TOUT EST DIT

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dimanche 28 avril 2013

Pour VGE, les Français parlent trop de vacances


ZOOM - L’ancien président est très pessimiste sur la situation de la France. Et encense la Chine.
Les "grognards" sortent du bois. Après l’intervention de trois anciens Premiers ministres (Balladur, Fillon, Juppé) pour pousser à l’organisation de primaires à l’UMP en vue de la présidentielle de 2017, c’est le très discret Valéry Giscard d’Estaing qui s’est exprimé en longueur, jeudi matin, sur Canal +. L’occasion pour l’ancien président de dresser son bilan de la situation de la France. Catastrophiste.
La France est-elle productive ? NON. Il y a donc du Maurice Taylor en VGE. En février dernier, ce patron américain s’était attiré le courroux d’Arnaud Montebourg pour avoir estimé que "les soi-disant ouvriers" français "ne travaillent que trois heures, ont une heure de pause pour déjeuner et discutent trois heures". Un constat pleinement partagé par l’ancien président français : "nous ne travaillons pas. Un pays qui ne travaille pas, qui passe son temps de vacances à d’autres, de jours fériés à un pont, ne peut pas avoir des résultats formidables. On passe son temps à parler des vacances. Il n’y a pas ce respect du travail qu’il y a en Allemagne, par exemple. C’est une de leur force, comme en Chine."
Discuter d’égal à égal avec la Chine ? NON. Alors que François Hollande est à Pékin pour relancer les échanges commerciaux entre les deux pays, le centriste est catégorique quant à la position de la France dans ses discussions. "Ils ont moitié moins de chômage que nous. Nous, nous faisons les malins sur tous les sujets mais le pays le plus peuplé du monde a deux fois moins de chômeurs que nous. Ils sont 1,3 milliard avec une croissance forte, nous sommes 63 millions avec une croissance 0."
L’industrie française a-t-elle un avenir ? NON. Les efforts d’Arnaud Montebourg pour sauver ce qui peut l’être n’ont pas vraiment convaincu Valéry Giscard d’Estaing. Mais d’après lui, les torts sont partagés avec les précédents gouvernements. Le constat n’en reste pas moins sévère. "La France s’est désindustrialisée dangereusement depuis 20,30 ans. Dans leur PIB, les Chinois ont plus de 40% d’industrie. Chez nous, c’est moins de 10%, donc on ne peut pas exporter. L’industrie française peut avoir un avenir car elle a des ingénieurs, des ouvriers spécialisés qui sont bons, mais elle a un environnement économique détestable."
Les dirigeants sont-ils compétents ? NON. Nicolas Sarkozy s’est beaucoup félicité de sa gestion de la crise mondiale. Ses proches continuent d’ailleurs de glorifier son bilan pour entretenir la flamme de son retour. Pourtant, pour VGE, les dirigeants n’ont pas pris la mesure du problème. "La caractéristique de l’époque actuelle, c’est l’incompétence économique des dirigeants. La crise a presque 5 ans d’âge, ils ont dit tout et le contraire de tout. Elle a été gérée d’une manière particulièrement incompétente. On n’a pas compris ce qu’elle était. Il n’y a pas eu d’expertises économiques pointues, comme il y en a eu dans les années 70 au moment de la première dévaluation du dollar." Les années 70, les années Giscard en somme...
Le chômage va-t-il baisser ? NON. François Hollande ambitionne d’inverser la courbe du chômage d’ici la fin de l’année, et compte s’appuyer pour cela sur ses emplois d’avenir et sur les contrats de générations, ses deux mesures phares. Pas suffisant. "Nous ne prenons pas les mesures pour (faire baisser le chômage, ndlr). Les pays qui ont réduit leur chômage, comme l’Allemagne, ou qui cherchent à améliorer leurs équilibres, comme le Danemark, ont réformé beaucoup plus que nous."
 A LIRE AUSSI : Les emplois d'avenir patinent

Le mariage pour tous, une réforme bien menée ? NON.Le président a clos la séquence mariage pour tous, mercredi, estimant que "la société en sera fière un jour, car c'est une étape vers la modernisation de notre pays". Connu notamment pour avoir permis la légalisation de l’avortement, VGE trouve (encore) à redire sur cette réforme sociétale."La question de l’IVG était aussi difficile. Cela avait été géré de telle manière que cela n’avait pas divisé la France. Et je l’avais fait exprès. La conduite de la réflexion, la rédaction du projet, l’écoute des différents milieux a été mené de telle manière que cette réforme sociétale a été adoptée par l’ensemble de la population."
La transparence en politique, une bonne chose ? NON.Après les ministres, François Hollande a décidé que les parlementaires devraient eux aussi rendre public leur patrimoine. Une course à la transparence qui agace même au sein du PS. Et qui ne convainc pas non plus l’ancien président. "Ce qui est bien, c’est l’honnêteté. On a transformé une situation de mensonge en une faute collective du milieu politique. C’est inexact. On est allé sur un chemin de traverse."
La France va-t-elle aller mieux ? NON. Les Français sont invités par le gouvernement à faire des efforts, en espérant des lendemains meilleurs. Redresser les comptes d’abord, pour redistribuer ensuite, tel est l’objectif du chef de l’Etat. Pour VGE, il va falloir attendre longtemps. "Dans le court terme, notre image est abîmée. Nous donnons l’impression d’un pays qui n’est pas sérieux, qui se disperse dans des projets plus ou moins divers, qui ne travaille pas assez."

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Comme toujours dans les périodes difficiles, le scénario du changement de Premier ministre circule. Rumeur sans fondement. Sacrifier Jean-Marc Ayrault n'aurait pas grand sens. Ce serait un constat d'échec pour le président, alors que le moine-soldat de Matignon peut encore servir. Il est loyal et se tient sur la même ligne que Hollande.
L'analyse du timing politique conduit aussi au maintien d'Ayrault. La période qui vient reste dans le droit fil des premiers mois, celui de la politique de rigueur, de réduction des déficits et de recherche de la croissance. Tant que le chômage n'aura pas amorcé sa décrue, toute annonce de phase nouvelle restera inaudible. Pas d'autre choix que de traverser la phase la plus rude du quinquennat, quand les mesures n'ont pas produit les effets escomptés.
Le président, sonné comme un boxeur, a subi une avalanche de coups, le pire avec Cahuzac. Il a encaissé. Il fait passer ses lois et, malgré les manifestations, il peut retrouver de l'oxygène.
Et un peu de temps pour redonner de la cohérence à son attelage en plein cafouillage. Le pilotage du Premier ministre sur le gouvernement, le Parlement, le parti et les partenaires devra être repensé. Bercy a besoin d'une seule tête et les chefs d'entreprise d'être rassurés et soutenus. Plus de patrons voyous. Que des « chers patrons ». Foi de Hollande.

Quand la courbe s’inversera

Quand la courbe s’inversera


3,2 millions de chômeurs, et moi, et moi et moi ! Il est peu probable que François Hollande, à son arrivée en Chine, ait eu envie de paraphraser la célèbre chanson de Jacques Dutronc. N'empêche que ce premier voyage du président dans l'empire du Milieu aura été placé sous le signe de l'emploi. Lui-même l'a reconnu en rapprochant sa visite « initiatique » de sa bataille pour l'emploi. Il a même lancé « l'appel de Pékin » en invitant les Français à se mobiliser pour cette cause nationale. Il est vrai que, même si l'on répugne à utiliser cette expression réservée habituellement à des performances plus glorieuses, un record a été battu à la fin mars.
Du coup, on comprend mieux le renversement des priorités dans la stratégie diplomatique de l'Élysée. Tout pour le développement économique et le rééquilibrage de notre balance commerciale. Finie l'exportation tapageuse de nos grands principes qui nous aliénait des marchés. Place au pragmatisme. La « diplomatie du saucisson », vantant notre filière porcine, a remplacé les péroraisons droits-de-l'hommistes.
Après tout, on ne fera pas grief au chef de l'État d'avoir révisé son vocabulaire de candidat quand il qualifiait le régime chinois « d'adversaire » et de « tricheur ». Ce n'étaient que propos de campagne. Ils n'ont pas altéré la relation personnelle inaugurée, hier, avec Xi Jinping. D'ailleurs, comment « snober » la deuxième économie mondiale quand, dans le besoin, on doit renforcer nos fluets dispositifs anti-chômage ?
Voilà pourquoi on ne reprochera pas trop à François Hollande d'avoir effleuré les droits de l'Homme avec « respect ». On se réjouira plutôt qu'à l'image de l'Allemagne, il ait poussé à l'installation de PME en Chine à côté des grandes entreprises stratégiques, et se soit engagé à lever « tous les obstacles » aux investissements chinois en France pour « booster » nos emplois. Il sera toujours temps, pour la France de parler plus haut et plus fort… quand la courbe du chômage s'inversera !

