TOUT EST DIT

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ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

jeudi 2 juin 2011

Ferry et le grand air de la calomnie

La presse n'est pas tendre avec Luc Ferry, qu'elle accuse, au choix, de véhiculer des rumeurs nauséabondes ou d'avoir été complice de celui qu'il dénonce.

Luc Ferry a entonné "l'air de la calomnie", estiment ce jeudi les éditorialistes, après les propos de l'ancien ministre de l'Education assurant que les plus hautes autorités de l'Etat avaient couvert des actes pédophiles commis au Maroc par un de ses ex-collègues, qu'il n'a pas nommé. 
"Si c'est avéré", écrit Nicolas Demorand dans Libération, il s'agit "d'un scandale d'Etat", mais en attendant la justice doit faire "rapidement la lumière" sur ces déclarations qui "font bouillir une marmite puante... Et arment le piège fatal du 'tous pourris'." 
"'Je sais tout mais je ne dirai rien. En entonnant l'air de la calomnie, Luc Ferry a-t-il ouvert le grand déballage du printemps", s'interroge Michel Vagner dans l'Est Républicain. Ou s'est-il plutôt livré à un "grand dérapage", renchérit Pascal Jalabert dans le Progrès. En tout cas, selon Jean-Claude Souléry, de la Dépêche du Midi, il "crache dans la soupe aux ragots" et sa conduite est "détestable." 
"On connaissait l'histoire de l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours", ironise Jacques Guyon dans la Charente Libre. "Comment peut-on lancer une accusation aussi lourde avec autant de légèreté '", accuse l'éditorialiste, qui constate au passage que "ces derniers temps, les philosophes ont malheureusement montré que leur capacité à éclairer le monde avait singulièrement baissé en intensité". 
"En moins d'un mois, voilà la scène politique submergée par les eaux boueuses d'histoires glauques", déplore Patrice Chabanet du Journal de la Haute-Marne. "De deux choses l'une", résume-t-il. Soit ces rumeurs "sont dénuées de tout fondement, et c'est grave pour la politique et la morale", soit elles "sont fondées, et c'est toute une grappe de responsables qui devront répondre de non-dénonciation de crime de pédophilie, à commencer par Luc Ferry lui-même (...) Dans les deux cas, c'est la démocratie qui trébuche et titube". 
Pour Didier Louis du Courrier Picard, "si l'on voulait salir la république et pervertir le débat public, on ne s'y prendrait pas autrement." "A qui profite la logorrhée", s'interroge-t-il, avant de répondre laconiquement: "Lire les prochains sondages de popularité, à la ligne Le Pen." 
De son côté, Patrick Fluckiger (l'Alsace) voit dans l'affaire Ferry une conséquence du séisme Strauss-Kahn, qu'il compare à une "bombe à fragmentation". "Mardi soir, explique-t-il, Luc Ferry a ramassé une autre sous-munition, et elle lui a explosé entre les mains". Or, poursuit-il, "l'incendie s'annonce violent" et "dans ce climat délétère, les médias sont sur la corde raide, car la presse a trop souvent tu les turpitudes des hommes politiques". 
Mais "faire le juste choix d'informer sans diffamer est parfois moins évident qu'il n'y paraît, justifie-t-il, surtout à l'approche d'une campagne électorale où tous les coups sont à craindre". La preuve.

LA PRESSE DÉBALLE MAIS N'ASSUME JAMAIS, FAUT DES COUILLES ET ELLE N'EN A PAS ! 

L'odieuse rumeur




Quand l'Allemagne devient une île

"Messieurs, l'Angleterre est une île, et je devrais m'arrêter là..." C'est ainsi qu'André Siegfried, l'un des pères de la politologie moderne, commençait jadis son cours d'histoire britannique à la Sorbonne.

Le tunnel sous la Manche n'y a rien changé. Les préventions du général de Gaulle contre l'entrée du Royaume-Uni dans l'Europe se sont avérées prophétiques : Albion n'a toujours pas les yeux vraiment tournés vers le continent. Mais qu'importe puisque, comme le disait de Gaulle avec humour, "l'Europe, c'est la France et l'Allemagne. Les autres, c'est les légumes".

Le problème, aujourd'hui, c'est qu'à son tour l'Allemagne est en train de devenir une île : si l'on n'y prend pas garde, le Rhin qui nous sépare aura bientôt l'immensité d'une mer. Pas de jour sans une nouvelle discorde ou incompréhension entre nos deux pays.

Que le gouvernement Merkel ait décidé d'organiser au plus tard en 2022 la sortie du nucléaire (23 % de la production totale d'électricité en Allemagne), c'est une nouvelle preuve que nous sommes de moins en moins en phase avec nos voisins : pour l'heure, nous en restons en effet au tout-nucléaire ou presque (75,2 % de la production totale d'électricité).

