Mer Noire), en 2014, s'annoncent aussi problématiques que le furent ceux de Pékin, sur fond de répression contre les Tibétains et les Ouïgours...
Pourrait-on reconnaître que les peuples de Russie et de Chine ne sont pas différents des autres ? D'ailleurs, sur le web, des invitations à des « rassemblements du jasmin » invitent les Chinois à une nouvelle forme, sinon de désobéissance, du moins de désaveu civique. Pourrait-on convenir que la liberté n'est pas une menace, mais un droit ?
Rude tâche pour notre nouveau ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, que de trouver le ton juste, avec ses collègues européens. Il nous faut pour cela retrouver la confiance en l'homme, de quelque origine ou de quelque confession qu'il soit. Et cela commence... en France !
Un(e) ministre qui démissionne, ou plutôt poussé(e) dehors… Cette fois-ci, il ne s’agit pas de la France mais de l’Allemagne où une thèse de doctorat plagiée à 70 %, paraît-il, coûte son poste, et peut-être sa carrière, à Karl-Theodor zu Guttenberg, étoile montante de la politique allemande. Certes, rien de transcendant ni de révolutionnaire dans ce travail d’étudiant puisque la thèse en question compile en près de 500 pages des réflexions sur la constitution américaine et les diverses constitutions européennes. Mais, outre-Rhin, un vrai scandale.
Un scandale sociétal, d’abord, puisque chez nos voisins le titre de «Herr» ou «Frau Doktor» enregistré par l’état civil assure un parcours rapide dans le public comme dans le privé, à l’image d’une promotion de grande école française. Il donne rang dans l’«aristocratie» bourgeoise… Un rang dont pourtant l’authentique et très fortuné baron n’avait pas vraiment besoin. Et quelle suspicion portée sur les universités ! Combien de jurys de thèses se donnent-ils vraiment la peine d’étudier le travail de leurs doctorants ? Combien de thèses rédigées par des «nègres» ou des officines spécialisées ?
Mais le vrai scandale dénoncé par l’opposition, évidemment vertueuse, porte sur le déni de confiance. Un ministre, n’est-ce pas, se doit d’être sans reproche. Surtout lorsqu’il est en charge de la Défense et confronté à l’impopulaire déploiement de la Bundeswehr en Afghanistan. Quand le même ministre, et c’est de plus en plus fréquent, doit prononcer l’éloge des soldats tués en mission dans ce pays lointain, rappelant le «devoir accompli» au nom des «valeurs de la démocratie»...
Certes, politique et morale font rarement bon ménage. Les grandes phrases des uns et les tonitruantes indignations des autres cachent peut-être autre chose. La chute de «KT» ne fait pas que des malheureux, y compris dans son propre camp ! Le baron et sa belle épouse (une comtesse Bismarck), adulés par la presse people, commençaient à faire beaucoup d’ombre aux caciques chrétiens-démocrates, sous l’œil sourcilleux de la chancelière Merkel. Le Bavarois de la CSU pouvait un jour prétendre aux plus hautes fonctions…
Plus généralement, l’affaire Guttenberg accentue le malaise auquel est déjà confronté le gouvernement de Berlin, en perte de crédibilité dans les sondages. La coalition CDU/CSU – FDP au pouvoir fonctionne cahin-caha. Les beaux chiffres de l’économie cachent mal une situation sociale dégradée (appel massif à des travailleurs intérimaires sous-payés, services publics déficients dans des communes surendettées, émergence d’une classe d’assistés, les «Hartz IV», fin programmée de l’«État providence»...). Et le gouvernement fédéral, déjà en minorité au Bundesrat (la chambre des Länder dont l’avis est déterminant pour pratiquement toutes les questions budgétaires) doit encore faire face à six élections régionales en 2011. La plus périlleuse pour les chrétiens-démocrates de la chancelière et leurs alliés libéraux sera celle du 27 mars au Bade-Wurtemberg, fief CDU et berceau du FDP. En mai 2005, le gouvernement Schröder avait été contraint à l’abandon après avoir perdu la Rhénanie-Westphalie du Nord, fief social-démocrate…
Deux jours après la démission de Michèle Alliot-Marie en France, le gouvernement allemand a perdu à son tour un poids lourd, hier, en la personne de Karl-Theodor von und zu Guttenberg, le ministre de la Défense, accusé de plagiat dans la rédaction de sa thèse, en 2007. Celle-ci lui a été retirée la semaine dernière, après que la star de l’équipe d’Angela Merkel eut admis de « graves fautes » dans son travail. On ne bafoue pas, en Allemagne, le titre envié de « Herr Doktor ». Le jeune ministre l’a vérifié à ses dépens.