L'amitié européenne ou le déclin

L'amitié européenne ou le déclin

Les sirènes de la division ne cessent de retentir en Europe juste au moment où il faudrait passer un cap : celui d'une union politique nécessaire pour élaborer les indispensables stratégies de développement industriel, énergétique, économique... Les générations d'après-guerre ont réussi à surmonter leurs blessures pour renouer des liens d'amitiés fondés sur le pardon et offrir ainsi un avenir de paix et de prospérité à leurs enfants. Quel héritage sera légué aux jeunes générations ?
Les babys boomers, responsables du pays aujourd'hui et qui ont bénéficié à plein de la prospérité, fruit des efforts de la génération précédente, vont-ils jeter aux orties l'héritage de la réconciliation construite dans l'espérance après tant de douleur et de larmes ? Ce serait une erreur doublée d'une injustice envers les jeunes générations.
Délaisser l'oeuvre de réconciliation engagée depuis des décennies risquerait de laisser le champ libre aux préjugés qui exacerbent la haine entre les peuples. Comme l'Histoire l'a démontré à maintes reprises, l'amitié entre les peuples est loin d'être spontanée. Tout peuple ayant tendance à se définir d'abord contre l'autre plutôt que d'affirmer ce qu'il est, ce qu'il apporte à la communauté des peuples.
Ce mécanisme resurgit dans les pays européens les plus frappés par la crise. Dans de nombreux pays d'Europe du sud, l'Allemagne est montrée du doigt comme la cause de tous les maux. Mais a-t-on oublié que pendant que l'Allemagne se réformait en profondeur et accueillait l'Allemagne de l'Est, la France, elle, portait un coup fatal au dynamisme du pays avec les 35 heures et la profusion des réglementations ? Entre l'effort et l'illusion, notre pays a, comme souvent hélas, préféré l'illusion ! Doit-on faire porter à l'Allemagne le chapeau de nos erreurs stratégiques ?
Tout se passe comme si la crise divisait les peuples européens. Le rôle des politiques n'est pas d'emboucher lâchement la trompette des populismes. Mais d'aider leurs peuples à prendre conscience des défis qui les attendent, de les rassembler, de les unir en vue de pouvoir jouer un rôle dans ce monde qui change. La question d'aujourd'hui n'est pas d'abord de choisir entre la croissance ou l'austérité mais d'avancer dans la voie d'une union politique européenne. Celle-ci ne peut se construire que dans l'amitié entre les peuples. Elle seule permettra d'échapper au déclin et de léguer aux jeunes générations un continent fier, libre et fort.

Hollande : popularité en baisse, à 24 %


François Hollande n'en finit plus de chuter dans les sondages.Selon un sondage BVA pour Le Parisien publié dimanche, le président de la République ne récolte que 24 % d'opinions favorables. "François Hollande est certes très bas, mais il peut encore tenir et même rebondir", estime Gaël Sliman, directeur de BVA, dans les colonnes du quotidien. "Certains autres présidents, comme Jacques Chirac, ont même réussi à se faire réélire", ajoute-t-il encore.
D'après ce sondage, les Français seraient par ailleurs favorables (61 %) à un remaniement ministériel, mais opposés (54 %) à une dissolution.
Sondage réalisé les 25 et 26 avril auprès de 1091 personnes recrutées par téléphone et Internet selon la méthode des quotas.

    Allemagne : le PS recadré (et surtout Bartolone)

    Michel Sapin et Manuel Valls ont vivement fustigé les appels à la "confrontation" avec Berlin.
    Le recadrage. "Le terme de 'confrontation' utilisé ces derniers jours est totalement inapproprié, inadapté. C'est même un contresens vis à vis des relations entre la France et l'Allemagne", a martelé Michel Sapin, invité dimanche du Grand Rendez-vous Europe 1/Le Parisien/i>Télé. Le ministre du Travail réagissaitaux virulentes critiques du PS à l'encontre d'Angela Merkel, notamment celles de Claude Bartolone, qui a employé le mot controversé.
    "Il ne s'agit pas de se confronter à un pays, l’Allemagne, ce qui ramènerait aux pires images du passé. Il s'agit encore moins de se confronter avec une personnalité, Angela Merkel, mais de débattre en Europe, à 27, de la meilleur politique possible pour faire en sorte que l'Europe retrouve la croissance et assainisse ses finances", a poursuivi Michel Sapin. "Parler de confrontation est une erreur de mot et même de concept", a tranché Michel Sapin. "Si on veut que le débat ait vraiment lieu, il faut éviter les mots qui blessent. Je suis le ministre du dialogue social, pas de la confrontation sociale".

    Sapin regrette "une erreur de mot" du PS par Europe1fr

    Valls s'y met aussi. "Ces propos sont irresponsables, démagogiques et nocifs. Ils risquent de mettre en très grande difficulté la relation historique entre nos deux pays, essentielle pour l’avenir de l’Union", a également fustigé dimanche le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, visant lui aussi le président de l'Assemblée nationale. "Il ne peut pas y avoir de recherche d’un bouc émissaire qui aurait le visage d’Angela Merkel. Si elle gagnait les élections en septembre, que ferions-nous? Nous déclarerions la guerre à l’Allemagne?", s'est interrogé Manuel Valls, remonté, dans une interview au Parisien.
    Pourquoi sont-ils si remontés ?Jeudi, Claude Bartolone, président de l'Assemblée nationale, avait soutenu qu’il fallait envisager une "confrontation" pour obtenir un infléchissement de la politique d’austérité prônée par l’Allemagne d'Angela Merkel. Si François Hollande "appelle cela la "tension amicale (pour qualifier la relation franco-allemande, ndlr), pour moi c’est la tension tout court, et, s’il le faut, la confrontation", avait lancé Claude Bartolone, interviewé dans Le Monde. Et le lendemain, le PS est venu remettre de l'huile sur le feu, en appelant à un "affrontement démocratique" avec la droite allemande. Dans un long texte publié vendredi, les socialistes ont ainsi fustigé "l'intransigeance égoïste" de la chancelière allemande Angela Merkel, avant d'annoncer la suppression de ce document sous la pression de Jean-Marc Ayrault.
    Le gouvernement solidaire. Au sujet de la réaction de Jean-Marc Ayrault à cette polémique, qui s'est contenté de tweeter en allemand, Michel Sapin parle d'ailleurs "d'une vraie prise de position". "Ces tweets ne sont pas des gazouillis", assure le ministre du Travail. Le Premier ministre avait déclaré sur le réseau social, en allemand, que que "l'amitié franco-allemande" était "indispensable". "On ne résoudra pas les problèmes de l'Europe sans un dialogue intense et sincère entre la France et l'Allemagne", avait-t-il martelé.
    Entre "deuxième temps" et "deuxième phase". Jeudi, Claude Bartolone ne s'était pas contenté de tirer sur l'Allemagne. Il avait aussi pressé François Hollande d'accélérer la cadence et de se concentrer sur les priorités telles que "le logement" ou la "consommation." "Il est désormais temps de tirer des leçons pour envisager le nouveau temps du quinquennat", avait lancé le président de l'Assemblée, demandant également au gouvernement d'écouter davantage le Parlement. Message reçu ?
    "Dans l'effort et le redressement, peut-on être encore plus efficace ? La réponse est oui", a reconnu dimanche Michel Sapin, assurant que le gouvernement rentre bien dans une "deuxième phase du quinquennat". Mais pas n'importe quelle phase, au regret de ceux qui espéraient un remaniement, avec Claude Bartolone en chef de file. "La deuxième phase du quinquennat c'est l'application des outils et l'efficacité", a martelé Michel Sapin, précisant dans la foulée qu'il ne parle pas de la "composition du gouvernement" et donc d'un éventuel remaniement. Sans exclure l'hypothèse d'un jeu de chaises musicales à moyen terme, le ministre du Travail estime toutefois que "c'est au président de décider".
    ERREUR DE MOT, ERREUR DE CONCEPT ? 
    LE SOCIALISME EST UNE ERREUR TOTALE DE CONCEPTS

    Virage politique J-2 : la situation est-elle (enfin) assez grave pour que François Hollande ose affronter l'aile gauche de sa majorité ?