Malaise qu'il faut ajouter aux différends économiques et financiers qui nous opposent à l'Allemagne. Après avoir subi une rude cure de rigueur, elle supporte de moins en moins d'avoir à payer pour l'irresponsabilité chronique de pays comme la Grèce. Elle n'accepte plus d'être la banque de l'Europe. Au point que l'on peut se demander si, un jour, elle ne voudra pas sortir de l'euro. On rit d'avance en pensant aux cris d'orfraie que pousseront alors les europhobes...

Printemps arabe ou printemps turc ?

Moïse, Jésus, Mahomet y sont nés. Mais leurs collines inspirées et, au-delà, tout l'univers arabe restent soumis à la colère divine. Alors, depuis des lustres, des hommes de bonne volonté se cramponnent à tout ce qui semble pouvoir l'apaiser. Aujourd'hui qu'une jeunesse aux mains nues balaie à Tunis ou au Caire de vieux despotes, se bat en Libye contre le plus foutraque et ronge son frein en Syrie, à Bahreïn, au Yémen, son élan, sa ferveur nous font rêver. L'Occident y respire un "élan démocratique". L'olympe international du G8 vient, à Deauville, de bénir ce qu'il appelle le "printemps arabe". Comme si ses fruits allaient, un jour, conjurer la misère arabe, le fanatisme islamiste et l'épouvantable conflit israélo-palestinien. Sur tous ces paris euphoriques, croisons les doigts ! Car la promesse est fragile.

La France milite à l'avant-garde pour en gonfler la voile. Elle a, pendant un demi-siècle, beaucoup ménagé les dictatures arabes et caressé comme personne Saddam Hussein et Kadhafi. Sarkozy sonne donc le grand virage. Il recueille à Deauville les éloges d'une Amérique longtemps sceptique, distante et réticente. Obama aura laissé la France et la Grande-Bretagne s'échiner en première ligne contre un Kadhafi devenu le chien galeux du printemps arabe. Mais, pour finir, requinqué par l'exécution de Ben Laden, Obama paraît se raviser, se fait avenant, voire cordial, avec une Europe oubliée. Et, plus important sans doute, voici que la Russie de Medvedev, solide soutien de Damas et de Tripoli, se résout à lâcher la Libye et à mener benoîtement Kadhafi vers la sortie...

Cet engagement en faveur des rébellions arabes, ce virage présentent pour l'Occident l'avantage évident d'accorder enfin sa politique arabe à ses valeurs démocratiques. L'Occident parie que l'avenir arabe s'en souviendra. Et que la démocratie, si un jour elle se profile, n'oubliera pas ses bienfaisants parrains. Mais on n'en est pas là, et la realpolitik a encore de beaux jours. Ainsi, l'Amérique n'abandonnera pas de sitôt le régime le plus rétrograde de la région - l'Arabie saoudite -, qui fait, sur le marché pétrolier, la pluie et le beau temps.

Quant à l'Europe, stratégiquement inexistante, elle exhibe son habituelle irrésolution. Le pacifisme allemand refuse l'aventure libyenne, où la France et la Grande-Bretagne retrouvent quelques bonheurs perdus d'Entente cordiale.

Cela dit, le plus douteux reste, à coup sûr, l'avenir même du printemps arabe. L'élan libertaire de la jeunesse a éclipsé la sinistre fatalité économique de l'échec arabe. Et le malheur, tant au Maghreb qu'au Machrek, d'avoir 20 ans dans un pays sans pétrole. Dans cet ensemble, plombé par une productivité débile, 450 millions d'hommes exportent, hors pétrole, moins que la Suisse avec 8 millions d'habitants... Tout est dit !

On voit bien à l'avant-scène, et sur Facebook, la détresse de ces 70 000 jeunes Tunisiens diplômés d'enseignement supérieur et dont 50 % sont sans emploi, mais on aperçoit moins, vu de Paris, la détresse des millions de pauvres hères qui, hors Facebook, et loin de la côte, croupissent dans l'arrière-pays. C'est cette détresse qui inquiète au premier chef une Egypte de 70 millions d'hommes. L'armée qui la dirige continuera de la diriger. Avec un despotisme mieux "éclairé" et une corruption mieux contenue. Mais la réalité démocratique se fera attendre.