Son attitude consistant à payer sa faute ne manque pas de grandeur, et la comparaison entre l’interminable crise politique engendrée par les vacances de Noël de Michèle Alliot-Marie et le rapide dénouement allemand (quinze jours après les premières révélations) n’est pas à l’avantage des politiques français. Contrairement à sa collègue hexagonale, « KT » n’était pas ministre à l’époque des faits qui lui sont reprochés. Il n’a terni que très indirectement l’aura du gouvernement de son pays, alors que « Mam » a paralysé toute la politique étrangère française, avec son périple tunisien et les explications abracadabrantesques qu’elle a fournies en justification.
Fort d’une popularité intacte (73 % !) le ministre allemand bénéficiait aussi du soutien de sa chancelière. Il aurait pu se battre pour rester au gouvernement. Il a choisi d’assumer et de partir, évitant ainsi de compliquer la tâche d’Angela Merkel, qui vient d’enregistrer une sévère défaite à Hambourg et qui se trouve devant des échéances électorales périlleuses dans plusieurs autres Länder. Tout l’inverse de l’attitude de Michèle Alliot-Marie : bien que surprise les doigts dans le pot de confiture, elle a farouchement nié tout « manquement » et s’est accrochée à son maroquin pendant des semaines et des semaines, n’hésitant pas à plomber l’ensemble du gouvernement. Son compagnon Patrick Ollier, qui faisait partie du voyage tunisien, reste quant à lui bien au chaud dans son fauteuil de ministre des Relations avec le Parlement. Il avait pourtant promis de démissionner si Mam était limogée. Paroles, paroles des responsables français… Triste palinodie.
Les humains restent humains et sujets à des faiblesses coupables des deux côtés du Rhin. Il faut cependant avouer qu’à Berlin, cette semaine, le fauteur a su garder le sens de l’État, alors qu’à Paris le couple Mam-Pom s’est arrêté au sens… de la famille.
À fleurets pas mouchetés, l'escarmouche sur l'emploi du temps du maire de Bordeaux en disait long sur les relations à venir entre François Fillon et Alain Juppé. Pour le moment « avantage Juppé ». En obtenant les départs que Nicolas Sarkozy avait refusés à François Fillon lors de la prolongation de son bail à Matignon, le patron du Quai d'Orsay s'est positionné en recours éventuel de la droite. Et s'est désigné le Premier ministre pour adversaire. Nicolas Sarkozy qui voulait faire de la politique étrangère le levier de sa « représidentialisation » est le grand perdant de sa propre stratégie. En admettant qu'il est en panne de résultats à l'international, comme dans la lutte contre l'insécurité, le président de la République s'est mis entre les mains de son ministre des Affaires étrangères.
Les G8 et G20 français clôtureront l'année politique par une séquence internationale forte. Alain Juppé en profitera pour chercher à imposer sa stature d'homme d'État et à faire oublier les erreurs sur le Moyen-Orient ou sur le Mexique. S'il parvient à rendre une cohérence à notre politique étrangère, il apparaîtra comme un vice-président plus que comme un Premier ministre bis. Mais, même si la louange excessive n'a pas lésiné sur son talent, le nouveau ministre aura du mal à effacer cette période diplomatique désastreuse.
D'autant qu'il cherchera sans doute à ne pas trop s'exposer tant il est évident qu'Alain Juppé n'est pas revenu dans le circuit gouvernemental seulement pour mettre son expérience au service de la France. En se posant en candidat de substitution à droite c'est son image qu'il veut peaufiner. Ce retour calculé est sa dernière carte et il n'en fait pas mystère.