    Entre les résultats économiques désespérément mauvais, les chiffres du chômage, et le mur des cons découvert dans les locaux du Syndicat de la magistrature, en passant par le voyage en chine qui se révèle catastrophique pour l’image de la France, la Hollandie ne s’en sort pas.

    La panique a cette semaine envahi la Hollandie. Pas d’une façon hystérique comme le jour ou Jérôme Cahuzac a avoué son compte en Suisse. Ce jour-là, le ciel est tombé sur la tête des habitants de la Hollandie, champions de la vertu et de la morale. Cette semaine, ce n’est pas le ciel qui leur est tombé dessus, c’est la terre qui s’est dérobée sous leurs pieds.

    Entre les résultats économiques qui sont désespérément mauvais, les chiffres du chômage, le mur des « cons » découvert dans les locaux du Syndicat de la magistrature et qui dévalue complètement l’image et le sérieux du pouvoir judiciaire, en passant par le voyage en Chine qui se révèle catastrophique pour l’image de la France, la Hollandie ne s’en sort pas, au point de se demander ce qui va lui arriver la semaine prochaine. Elle devrait être consacrée aux entrepreneurs. C’est a dire à l’essentiel.

    "La situation est tellement désastreuse qu’elle pourrait théoriquement permettre à François Hollande d’annoncer lundi des vrais changements dans son organisation et surtout dans sa politique. Il n’aura pas le choix, et les troupes ne pourront pas s’y opposer". Ce proche du président, grand baron de province, qui a, comme quelques autres, refusé récemment de rentrer dans un gouvernement remanié, se veut optimiste. Il voudrait y croire mais un brin désabusé, il reste réservé sur sa probabilité : "Comme le président n’agit toujours que sous l’empire de la nécessité et attend que les décisions deviennent évidentes, on a une petite chance…" Puis d’ajouter aussitôt que "la situation n’est peut-être pas encore assez grave".

    Et pourtant, la semaine été désastreuse dans tous les domaines, y compris à la communication présidentielle où les équipes ne s’entendent plus. Claude Serillon a de plus en plus de mal à faire marcher les différents collaborateurs, parce que tout le monde a son idée, ses recettes et ses entrées chez le président. Lequel ne dit jamais non !

    En début de semaine, il pensait être sorti de qui était devenu une galère - la loi sur le mariage pour tous - et d’annoncer non sans soulagement "qu’il fallait désormais se consacrer à l essentiel, c’est-à-dire à l’économie". Mal lui en a pris, les milieux de gauche ont assez peu apprécié que l’une des réformes les plus emblématiques du quinquennat soit désormais rangée au magasin des accessoires, puisque "l’essentiel est ailleurs".

    D’autant que "l’essentiel", comme il a dit, lui promet un débat violent au sein même de sa majorité. Il le sait et il l’appréhende. Depuis quelques semaines, la gronde contre l’austérité est montée au sein du parti, relayée par certains de ses ministres et notamment Arnaud Montebourg... Lundi dernier, le Premier ministre a cru bon d’organiser un séminaire avec les députés socialistes, mais ça s’est très mal passé. Le rapport avec les élus socialistes souffre d’un malentendu difficile à résorber. Les élus sont convaincus que nous vivons sous l’emprise de l’austérité et que cette austérité étouffe l’activité. Le malentendu vient qu'il n y a pas véritablement d’austérité en France. On en parle beaucoup mais on ne la fait pas. Ce n’est pas la rigueur ou l’austérité qui étouffe la croissance, mais la surfiscalité et l’excès de règlements.

    Jean-Marc Ayrault a essayé une fois de plus de vendre la boite à outil pour créer des emplois de François Hollande, mais il n’a convaincu personne. Au point que Marie Noëlle Lehman, sénateur socialiste pure et dure, en est sortie en annonçant sur tous les plateaux de télévision qu’il existait une autre stratégie économique fondée sur un plan de relance de plus de 40 milliards financés par un emprunt national. Ce plan, mal vendu et surtout mal ficelé parce que totalement surréaliste et inefficace, n’a pas résisté 24hH à l’analyse. Même au Parti socialiste, on sait bien que la crise a définitivement tué Keynes.

    Le Parti communiste et le Front de gauche, dont l’ambition est purement politique, ont néanmoins embrayé sur la critique de l’austérité mais ils n’ont surtout pas digéré l’abandon de l’amnistie des syndicalistes coupables de violence.  "Encore une trahison", disent-ils. Alors qu'ils savent très bien que le gouvernement leur fait payer la non-signature par la CGT de l’accord sur la flexibilité de l’emploi. Si quelqu’un n’a pas tenu ses engagements dans cette affaire, c’est la CGT.

    Ceci étant, le coup de colère passé, la CGT va sans doute passer à autre chose et renouer le dialogue. Le premier syndicat, dans une période aussi trouble, ne peut pas prendre le risque de déstabiliser le système ou de se mettre à l’écart. C’est un peu la mission du nouveau secrétaire général que de ramener le syndicat communiste dans le jeu social normal et responsable.

    Du côté des écolos, ce n’est pas non plus la joie. Ils ressortent du débat sur le mariage pour tous un peu cabossés. Et gênés aux entournures. Ils y ont participé parce qu’ils sont en colocation avec la gauche, mais beaucoup d’entre eux reconnaissent qu’ils ont du mal a défendre l’idée d'une procréation assistée, ou à revendiquer l’autorisation des mères porteuses, alors qu’ils s’y opposent dans l’agriculture. Pas très naturelles toutes ces méthodes.

    Les écolos sont beaucoup plus à l’aise avec le débat ouvert cette semaine sur la transition énergétique. Ca participe à l’idée que demain, il faudra utiliser une énergie renouvelable et surtout consommer moins. Derrière ce charabia post soixante-huitard se cache en réalité le débat sur la place du nucléaire dans le mixte énergétique et surtout, l’avenir possible de l’exploitation du gaz de schiste. Le débat a démarré à l’assemblée nationale mais il est biaisé dès le départ. Comment s’opposer à l’énergie propre et pas chère (comparée au gaz importé) que nous offre le nucléaire français sinon par des arguments purement idéologiques ou en agitant des peurs ancestrales ? Comment refuser la seule expérimentation du gaz de schiste, qui permet aujourd'hui le redressement et l’indépendance de l’économie américaine, sous le seul prétexte que la méthode d’extraction porte un risque de polluer les nappes phréatiques ? Les chefs d’entreprises concernés, les pétroliers, les gaziers , les distributeurs d’eau sont montés au créneau cette semaine pour réclamer au minimum le droit de mesurer le potentiel que ça représente.

    Ce déficit de connaissances fait que les uns comme les autres parlent sans savoir de quoi ils parlent. Les écologistes raisonnables et responsables au contact de nos voisins européens, José Bové et Daniel Cohn-Bendit, qui sont au Parlement européen, reconnaissent qu’on n'est pas très sérieux de discuter sans chiffres ni études, quand on voit le profit qu' en tire le système américain. Entre les attaques contre le nucléaire (la fermeture de Fessenheim) et le rejet des expérimentations du gaz de schiste, beaucoup de socialistes commencent à dire tout haut que l’alliance avec les écologistes leur coute très cher en termes de croissance et d'activité.
    Au cabinet de François Hollande, on se dit que plus la pression monte, plus il sera possible de changer de politique, sauf qu’on sait aussi que le changement ne pourra pas passer par le laxisme budgétaire mais par une libération (fiscale et sociale) des agents créateurs de richesse et d’emplois, c'est à dire les entreprises. Mais qu'à ce moment-là , les forces de gauche ne sont pas prêtes à avaler un tel changement.

    François Hollande pensait pouvoir respirer un peu en partant mercredi soir en Chine. Sauf qu'en arrivant à Pékin, il s’est aperçu que l’affaire du « mur des cons » faisait des ravages dans l’opinion, ce qui l’a obligé a demander à Christiane Taubira de porter plainte ; ce qu’elle a fini par annoncer devant le Sénat, mais 48h après la publication de la vidéo par Atlantico. C’est-à-dire beaucoup trop tard. Beaucoup auraient voulu qu'elle réagisse de cette façon au sein même de l’Assemblée nationale la veille en répondant a Luc Chatel, mais à ce moment-là elle n’avait pas le feu vert. François Hollande et Jean-Marc Ayrault pensaient que l’affaire s éteindrait comme une plaisanterie de potache.

