jeudi 4 décembre 2014
Marisol Touraine : pénible pour tout le monde !
La ministre des Affaires sociales développe une conception des relations sociales qui rappelle les heures les plus reculées de la lutte des classes.
Peu importe que le ministre de l'Économie, Emmanuel Macron, et le secrétaire d'État à la réforme de l'État et à la Simplification, Thierry Mandon, aient abouti à la même conclusion : il faut rendre plus simple et supportable pour les chefs d'entreprise la loi sur la pénibilité. Car Marisol Touraine, elle, ne veut pas changer une virgule à cette "avancée sociale majeure". Elle l'a dit lundi 1er décembre, elle l'a répété deux jours plus tard, sur i>Télé.
Que dit-elle ? "La loi est votée, les décrets ont intégré des assouplissements pour entendre les préoccupations du patronat. Donc quand j'entends le patronat qui défile en disant : le compte pénibilité n'est pas praticable et ne peut pas se mettre en oeuvre, je veux marquer mon étonnement et mon interrogation, puisque nous lançons maintenant à peine une mission de réflexion pour faire en sorte que les critères de mise en oeuvre du compte pénibilité soient le plus simples possible. Laissons donc ce travail se faire, mais je le répète, le compte pénibilité, c'est une avancée sociale majeure et il n'est pas question d'y renoncer."
C'est un immense défi à la logique la plus élémentaire que de constituer une mission de réflexion après la publication de décrets d'application. Peut-être eût-il fallu réfléchir... avant. Mais ce que ne dit pas Marisol Touraine, c'est qu'elle voulait "sanctuariser" cette "avancée sociale majeure" afin qu'elle entre en application tambour battant. De plus, la mission de réflexion succède à une "mission de facilitation et de concertation permanente" confiée au magistrat à laCour des comptes Michel de Virville, qui a rendu ses conclusions en juin 2014.
Dans un souci d'apaisement, Manuel Valls a retardé l'application de six critères sur dix (postures pénibles, manutention de charges, exposition au bruit, à des agents chimiques, vibrations mécaniques, températures extrêmes) au 1er janvier 2016. Dès le début 2015, les fiches pénibilité que devront remplir les entreprises pour chaque salarié concerneront déjà le travail répétitif, de nuit, en horaires alternants, ou encore en milieu hyperbare.
Cette innovation bureaucratique lourde, semble, pour la ministre, le prix à payer par les entreprises pour l'allègement des charges dont elles bénéficient. Elle confond - à dessein ? - l'équité sociale et la lutte des classes : ce que les entreprises gagnent, elles doivent le perdre autrement. Par exemple, en effectuant des tâches répétitives : cocher des cases sur des fiches. Quel petit entrepreneur pourra prendre sur son temps de travail cette activité de remplissage ? Et, peut-être, dans une situation "hyperbare", la pression risque de monter de quelques crans... La prochaine mission de Marisol Touraine : évaluer la pénibilité induite par son cher compte personnel de prévention de la pénibilité, nom officiel de cet ovni législatif.
Pacte de responsabilité : quand ça ne veut pas, ça ne veut pas
Hier, nous avons vu qu’en terme de simplification administrative, les réformes lancées jusqu’à présent comme des chatons dans un lac plein de crocodiles se traduisaient surtout par une augmentation importante de l’enfer paperassier français. À présent, et puisque l’actualité semble s’y prêter, c’est le moment de revenir un peu sur l’autre réforme phare du gouvernement, dont le jeune Emmanuel Macron a la charge : le pacte de responsabilitruc.
Il y a presque un an, alors que Macron n’était pas encore le nom d’un virus urticant et qu’on évoquait en hauts-lieux la nécessité d’un « choc de compétitivité », le Chef de l’État, prenant ses plus belles lunettes et sa cravate la moins mal placée, s’adressait aux Français et leur proposait, entre deux petits-fours de fin d’année, la mise en place d’un « pacte de responsabilité » fondé sur un principe simple, voire franchement simpliste : d’un côté, le gouvernement s’engageait à réduire les charges sur le travail, les contraintes sur les activités des entreprises, et en contrepartie, demandait plus d’embauches, plus de dialogue social et quelques bisous pour que tout reparte comme aux Trente Glorieuses.
