TOUT EST DIT

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dimanche 27 juin 2010

Le G20 met en garde contre les excès de rigueur

Le projet de déclaration finale du G20 opère une subtile synthèse entre les positions américaines et européennes. Mais la taxe bancaire, défendue par la France et l'Allemagne, n'a pas fait l'unanimité.

Aprement négocié trois jours durant, à Toronto, le projet de communiqué du G20 ne devrait fâcher personne. S'il intègre la rigueur dans la stratégie de croissance, il met aussi en garde contre les excès d'austérité. Toujours aussi impopulaire à l'échelle mondiale, la taxe bancaire est mentionnée par le G20 comme un instrument à la disposition des Etats pour faire payer à leurs banques les pots cassés de la crise. Les 28 pages de projet de déclaration finale, dont le Figaro a obtenu une copie, opèrent une synthèse subtile entre les positions américaines et européennes.

Angela Merkel peut se vanter d'avoir imposé les vertus de la rigueur budgétaire au plus au niveau. Mais au grand soulagement de Barack Obama et de Nicolas Sarkozy, elle n'aura pas transformé le G20 en sommet de l'austérité. «Les évènements récents montrent l'importance de finances publiques soutenables et le besoin pour nos pays de mettre en place des mesures de consolidation budgétaires étalées dans le temps, propices à la croissance, et différenciées selon les pays et les circonstances nationales», indique l'une des phrases les plus discutées du compromis.

Décidés à faire de la croissance «la priorité» du G20, les Etats-Unis ont obtenu de placer l'expression «relance» en bonne place dans la déclaration, une gageure, note un négociateur. «Nous devons laisser agir jusqu'au bout nos plans de relance budgétaires pour consolider la reprise», indique ainsi le G20. «Des ajustements simultanés dans plus grands pays pourraient compromettre la reprise», ajoute le texte.

Désaccord au sommet sur la taxe bancaire

Le Canada n'a pas vraiment réussi à imposer un pacte de stabilité à l'échelle planétaire. «Les économies avancées se sont engagés à prendre des mesures de consolidation budgétaires qui diminueront de moitié, au moins, les déficits d'ici 2013, et stabiliseront ou réduiront le ratio dette sur PIB d'ici 2016», rappelle le G20. Rien qui ne fasse très peur à la zone euro, ni même à la France qui a promis de ramener son déficit à 3% en 2013. La Maison-Blanche, quant à elle, n'a pas attendu le G20 pour s'engager à réduire le déficit budgétaire américain de moitié en 2013, afin de revenir à 3% de déficits en 2015.

S'il entérine le désaccord au sommet sur la taxe bancaire, en raison de la forte opposition du Canada de l'Australie, mais aussi des pays émergents (Chine, Inde, Russie), le G20 mentionne la taxe comme une option possible pour les pays soucieux d'épargner les deniers publics en cas de nouvelle crise bancaire. Défendue par le FMI, cette taxe serait modulée en fonction du profil de risques des institutions financières.

Rien que du vent ?