    En arrivant à Pékin , il a aussi découvert dans les télégrammes que la libération des otages au Cameroun aurait fait l’objet d une rançon, ce que le gouvernement continuera de nier. N’ empêche que cette rumeur faisait désordre compte tenu des engagement pris par la France pour changer d’attitude.

    Dans cette affaire, si rançon il y a eu, ce n’est probablement pas l’Etat français qui a payée, mais l’entreprise Suez que dirige Gérard Mestralet qui n’a fait aucun commentaires mais qui a toujours fait savoir que l’entreprise était pleinement responsable de la sécurité de ses salariés expatriés. Donc, l’Etat français n’aurait pas payé mais il aurait fortement encouragé l’entreprise à le faire. Cette affaire restera un secret d’Etat.

    Autant dire que l’humeur à l’arrivée n'était guère enjouée, surtout que pour couronner le tout les chambres d’hôtel n'étaient pas prêtes et que les membres de la délégation ont été obligés d’attendre plusieurs heures.

    Le voyage en Chine a été pour François Hollande une obligation épouvantable, à la limite de l’humiliation. La présence de Jean Pierre Raffarin, qui a pourtant ses entrées à Pékin, n’a pas changé grand-chose . En fait, les Chinois ont fait payer à François Hollande le fait qu'il ne soit jamais venu en Chine auparavant (pour eux, c’est inadmissible ) mais surtout ils ont voulu lui faire payer tout ce qu'il avait dit pendant la campagne présidentielle sur cette grande économie mondiale qui triche en permanence, qui utilise une monnaie dévaluée et surtout qui ne respecte pas les Droits de l’homme. Pour les Chinois, c’était inacceptable. Ils l’avaient d’ailleurs déjà dit, en refusant l’an dernier de recevoir Laurent Fabius, lequel avait dû faire marche arrière.

    François Hollande s’est donc retrouvé coincé entre des promesses électorales que beaucoup lui rappelaient et une réalité économique qui l’obligeait à trouver un compromis. L’Europe a besoin de la Chine comme fournisseur à bas coût de produits manufacturés , elle en a besoin comme client pour des produits plus sophistiqués, elle en a besoin enfin comme investisseur.

    Les dirigeants chinois veulent bien jouer le jeu, à une condition : qu' on ne vienne pas se mêler de leurs problème de gouvernance. Ce n’est pas le sujet, et ce n’est le sujet pour personne qui cherche à faire des affaires avec les Chinois. François Hollande est donc resté discret sur toutes les questions qui fâchent, mais ça n’a pas empêché les Chinois de faire remarquer que le président français n'est resté que 36 heures alors que Mme Merkel séjourne en général près d'une semaine et cela au minimum une fois par an avec plus de la moitié de son gouvernement.

    François Hollande s’est donc retrouvé coincé entre Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, et Martine Aubry, qu' il avait missionnée officiellement en Chine pour l’occuper. Comme ces trois personnages ne s’aiment pas, on imagine l’ambiance. Laurent Fabius a donc passé plus de temps le nez dans les télégrammes diplomatiques et le téléphone à l’oreille. Martine Aubry s’est fait très discrète en refusant tout contact avec la presse. Quant au programme de la visite, il était singulièrement allégé. François Hollande était entouré de grands patrons qui travaillent énormément en Chine (Total, Areva , Veolia , etc. ), mais il ne parlait en bien que des PME françaises. Les PME de la charcuterie, de la boulangerie et des services. Sauf que les PME n’étaient pas du voyage.

    Les patrons du CAC 40 ont eu le sentiment qu'ils n’étaient là que pour le décor et pour faire plaisir aux Chinois. Le résultat du shopping présidentiel en Chine est donc plus que décevant. La délégation française ne revient avec aucun contrat. Seul dossier à inscrire au tableau de chasse : une lettre d’intention d’achat de 60 Airbus. Personne n’a cru sérieusement qu'EADS avait besoin du chef d’Etat pour décrocher ce qui n’est qu'une intention d’achat.

    François Hollande et son service de communication ont tout fait pour convaincre l’opinion française que le président se consacrait désormais au démarchage commercial auprès des Chinois. Le problème est qu’il n’est pas rentré avec moult contrats. La pêche est peu fructueuse. Le comble, c’est qu'au moment où le président de la République essayait de convaincre les investisseurs chinois de venir en France, en saluant leur dynamisme, son ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg vantait, lui, le « made in France » en se réjouissant des initiatives du groupe Renault pour protéger l’emploi dans les usines et de Carlos Ghosn, avec lequel il avait eu pourtant quelques mots. Il aurait pu attendre quelques jours.

    Le monde de la PME ne se faisait guère d’illusion. Celles qui ont réussi en Chine sont le résultat d’aventures humaines et personnelles assez extraordinaires mais difficile modéliser.

    Le monde de la PME française attend plus des assises entrepreneuriales que François Hollande doit clôturer lundi soir. Le résultat des travaux de plus de 300 chefs d’entreprise a été soumis au Premier ministre dès vendredi matin. Jean-Marc Ayrault a été surpris d’apprendre que la plupart des PME cherchent à embaucher des salariés en CDI mais ne trouvent pas les qualifications dont elles ont besoin. Pour le reste, les services de Matignon et ceux de Fleur Pellerin planchent sur le papier que lira François Hollande lundi soir. L’ idée serait d’offrir un choc de compétitivité à ces entreprises dont on sait bien qu’elles sont créatrices d'emplois. Le test sera la fiscalité.

    Les PME ne toucheront pas grand-chose du crédit d’impôt promis dans le rapport Gallois. Elles ont donc réclamé des mesures spécifiques : l’abaissement de l’impôt sur les société à 15% sur la totalité des profits et la réduction de l’imposition des plus-values de cession. Mesures de libération et de flexibilité de l’emploi. Les patrons de PME-PMI me disent qu' ils ne se développeront que s’ils ont intérêt à le faire. "On ne crée des boites que si on a la garantie d'en tirer un profit, lequel profit permet de financer des acquisitions. On ne multipliera les embauches que si et seulement si on peut alléger les effectifs en cas de retournements de la conjoncture."

    De l’avis du monde patronal, si François Hollande accepte le tiers des revendications qui ont été présentées, ce pays aura une chance de sortir de la crise. On le saura lundi. Mais pour reprendre le sentiment d’un des membres de la Hollandie , "pas sûr que la situation soit encore assez grave pour lui donner le courage d’affronter l’aile gauche de la gauche".

    Chine : le web rit de la braguette de Hollande


    Les internautes qui s'intéressent à sa visite parlent surtout… de sa braguette et de Trierweiler.
    L'INFO. François Hollande a entamé vendredi au pas de charge son deuxième et dernier jour d'une visite d'Etat dans l'Empire du milieu. Le président français, inconnu en Chine, a effectué une première prise de contacts avec quelques contrats à la clé. Quelles sont les impressions laissées par le chef de l'Etat ?
    Que dit-on de cette visite sur Weibo, le principal réseau social chinois ? Renaud de Spens*, sinologue et spécialiste des réseaux sociaux chinois, a prêté ses yeux à Europe1.fr pour faire le tour de la Toile.
    EUROPE1.FR : Est-ce qu'on parle de Hollande en Chine et sur les réseaux ?

    Chine : le web rit de la braguette de Hollande
    © Reuters

    Globalement, la plupart des Chinois sont passés à côté. Aujourd'hui, avec la visite de Hollande, il y a peut-être cent commentaires lorsqu'on fait une recherche instantanée alors qu'on était plus dans le millier lors de la visite de Sarkozy. Dans mes contacts, je dois suivre à peu près 400 personnes dont un certain nombre d'observateurs chinois de la France, et il n'y avait pas beaucoup de commentaires. Cette visite intéresse peu la population car aujourd'hui, les médias chinois et les réseaux sociaux font que l'information est un peu plus ouverte qu'avant. Il y donc d'autres thématiques à discuter sur les réseaux que la venue d'un président étranger.
    E1.FR : Que dit-on de François Hollande sur Weibo et ses 500 millions d'utilisateurs ?