Est-ce que dans les élections, ici ou là retardées mais programmées, à Tunis et au Caire, les Frères musulmans se tailleront la part du lion ? Probablement, disent les experts, car l'armature morale et consolatrice de l'islam se révélera, dans la confusion, indispensable. Mais, nous assure-t-on, cet islam ne sera ni agressif ni xénophobe. Un islam, en somme, tolérant la laïcité de l'Etat, comme le turc, qui, peu à peu, impose son modèle. A se demander si le printemps arabe ne fait pas d'abord reverdir le printemps turc, et une renaissance ottomane ! Du reste, l'effondrement égyptien, l'affaiblissement de Téhéran, miné par les zizanies internes, et l'ébranlement de l'allié syrien ne font que souligner par contraste l'épanouissement de la Turquie.

Une allusion d'Obama aux frontières de 1967 comme périmètre d'un futur Etat juif aura, pour quelques heures, échauffé les esprits. A Washington même, où il se trouvait, Netanyahou en a retoqué sèchement la perspective. S'il a paru contrarier Obama, il n'en fut pas moins applaudi au Congrès américain. Le pouvoir israélien, en tout cas, n'est pas disposé aux nécessaires concessions où la terre entière paraît l'inviter. Le mode de scrutin israélien l'interdit. Le plus vraisemblable n'est donc pas la détente. Mais, au contraire, qu'une nouvelle et violente intifada palestinienne mette à nouveau le feu aux poudres. Et n'entraîne l'intervention internationale. La paix sur ces contrées paraît introuvable. Un jour ou l'autre, elle sera, qui sait, importée... Et, dès lors, imposée.

Un an avant

L'élection de 2012 prend place à un moment décisif. Sur le plan mondial, les révolutions du monde arabo-musulman et la mort d'Oussama ben Laden concluent le cycle historique ouvert par les attentats du 11 septembre, sans enrayer le recul de l'Occident né du grand basculement du capitalisme vers les pays émergents. L'Europe, enfermée dans la crise financière et minée par la divergence de ses économies, est menacée de relégation. Enfin, la France est confrontée à une heure de vérité. Soit elle parvient à libéraliser ses institutions autoritaires et sa régulation étatique, à convertir son modèle de développement tiré par une consommation financée par la dette publique, à briser la spirale du chômage de masse, à réunifier une nation éclatée. Soit elle deviendra une grosse Grèce, promise à un choc économique et financier majeur. De cet enjeu les Français ont clairement conscience. Leur pessimisme s'explique par la compréhension du déclassement du pays et de la profondeur d'une crise qui dure depuis les années 70, cumulée avec l'absence d'issue crédible en raison de la panne des moteurs du changement que furent l'Etat et l'Europe.

Rarement élection présidentielle aura porté une telle charge historique. Rarement aussi campagne aura débuté aussi tôt et aussi bas. Il est affligeant que les partis dits de gouvernement fassent la campagne des populismes en rivalisant de démagogie. La décomposition de la vie politique accompagne celle de la nation, encourageant la multiplication anarchique des candidatures. Or les mauvais candidats chassent les bons débats, favorisant la floraison des attaques personnelles dont l'ultime avatar est à chercher dans la polémique entre la gauche Porsche et la gauche Scooter. Au lieu de défendre la mondialisation, l'Europe et la réforme, partis et candidats flattent les passions et les peurs collectives. La précaution et la protection sont mobilisées contre la société ouverte. Le marché est condamné et l'étatisme avec ses deux béquilles, les taxes et les réglementations, réhabilité comme vecteur du développement. L'Europe est vouée aux gémonies et les frontières font leur grand retour, la crise financière justifiant les attaques contre l'euro, le patriotisme économique la remise en question du grand marché, le contrôle de l'immigration la dénaturation de l'espace de Schengen. Enfin, la hantise de l'islam alimente les dérives sécuritaires, la dénonciation de l'immigration légale et la xénophobie, en parfaite contradiction tant avec les besoins économiques résultant du vieillissement démographique qu'avec le soutien de la politique étrangère aux révolutions du monde arabo-musulman.

