TOUT EST DIT

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jeudi 11 août 2011

Qui détient la dette de la France ?

Qui achète et possède la dette publique de la France ? Cette question, apparemment simple, est plus complexe qu'il n'y paraît. Et éminemment stratégique, alors que notre pays atteint un record d'endettement, à hauteur de 85 % de son produit intérieur brut (PIB), soit 1 646,1 milliards d'euros, en progression de 110 milliards d'euros depuis un an.
Comment est composée la dette publique ?
La dette publique est en fait triple : celle de l'Etat proprement dit, mais aussi celle des collectivités locales et celle des administrations publiques.
Sur les 1 646,1 milliards dus par la France, 1 286 le sont par l'Etat lui-même, selon l'Insee, soit l'essentiel. Les administrations locales (régions, départements, communes), sont endettées à hauteur de 156 milliards d'euros ; les administrations de sécurité sociale (assurance maladie, caisse nationale d'assurance vieillesse) pour 191 milliards d'euros. Enfin, les organismes divers d'administration centrale (établissements et agences dépendant de l'Etat) doivent 11,6 milliards d'euros.
Le déficit cumulé, conséquence de plus de trente années de budgets déficitaires, a été empruntée à divers acteurs financiers : Etats, entreprises, grandes banques... Ceux-ci achètent des produits, émis par la France et remboursables à plus ou moins long terme. La fameuse note "AAA" du pays permet de réaliser des emprunts à des taux réduits. De 1 % à 4 % en fonction de la durée de l'emprunt contracté, selon le dernier bulletin mensuel (en PDF) de l'Agence France Trésor (AFT), chargée d'émettre ces produits et de réaliser les emprunts pour l'Etat.
Qui achète des titres de dette publique en France ?
Les produits émis par l'Etat sont au nombre de trois, qu'on peut classer en deux catégories. D'abord les titres de long terme. Ce sont les obligations assimilables au trésor (OAT), les plus importants en volume, remboursables en sept à cinquante ans, qui peuvent être à taux fixe ou variable. Ensuite, ceux à court terme, de deux genres : les bons du Trésor à intérêt annuel (BTAN), d'une durée de deux ou cinq ans ; et les bons du Trésor à taux fixe et à intérêts précomptés (BTF), émis pour des périodes très courtes (de l'ordre de quatre à sept semaines).
La France emprunte environ un tiers de sa dette à ses propres banques et sociétés de crédit. Avec une particularité : le pays est plus endetté auprès des compagnies d'assurance (20 %), qui "achètent" des titres de dette française pour les placements d'assurance vie, qu'auprès de ses banques. Contrairement à la situation du reste de l'Europe, les établissements bancaires français possèdent moins de 14 % de la dette nationale.
Quel part de dette est détenue par des étrangers ?
La dette française est détenue à plus de 65 % par des "non-résidents" français. Un chiffre en baisse : jusque fin 2010, il se situait plutôt autour de 70 %. Mais un chiffre qui n'a eu de cesse de grimper ces dernières années : en 1993, seuls 32 % de la dette française était détenus par des non-résidents.
La situation française en Europe est particulière : selon une étude publiée en avril par la fondation pour l'innovation politique (Fondapol), notre pays est en troisième position de l'Union européenne, derrière le Portugal (75 % de la dette détenue par des non-résidents) et la Grèce (71 %). En moyenne, 53 % de la dette des pays européens est détenue par des non-résidents. C'est une différence majeure avec un Etat comme le Japon, dont l'énorme endettement (plus de 200 % de son PIB) est essentiellement possédé par ses épargnants. Les Etats-Unis, quant à eux, ont un tiers de leur dette aux mains de non-résidents.
Le terme de "non-résidents" recoupe une série d'acteurs : fonds de pension, grandes banques, compagnies d'assurance, fonds souverains... Il est impossible de savoir précisément quel pays possède le plus : la loi interdit la divulgation de cette information, à part aux vendeurs eux-mêmes. Ce qui pose question : la provenance des possesseurs de dette revêt en effet un caractère de plus en plus crucial.
Quelles conséquences au fait que la dette soit détenue hors des frontières ?
Le fait que la dette nationale soit détenue par des acteurs étrangers est un atout autant qu'une faiblesse. Un atout, car c'est une preuve de l'attractivité du territoire national et de la confiance qu'il obtient auprès des marchés. Mais une faiblesse, car le pays est d'autant plus sensible aux questions de conjonctures que sa dette est placée sur des marchés internationaux. La Grèce ou le Portugal, qui avaient également une dette majoritairement située à l'étranger, en ont ainsi payé les conséquences.
La dette des pays de la zone euro est en grande partie possédée par des non-résidents d'autres pays de la zone. C'est ainsi que, en 2010, 52 % des dettes de la France et de l'Allemagne étaient détenus au sein de la zone euro, et donc libellés dans cette monnaie. Par ailleurs, 60 % de la dette des deux pays sont détenus en Europe au sens large (en incluant Norvège ou Suisse).
C'est une sécurité, dans la mesure où l'Europe est capable de politiques contracycliques. La France a ainsi racheté une partie de la dette grecque au terme de l'accord du 21 juillet. Mais c'est aussi un danger, puisqu'un pays de la zone qui ferait défaut (qui se montrerait incapable de s'acquitter du paiement de ce qu'il doit) fragiliserait toute la zone et la monnaie européennes.
Restent donc 40 % à 48 % de la dette française qui sont détenus hors de l'Europe, et donc sur des marchés internationaux. Cette part est la plus vulnérable aux aléas de la conjoncture et à l'affolement de la sphère financière.