Encore un sommet international, et même deux, à grands frais pour rien ? Le G20 de Toronto, réuni dans la foulée du G8, ne va pas aboutir à un résultat concret. Et certainement pas à cette grande moralisation financière prônée par Nicolas Sarkozy au plus fort des crises de 2007-2008. D'ailleurs, d'éventuelles décisions ne devraient être prises qu'à Séoul en novembre, voire plus tard. Pourtant, quelque chose bouge sur la planète Finances. Les nouvelles réglementations de Wall Street arrachées par Barack Obama, la discussion autour des capitaux propres des banques (les accords Bâle II et Bâle III), la dissémination des risques, la transparence de certains fonds ou encore le débat sur la surveillance des agences de notations sont des indices à ne pas négliger. Ils montrent que sur un plan « technique », le monde veut se doter de nouveaux outils pour éviter un autre « crash », façon 2008. Mais exclusivement sur un plan « technique », sans ambitions politiques, sans visions macro-économiques ! Seuls sont prévus des « instruments » pour resserrer les boulons grippés et changer l'une ou l'autre courroie. Rien de révolutionnaire, rien qui bouleverserait l'ordre (ou le désordre) de la finance internationale largement responsable de la situation économique ! Parce que les gouvernants des « Huit » ou des « Vingt » défendent des intérêts opposés. Sous l'impulsion d'Angela Merkel et de David Cameron, l'Europe obnubilée par la réduction des déficits s'est convertie avec la foi du néophyte à la rigueur... qui entraînera bientôt la France. Les Etats-Unis prônent toujours une certaine relance par la consommation et appréhendent une déflation en Europe : elle réduirait leurs exportations vers le vieux continent, voire ailleurs, et pourrait gonfler leurs importations dopées par un euro bas. Et faute de débouchés européens, la Chine ne va-t-elle pas déverser toute sa manufacture sur le marché américain ? Il est vrai que Pékin, avec sa croissance de 9&, est gagnant sur tous les tableaux, qu'il y ait polémique sur le cours du yuan ou non. Enfin, les Américains ne comprennent pas l'Europe, certes comme eux noyée dans les déficits publics mais si riche en épargne privée. Selon eux, de l'argent qui dort... et la demande, donc l'activité, avec lui. A ces différends idéologiques s'ajoutent les réticences du Canada et des « émergents » du G20 sur une généralisation de la taxe bancaire ou sur une « taxe Tobin ». Pourquoi eux, dont les banques ont été « sages », paieraient-ils pour la cupidité des établissements américains et européens ? Attendre, hormis quelques outils, de vraies « solutions mondiales » à la crise (pourtant mondiale) est aussi illusoire qu'espérer le règlement des conflits armés par l'ONU. Les blocs économiques sont en concurrence, donc à chacun de se défendre...

Jean-Claude Kiefer

Le ministre et la milliardaire


Au moment où les syndicats réussissent une forte mobilisation contre la réforme des retraites, le meilleur défenseur du projet gouvernemental, le ministre Eric Woerth, est mis sur la sellette pour un soupçon de conflit d'intérêts dans une affaire aussi glauque que symbolique.

Eric Woerth, ministre du Travail, est considéré comme l'un des meilleurs ministres actuels. Tout le monde loue sa compétence, sa connaissance des dossiers, sa solidité, sa franchise. Il passe pour un homme honnête, rigoureux et même scrupuleux. Les syndicats le respectent, l'opposition l'estime, même si à l'Assemblée nationale notamment, il peut se révéler pugnace, voire agressif dans les débats.
Des convoitises balzaciennes