L'inconséquence culmine avec le modèle économique et social que chacun sait insoutenable mais dont nul n'ose traiter les trois fléaux : la sous-compétitivité, le surendettement et le chômage de masse. La France est le seul des pays développés à n'avoir pas retrouvé son niveau de production d'avant la crise, tout en consommant 13 % de plus que la moyenne européenne. Or l'imagination débridée des propositions en matière de régulation et de redistribution va de pair avec un vide béant en matière de création de richesses. Dans le domaine des finances publiques, la France devra réduire son déficit structurel de 6 à 2 % du PIB, soit 80 milliards d'euros, si elle veut échapper à une dégradation de sa dette. Or un consensus délétère s'établit autour du refus de la rigueur ou de l'austérité en vigueur partout ailleurs en Europe. La croissance reste une divine Providence censée combler les déficits et rembourser les dettes, alors qu'elle n'a cessé de diminuer depuis les années 60 pour se limiter à 1,2 % dans les années 2000. Face à un Etat promis au défaut s'il ne se réforme pas, la gauche préconise d'ajouter 25 milliards d'euros aux 56 % du PIB de dépenses publiques, tandis que la droite promet de ne pas augmenter les impôts, quand bien même la hausse de la TVA et celle de la CSG sont inéluctables. Tous mentent, les uns prétendant dépenser plus en faisant payer les riches, les autres réduire les déficits sans recourir à l'impôt. En matière de chômage, loin de faire avancer la flexisécurité qui lie la libéralisation du marché du travail à la résilience de l'emploi en cas de chocs, la gauche ressuscite les zombies de la fin du XXe siècle avec l'embauche de 100 000 fonctionnaires et la création de 300 000 emplois-jeunes, tandis que la droite invente avec la sanction des dividendes la prime contre l'emploi sur le territoire national.

Le déchaînement de la démagogie est un choix dévastateur pour le pays mais aussi un pari électoral risqué, tant les Français paraissent plus raisonnables que leurs dirigeants. Le vote extrémiste relève de l'ultime avertissement et s'accompagne d'un scepticisme salutaire sur la rupture avec le capitalisme ou la sortie de l'euro et de l'UE. Les Français attendent des solutions pour mettre fin aux échecs en chaîne de la réforme et repositionner la France dans le XXIe siècle en respectant son histoire et les valeurs de la République. Loin d'encourager la floraison des promesses et des dépenses non financées, ils demandent du sens - c'est-à-dire un projet -, du sérieux - c'est-à-dire la prise en compte de la situation réelle du pays et la définition de priorités -, enfin de la responsabilité - c'est-à-dire le respect du citoyen qui est au fondement de la démocratie. L'ascension aux extrêmes du mensonge entre une vieille gauche renouant avec l'antienne de la lutte des classes et une vieille droite autoritaire et étatiste n'a rien de fatal. Viser haut, c'est souvent viser juste. En politique aussi. En 2012 aussi.

Sexus politicus, ras le bol !

C'est un fait : avec l'affaire Strauss-Kahn, rien ne sera plus comme avant au sens où elle aura libéré la parole, permis à des victimes de surmonter les peurs inhérentes à une action pénale contre des puissants, mis au jour l'obsession sexuelle de quelques hommes politiques et montré que, non satisfaits de séduire l'électeur, ils peuvent se transformer en coureurs de jupons rattrapés par la justice. Mais de grâce, un peu de mesure ! L'ère du grand déballage dans laquelle nous sommes entrés est en train de nous rendre fous et de créer une immense confusion de l'esprit. Il ne faudrait tout de même pas voir un hyperactif de la braguette derrière chaque politique, un harceleur derrière chaque dragueur, un complice de l'omerta derrière chaque journaliste ! Ce n'est pas la bombe lâchée par Luc Ferry, recyclant une vieille rumeur, qui nous éloignera de la vulgarité ambiante. On lui aurait rapporté en haut de l'État qu'un ministre se serait fait surprendre dans une partie avec des petits garçons. Où, quand, qui ? L'ex-ministre oublie les fondamentaux de l'Éducation nationale : il n'étaye pas ses assertions, ne raisonne pas, ne saisit pas la justice. Il balance. Comme dans un dîner chic en ville. Tel un philosophe de comptoir. Ainsi vont les nouvelles mœurs politico- médiatiques : un barnum où les coups les plus lâches sont permis, où l'on mélange vie privée et vie publique, informations et ragots. Si l'on voulait salir la république et pervertir le débat public, on ne s'y prendrait pas autrement. À qui profite la logorrhée ? Lire les prochains sondages de popularité, à la ligne Le Pen.

Un nouveau plan de rigueur de 6,4 milliards d'euros en Grèce

La Grèce et la «troïka» dévoileront vendredi les détails d'un prochain tour de vis buggétaire. L'idée d'une nouvelle aide financière monte, un an après l'octroi d'un prêt de 110 milliards d'euros. L'euro grimpe.

L'idée d'une restructuration de la dette grecque s'éloigne. Non pas que les finances grecques se portent mieux, mais la thèse de la mise en place d'un nouveau plan d'aide financière pour éviter à nouveau la faillite du pays est privilégiée. Un an après l'octroi d'un prêt de 110 milliards d'euros, les Européens devraient ainsi remettre de l'argent sur la table... à conditions que la Grèce elle-même consente à de nouveaux efforts.