Les refus de solidarité

Une fois de plus, on n'a pas célébré le 4 août. En 1789, la noblesse renonça solennellement à ses privilèges. Aujourd'hui, la noblesse d'argent n'y songe guère. Sauf à agir comme de nombreux milliardaires américains, répondant à l'appel de l'un des leurs, Warren Buffett. Ils ont donné le plus gros de leur fortune à des institutions éducatives ou d'assistance sociale.

Si nos milliardaires français, pourtant sollicités, en faisaient autant, la somme recueillie permettrait à elle seule de financer l'aide alimentaire à la Corne d'Afrique mourant de faim. Il est vrai qu'aux États-Unis, on vient d'assister au refus des fortunés de laisser augmenter leurs impôts pour diminuer la dette, tout en exigeant qu'on limite les programmes exprimant la solidarité avec les plus faibles.

En France, les refus de solidarité sont du même ordre. Les rémunérations, les avantages financiers complémentaires, les retraites considérables assurées à vie au bout de peu d'années en responsabilité, constituent un ensemble qu'on peut qualifier d'indécent. Sans que, pour autant, les privilégiés se rendent compte de cette indécence. Recevoir des millions d'indemnités après une mauvaise gestion alors que cette gestion réduit les salariés au chômage, voilà qui ne semble gêner aucun bénéficiaire.

Il est question de déchoir de la nationalité française des récidivistes français depuis moins de dix ans. Pourquoi ne pas retirer alors la nationalité aux « émigrés », aux « réfugiés » fiscaux en Suisse ou au Liechtenstein ? Les sommes dont chacun d'eux prive la collectivité nationale sont tellement plus importantes que le larcin, même renouvelé, d'un jeune délinquant dans un grand magasin !

Nous vivons en un temps étrange. Oui, il faut, pour faire progresser les désavantagés par leur milieu social, que l'enseignement soit plus individualisé. Donc, on supprime massivement le nombre d'enseignants. Il faut que les malades, dans les hôpitaux, reçoivent des soins plus humanisés. Donc, on supprimera massivement les postes d'infirmières. Il faut que les plus démunis soient aidés, logés, nourris. On diminuera donc drastiquement le soutien aux associations qui ont cette visée. Qu'est-ce qu'une solidarité proclamée, mais déniée dans les faits ?

C'est ce déni qui crée le sentiment justifié d'une rupture dans notre société, entre une petite strate ignorant la solidarité, et une strate sans cesse grandissante de citoyens et de citoyennes qui trouvent leur liberté de plus en plus abstraite, faute d'une marche perceptible vers plus d'égalité, faute aussi d'une fraternité ressentie.

Mais qui calmera les agences de notation ?