    Chine : le web rit de la braguette de Hollande
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    Jeudi, il y a eu une petite blague relayée par les internautes chinois : une photo retouchée de Hollande en train de descendre de l'avion avec la braguette ouverte. Lors de sa conférence de presse, à laquelle j'ai assisté, les journalistes se sont demandé si c'était vrai ou pas. On a comparé avec des photos originales et il semble bien que ce soit une retouche. C'était une petite blague de potache. Cette information n'a pas énormément circulé mais jeudi, lorsqu'on tapait dans le moteur de recherche 'président français', on tombait sur ce résultat dans les deux ou trois premières réponses.
    Vendredi, le sujet le plus discuté est une photo de comparaison entre la compagne de François Hollande et la femme du président chinois. Elles ont un style un peu différent et il y a plein de commentaires pour savoir laquelle est la plus jolie. Valérie Trierweiler est un peu plus décontractée et Mme Peng est plus militaire. Ils disent que les habits de Valérie Trierweiler sont plus communs –certains trouvent ça bien, d'autres pas-. Il y a un commentaire amusant : 'il ne faut pas oublier qu'elle est la compagne d'un homme du parti socialiste qui se réclame du marxisme et d'une société sans classe'. Il y a environ 200 commentaires sur ce sujet. Enfin, le deuxième sujet le plus commenté vendredi raconte un épisode de la réception lors de laquelle il y a eu une chanson sur les Champs-Elysées qui a été chantée par une artiste chinoise qui vit en France.
    E1.FR : Evoque-t-on les sujets sérieux sur les réseaux ?

    Chine : le web rit de la braguette de Hollande
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    On n'a pratiquement aucun commentaire sur les achats d'Airbus. La seule chose qui a été reprise lors de sa conférence de presse sur les réseaux c'est lorsqu'il a répondu à une question d'une journaliste chinoise qui lui demandait ce qu'il pensait de la grippe aviaire en Chine.
    François Hollande a répondu qu'il mangerait du poulet chinois sans problème et qu'il espérait que les Chinois allaient manger du porc français.
    E1.FR : Que pensent les journalistes chinois de Hollande ?

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    Chez les journalistes chinois qui étaient présents à la conférence de presse avec qui j'ai échangé sur sa performance, tout le monde se posait la question de savoir si François Hollande allait avoir la carrure de redresser la barre des relations franco-chinoises. La plupart disait que sa prestation était honorable. Mais ils disaient aussi qu'avec Sarkozy, on sentait le souffle créateur… ou destructeur mais un souffle. A la fin, le consensus était de dire : il a été élu sur le fait qu'il soit un président normal. Et c'est ça que les journalistes ont vu jeudi : des relations normales.
    *Renaud de Spens et Jean-Jacques Augier, Dictionnaire impertinent de la Chine, François Bourrin éditeur.
    IL EXISTE UN SITE POUR SA CRAVATE, UN AUTRE POUR SA BRAGUETTE SERAIT 
    AUSSI AMUSANT, NON ???

    Faire exploser le dogme de l’austérité, seule échappatoire pour l’Europe : mais puisque bombarder l’Allemagne n’est pas une option, comment y parvenir ?


    "Il faut changer la direction des politiques européennes (...) En Europe, les politiques d'austérité ne suffisent plus". La première déclaration d'Enrico Letta, nouveau chef du gouvernement italien, a fait réagir le reste de l'Europe. De plus en plus de voix s'élèvent pour critiquer la voie prônée officiellement par Bruxelles...

    "Il faut changer la direction des politiques européennes (...) En Europe, les politiques d'austérité ne suffisent plus". La première déclaration d'Enrico Letta, nouveau chef du gouvernement italien, a fait réagir le reste de l'Europe. Dans le même temps, après les appels à plus de souplesse de la part du FMI et des États-Unis, le président de la Commission européenne, José-Manuel Barroso, a déclaré "l'austérité a atteint ses limites". De plus en plus de voix s'élèvent pour critiquer la voie prônée officiellement par Bruxelles... Malgré des premiers signaux préoccupants venant d'Allemagne, Berlin semble rester inflexible sur la question. A quelles conditions le « dogme » l’austérité pourrait-il exploser ? Quels verrous faudrait-il faire sauter ? Quelles institutions convaincre et comment ?

    Jean-Luc Sauron : La question centrale est celle du décideur politique qui aurait l'autorité de prendre cette décision de la "sortie de l'austérité". Cette question recouvre de multiples sous-interrogations. La première est celle de la faisabilité de cette sortie de l'austérité.Autrement dit, est-il envisageable de changer de politique économique comme "on change de chemise" ? Cette problématique de la sortie de l'austérité est née de la conjonction de deux mouvements : un d'origine extra-européen et l'autre interne à certains pays de l'Union européenne.
    A l'extérieur de l'Union européenne, les Etats-Unis, les pays asiatiques et les BRICS s'inquiètent de ce que la remise en ordre des finances publiques des pays européens (comprenez l'austérité) casse l'amorce de reprise mondiale. Nos partenaires demandent tous une relance. Le changement d'analyse du FMI sur les dangers/avantages de l'austérité ou la découverte des erreurs commises par deux professeurs d'économie américain sur les effets de l'austérité tombent à pic pour conforter la demande internationale de changement de cap économique de l'Europe. Le soudain retour d'affection du président américain pour le marché unique transatlantique entre les États-Unis et l'Europe est d'autant plus remarquable qu'il avait réaffirmé son prisme pacifique (discours d'Hawaï durant sa campagne électorale). Or il est sûr que pour tirer avantage outre-atlantique d'un accord de libre-échange (EU/UE), il conviendrait que les Européens relâchent leurs restrictions budgétaires et leurs pressions fiscales.
    En interne à l'Europe, les partisans d'une remise en cause de l'austérité regroupent essentiellement les partis d'opposition, à l'exception du gouvernement français et peut-être du gouvernement néerlandais. Les gouvernements des autres Etats membres n'affichent pas des discours très construits ou  très cohérents. M.Letta, le président du Conseil italien, n'est pour l'instant que pressenti. Il doit constituer une large majorité liant les centres gauche et droite. Son affirmation est à replacer dans ce contexte fluctuant et instable. La présence de M.Monti est évoquée dans son éventuel gouvernement. Ce dernier participerait-il à une politique de reniement des efforts faits depuis une année par les Italiens ? La deuxième interrogation est que contiendrait une initiative de sortie de l'austérité ? Le Premier ministre néerlandais la définit-il de la même façon que le Gouvernement français ? D'ailleurs quel contenu le gouvernement français donne-t-il à une telle sortie de l'austérité ? Il faudrait construire une initiative européenne de sortie d'austérité acceptable par tous les Etats membres, notamment de la zone euro. En liaison avec la précédente interrogation, la troisième porterait sur l'identité de l'autorité politique qui la définirait ? Il convient d'être conscient des contraintes du calendrier européen sur mai 2013/mai 2014.
    Les élections européennes de mai 2014 ne vont pas se préparer quelques semaines auparavant. Dès la rentrée, les parlementaires européens seront en course pour leur renouvellement pour un futur mandat pendant que les Commissaires et leurs cabinets chercheront une "suite" à leurs carrières. Traditionnellement, la période qui précède la fin d'une Commission n'est guère propice aux grands actes ou aux grandes décisions. C'est normal : qui croit aux engagements d'un gouvernement sortant ? Dans ce contexte, la présidence de l'Union est-elle un relai crédible, susceptible d'aider à l'émergence d'un projet ambitieux ? A compter de juillet 2013, les trois prochains Etats membres qui assureront la présidence semestrielle de l'Union seront dans l'ordre : la Lituanie, la Grèce et l'Italie. Ces Etats auront-ils le poids politique pour assurer le suivi d'initiatives politiques audacieuses? Enfin, le président du Conseil européen, Herman von Rompuy, terminera son mandat en novembre 2014. Dès lors, il reste le concert intergouvernemental classique au sein du Conseil européen, construit autour d'un triangle franco-britannico-allemand.
    Les trois côtés de la "trinité européenne" traversent des difficultés politiques. La chancelière est haut dans les sondages, mais elle doit manœuvrer pour garder sa liberté de choix quant au partenaire ministériel (reconduite de l'actuelle coalition avec le FDP ou grande coalition avec le SPD); David Cameron est dans une situation guère plus simple. Il doit affronter la campagne pour l'indépendance écossaise, la pression eurosceptique en vue du référendum sur l'appartenance à l'UE et le maintien de sa coalition avec les libéraux-démocrates pro-européens, sans compter une situation économique difficile. François Hollande a la lourde tâche de moderniser un pays inquiet quant à son avenir et profondément divisé quant aux solutions à prendre pour reconquérir ou sauvegarder son rang de puissance économique .
    Philippe Waechter : La difficulté est que l'Allemagne est entrée en année électorale. Certes Angela Merkel est la favorite à sa propre succession mais elle doit néanmoins s'assurer une majorité stable. Mettre en avant des efforts à faire pour l'Europe est certainement complexe. Une étude indique que 59% des Allemands ne font plus confiance à l'Europe en tant qu'institution et cadre de fonctionnement. C'est un élément à prendre en compte aujourd'hui.
    Or l'Allemagne a une partie de la réponse puisque le déséquilibre au sein de la zone Euro provient d'une dynamique de demande qui n'a pas fonctionné de façon homogène. En d'autres termes, la demande interne de nombreux pays a progressé très rapidement alors que l'Allemagne ne mettait pas en place une stratégie cohérente avec cela mais en profitait pour exporter. Aujourd'hui il serait nécessaire de modifier ce mécanisme en soutenant la demande en Allemagne. Cela rééquilibrerait les situations au sein de l'Europe. Car pour l'instant et depuis longtemps l'effet d'impulsion de l'Allemagne vers le reste de la zone Euro est réduit et limité. C'est cette problématique qu'il faut changer. Il y a quelques mois Angela Merkel avait évoqué la possibilité de baisser les impôts mais cela n'a pas été suivi de mesures concrètes. Mais à courte échéance, on se heurte aux contraintes électorales allemandes qui limitent cette capacité d'agir.
    Dans le même temps on perçoit que les citoyens allemands s'interrogent. Les discussions sur le salaire minimum sont intéressantes de ce point de vue. Indépendamment des questions liées au rééquilibrage européen les Allemands souhaitent bénéficier aussi de la situation privilégiée de l'Allemagne.
    La situation reste en grande partie conditionnée par les élections de septembre et à la stabilité de la coalition qui en sortira. On ne peut pas attendre de bouleversements avant cette échéance. Par la suite cependant si Merkel dispose d'une majorité stable et de temps elle aura la capacité de mettre en œuvre une stratégie plus favorable à la croissance pour finalement donner une solution à la crise européenne. En attendant, chaque gouvernement, essaie de relâcher les contraintes auxquelles il est confronté. Cela pourrait forcer un peu la main à Bruxelles. Les politiques pourraient reprendre du poids dans les décisions face à la Commission Européenne. Le balancier revient vers les pays.
    La solution pour que la crise s'achève passe par des comportements plus coopératifs et mieux coordonnées.
    Pascal Ordonneau : L’austérité, il faut se faire une raison, n’est pas un dogme pour les Allemands. C’est l’application d’un principe et d’une méthode. Le principe : c’est celui de la ménagère qui ne dépense pas plus qu’elle n’a en poche... La méthode: pratiquer une dévaluation … qui n’a été ni plus ni moins qu’une ‘sagesse salariale’ consentie.