Partant du principe qu’en diminuant (même symboliquement) les charges des entreprises, ces dernières recommenceraient à dégager des marges et pourraient en conséquence embaucher à tour de bras, relançant ainsi une machine économique grippée depuis un peu trop longtemps pour n’accuser que le précédent président, Hollande a donc largement misé sur une belle « politique de l’offre » bien polie, bien propre sur elle, et propulse donc l’idée à la télé devant des Français qui, recomptant bien les petits sous-sous qu’ils ont versés aux impôts en cette fin d’année 2013, se demandent un peu à quelle sauce ils vont être mangés en 2014.
Fin février 2014, le Haut Conseil du financement de la protection sociale, énième bidule technocratique chargé de valider a posteriori les idées lumineuses de nos dirigeants, émet un premier prout papetier dont les conclusions sont, évidemment, toutes en faveur du plan hollandiste : avec de telles mesures, le PIB grossirait de 0,8 à 0,9%, ce qui se traduirait par plusieurs dizaines de milliers d’emplois créés en cinq ans. Aucune raison, donc, de ne pas se lancer à corps perdu dans une telle tentative. Fin avril, le pacte se traduit en propositions qui trouvent une place dans le programme budgétaire, approuvé le 29 par une Assemblée Nationale un peu tendue par la présence de quelques frondeurs. Tout va bien. Courant juillet, cela se gâte d’un coup avec le rejet du Sénat, et le 6 août, le Conseil constitutionnel rejette à son tour la baisse des charges sur les bas salaires c’est-à-dire les salaires compris entre 1 et 1,3 SMIC. Flûte et zut, le parcours institutionnel continue de présenter cet aspect maintenant caractéristique de chaos et de bricolage qu’il affecte à chaque fois que le gouvernement tente des trucs et des machins.
(Duflot ne fera aucun commentaire pertinent. C’est dommage puisqu’en terme de parcours parlementaire chaotique, elle en connaît un rayon.)
Le temps passe. La rentrée se fait, cahin-caha, permettant de virer quelques impétrants trop remuants, de placer quelques têtes nouvelles et de laisser en place ceux dont la sinécure est trop bonne pour qu’il leur prenne l’envie absurde d’ouvrir leur clapet et de risquer le départ précipité. Le pacte progresse son insinuation lente et pervasive dans les entreprises françaises pendant qu’entre temps, les contraintes légales, les obligations absurdes et les nouveautés législatives kafkaïennes dégringolent sur leurs têtes dans un déluge rarement vu jusqu’alors : l’introduction de la pénibilité au travail s’avère être un cauchemar de complexité inutile, l’obligation d’un minimum de 24h par semaine dans le temps partiel provoque de plus en plus de remous tant il sera difficile à appliquer, et l’introduction d’une obligation d’information préalable des salariés en cas de cession transforme les passations d’entreprises en abomination administrative inapplicable.
Nous sommes en décembre 2014.
L’affichage publicitaire du gouvernement Valls et du président Hollande a beaucoup jauni. Les lendemains ne sifflotent pas des masses, et le patronat, qui a très bien compris qu’à chaque ajustement d’une charge correspondrait une ponction fiscale et une avanie taxatoire débile camouflée ici ou là, rouspète de plus en plus ouvertement.
Dernier exemple en date : nos fins politiciens viennent de se rendre compte que le CICE (crédit d’impôt – compétitivité emploi), sur lequel se base la politique de Hollande, est d’une complexité invraisemblable et qualifiée par Piketty lui-même d’usine-à-gaz et de verrue, au point de n’avoir qu’un effet marginal dans l’économie, les entreprises fuyant le dispositif auquel elles ne comprennent rien. Et lorsque les patrons tentent tout de même l’aventure rocambolesque, ils ne peuvent que noter que ce qu’ils touchent, ne couvre qu’en partie les hausse d’impôts déjà décrétées. En vertu de quoi, pour compenser ce CICE qui dépote, … l’Assemblée nationale a adopté mardi dernier des amendementsmajorant la taxe sur les surfaces commerciales pour la grande distribution de 50%. Vlan, ça leur apprendra, tiens !