Le véritable handicap pour Alain Juppé c'est qu'il retrouve l'avant-scène à la faveur d'une crise de la diplomatie. Or la France attend aujourd'hui d'un « homme neuf » qu'il soit le promoteur d'une politique sociale et économique neuve. Nous venons d'assister à un changement de têtes plus qu'à l'avènement d'une autre gouvernance. Tant que le discours présidentiel continuera à nous dire que nos problèmes viennent des aspirations à la liberté des peuples arabes, Juppé sera en danger d'être perçu comme un faux homme fort.
Entre Nicolas Sarkozy et François Fillon, les relations n'ont jamais été faciles. Le fait est que l'attelage résiste aux caprices du temps et des tempéraments et qu'il avance, cahin-caha, sur la route de 2012. La sobriété du Premier ministre est appréciée à droite ; sa popularité, fût-elle écornée, appréciable. L'hôte de Matignon a su se défaire du rôle de collaborateur dans lequel celui de l'Elysée voulait le confiner. Pourtant, de remaniement en remaniement, il n'a pu pousser son avantage. Il avait été l'homme fort du précédent, au point d'imposer son maintien. Il serait plutôt l'homme oublié et transparent du casting mis en place ce week-end à la Lanterne. Son étoile a pâli ; il a été relégué au rang de spectateur assistant à la redistribution des postes régaliens. Son effacement lors de la fâcheuse séquence MAM n'a pas manqué d'être remarqué. Enfermé dans le silence, il a en outre paru meurtri par les attaques sur ses vacances égyptiennes. Elles l'ont affaibli. La nouvelle ère gouvernementale lui permettra-t-elle de revenir sur le devant de la scène ? En tout cas la promotion d'Alain Juppé, vieux routier du circuit, lui fera de l'ombre. D'autant que celui qu'on qualifie déjà de vice-Premier ministre a posé, et obtenu, les conditions d'une relative autonomie. Il est prêt à se poser en sauveur si le quinquennat tournait vinaigre. Quant au fidèle Claude Guéant, nul doute qu'à l'Intérieur il sera en ligne directe avec l'Elysée, sinon sous tutelle. Le rayon d'influence de François Fillon a réduit au lavage mais il entend continuer à marquer sa différence. Ainsi, hier, il a successsivement défendu MAM (non citée dimanche par Sarkozy), appris la nomination d'Hortefeux à... la présidence (non annoncée par Sarkozy) et prévenu qu'il ne laisserait pas déraper le débat (initié par Sarkozy) sur l'islam.
Saïf Al-Islam Kadhafi soupçonné de plagiat universitaire
"L'école prend très au sérieux toutes les affirmations de plagiat et étudie la question conformément aux procédures de la LSE", a indiqué ce porte-parole mardi 1er mars. Les accusations ont été lancées par des universitaires qui ont souhaité garder l'anonymat, selon le journal des étudiants de la LSE, The Beaver.
HOMME D'INFLUENCE
La semaine dernière, l'université avait annoncé couper tous ses liens avec Saïf Al-Islam, en stoppant notamment un programme d'études sur l'Afrique du Nord, mis en place grâce à une dotation d'une fondation du fils de Mouammar Kadhafi, et un programme de formation de fonctionnaires libyens.
Homme d'influence, Saïf Al-Islam n'occupe pas de fonctions officielles en Libye, mais il s'est distingué ces dernières années en tant qu'émissaire du régime de ce pays, en proie depuis le 15 février à une révolte réprimée dans le sang.
Un quotidien égyptien relance les spéculations sur l'état de santé de Moubarak
Hosni Moubarak serait hospitalisé en Arabie saoudite, affirme mercredi le quotidien égyptien Al-Akhbar, relançant les spéculations sur l'état de sante de l'ex-président égyptien. Aucun commentaire n'a pu être obtenu dans l'immédiat auprès du Conseil suprême des forces armées, désormais aux commandes du pays. Mais une source militaire avait démenti, mardi, une précédente information de presse selon laquelle l'ex-raïs, qui est âgé de 82 ans, aurait été admis dans un hôpital du Caire après avoir tenté de fuir le pays avec les membres de sa famille.