En tout cas, il est l'un des trois ou quatre dont le nom circulait avec insistance pour succéder éventuellement à François Fillon cet automne. En privé, Nicolas Sarkozy, qui n'est pas toujours aimable envers les membres du gouvernement, disait grand bien de lui. Si la réforme des retraites passe, Eric Woerth serait considéré comme l'un des principaux artisans du succès. Patratras ! Alors qu'il est à la pointe du combat pour la réforme qui est considérée par tous, partisans ou adversaires, comme le marqueur social du quinquennat et comme l'emblème du volontarisme sarkozien, le voilà rattrapé par la ténébreuse affaire Liliane Bettencourt. La fortune de la femme la plus riche de France fait l'objet de convoitises balzaciennes. Le photographe mondain François-Marie Banier est soupçonné de lui avoir extorqué presque un milliard d'euros. La fille de Liliane Bettencourt considère que sa mère, affaiblie par l'âge (elle est octogénaire et visiblement fatiguée) est sous l'emprise d'un entourage vorace. On multiplie les actions judiciaires, les parties opposées s'envoient du papier bleu et se préparent à s'affronter devant les tribunaux. Les avocats les plus célèbres défendent leurs intérêts. Un majordome indélicat enregistre clandestinement les conversations dignes de dialogues d'un film très noir entre les protagonistes. Parmi les noms échangés reviennent ceux d'Eric et Florence Woerth. L'épouse du ministre travaille en effet depuis 2007 dans la petite cellule chargée de gérer l'immense fortune de l'héritière de L'Oréal, premier fabricant de cosmétiques du monde. Elle est responsable de l'investissement des dividendes perçus sur les actions de L'Oréal. Gestionnaire de fortune, c'est son métier depuis plus de vingt ans. Elle passe pour une bonne professionnelle et ses activités demeurent dans le strict cadre de la légalité. Alors, où est le problème ? Il se trouve, pour commencer, dans l'ambiguïté de sa nomination. Comme Florence Woerth est recrutée en 2007 par le principal gestionnaire de la fortune de Liliane Bettencourt, Patrice de Maistre, son mari est déjà ministre du Budget. Maistre se vante au téléphone de la commodité de cette situation. C'est déjà imprudent, même si à l'époque il n'est pas question d'évasion fiscale. Eric Woerth remet d'ailleurs lui-même la croix de chevalier de la Légion d'honneur à Patrice de Maistre. C'est encore imprudent, puisque cela affiche une familiarité entre le ministre du Budget et l'une des grandes fortunes de France. Par-dessus le marché, Eric Woerth, membre du gouvernement, demeure trésorier de l'UMP. Rien d'illégal mais, au sein d'une République qui se prétend exemplaire, un cumul risqué puisqu'il revient à solliciter de l'argent de contribuables dont on a la tutelle.
Le fameux fichier suisse

Il est bien possible que, s'il s'est ainsi exposé, c'est justement parce qu'Eric Woerth ne pratique pas le mélange des genres et qu'il a parfaitement bonne conscience. N'ayant rien fait d'illégal ou d'immoral, il ne se serait pas cru obligé de renoncer à ses fonctions de trésorier de l'UMP ou de demander à sa femme d'abandonner son travail. C'est la thèse de ses amis et elle est plausible. L'ennui est que les apparences sont très inconfortables. Entre-temps, le fameux fichier suisse a en effet été fourni au fisc français. Trois mille noms y figurent. Une vaste entreprise de vérification, de régularisation et, le cas échéant, de sanctions est mise en œuvre. Eric Woerth change de poste et est promu ministre du Travail mais une partie (d'ailleurs modeste) de la fortune Bettencourt se trouve de l'autre côté du lac Léman. Dès qu'on l'apprend, Florence Woerth démissionne et quitte la cellule de gestion de la fortune Bettencourt. Il n'empêche : le soupçon s'instille. Même si elle n'a rien su, c'est très possible techniquement, la femme du ministre se trouvait sous les ordres de celui qui savait et agissait pour frauder le fisc, celui-là même qui se vantait de ses relations ministérielles.
Sans doute intègre, certainement maladroit

Rien de tout cela ne prouve qu'Eric Woerth ait commis quelque infraction que ce soit mais tout converge pour démontrer son imprudence ou son inconscience. A l'époque de la communication-reine, il ne suffit pas d'être honnête, il faut encore en avoir les apparences. Eric Woerth est sans doute intègre mais certainement maladroit : faute de précautions nécessaires, voire de prudence élémentaire, le voilà aujourd'hui en grande difficulté, et le gouvernement avec lui.


Alain Duhamel

Le G20 veut concilier croissance et lutte contre les déficits

Les dirigeants des principales nations industrielles et des grands pays émergents se réunissent dimanche à Toronto avec pour enjeu une coordination de leurs politiques pour rendre durable la reprise économique mondiale, qu'ils abordent en ordre dispersé.

Les pays du G20 feront aussi le point de leurs efforts en matière de régulation des banques et des marchés, une priorité affichée lors de leurs précédentes rencontres pour éviter que la crise financière de fin 2007, qui a dégénéré en une dépression mondiale sans précédent depuis 1929, ne se reproduise.