    L’austérité est une vision de sudiste. Il n’y a pas d’austérité en Allemagne. Il y a simplement un consensus pour que la machine allemande fonctionne dans les meilleures conditions de compétitivité possible. Quitte à sacrifier l’avenir. Car, ce qui permet à la ménagère allemande de ne pas trop se préoccuper des charges, c’est qu’elle n’en a pas : pas d’enfants, pas de besoins en école, pas de besoins en hôpitaux, pas de besoins en logements, pas de charges d’étudiants, pas de nouveaux entrants sur le marché du travail, flexibilité grâce au lumpenproletariat importé des pays voisins etc. 

    Donc l’Allemagne n’a aucune raison de bouger. Au surplus, les élections pour le Bundestag qui se tiennent en septembre ne peuvent pas donner de chances à des initiatives de relance, c’est-à-dire à une prodigalité condamnable. Ajoutons que la Bundesbank et son sémillant Président bétonnent férocement le terrain. Les attaques contre les tentations de « quantitative easing » à l’anglaise ou à l’américaine sont menées avec une certaine efficacité. Si Mario Draghi a réussi à contourner certains des obstacles mis par ses collègues de la Bundesbank à toute idée de relance, il n’en est pas moins sous leur regard attentif et courroucé. 

    Faire sauter des verrous ? Il n’y a pas de verrous. Il y a simplement une querelle dont la dimension est absolument politique. « Cessez vos politiques d’assistanat dispendieuses, cessez de prendre vos contribuables pour les vaches à lait d’une fonction publique aussi inefficace que pléthorique, cessez de protéger tous vos salariés sous-qualifiés en vous efforçant de maintenir en survie des industries du passé, cessez de considérer qu’un homme qui travaille est une victime du grand capital et non un contributeur de richesse et vous retrouverez le bon chemin » . Tout le reste n’est que tentation dirigiste et soviétisme à peine dissimulé : ce n’est pas à un pays dont le chef de l’Etat et la chancelière ont été élevés à l’Est qu’on le fera gober. 

    S’appuyer sur le Parlement européen ? Pourquoi pas… il n’est pas loin le moment où ce même Parlement accueillait un Berlusconi outrancier prenant les Allemands à parti et leur rappelant les bons souvenirs des années quarante. Belle Assemblée, en effet ! La Commission ? Ça alors ! Quelle drôle d’idée ! Voilà une administration qui s’est vite mise d’elle-même sous le boisseau au beau moment où la crise éclatait. Personne n’imagine le Président de la commission s’exclamant auprès d’Angela Merkel : « Chef ! J’ai une idée ! Chef ! Vous m’écoutez, je crois que j’ai une idée. »
    Jakob Hoeber : Le fait que l'analyse de Rogoff/ Reinhard sur le surendettement – grosso modo, qu'une dette au-delà de 90 % du PIB est un seuil critique – a connu des contestations massives en raison des inexactitudes méthodologiques, traduit également la mise en question de la politique d'austérité. La pression sur l'Allemagne d'abandonner sa position monte.
    Maintenant, c'est au tour de José Barroso d'exiger la fin de la politique d'austérité de l'Allemagne. Or, la marge de manœuvre d'Angela Merkel est très restreinte quant à un assouplissement de sa politique. Avec la création du parti «Alternative für Deutschland» qui prône la sortie de l'Allemagne de l'Euro, elle perd un nombre croissant de son électorat. Bien que son parti a toujours une avantage confortable et qu'une grande majorité des Allemands la préfèrent au candidate socialiste d'opposition Peer Steinbrück, elle doit pourtant garder à l’œil des options de coalition ainsi que le rapport de force dans une telle coalition – qui serait sans doute plus favorable avec les Libéraux (FDP) qu'avec le SPD. Finalement, il y a un risque réel de révolte au sein de son propre parti où la fraction des eurosceptiques est grandissante. Ce n'est donc qu'à partir de septembre et une réélection éventuelle d'Angela Merkel qu'on peut s'attendre à des changements majeurs du positionnement allemand en Europe.

    Et surtout comment convaincre l'Allemagne ? Quelles circonstances pourraient la pousser à reconsidérer la questions ? Si la voie diplomatique devait mener à l'impasse, quel serait la nature du rapport de force qui devrait s'engager ? Pourrait-on imaginer une recomposition des équilibres politiques ? Autour de quels pays ?