Le quotidien Al-Akhbar, qui cite des "sources informées", précise que M. Moubarak se trouverait dans un hôpital militaire de la ville saoudienne de Tabouk pour soigner par chimiothérapie un cancer du côlon et du pancréas. L'ancien président, qui a démissionné le 11 février, se soumettrait à une séance de chimiothérapie d'une heure tous les cinq jours, ajoute le journal. Sa famille serait à ses côtés. L'état de santé d'Hosni Moubarak, qui a subi en mars 2010 en Allemagne une intervention à la vésicule biliaire, est au centre de nombreuses interrogations depuis des mois. D'après les autorités égyptiennes, qui lui ont interdit lundi de quitter le territoire, il se trouve à Charm el-Cheikh, sur les bords de la mer Rouge.
L'Inde et la gangrène de la corruption
Quotas de femmes dans les conseils : pourquoi pas ?
Il est temps de briser, une fois pour toutes, le « plafond de verre ». Permettre aux femmes de donner toute la mesure de leur talent n'est pas seulement une question d'égalité. C'est aussi une nécessité économique. Les faits apportent, hélas, un cruel démenti : au sein des conseils d'administration des entreprises de l'Union européenne, seul un membre sur dix est une femme, et seuls 3 % des PDG sont des femmes. En Europe, les progrès ont été jusqu'alors extrêmement lents : la part des femmes siégeant aux conseils d'administration d'entreprises de l'Union n'a augmenté que d'un demi-point de pourcentage par an au cours de ces sept dernières années. A ce rythme, il faudrait encore attendre cinquante ans avant d'atteindre la parité hommes-femmes dans les conseils d'administration !
L'égalité entre les femmes et les hommes constitue l'un des principes fondateurs de l'Europe. Dès 1957, en effet, le principe de l'égalité des rémunérations pour un même travail a été intégré au traité de Rome. Plusieurs pays européens ont déjà ouvert la voie : la Norvège a été la première, en 2003, à instaurer un quota de 40 % de femmes dans les conseils d'administration, suivie de l'Espagne en 2007 et de l'Islande, qui a adopté des quotas femmes-hommes l'année dernière. Au mois de janvier, la France, berceau de l'égalité, a adopté une loi prévoyant que, d'ici à 2017, les femmes représenteraient 40 % des membres des conseils d'administration des plus grandes entreprises cotées en Bourse. Outre-Rhin, la classe politique allemande débat actuellement de l'opportunité d'imposer un tel changement. L'Autriche envisage également de prendre des mesures.
Les quotas sont certes discutables. Ils reviennent en effet à user de la manière forte pour briser le « plafond de verre », mais les résultats sont là : en Norvège, la part des femmes siégeant aux conseils de surveillance est passée de 25 % en 2004 à 42 % en 2009 ; en Espagne, la participation des femmes aux conseils d'administration est passée de 4 % en 2006 à 10 % en 2010. S'ils peuvent nous permettre de faire bouger les choses, les quotas doivent absolument rester une mesure transitoire, à n'appliquer qu'en dernier ressort.
Nous allons procéder en deux étapes : dans un premier temps, il appartiendra aux entreprises elles-mêmes de proposer des solutions. Au cours des prochains mois, la Commission européenne et plusieurs gouvernements nationaux rencontreront des PDG des plus grandes entreprises européennes cotées en Bourse afin d'entendre leurs propositions. L'autorégulation peut effectivement permettre de renforcer la présence des femmes au plus haut niveau de décision, mais elle doit être suivie de très près. En l'absence de progrès convaincants, la seconde étape serait claire : l'Europe devrait alors imposer des quotas juridiquement contraignants. La balle est à présent dans le camp des entreprises.
Le besoin de renforcer la présence des femmes dans les conseils d'administration des entreprises n'a jamais été aussi criant. Il ressort d'une analyse de McKinsey que le résultat d'exploitation des entreprises qui comptent le plus de femmes au sein de leur conseil d'administration dépasse de 56 % celui des entreprises qui ne comptent que des hommes à ce haut niveau de direction. Les conseils d'administration dans lesquels les femmes sont plus nombreuses sont plus performants en matière d'audit et de surveillance et de contrôle des risques que les conseils d'administration composés exclusivement d'hommes. Or, les femmes prennent 80 % des décisions d'achat des ménages - et nous ne parlons pas uniquement de pain ou de lessive. Demandez donc autour de vous qui a choisi le dernier ordinateur !