Surprise et étonnement : cela n’enchante pas les patrons, pour le dire gentiment. Les voilà qui refusent de retenir les annonces d’il y a un an, pleines d’espoir du gouvernement, pour s’entêter à ne retenir que cette réalité qui refuse de se plier (comme certaines courbes) à la volonté présidentielle, et qui les embourbe dans des taxes et des contraintes se traduisant, in fine, par une activité qui périclite et, pour les plus faibles, la faillite.
Du côté du gouvernement, c’est la consternation : pour Emmanuel Macron, l’échec du pacte de responsabilité est imputable à ces patrons, MEDEF en tête, qui ont refusé de jouer le jeu ! Salauds d’entrepreneurs qui refusent d’investir lorsqu’on leur donne de l’argent d’un côté en échange de bâtons dans les roues de l’autre !
Cet agacement gouvernemental, voire cette quasi-colère d’un Valls tout remonté contre Gattaz, l’actuel dirigeant du MEDEF, donne une mesure assez bonne de l’écart qu’il y a entre les espoirs, chimériques et presque enfantins de nos dirigeants et les comportements observés dans la réalité face aux bricolages qu’ils ont mis en place. Ils n’ont toujours pas compris que l’emploi ne se décrète pas, pas plus qu’il ne se provoque en diminuant par ici les charges des entreprises pour les rattraper par là avec des mécanismes de plus en plus loufoques.
Comme le fait remarquer Nicolas Doze dans un récent édito, nos petits alchimistes gouvernementaux se sont employés à bricoler des « solutions » orientées vers l’emploi alors que c’est l’investissement productif qui doit être favorisé, ou, à tout le moins, qu’on doit arrêter de le tabasser consciencieusement pour des raisons idéologiques d’un dogmatisme affolant. L’emploi est la résultante de cet investissement.En petits keynésiens brouillons, ils tentent désespérément de faire croire à l’allègement des charges des entreprises (sans y parvenir, du reste), tout en loupant l’évidence que l’emploi n’est qu’une résultante d’une entreprise qui se développe, c’est-à-dire pour laquelle le fuel essentiel, le capital, ne vient pas à manquer ou à se divertir dans les milliers de petites tubulures chromées et chuintantes de l’administration fiscale ou sociale du pays.
Non seulement, le pacte de responsabilitruc ne marchera pas comme le prédit déjà Doze, mais la solution évidente (exposée ici par Naudet sur Contrepoints), « moins d’impôts (défiscaliser), moins de réglementations (déréguler), moins d’État (désétatiser) » est absolument hors de leur portée intellectuelle.
Et le pire est que, de « réformes » en « réformes » et donc d’échecs en échecs, tout ce que ce gouvernement de clowns peut nous offrir est le spectacle pathétique d’un déni de réalité et d’un rejet permanent de ses échecs sur les autres acteurs de l’économie. Partant de là, une seule conclusion s’impose.
Ce pays est foutu.
Claude Allègre : «François Hollande a mis la France par terre»
Après presque deux ans de silence, l'ancien ministre de Lionel Jospin revient et porte un jugement très sévère sur la présidence socialiste.
Claude Allègre a été, entre 1997 et 2000, ministre de l'Education nationale du gouvernement Jospin. Mais depuis, il a fait du chemin. Militant socialiste de trente ans, il a soutenu Nicolas Sarkozy depuis 2008, lui accordant un soutien officiel pour l'élection présidentielle de 2012. Depuis deux ans, Claude Allègre s'en tient au silence, après avoir été terrassé par une crise cardiaque en pleine conférence sur le climat au Chili, en 2013.
Sur RTL, il revient et n'épargne pas François Hollande. Dans un entretien diffusé ce jeudi soir, il s'avoue «très déçu» par la présidence du socialiste. «C'est simplement qu'il a mis la France par terre, la France qui se portait pas si mal…», lâche-t-il. Puis il énumère des éléments de critiques: «Il a augmenté les impôts et puis il a surtout manqué de leadership ; on ne voit pas de capitaine dans le bateau», estime-t-il.
Le scientifique, aux propos contestés sur le changement climatique, y va de son conseil à François Hollande: «changer du tout au tout». «D'abord de changer son premier ministre et puis de changer son équipe», poursuit-il. «Non, il n'a pas une posture de président», conclut-il.