Il s'agit de la quatrième réunion au sommet du groupe depuis celle de fin 2008 à Washington au plus fort de la crise.

Composé des Etats-Unis, de leurs grands alliés européens, du Japon mais aussi de la Chine, du Brésil, de l'Inde et la Russie, le G20, qui pèse pour 80% du commerce mondial, est devenu entre temps le principal forum de discussion international sur les questions économiques et financières.

Si la récession, qui a été combattue à coups de centaines de milliards de dollars d'argent public, appartient aujourd'hui au passé, le défi à présent est de consolider une croissance jugée encore globalement fragile.

Dans ce contexte, les Etats-Unis, rejoints par d'autres pays comme l'Inde, se sont inquiétés publiquement des politiques de réduction de leurs déficits annoncées par plusieurs pays européens échaudés par la tempête financière qui a presque emporté la Grèce, une des nations les plus endettées.

MEME OBJECTIF

L'approche du G20, qui a été précédé d'un sommet du G8 dans la campagne de l'Ontario, a néanmoins été marqué par un souci d'apaisement entre les deux rives de l'Atlantique.

"Nous visons la même direction, celle d'une croissance durable à long terme qui met les gens au travail", a déclaré le président américain Barack Obama.

Selon un projet de communiqué obtenu par l'agence Reuters, les pays du G20 sont proches d'un accord sur une réduction de moitié de leurs déficits publics, qui ont été gonflés par la crise, sur une période de trois ans. Mais ils laisseraient aussi le choix à chacun d'agir, au moins dans un premier temps, à son rythme pour tenir compte de sa situation économique.

Le projet de communiqué qui circule reconnaît ainsi l'existence de stades plus ou moins avancés de reprise selon les pays et l'équilibre délicat nécessaire entre le soutien à la croissance et la consolidation de finances publiques.

"Il y a le risque qu'un ajustement budgétaire synchronisé de plusieurs grandes économies impacte négativement la reprise. Il y a le risque aussi que l'absence d'une consolidation nécessaire nuise à la confiance et entrave la croissance", lit-on dans le texte.

La principale source de la croissance mondiale est aujourd'hui l'économie de la Chine et des autres grands pays émergents, qui partagent la même inquiétude à propos des problèmes de dette des vieux pays industrialisés.

Au sein du G20, la dette de ces derniers devrait atteindre en moyenne cette année 107,7% de leur produit intérieur brut, contre 80,2% en 2007 au début de la crise, alors que les prévisions pour les pays émergents du groupe sont à 37%.

VIOLENCES A TORONTO

Toujours selon le projet de communiqué, les dirigeants du G20 devraient saluer l'inflexion dans un sens plus souple de la gestion de sa monnaie, le yuan, par la Chine, dont certains espèrent qu'il se traduira par une appréciation de la devise.

Ils devraient aussi s'engager à renforcer la solidité de leurs banques en durcissant leurs normes de capitalisation.

L'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne sont bien décidées à pousser leur projet de taxation des établissements financiers, auquel les Etats-Unis sont aussi favorables mais qui est combattu par le Canada et plusieurs pays émergents.

Le G20 serait prêt à laisser chaque pays libre d'imposer une telle taxe pour récupérer les importants moyens engagés par les Etats pour sauver leurs banques de la crise.

Les dirigeants du G20, qui se sont retrouvés samedi soir à Toronto pour un dîner, ont quatre sessions de travail à leur menu ce dimanche, dont un déjeuner, le sommet devant s'achever vers 16h30 (20h30 GMT).

Le centre de la capitale économique du Canada a été samedi le théâtre d'échauffourées entre la police et des militants anarchistes vêtus de noirs à l'issue de manifestations anti-G20 qui ont rassemblé plusieurs milliers de personnes généralement dans le calme. La police a fait état d'au moins 130 interpellations.