S'ils sont prompts à dénoncer l'"oligopole" des agences de notation financière, les responsables européens ont jusqu'ici été incapables de prendre des mesures concrètes pour contrer leur pouvoir, déplore le quotidien portugais Público.

Un chœur de responsables politiques de l’Union européenne, mais pas seulement, est venu hier, le 6 juillet, dénoncer publiquement l’"oligopole" (le mot est du ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble) des agences de notation financière. Alors que la dette du Portugal vient d’être descendue en catégorie "spéculative", à l’incompréhension, à l’indignation et aux critiques s’est ajoutée la promesse, faite par Wolfgang Schäuble, que l’UE allait “faire des efforts” pour en finir avec le pouvoir dévastateur de ces agences dans la zone euro.

La promesse pourrait être belle, si elle n’était usée jusqu’à la corde. Depuis 2008, les dirigeants européens multiplient les menaces contre les agissements absurdes de ces agences, sans qu’aucune mesure concrète n’ait été prise pour les empêcher de faire du tort. Alors que les Etats-Unis ont modifié leur réglementation bancaire pour réduire leur pouvoir et que la Chine, s’est tout simplement dotée d’une agence nationale, l’Europe n’est jamais allée au-delà des vœux pieux, renforçant ainsi l’impression de vacance des idées et du pouvoir qui se dégage de Bruxelles, de Paris et de Berlin.

Face à ce vide, il est normal que les agences bombent le torse et cherchent à explorer jusqu’à ses limites la vulnérabilité de l’euro. Ce qui est en jeu aujourd’hui, ce ne sont pas seulement les difficultés du Portugal (sans parler de la Grèce) à assumer ses engagements : il se dégage également de l’action des agences une sorte de nécrophilie qui les fait se comporter en vautours planant au-dessus de la fragile monnaie unique. Incapable de leur tenir tête, offrant chaque jour au monde une nouvelle preuve de sa confusion, l’Europe ne réagit que quand elle se retrouve dans les cordes.

De leur côté, constatant la grande fragilité de ceux qui leur ont promis la bataille et qui reconnaissent parallèlement des pertes pour les investisseurs privés dans la restructuration de la dette grecque, les agences agissent de la façon la plus naturelle : elles augmentent la pression et étendent leur offensive. Quand la politique s’incline devant la force organisée des capitaux financiers, il n’y a pas grand-chose à espérer.

Contrepoint

Ne tirons pas sur les agences

Ne tirons pas sur les agences"La réaction indignée des politiques face à l’abaissement de la note du Portugal par l’agence Moody’s n’est pas une surprise", note le Financial Times Deutschland. "Tous les moyens sont bons pour détourner l’attention du public et éviter de voir nos propres faiblesses. Disons-le clairement : l’Europe a les nerfs en pelote." "Même Angela Merkel est venue mettre son grain de sel", qui préfère se fier "à la Commission européenne, à la Banque centrale européenne et au FMI. Autrement dit : arrêtez donc de prendre les agences de notation tant au sérieux. Un soupçon s’insinue alors : les politiques ne seraient-ils pas en train de tirer sur le messager ?" "Cela ne fait-il pas déjà longtemps que l’on reproche aux agences de ne pas avoir su discerner – ou trop tard – des faillites comme celle de Lehman Brothers ?", s'interroge le quotidien économique. "Après s’être laissées endormir, voilà qu’elles feraient preuve de précipitation. Ce n’est pas mieux. Une chose est sûre en tout cas : jusqu’à présent, toutes leurs rétrogradations se sont avérées justes." Pour le FT Deutschland, "les appels d’Angela Merkel à l’émancipation de l’Europe vis-à-vis des agences de notation, pourraient nous entraîner sur une voie dangereuse : on parle beaucoup des conflits d’intérêts des agences de notation où l’émetteur de la dette est également celui qui paie pour faire évaluer son propre niveau de solvabilité. Mais personne ne parle des conflits d’intérêts des institutions en qui Angela Merkel place toute sa confiance. L’Union européenne et le FMI ont avancé plusieurs centaines de milliards – certes couverts par diverses garanties nationales – rien que pour la Grèce. Voilà qui n’est pas exactement la garantie d’un jugement impartial sur la solvabilité des Etats ou l’urgence d’un plan d’austérité."