D'après les dernières informations, cette aide serait chiffrée entre 60 et 70 milliards d'euros. Le FMI débourserait 10 milliards d'euros, et l'Union européenne, 20 milliards. La Grèce, elle, devra trouver 25 à 30 milliards. Comment ? De plus en plus pointe l'idée de faire participer le secteur privé à ces efforts. L'idée de base serait que les banques maintiennent leur exposition à la dette grecque de façon volontaire, afin d'éviter une fuite des capitaux. C'est ce que plaide l'Allemagne : «Il est important que le secteur privé assume ses responsabilités», estime-t-on au ministère allemand des Finances. Et la BCE semble pencher pour cette solution. En tout cas, ce jeudi, Jürgen Stark, membre du directoire de la BCE connu pour ses positions orthodoxes, a indiqué que l'institution n'écartait pas cette hypothèse.
Rigueur budgétaire et privatisations

La Grèce et une délégation de la «troïka» (Union européenne, Fonds monétaire international, Banque centrale européenne) discutent toujours. Ils ont promis qu'un communiqué serait publié vendredi après-midi. Le premier ministre grec George Papandreou livrera alors les grandes lignes du nouveau programme d'austérité qu'ils auront mis au point. Selon des sources, son montant s'élèvera à 6,4 milliards d'euros, au prix d'une hausse des impôts ainsi qu'une révision des exonérations de l'impôt sur le revenu.

En revanche, rien ne sera dit sur la nouvelle aide. Jean-Claude Juncker, le président de l'Eurogroupe, a assuré qu'aucune réunion de crise entre les ministres des Finances de l'Union européenne n'était prévue. Une décision sera prise «d'ici la fin juin».

Paralèllement, le pays, au pied du mur, a engagé un processus de privatisations, qui permettra d'engranger 50 milliards d'euros. Les ports, les aéroports, les chemins de fer, l'eau de Thessalonique et d'Athènes, les hippodromes, les télécoms et la Banque postale constituent la première vague d'entreprises grecques à vendre. Un appel à la grève a été lancé pour le 9 juin pour protester contre cette vague de privatisations.
L'euro, «fort et crédible»

Si les marchés d'actions accusent encore lourdement le choc de la dégradation de la note de la Grèce hier (mercredi), l'euro, lui, continue sa route vers la hausse, s'installant confortablement au-dessus de 1,44 dollar (1,4472 au plus haut ce jeudi). Ainsi, dans la tendance de fond, l'inquiétude sur la planète finance domine alors que le dossier grec rebondit - et inquiète - quasiment tous les jours : aujourd'hui à la Bourse de Paris, le Cac 40 plongeait de plus de 1,4% vers 16 heures et Wall Street peine à se reprendre après avoir signé sa plus mauvaise séance depuis août 2010. Hier, le journal allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung a confirmé l'hypothèse d'un nouveau programme d'assistance à la Grèce, auquel le FMI participerait, à défaut de payer la dernière part de l'aide initiale.

Mais, sur le marché plus volatil des changes, les annonces du jour jouent en faveur de l'euro... et en défaveur du dollar. La monnaie européenne est notamment portée par des propos rassurants de la part de Jean-Claude Trichet, qui a estimé ce jeudi en Allemagne, qu'il «n'y a pas de crise de l'euro», et qualifié la devise de «forte et crédible». Le président de la BCE a alimenté la perspective dune prochaine hausse des taux directeurs. Il a en outre suggéré la création d'un ministère des Finances européen et imagine que «les autorités européennes aient le droit d'opposer leur veto à certaines décisions de politique économique nationale». Côté américain, une série de mauvais chiffres économiques ont polmbé le dollar, tirant mécaniquement l'euro à la hausse.

Hiroshima: Ground Zero 1945



Hiroshima: Ground Zero 1945 from ICP on Vimeo.

Un pont céleste 

La fête évoque le ciel mais en ce jeudi de l’Ascension les préoccupations des mortels restent particulièrement terre-à-terre. Le doute rôde sur la route, voie de l’évasion mais aussi des périls automobiles, où la tentation de la vitesse ne décélère pas.

La polémique sur «les panneaux» - surréaliste, quand on y songe à tête reposée - donne une indication de la sensibilité aussi épidermique que nationale sur cette question. Les hésitations gouvernementales, qui prêteraient à sourire si des vies n’étaient pas en jeu, reflètent l’embarras du pouvoir devant un sujet aussi irrationnel.

Quels dieux des transports invoquer quand le bon sens est battu en brèche par l’autopersuasion ? Comment imposer une discipline élémentaire validée par toutes les enquêtes - moins on va vite, et moins on s’expose à un risque d’accident sérieux - quand tant de conducteurs trouvent encore des vertus civiques aux détecteurs de radars ? Et font preuve de tant de force de conviction pour démontrer qu’ils sont utiles à la prévention routière ?