En janvier 2013, juste avant son accident, Claude Allègre avait déjà eu des mots durs à l'égard de François Hollande. Dans une interview accordée à Nice-Matin, il avait jugé que le chef de l'Etat n'était «pas à la hauteur». «Il faut qu'il comprenne que gouverner ce n'est pas une technique de gestion. On a besoin d'inventer, d'innover, et pas seulement d'équilibrer les comptes», déclarait-il.
Hollande s'en va : quand Philippulus imagine le départ du chef de l'Etat
À l'occasion de la parution de la politique-fiction Hollande s'en va, son auteur Philippulus revient sur la source de son inspiration, et explique en quoi le départ du Président reste plausible.
Qui est Philippulus, ce prophète de malheur? On aurait tort de le réduire au personnage de Tintin qui déambule en bure blanche, tapant sur un gong. Après avoir prédit l'an dernier, dans «Le Coup du Père François», la déroute de Jean-Marc Ayrault, son remplacement par Manuel Valls, le départ d'Arnaud Montebourg, la révolte fiscale et le triomphe du FN aux européennes, le mystérieux auteur récidive en imaginant la démission du président de la République. «Hollande s'en va», son récit que les lecteurs du Figaro ont lu avec passion tout l'été, sort aujourd'hui en librairie, enrichi de nombreux chapitres. Est-il écrivain? C'est une évidence. Sa plume connaît le rythme, la musique et les secrets de la langue française. Ses portraits sont fins, sa ligne claire, et aucun ridicule n'échappe à son esprit féroce. Est-il politique? Assurément. L'homme connaît, en détail, le bureau du chef de l'État à l'Élysée, le goût des «haleurs» de Dominique de Villepin, les colères secrètes de François Rebsamen («plus c'est de gauche, plus c'est con!»). Est-il journaliste? Comment ne le serait-il pas? Philippulus nous promène dans le Paris politique avec une aisance rare comme s'il faisait visiter sa propriété. Est-il prophète? Philippulus n'a pas la barbe de Jacques Attali mais sait pourtant tout, du passé, du présent et de l'avenir. Vous le croiserez sans doute mais sans le reconnaître: Philippulus est un homme normal. Il roule en scooter.
Philippulus, vous aviez écrit en 2013 dans les colonnes du Figaro «Le Coup du Père François» et, depuis, plusieurs événements décrits alors se sont effectivement produits: la révolte fiscale, le départ d'Arnaud Montebourg… Cette fois-ci, vous nous prédisez le départ de François Hollande…
PHILIPPULUS - Disons que je m'amuse à imaginer le départ du chef de l'État. Est-ce invraisemblable? A priori oui. Mais la vie est ainsi faite que ce qui semble invraisemblable peut devenir vrai. J'ajouterais qu'avec François Hollande, tout est invraisemblable mais tout est vrai! Qui aurait dit en 2010 que François Hollande deviendrait président de la République? Qui aurait pu prévoir qu'un ministre socialiste du Budget, taxant de bon cœur le contribuable, cacherait de l'argent en Suisse? Qui aurait imaginé qu'un jour on reconnaisse sur une photographie le président de la République, assis à l'arrière d'un scooter, quittant l'Elysée pour se rendre chez son amie de coeur, trompant ainsi la première dame, laquelle se vengerait par le biais d'un livre retentissant? C'est invraisemblable? Non, c'est vrai! Le président supposé normal ne l'est pas du tout. Ce phénomène aiguise forcément l'imagination.
François Hollande vous inspire beaucoup. Ne vous obséderait-il pas un peu?
Quelque chose me frappe chez lui. C'est l'homme politique qui s'est attiré le plus de sobriquets: «Fraise des bois», «Flanby», «Culbuto», «Ni oui ni non», «Guimauve le Conquérant» et, depuis qu'il est à l'Élysée, «Pépère». Ça fait beaucoup pour un seul homme! Je pense depuis le début qu'il s'est embarqué dans une mauvaise aventure. Donc, tout devient possible! Y compris le fait qu'en décembre 2015, après des élections cantonales calamiteuses, un congrès du PS tonitruant puis des élections régionales cataclysmiques, il choisisse de partir… Qui vivra verra!