    Jean-Luc Sauron :  Si un accord devait se faire, il devrait tout d'abord être scellé entre la France et l'Allemagne. C'est pourtant un Britannique qui en a le mieux défini le contenu. Le chancelier de l'échiquier britannique, G.Osborne, vient de rappeler aux Écossais qu'il convenait de choisir entre le maintien dans la Grande-Bretagne et l'usage de la livre sterling. Pourquoi ? Parce qu'il n'était pas question que les Écossais, devenus indépendants, puissent avoir leur mot à dire sur deux questions intimement liées au partage d'une même monnaie : le choix des dépenses (les postes budgétaires) et celui des ressources (les impôts).
    Un accord franco-allemand ou plus largement accepté par les États de la zone euro devrait porter notamment sur la coordination budgétaire et l'harmonisation fiscale. Angela Merkel a mis cette question sur la table en mentionnant qu'il ne pourrait pas y avoir de progrès en Europe sans abandon de souveraineté. Il est évident que l'Union européenne qui sortirait de ces discussions comprendrait un cœur à souveraineté partagée (comme la monnaie) et concernerait les Etats de la zone euro qui accepteraient cet exercice en commun de la souveraineté et les autres.
    Parmi les autres, il y aurait ceux qui travailleront à entrer un jour dans cette Union économique, monétaire et budgétaire et ceux qui en resteront exclus se contentant de bénéficier du marché unique ou de participer à des politiques sectorielles (défense, recherche) parmi lesquels pourraient figurer la Grande-Bretagne et pourquoi pas la Turquie à terme  (voir sur ces questions mon ouvrage "L'Europe est-elle toujours une bonne idée ? " Gualino éditeur) . Le non français à la Constitution européenne a placé la construction européenne dans une impasse et a durablement affaibli le poids et le rôle de la France en Europe. La crise politique actuelle doit être dépassée par une révolution copernicienne française sur la souveraineté nationale. Les Allemands n'attendront pas éternellement que les Français veuillent bien changer. Ou la France se lance dans une négociation avec l'Allemagne centrée sur une fédéralisme budgétaire et fiscale, ou l'Europe se fera sans la France.
    Philippe Waechter : Les équilibres politiques se font autour des pays les plus puissants. Cela a toujours fonctionné comme cela et il y a peu de chance que cela change puisqu'en plus le pays le plus puissant actuellement est aussi celui qui dispose de marges de manœuvre importantes.
    Chercher à recomposer un équilibre politiques c'est aussi faire l'hypothèse que des changements profonds se sont opérés en Europe pour que la hiérarchie ancienne ne puisse plus fonctionner. Ce n'est surement pas souhaitable. A court terme si nouvelle composition il y a, elle se fera entre gouvernements puisque la Commission européenne manque de projets mobilisateurs. C'est ce que Merkel et Sarkozy avaient tenté de faire en août 2011 après la réunion de l'Elysée. Cela n'avait pas bien fonctionné néanmoins.
    Cependant ce regroupement autour des pays et des gouvernements n'est pas ce qui se dessine dans les institutions de la zone euro adoptées depuis l'été 2012. Les cadres qui se mettent en place avec le MES, l'Union Bancaire, le traité de gouvernance et le nouveau rôle de la BCE comme potentiel prêteur en dernier ressort ont pour vertu de ne pas être le prolongement des gouvernements.
    L'articulation entre ces institutions nouvelles et les gouvernements manque encore de clarté parce que les institutions ne sont pas encore complètes. La question de la gouvernance n'est pas encore totalement résolue en zone Euro parce que rien n'est encore achevé et c'est pour cela que les décisions parfois bafouillent.
    Pascal Ordonneau : Pour que l’Allemagne bouge, il faudrait un cataclysme. Les législatives allemandes à venir ne font pas partie des cataclysmes mais de l’ordre des choses démocratiques. Les élections municipales françaises ? Même chose. La Belgique qui éclate sous les coups de boutoir de la crise et des Flamands ? Péripétie. L’Ecosse qui prendrait finalement son indépendance et convaincrait la Catalogne de faire de même ? De futurs marchés pour les machines-outils et les voitures allemandes. La Grèce associée à Chypre qui décident de s’en aller de la Zone euro et de créer une grande zone franche internationale dans le genre Virgin Islands mais avec la culture et de grands moments historiques en plus ?
    Cessons ce petit jeu ! Tout ceci importe peu à l’opinion allemande. A raison. Ces morceaux de pays ou ces pays en leur entier ne pèsent pas lourds en termes économiques. Donc ils ne risquent pas de gêner la politique suivie par l’Allemagne.
    Quant à donner des gages aux Allemands ?… Ne revenons pas sur les douloureux exemples du passé quand la France allait prendre des gages sur la Rive gauche du Rhin ou quand, dans l’autre sens, elle dût verser l’équivalent d’un tiers de son PNB à l’Empereur allemand pour qu’il veuille bien interrompre sa promenade militaire.
    Il n’est même pas sûr que Poutine lançant ses chars « comme au bon vieux temps » ferait bouger la ménagère allemande.
    Jakob Hoeber : Une volte-face de l'Allemagne ne viendra pas sans condition. Le sentiment en Allemagne, justifié ou non, est que les pays demandant plus de souplesse monétaire ne font pas assez d'efforts pour renforcer leur compétitivité. L'idée est que dans un tel contexte, une augmentation des dépenses publiques n'aurait qu'un effet très faible sur l'économie. Il y a aussi des doutes quant à l'utilisation de l'argent que finalement l'Allemagne, mais aussi la France et d'autres pays de «l'Europe du Nord» devrait garantir – soit en se portant garant pour la somme investie, soit par la perte de crédibilité pour la monnaie lorsque le financement se fait par le levier d'une politisation de la BCE. Les pays bénéficiant d'un tel investissement devraient alors convaincre le gouvernement allemand, mais aussi d'autres pays comme la Finlande et l'Autriche, entre autre, du bon emploi de cette somme.
    Enfin, l'expérience faite dans le temps de crise économique montre qu'une augmentation de la dépense publique a un effet important lorsqu'elle est faite juste après l'apparition du choc économique – comme c'était le cas pour la prime de la casse par exemple – mais que l'effet devient de plus en plus faible voire même négative dans le temps qui suit si on tient compte de l'effet crowding out – la dépense publique remplaçant la dépense privée – et les intérêts à payer plus tard sur l'endettement supplémentaire. La crise de la zone euro montre qu'il s'agit d'une crise structurelle – c'est la où l'Allemagne a raison – et son résolution ne passe que par une interrogation de l'ensemble des membres quant à son positionnement dans l'économie mondiale à l'avenir ; ni une injection de liquidité de la BCE, ni une augmentation des dépenses publiques peuvent remplacer cette discussion. Si elle est menée ouvertement, on peut aussi s'imaginer plus de souplesse de la part de l'Allemagne pour un soutien monétaire – seulement, une telle discussion est difficile à réaliser dans le climat de méfiance qui divise la zone euro et même l'UE en ce moment.

    Selon quels scénarios cette transition pourrait-elle s'opérer ?