Un constat, tout de même : devant un tel obstacle, le gouvernement, parti pied au plancher pour effacer tout repère aussi salvateur que rassurant de «contrôle automatique», a bel et bien freiné. Voire pilé net. Chacun pourra le constater au cours de ce week-end : nos bons vieux «panneaux», devenus si familiers, sont toujours là ! Les démontages, commencés gaillardement dès l’annonce de la mesure, ont été stoppés du jour au lendemain. Le Premier ministre a vaillamment, courageusement et sincèrement juré qu’ils seraient poursuivis, mais chacun sait qu’entre la parole politique et les actes des services de l’État, l’inertie est un outil précieux pour ramollir une fermeté impopulaire avant qu’elle ne se dilue dans le temps.

De la place Beauvau, siège du ministère de l’intérieur, à Matignon en passant par l’Assemblée nationale le discours a été si sinueux à travers des nappes de brouillard - qui ne se dissipent pas - que dans tout ce flou cotonneux chacun aura entendu ce qu’il voulait entendre.

La peur du retrait de points intempestif est donc un peu retombée. C’est toujours ça de pris, songent certains communicants gouvernementaux, dans une séquence particulièrement anxiogène où l’on craint tout à la fois le concombre et le téléphone portable... Même le beau temps persistant et la sécheresse historique qui va avec - la plus importante depuis cinquante ans - diffusent de l’inquiétude !

L’unique pont d’un printemps pas comme les autres voudrait enjamber ce fleuve tumultueux qui charrie tant d’interrogations. Un peu de légèreté dans l’air ? Ah, mais, c’est vrai, il n’a jamais été aussi pollué, l’air. Tant pis, on fera avec. On trouvera bien quelques fragrances d’espérance dans la nuée bleue.


La Grèce sur le fil du rasoir

Sauvé par le gong ? Sans doute. La Grèce pourra repasser au guichet des aides financières internationales. Renflouée in extremis, pas sauvée. Un an après le prêt de 110 milliards de la communauté internationale, il faudrait être singulièrement aveugle pour ne pas voir la réalité. Étranglé par des taux d'intérêt à 15 %, lesté par un endettement plus lourd que prévu (150 % de la richesse produite !), miné par une grogne sociale incontrôlable, englué dans la récession, le pays reste au bord du gouffre. Au risque d'entraîner dans sa chute ses camarades d'infortune - Portugal, Irlande - sinon de faire éclater l'euro, ce souhait démagogique sur lequel surfent aujourd'hui quelques boutiquiers d'un nationalisme dépassé, du passé. Irréalistes.

Comment éviter le pire à Athènes ? Pas simple quand on entend la partition actuelle de trois acteurs principaux du psychodrame grec. La démission de Dominique Strauss-Kahn du FMI a quelque peu émoussé la capacité de compréhension du Fonds monétaire international à l'égard des errements grecs. La patience du maître d'école de la classe européenne - l'Allemagne - montre, elle aussi, ses limites. Angela Merkel a compris que son pays ne pouvait prospérer dans une zone euro disloquée, mais son opinion - ses électeurs - demeure très rétive aux comportements des « cancres » de l'Europe du sud.

Quant aux autorités d'Athènes, on ne peut que constater leur incapacité à cimenter la cohésion nationale, voire à simplement restaurer l'autorité de l'État. On voudrait sourire quand l'opposition propose une baisse des impôts, dans un pays où la fraude fiscale demeure, crise ou pas, un sport national qui sape par nature toute assise étatique digne de ce nom...

Dans ce contexte contraignant, le scénario du « toujours plus d'aides contre plus d'austérité » ne ressemble pas seulement à une fuite en avant. Il paraît des plus irréalistes et même de plus en plus dangereux face à une opinion chauffée à blanc par l'austérité salariale et le chômage de masse (16 %). Il est d'autant plus insoutenable qu'il passe désormais par des méga privatisations (téléphone, électricité, ports... îles) assimilées par une majorité de Grecs à un quasi-bradage du pays. De quoi créer, pour le coup, un consensus national redoutable sur le front du rejet.

Alors ? On ne pourra sans doute pas très longtemps écarter, quoi qu'en disent les technocrates de la Banque centrale européenne (BCE), le débat sur la restructuration de la dette grecque, son aménagement dans le temps, voire son effacement partiel. On en sait les dangers : possible contagion à l'Irlande et au Portugal, risque de plomber les banques d'Athènes, les assurances, les fonds de pension, et de léser quelques États voisins détenteurs de la dette grecque. Soit, mais on sait surtout qu'en l'état, la situation est inextricable. Potentiellement explosive. Alors que les manifestations « d'indignés » s'enchaînent, sans refluer, un peu partout en Europe, on pourra le mesurer dans les rassemblements syndicaux de samedi à Athènes.