Vous avez choisi un mode burlesque pour décrire les mœurs et coutumes du monde politique. Or, l'époque n'est pas particulièrement burlesque…
Certes non, mais, sur le Titanic, l'orchestre a joué jusqu'au bout… Je suis frappé par le visage toujours jovial de Michel Sapin qui, s'il n'avait été nommé aux Finances, serait toujours ministre de l'Emploi aujourd'hui et nous dirait que si le chômage progresse, c'est, en fait, parce qu'il régresse… Les hommes politiques nous servent d'étonnants numéros d'acteurs. La particularité de cette époque, c'est que ça commence à se voir…
Vous surnommez Michel Sapin Séraphin Lampion, ce personnage de Tintin qui veut vendre coûte que coûte ses improbables polices d'assurance. Hergé fait partie de vos sources d'inspiration?
Hergé et d'autres. J'y ai mis un peu de poésie, avec Dominique de Villepin qui récite du Rimbaud et du Paul-Jean Toulet à Nicolas Sarkozy, lequel s'est entiché de Baudelaire. Je me suis attaché à caricaturer tous mes personnages à partir de tel ou tel aspect de leur personnalité. Nicolas Sarkozy, toujours survolté, François Fillon et son amour des voitures pleines de chevaux, Arnaud Montebourg, qui semble perpétuellement déclamer, Manuel Valls et sa fièvre espagnole... Et puis, vers la fin de l'ouvrage, je me suis amusé à donner à ces pages la tournure d'un roman policier.
Malgré tout, il arrive que vous vous trompiez dans vos prédictions…
Oui, j'avoue! Les lecteurs du Figaro qui auront lu au mois d'août «Hollande s'en va» constateront que j'ai dû remanier l'histoire. J'avais imaginé que Jean-Pierre Raffarin deviendrait président du Sénat fin septembre… et ce fut Gérard Larcher! Le détail avait son importance puisque, si François Hollande s'en va, il est remplacé par le président du Sénat. Errare humanum est! J'ai donc profondément modifié l'histoire, et j'ai rajouté un ultime épisode.
Si Hollande s'en va avant la fin, pensez-vous ouvrir un cabinet de voyance ou de conseil en stratégie?
Peut-être. Ou bien irai-je jouer au Loto…
Hollande s'en va, par Philippulus, Les éditions des Equateurs - Le Figaro, 240 pages, 18 euros.
Le patronat comme punching-ball
On a cru un moment que la gauche se divisait désormais en deux camps : ceux qui aiment les entreprises, et ceux qui ne les aiment pas ; ceux qui ont compris que la croissance et les emplois ne se feraient pas sans elles, et ceux qui imaginent encore que le collectif et l’étatique ont une légitimité et une efficacité supérieures à tout.
On sait maintenant que la gauche, qu’elle aime ou pas les entreprises, se retrouve unie sur un point : elle n’aime pas les patrons. Elle les suspecte de geindre, de quémander, de pleurnicher toujours et d’être un bloc d’ingratitude. Elle pense que le gouvernement cajole les entreprises (on retrouve alors les deux camps : ceux qui l’admettent et ceux qui combattent cette trahison de classe). Et elle s’exaspère donc de voir que les patrons ne s’en contentent pas. C’est une curieuse malédiction française que cette relation de méfiance ou pire, d’hostilité, entre le monde de la production et l’univers de la politique. Ça ne date évidemment pas d’hier. Mais rarement la tension a été aussi forte entre un gouvernement qui attend des patrons une contrepartie aux milliards d’euros qui se déverseraient sur les entreprises, et le patronat qui attend du pouvoir que les discours se traduisent en actes et que la majorité cesse de se servir de lui comme d’un punching-ball politique.
Chez tous nos voisins, les gouvernements ont compris que leur rôle était de créer un contexte de confiance et un environnement économique favorable aux entreprises. En France, le pouvoir en est encore à croire habile d’opposer les petits patrons aux grands PDG, les start-up aux multinationales, l’industrie à la finance, les chefs d’entreprise au patronat. Et refuse de comprendre que leur volonté commune de se développer sans étouffer sous les contraintes est ce qu’il peut arriver de mieux pour la croissance et l’emploi.
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