Nous souhaiterions que l'Europe donne un coup d'accélérateur pour ce qui concerne la représentation des femmes dans les conseils d'administration. Fixons-nous des objectifs ambitieux ! D'ici à 2015, les conseils d'administration devraient compter au moins 30 % de femmes et, d'ici à 2020, 40 %. Il serait bien sûr préférable que les entreprises y parviennent d'elles-mêmes. Mais si tel n'est pas le cas, nous sommes prêts, au besoin, à adopter des règles contraignantes à partir de 2012.
Il est grand temps d'agir à présent. Alors que nous sommes exposés à un risque de ralentissement de la croissance économique et de l'emploi suite à la crise de la dette souveraine, nous ne pouvons nous permettre de négliger le potentiel que représente une moitié de la population. Certaines entreprises ont déjà compris que la parité est bonne pour les affaires ; d'autres, en revanche, sont plus lentes à réagir. Le vent du changement souffle fort et les décideurs d'entreprise doivent choisir : soit faire en sorte que le « plafond de verre » se brise de lui-même, soit attendre qu'une intervention extérieure ouvre la première brèche.
Le retour des LBO, une mauvaise nouvelle pour les entreprises
On dit que les LBO créent de la valeur. Mais pour qui ? La question mérite d'être posée.
Un LBO consiste à racheter une entreprise par une combinaison de capital et de dette. La dette a un but essentiel : maximiser le profit que fera l'acheteur sur son apport en capital au moment de la revente. Plus l'endettement est élevé, plus le profit sur le capital sera élevé. La caractéristique du LBO est que la dette, dite dette d'acquisition, n'est pas garantie par des actifs externes liés à l'acquéreur mais par les actifs mêmes de l'entreprise acquise.
La nature de la dette d'acquisition soulève des questions majeures.
Il convient d'abord de corriger une perception largement répandue : les LBO n'apportent pas de capitaux aux entreprises, ils ne concourent pas au financement de l'économie. Ils ne font qu'acheter et revendre des actions existantes.
Non seulement ils n'apportent pas mais ils prélèvent. Ils ponctionnent les ressources de l'entreprise acquise pour assurer le service de la dette d'acquisition. Les ressources pour financer la croissance sont amputées.
La dette d'acquisition réduit d'autant la capacité d'endettement de l'entreprise acquise, donc ses possibilités d'emprunt pour financer des projets de croissance. Dans un environnement de crise comme aujourd'hui, l'entreprise a un double handicap : obtenir les soutiens bancaires nécessaires à son exploitation et assumer la dette d'acquisition.
Le LBO transforme une entreprise à faible risque en une entreprise à risque élevé. Avant l'acquisition, l'entreprise a par définition un profil de risque faible : elle est bénéficiaire, elle a peu de dettes, un cash-flow positif, elle est déjà en croissance en termes de chiffre d'affaires et d'emploi. Ces caractéristiques sont en effet nécessaires pour appliquer à l'entreprise la dette d'acquisition la plus élevée possible. Après l'opération de LBO, l'entreprise a un profil de risque dégradé : moins de cash-flow, plus de dettes.
L'entreprise acquise assume le risque plein de la dette d'acquisition (jusqu'au risque de défaut, voire sa disparition) sans avoir bénéficié de l'usage de la dette, par exemple pour financer un projet de croissance. Les actionnaires acquéreurs en revanche bénéficient pleinement de l'usage de la dette tout en limitant leur risque au montant de leur apport en capital.
Les actionnaires vont bien évidemment chercher à faire croître l'entreprise acquise : mais cette croissance sera contrainte par le poids de la dette d'acquisition. L'entreprise n'atteindra pas son plein potentiel de croissance en termes de chiffre d'affaires et d'emplois. Les actionnaires acquéreurs ne s'en préoccupent guère car ils savent que le déficit de croissance sera compensé par le profit supplémentaire engendré par la dette d'acquisition.
Les intérêts de la dette d'acquisition viennent réduire l'impôt sur les bénéfices payé par l'entreprise acquise, un coût pour l'Etat de près de 1 milliard d'euros par an, une véritable subvention à l'industrie du LBO. Comment justifier cette subvention ?
Les LBO sont des opérations d'ingénierie financière qui maximisent le profit de l'actionnaire au détriment de l'intérêt de l'entreprise. Les investisseurs institutionnels (compagnies d‘assurances, banques, caisses de retraite) qui alimentent les fonds de LBO doivent en prendre conscience : les LBO peuvent générer des profits, mais ils ne servent pas l'économie.