La vie au temps de la Troïka

Finis les sorties, les achats ou les apéros en terrasse. Reportées les interventions chirurgicales. Oubliées les factures : frappés par la crise, les Grecs ont appris à réduire leur train de vie, et leur quotidien est devenu triste.
Le fameux panier de la ménagère ne se remplit pas aussi facilement qu'avant la crise. Les chiffres le prouvent : seuls 12% des consommateurs paient plus de 100 euros lorsqu'ils se rendent au supermarché. Même ceux qui y vont très souvent évitent les produits de marque et choisissent des produits sans label. Le rapport de l'institut de sondage MRB est sans appel: sur 11 000 personnes, le panier de la ménagère en 2010 est très différent de celui de l'année précédente. Les consommateurs choisissent des féculents, du riz et de la farine, alors que 40% d'entre eux délaisse les grandes marques de détergents. Seuls les produits biologiques ont l'air de tenir ainsi que les fruits et légumes d’origine nationale.
La crise a porté atteinte aussi au cliché du Grec qui s'amuse et qui sort tous les soirs jusqu’a pas d'heure: nombre d’Hellènes ont retrouvé les joies du cocοoning et évitent les sorties au restaurant. Un plaie, pour le président de l'union des restaurants de Grèce : "Il y a des jours où nous n'avons pas un seul client", affirme t-il. Son restaurant est sur le Pirée et il s'étonne du climat qui s'alourdit de jour en jour: "Lundi, ma caisse avait 350 euros; mardi, 230 et mercredi 400, alors que les dépenses quotidiennes de base sont de 1 500 euros".
Il estime que le chiffre d'affaires des commerçants a baissé de 55% et affirme que tous espèrent que la saison touristique sera bonne. Mais près de 6 000 restaurants ont déjà mis la clé sous la porte. Et d'ici la fin de l'année entre 20 et 25 000 devraient fermer! Même la nourriture peu chère est en crise avec une baisse de 30 à 35% !
La santé, "on verra plus tard". C’est le genre de remarque que l’on entend de plus en plus dans la bouche des Grecs. Qui l’eut cru dans le pays des hypocondriaques et où les médicaments coulent à flots ? L’achat de vitamines, d’antibiotiques ont sensiblement baissé; les analyses de sang, les radiographies et les mammographies ont été reportés aux calendes grecques, les interventions de la bile aussi.
Les factures d’électricité… pareil. Les Grecs ne peuvent plus les payer, d’autres saisissent l’occasion pour les "oublier". La compagnie d’électricité nationale grecque a annoncé que les impayés se montent à 200 millions d’euros. Et ce n’est pas tout. Si parmi les points positifs, on peut relever que les Grecs prennent de moins en moins leur voiture pour se déplacer, il est des points plus graves comme l’éducation. Les cours particuliers, véritable institution, qui comble un système éducatif lacunaire, diminuent. Selon Giorgos Petropoulos, de l’union des cours privés, "la baisse est de 40%, c’est inquiétant, surtout pour les premières années du lycée", souligne t-il.
Enfin, les Grecs cherchent le moins cher, le moindre coût et partout. Les retraités se donnent rendez vous dans les centres pour personnes âgées pour boire un café et évitent les terrasses d’Athènes devenues hors de prix; au supermarché, les rayons des premiers prix sont les plus prisés, alors que les autres sont désertés. 


Santé

Une société au bord de la crise de nerfs

Il y a deux mois, un homme de 35 ans a commencé à ressentir des douleurs dans le ventre et à la poitrine. Des maux de tête l’ont assailli. Il s’est inquiété, est allé voir son médecin, qui lui a recommandé de faire une série d’analyses. Tous ses symptômes se sont révélés psychosomatiques. Il s’est donc tourné vers une psychologue. "Ce patient était dans une anxiété intense et prolongée. Une crainte le rongeait", explique Asimina Christopoulou. "En fait, dans l’entreprise où il travaillait, on avait annoncé des licenciements et il vivait dans la peur de perdre son job", poursuit la thérapeute. 