    Jean-Luc Sauron : Sans volonté française, les scenarii sont multiples: éclatement de l'Union européenne vers une zone de libre échange, éclatement en plusieurs sous-groupes avec une domination économique d'un pôle germano-austro-néerlando-polonais, etc. Il est fondamental de comprendre que l'Union européenne est mortelle. Elle n'a pas atteint un niveau de maturité politique et économique qui la rendrait irréversible. Je n'évoque pas les scenarii de rapports de force entre la France et l'Allemagne, mauvais remake du compromis de Luxembourg. La France de 2013 n'a plus les moyens d'imposer sa volonté à son principal partenaire économique, notamment compte tenu de l'état de ses fondamentaux économiques et sociaux. Pour parler avec une voix forte autour de la table européenne, il faut pouvoir attester d'une réussite économique. L'exception culturelle et la bombe atomique ne sont pas des arguments suffisants pour vouloir diriger l'Europe. Enfin, curieuse manière  que cette menace de pression sur l'Allemagne au cours de l'année du soixantième anniversaire du traité de l'Elysée !!
    Philippe Waechter : Je n'ai pas envie de faire de la sortie de la zone Euro la solution ultime car très certainement l'Union Européenne n'y résisterait pas. Le risque de tensions serait certainement vite palpable parce que chaque pays essaierait de trouver la bonne position, celle qui lui convient. Ce serait une période instable et je ne suis pas sûr que l'on puisse souhaiter cela. Ce serait prendre le risque d'aller à rebours de ce qui a été construit depuis plus de 50 ans. Mario Draghi à Londres le 26 juillet dernier évoquait d'abord l'Europe comme une construction politique, comme une volonté d'aller vers une dynamique commune. C'est cela qu'il faut avoir à l'esprit pour ne pas prendre le risque de divergence entre les pays européens.
    La deuxième solution maintient la problématique actuelle qui veut courir deux lièvres à la fois. Quand les Européens veulent faire des réformes structurelles cela veut dire que les règles de fonctionnement vont changer et que chacun va devoir s'adapter à ce nouveau cadre, chacun devra trouver la trajectoire qui lui convient. La mise en place de politiques d'austérité limite ces capacités d'ajustement. Personne n'a plus la possibilité de trouver sa bonne trajectoire. Dès lors les solutions résultant des politiques structurelles sont davantage contraintes et il n'est pas sûr alors qu'une dynamique équilibrée puisse être trouvée.
    Cette solution qui a été adoptée par l'Europe a eu des résultats catastrophiques. La prolonger c'est prendre le risque de voir le taux de chômage déjà à 12% en février 203 progresser encore rapidement et devenir intolérable.
    La première solution est celle d'une hiérarchie qui met la croissance en premier. Il faut que l'économie de la zone Euro se remette en mouvement pour s'adapter à un monde qui bouge très vite et qui ne nous attend pas. Pour l'instant et depuis le début de l'année 2011 la zone Euro est à l'arrêt parce qu'elle souhaite réaliser trop d'objectifs en même temps.
    Le dessein doit néanmoins être double. Le premier est de compléter le cadre institutionnel qui a été mis en place et accélérer la construction de l'Union Bancaire afin que la zone Euro puisse fonctionner de façon équilibrée. Cela réduira l'incertitude est permettra d'allonger l'horizon de chaque participant à l'économie que ce soit un consommateur ou une entreprise. Pour l'instant personne ne réussit à se projeter vers l'avant. Les institutions peuvent y contribuer en réduisant l'incertitude.
    L'autre objectif est celui de réalimenter la demande pour que l'activité reparte. Jusqu'à présent et notamment depuis 2011 tous les acteurs de l'économie souhaitent réduire leurs dépenses. Le consommateur parce qu'il est inquiet ne dépense pas, l'entreprise ne souhaite pas investir car le cadre institutionnel ne lui semble pas encore suffisamment robuste. Et l'Etat contraint par les politiques d'austérité réduit ses dépenses. La question est de savoir qui génère de la demande pour soutenir l'activité des entreprises. Aujourd'hui personne ne tient ce rôle et le commerce mondial n'est pas suffisamment dynamique pour prendre le relais. C'est pour cela que de nombreux pays sont en récession. C'est cette façon de faire qu'il faut altérer en profondeur afin que les entreprises voient enfin leurs carnets de commandes se regarnir. Ce sera le seul moyen de réduire durablement le chômage.
    Pascal Ordonneau : Imaginons que l’Allemagne descende de son Aventin… Imaginons qu’elle s’en vienne devant ses associés et leur dise : « Allez, finalement, c’est trop bête. Relançons un grand coup. Et que la machine reparte. C’en est assez de se reposer. Bossons ! »
    Alors, pour faire repartir la machine, il ne faudrait surtout pas s’en remettre aux Etats. Aux dépenses publiques. Aux investissements du même nom. Ce serait trop lent. Trop inefficace. Et puis, des dépenses publiques cela ne se décide pas comme ça, d’un claquement de doigts. Il suffit de voir ce qu’il en a été des investissements à financer par le grand emprunt « Sarkozy ». Trois ans après, les enveloppes prévues n’avaient toujours été que partiellement consommées.
    Si on veut que la machine reparte, il faut s’en remettre à la myriade de décideurs économiques que sont les ménages et les entreprises. Ils savent bien ce qui leur manque, ce qu’ils aimeraient pouvoir financer et seraient capables de se décider très vite. Presque instantanément.
    Comment fait-on dépenser des ménages qui se sont arrêtés de le faire ? En diminuant les prix, donc la TVA, (en s’organisant pour que la stimulation de la consommation n’aille pas enrichir quelques asiatiques). Comment faire redémarrer les entreprises ? En abaissant violemment leurs charges sociales. La demande resolvabilisée et l’offre rassérénée font en général de bonnes affaires ensemble.
    Donc des déficits des finances publiques ! Comment les financer ? En étant Européen, en lançant des emprunts européens destinés à compenser les pertes de recettes fiscales. Comment les rembourser ? Par l’augmentation des recettes fiscales liées à l’augmentation des dépenses et par la réduction des dépenses publiques liées à la reprise du marché de l’emploi.
    Certains pays sont violemment touchés ? Un second système d’emprunts groupés européens serait mis en place pour les soutenir et leur permettre d’affronter les fameuses réformes de structures sans trop souffrir.
    Quels gages donner  à l’Allemagne, mais surtout à l’avenir ? Continuer les réformes du marché de l’emploi, des retraites et des systèmes de redistribution sociale. Avancer plus loin encore dans la construction d’une Fédération Européenne et dans la mise en place de politiques extérieures solides et pro-actives.
    Tout ceci revient à parier qu’un vent de confiance balaiera les miasmes de la crise : Après tout, l’Allemagne, comme la France, détruites toutes deux par la dernière guerre mondiale s’en sont remises !
    Utopie, simplisme, enfantillages ! Relancer une économie, c’est beaucoup plus compliqué que cela ! Il faut réfléchir. Ne pas se lancer à l’aveuglette. Demander aux spécialistes.
    Alors, il y a une solution, une dernière. Celle-là marche d’un coup et, si elle est bien menée, très fort. La dévaluation ou la réévaluation. On a le choix. Ou les Français s’en vont (dévaluation) ou les Allemands le font (réévaluation). Si nos grands argentiers, nos grands fonctionnaires sur-compétents et si nos banques ne sont pas qu’une collection d’enfants de cœur, ces deux plans B (B’ et B’’) dorment quelques parts dans des cartons, eux-mêmes dans des coffres-forts… Il paraitrait même que les billets sont déjà prêts. Le reste n’est qu’une question d’informatique.
    Et puis, on ne rendrait pas leur or aux Allemands. Voilà le gage que les Français pourraient mettre en place.
    Au fait pourquoi ne pas parler de la dévaluation de l’Italie, de l’Espagne etc. La réponse est simple : quand on arrive à ce stade de pensée économique, on a atteint la zone de l’égoîsme national maximum. Alors, penser aux autres ….

    Quelles seraient les conséquences d'une explosion de la zone euro ?

    Pascal Ordonneau : Qui sortirait donc ? Y aurait-il comme au bon vieux temps de Guillaume 1er de Prusse (celui qui ne voulait pas être empereur), une Confédération du Nord, qui battrait monnaie commune ? Y aurait-il comme au bon temps de la France de la fin de XIXème Siècle, une Union Latine, où l’or serait roi ?
    La France déciderait-elle de faire « monnaie à part » laissant aux autres membres de l’Euro les charmes et les affres de l’Euro. Elle les regarderait s’étouffer dans une monnaie trop forte comme la France du Général riait sous cap de voir la livre sterling se transformer en monnaie pour nécessiteux.
    Dans tous les cas de figure, il est préférable de ne pas chercher à imaginer les conséquences autrement que sous la forme que prit la course à la dévaluation durant les années trente de l’autre siècle. Rien que cette vision apocalyptique devrait faire réfléchir.
    Jakob Hoeber : Le pire des scénario serait un éclatement de la zone euro. Prévoir les conséquences – surtout si la dissolution se fait d'une façon chaotique, disons après la sortie subite d'un membre important – ressemble à un jeu de devinette – mais on doit s'attendre à une récession massive dans l'ensemble de l'UE et même au-delà à cause de l'incertitude qui en suit. Le pays qui perdra le plus en niveau de vie en court et moyen terme sera probablement la France dont le système bancaire connait une exposition importante aux pays comme l'Italie et l'Espagne. La durée de la récession et l'image de l'Europe quelques ans après la fin de l'eurozone dépendra largement du niveau de coopération entre les états européens – tenter de le prédire serait pure spéculation.
    Que faire alors ? La meilleure solution serait de laisser le marché faire son travail tout en lui donnant ce dont il a besoin : de la certitude. Une solution politique homogène est déjà interdite par l’hétérogénéité des crises : éclatement des bulles en Espagne et Irlande, mauvaise gestion politique en Italie et en Grèce...l'idée serait alors de donner des signaux importants qui confirment la volonté des membres de la zone euro de continuer le projet ensemble et surtout l'établissement d'un cadre régulateur plus homogène qui permet aux investisseurs de pouvoir anticiper l'avenir on pourrait penser à une uniformisation des impôts, par exemple. Un autre moyen serait l'introduction d'une assurance chômage à temps limité au niveau européen, qui aurait un effet anticyclique. Ce qui pèse réellement sur les économies en difficulté n'est pas l'absence des dépenses publiques mais un projet d'avenir clair et cohérent qui est porté par l'ensemble du pays et de la zone euro même. C'est seulement après qu'un financement public peut donner un coup de pouce pour le démarrer. Il pourrait alors même venir de l'Allemagne.