Il faut s'inquiéter du retour massif des LBO, deux ans à peine après la crise, alors que les économies sont encore gravement atteintes. Les investisseurs institutionnels serviraient mieux l'économie, les intérêts à long terme de leurs déposants et souscripteurs s'ils allouaient moins de leurs ressources aux LBO et davantage à l'apport de capitaux aux entreprises pour le financement de projets de croissance.
Aujourd'hui en France 1.700 entreprises sont sous LBO au prix de 27 milliards d'euros de capital et 50 milliards d'euros de dettes d'acquisition. On peut imaginer la croissance économique qui aurait été gagnée si ces ressources avaient été mises au travail.
Il flottait comme un parfum de soulagement hier à Pékin. La dernière brassée de statistiques a confirmé le ralentissement de l'activité économique et des prix de l'immobilier en Chine. Le gouvernement n'a donc pas perdu le contrôle de l'économie. Conformément à ce qu'expliquait dimanche le Premier ministre chinois, Wen Jiabao, pour qui la croissance du pays pourrait revenir à 7 % en 2011 contre 8 % initialement annoncé. Depuis des mois, les autorités avaient augmenté les taux d'intérêt et surtout relevé progressivement le taux des réserves obligatoires, sans exercer d'effet visible sur une activité qui avait encore bondi au dernier trimestre 2010. Les investisseurs redoutaient une intervention beaucoup plus brutale. Car deux indicateurs cruciaux sont passés au rouge. Poussée par la flambée des prix alimentaires et de l'énergie, la hausse des prix à la consommation frôle désormais les 5 %. Elle inquiète les consommateurs, en particulier les plus démunis, qui consacrent une part de leur budget plus importante que les autres à se nourrir. Et puis les prix de l'immobilier galopent. Un peu comme en France, les classes moyennes perdent l'espoir d'accéder à la propriété. Mais, en Chine, l'inflation n'est pas seulement placée sous le signe du yin. Elle est aussi sous le signe du yang. Si la hausse des salaires et donc des prix diminue la compétitivité des exportations, elle calme les récriminations des pays occidentaux. Et, surtout, elle soutient la consommation. Autrement dit, elle favorise le basculement de l'économie sur la demande intérieure, qui constitue un objectif majeur du gouvernement pour les prochaines années.
Tout se passe comme si les autorités tentaient en fait de stabiliser l'inflation à un taux un peu inférieur au rythme actuel. Pas trop fort pour éviter de devoir donner un coup de frein vigoureux qui enverrait dans le décor les collectivités locales qui ne pourraient plus refinancer leurs emprunts colossaux. Pas trop lent pour favoriser le virage. Autrement dit, au voisinage de 4 %... le chiffre que proposait l'an dernier l'économiste en chef du FMI, Olivier Blanchard, aux pays avancés. Jusqu'à présent, aucun pays n'a su piloter son inflation si loin du voisinage de la stabilité des prix. Mais, après tout, la Chine a bien réussi à faire comme prévu 10 % de croissance par an depuis trois décennies...
«On a dit Kadhafi fou alors que c'est surtout un mégalomane»
Eric Rouleau, ancien journaliste, ambassadeur en Tunisie et en Turquie, a très bien connu le colonel Kadhafi.
Eric Rouleau - Je connais Mouammar Kadhafi depuis 1971, soit deux ans après qu'il a renversé la monarchie Senoussi. Il n'était pas connu, inculte, curieux de tout et, comme Nasser lui avait dit «méfie-toi des Etats-Unis et de l'URSS, mais tu peux faire confiance aux Français», il s'est vite lié avec moi car j'étais journaliste français et parlais sa langue, l'arabe. Kadhafi est ignare, mais rusé, sous une apparence de naïveté. En 1973, voulant absolument être invité par la France alors que Pompidou refusait de le recevoir, il a profité de ma position au quotidien Le Monde pour organiser un colloque rassemblant, à sa demande, des « sionistes et des rabbins français ». Il était persuadé, ajoutait-il, de pouvoir les gagner à la cause palestinienne. A son arrivée à Paris, Pompidou s'est senti contraint de lui accorder une audience. Il était le meilleur client de la France en achats d'armements, en particulier d'avions de chasse et de bombardiers.