L’anxiété face au chômage, la précarité et le climat social tendu ont un impact psychologique notable, voir grave, sur les individus.
Même si la peur est un réflexe naturel et utile face au danger, toute situation devient dangereuse lorsque nous en perdons le contrôle. Et c’est ce qui semble se produire en Grèce aujourd’hui. Depuis le début de la crise économique et les mesures d’austérité qui ont suivi, ce sont les classes moyennes et défavorisées de la société qui ont été le plus affectées psychologiquement. "Mais les plus aisés sont également concernés", note le Dr Ilia Theotoka Chrysostomidis, spécialiste en psychiatrie à l’université d’Athènes. "Les troubles d’anxiété, les dépressions, les crises de panique, les problèmes de sommeil, voire les tentatives de suicide, ont augmenté. Et cela concerne tout le monde", dit le psychiatre.
Mahi Tratsa, To Vima, Athènes (extraits)

Le “concombre tueur” sème la panique

Après avoir contribué à alimenter la polémique, la presse européenne s'interroge sur la psychose liée à la bactérie E.coli et sur l'absence d'une politique de prévention commune.
Déclarée il y a trois semaines en Allemagne, la bactérie E.coli s'est depuis étendue à l'Europe, causant la mort de 16 personnes dont 15 en Allemagne, et plus de 1 200 infections. Après avoir affirmé que la bactérie provenait d'un concombre espagnol, les autorités sanitaires hambourgeoises reconnaissent à présent que la source de l'intoxication n'est toujours pas identifiée.

"Pendant que les européens s'égarent dans l'origine des cucurbitacées avec E.coli, le nombre de victimes augmente"
, critique le journal roumain Jurnalul Naţional, qui résume: "L'Europe tremble de peur". Le quotidien bucarestois justifie son assertion par une interview de l'universitaire Gheorghe Mencinicopschi : "La grippe des concombres est le nouvel épouvantail biologique. Je suis convaincue que c'est juste un nouvel épisode dans la série de la grippe aviaire, porcine… Autrement dit, on nous encourage à ne plus manger de la viande de porc, de poulet. Aujourd'hui des légumes et demain des fruits. Afin qu'on y passe tous au fast food ! "
Coté allemand, la presse se limite au service aux consommateurs et à l'avancement des recherches, tout en notant que l'Allemagne commence à affronter la critique de ses partenaires européens. C'est la Frankfurter Allgemeine Zeitung qui fait exception en passant en revue "une semaine kafkaïenne pour les producteurs de légumes allemands". "Tandis que les crises sanitaires démarrent d'habitude avec la découverte de la cause d'un potentiel risque sanitaire – des vaches chancelantes, des cochons éternuant, de l'huile dans la matière fourragère – le cas de E.coli commence avec les décès. Les épidémiologues travaillent comme des commissaires qui enquêtent sur un meurtre. Le cercle des suspects est énorme."
Côté espagnol, le sentiment anti-allemand domine. La ministre de la santé du Land de Hambourg Cornelia Prüfer-Storcks a confirmé que les analyses écartent l'origine espagnole de l'accès d´E.coli, mais "elle ne s'est pas excusée", souligne El Mundo dans son éditorial. "Il est évident que le premier responsable de la situation est donc l'Allemagne", dont le gouvernement "a été incapable de faire des reproches aux autorités d'Hambourg et de réorienter le cas", malgré "l'action insensée" de la conseillère, "qui n'a pas respecté les protocoles europeéns prévus pour les alertes alimentaires". "Mais il y a encore plus de raisons de critiquer l'incapacité du gouvernement espagnol", qui a mis en évidence "son absence de réflexes" et "dont les protestations n'ont pas fait bouger l´Allemagne".
L'Allemagne doit maintenant réparer son erreur, affirme La Razón dans son éditorial : "mais cela ne signifie pas que le problème est oublié. D'abord parce que la panique est un état d'esprit très compliqué à maîtriser, et deuxièmement parce que le préjudice aux agriculteurs a été trop important". "Une campagne nationale des autorités allemandes en faveur de nos légumes et la compensation économique correspondante sont des actions nécessaires".
Pour Público, la crise des concombres "manifeste la faiblesse de l'UE dans la gestion de ce genre de situations, pour éviter que des accusations infondées puissent être à l'origine d'énormes préjudices à tout un secteur économique d'un Etat membre".
Le coeur du problème pour le quoditien français Libération, c'est d'abord le soupçon qui "ne peut s'ériger en politique de santé publique. Il entretient la panique alors que les consommateurs ont besoin d'être éclairés et informés. Cette politique de la psychose est dévastatrice pour l'économie, mais plus encore pour la santé."
Enfin, pour le quotidien néerlandais Volkskrant, "ce n’est pas le concombre qui fait peur, mais l’incapacité des autorités à limiter la contamination". "Cette incapacité reflète probablement très bien le manque de transparence du libre marché des légumes et des fruits en Europe et dans les pays membres." Et le quotidien néerlandais de conclure que "ne plus manger de concombres, c'est faire preuve d'hystérie ridicule, notamment si les consommateurs lavent et épluchent leurs légumes – tel que cela a toujours été recommandé."