On a beaucoup dit qu'il était fou aussi...
On l'a dit fou alors que c'est surtout un mégalomane. Kadhafi, admirateur passionné de Nasser, croyait, après la mort de celui-ci, qu'il était investi de la mission d'unifier le monde arabe ; d'où ses multiples tentatives d'unir la Libye à divers pays arabes, en vain d'ailleurs. Des années plus tard, il se voyait à la tête d'une Afrique unifiée. Il a financé des organisations palestiniennes vouées exclusivement à la violence, des milices libanaises pendant la guerre civile dans le pays du Cèdre, les nationalistes irlandais dans leur lutte contre le gouvernement britannique. Il a soutenu des mouvements révolutionnaires anti-Américains en Amérique latine et, quand on lui disait qu'il était fou de le faire, il répondait : «Pourquoi ne le ferais-je pas, les Américains financent bien des mouvements anti-Arabes!» Pour lui, la petite Libye valait bien la puissante Amérique.
Mais est-il intelligent ?
Il est surtout calculateur. En 2004, il se livre à un spectaculaire changement de politique et d'orientation. Il offre au « Grand Satan » américain de renoncer au terrorisme, qu'il pratiquait partout dans le monde, et à la fabrication d'armes nucléaires, en échange de quoi il sollicitait la neutralité bienveillante de Washington à son égard. Il craignait alors de connaitre le sort de Saddam Hussein qui, l'année précédente, avait été fait prisonnier en Irak par les forces américaines. Depuis ce compromis, le commerce americano-libyen a plus que décuplé.
Voyez-vous Kadhadi comme un dictateur sanguinaire ?
Je n'emploierais pas le terme de sanguinaire. Je connais sa responsabilité dans l'assassinat de certains opposants, dont un ancien ministre des Affaires étrangères qui voulait introduire une forme de démocratie. La torture, et probablement des mises à mort, étaient courantes dans ses prisons. Ce n'est que récemment qu'il s'est livré à des massacres.
Quelle est sa marque de fabrique ?
J'ai réalisé un documentaire sur lui dans les années 80. Issu d'un milieu petit-bourgeois, il chercha l'ascension sociale en intégrant le corps des officiers. Dès le lycée, il participait à des manifestations et rêvait de suivre l'exemple de Nasser, son idole. Lors du tournage, Kadhafi a montré un visage insolite. Il insista pour me conduire chez son père, âgé de 102 ans, auquel il manifesta une tendresse surprenante. Il lui caressait le crâne avec émotion en me parlant de la lutte menée par son père contre l'occupation italienne. A une autre occasion, il me retint toute une nuit dans son bureau pour me convertir à l'islam, lequel, soutenait-il, rassemblait toutes les vertus du judaïsme et du christianisme. Ayant échoué à me convaincre, il me remit au petit matin un exemplaire du Coran dédicacé. Ces deux anecdotes, inutile sans doute de le dire, ne définissent pas l'homme qui m'a le plus souvent paru orgueilleux, entêté et sans scrupules. On peut tout attendre de lui.
Recherchait-il quelque chose en particulier ?
De la reconnaissance. Kadhafi avait un insatiable besoin de reconnaissance. C'est pour cela qu'il était imprévisible, cherchant à surprendre constamment ses interlocuteurs, l'opinion publique. Avait-il besoin d'arriver à Paris avec sa tente de Bédouin ? Je connais ses palais, ses appartements privés. Le message était clair : Kadhafi n'a que faire de notre civilisation.
Kadhafi est-il un habile politique ?
Oui, si l'on prend en considération le système politique qu'il a mis en place. Il a créé ce qu'il a appelé la Jamahiriya (l'Etat des masses) en prétendant qu'il avait donné le pouvoir à son peuple, organisé en comités populaires dont il n'était que le guide. Or, il a transformé progressivement ces comités en milices qui constituèrent l'une de ses gardes prétoriennes.
Avez-vous conservé des relations avec lui ?
Je ne l'ai pas revu depuis une vingtaine d'années. Il m'a pourtant invité régulièrement pour la fête nationale libyenne mais, ayant eu le sentiment d'avoir fait le tour du personnage, je ne me suis plus rendu en Libye depuis que j'ai quitté le corps diplomatique français.