mercredi 8 janvier 2014
Municipales 2014 : c’est (re) parti !
Municipales 2014 : c’est (re) parti !
A Paris, malgré les intempéries qui ont soufflé durant le mois de novembre sur la campagne de Nathalie Kosciusko-Morizet, le score de cette dernière, toujours certes défavorable, demeure néanmoins stable. Les dernières enquêtes d’opinion lui donnent, dans le flou d’une abstention grandissante, 47 ou 48 % contre 52 ou 53 % à son adversaire, la socialiste Anne Hidalgo. L’enfantement dans les douleurs de certaines listes UMP, ponctué de dissidences fracassantes, ne semble pas avoir pesé sur les intentions de vote. Il est vrai qu’à Paris, depuis une quinzaine d’années maintenant, les électeurs de l’UMP sont habitués aux chicayas de basse-cour et aux gesticulations palinodiques, avec revirements et volte-face, de la part de leurs candidats.
Parmi les dernières dissidences en date : celle de Roxane Decorte, élue du XVIIIe arrondissement éjectée des listes de NKM à cause d’une condamnation, en décembre 2011, à « quatre mois de prison avec sursis et 6 000 euros d’amende ». La justice sanctionnait ainsi l’élue du XVIIIe arrondissement, reconnue coupable d’avoir détourné « plusieurs dizaines de milliers d’euros de la caisse d’une association d’aide au maintien à domicile de personnes âgées… ». Aujourd’hui, ce sont les voix de NKM que, par ressentiment, cette conseillère indélicate essaie de détourner.
De la dissidence à la « concurrence complémentaire »
Il y a bien sûr l’ineffable Charles Beigbeider, toujours furieux d’avoir été évincé de la liste du VIIIe arrondissement au profit d’un vieux cheval de retour de la droite parisienne, Pierre Lellouche. Beigbeider confirme sa nuisible intention de présenter des listes concurrentes, cautionnées par son mouvement (tout aussi fantomatique pour l’instant que ses listes virtuelles) : Paris libéré. Et NKMoutragée ? NKM brisée ? Nous sommes chez les pitres.
Pour l’heure, l’homme d’affaire a proféré lundi, au micro d’une radio périphérique, l’une des phrases les plus imbéciles de cette campagne parisienne qui en compte déjà beaucoup, décrétant à propos d’Anne Hidalgo « qu’il ne voulait pas qu’une inspectrice du travail (…) devienne maire de Paris ». C’est sans doute le patron qui parlait en lui. A cœur ouvert. Etrange ukase. Mme Hidalgo a sans doute des défauts, dont le plus rédhibitoire est d’être socialiste. Mais pourquoi son ex-profession lui interdirait-t-elle de briguer la mairie de Paris ? Charles Beigbeder préférerait sans doute un PDG (comme lui-même) à la tête de la capitale ? Ou peut-être un inspecteur (ou une inspectrice) des travaux finis ? Autre trouvaille stylistique de Beigbeder : il ne se sent pas « dissident » par rapport à NKM, préférant se définir en « concurrent complémentaire » de cette dernière. Vive, certes, la concurrence ! Mais concurrencer son chef de file en pleine élection, est-ce bien raisonnable ?
Et puis, il y a toujours l’épineux problème du Ve arrondissement. Si la candidate de l’UMP s’est fait photographier la semaine dernière en jean et blouson de cuir en train de griller démocratiquement une clope au milieu de SDF hilares, NKM n’a toujours pas, en revanche, fumé le calumet de la paix avec la tribu des Tibéri.
Dans le livre que lui a consacré Soazig Guéméner, NKM présidente, celle-ci confie : « Mon grand-père n’a jamais réussi à être député. Il était trop correct, trop bien élevé, trop clean. Eh bien, moi, je ne serai pas clean. » Pour rompre avec cet atavisme familial trop grand-bourgeois, Nathalie prend le métro (pour la première fois ?), s’affiche avec des SDF (et des photographes en beaucoup plus grand nombre), grille une cibiche… Bref, faisant la nique à son grand-père, elle s’encanaille. Demain, peut-être prendra-t-elle son petit-déjeuner, façon Giscard, avec des éboueurs africains ? Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour être élu…
Le ragoût peu ragoûtant du MoDem
Parmi les gens de son camp – ou censés l’être – qui lui cause des tracas, il y a bien sûr le conseiller Jean-François Martins, seul élu du MoDem à Paris, – où il remplaçait Marielle de Sarnez partie en 2010 au Parlement européen – et qui a rejoint Hidalgo après la signature d’un accord, pourtant si difficile à obtenir, entre Jean-Louis Borloo, François Bayrou et Nathalie Kosciusko-Morizet. Le président du MoDem avait alors tonné : « C’est un ralliement médiocre qui n’a aucun intérêt. Jean-François Martins est suspendu du MoDem et il en sera prochainement exclu. » Las… Le transfuge voit sa suspension prolongée jusqu’en décembre prochain, date à laquelle il pourra, s’il le désire, demander sa réadmission au sein du MoDem. Suspendu, mais pas exclu.
Devant les instances de son parti, Jean-François Martins a plaidé sa cause de façon très argumentée (et sans doute convaincante), s’efforçant de démontrer combien « l’ADN du MoDem » lui paraissait « incompatible » avec « les pratiques politiques et le programme » défendus par Nathalie Kosciusko-Morizet. De cette dernière, Martins réprouve tout d’abord « sa participation à un gouvernement dont nous avons condamné les excès, la brutalité de la pratique politicienne, le goût pour les conflits d’intérêts ou l’obsession de l’argent et des puissants ». C’était effectivement l’implacable réquisitoire dressé par le procureur Bayrou contre Nicolas Sarkozy. Le remplaçant de Marielle de Sarnez (numéro 2 du MoDem) s’est également étonné que Mme Kosciusko-Morizet, qui se dit « républicaine », ait pu rester en 2012, « le porte-parole d’un candidat (…) qui avait pillé le programme de Marine Le Pen ». Ce n’est pas tout : l’accusé accusateur reproche également à NKM « ses récentes déclarations sur les Roms, son apologie du travail du dimanche, auquel le MoDem est opposé, sa réticence au logement social » et même « sa volonté de doubler les places de stationnement ». Une sensibilité très gauche écolo, mais visiblement plutôt bien partagée au MoDem puisque Jean-François Martins semble avoir, pour l’essentiel, convaincu ses pairs du CCC(Comité de conciliation et de contrôle). Au fait, se sont sans doute interrogés certains d’entre eux, est-il plus grave de rejoindre une liste d’Anne Hidalgo que d’appeler à voter François Hollande, comme l’a fait François Bayrou en 2012 ?
Le MoDem continue par ailleurs ses alliances à la carte. Dans beaucoup de villes, entre autres Dijon, Montpellier, Lyon, Lille, Roubaix, Tourcoing, malgré un retour annoncé par François Bayrou au centre droit, beaucoup d’élus du MoDem siégeant dans des majorités municipales de gauche entendent bien y demeurer. Centre droit, centre gauche, quelle différence ? A Marseille le MoDem, allié avec le PS, serait plutôt tenté par une liste avec les écolos. Comme s’exclamait récemment un responsable de l’UDI : « Le MoDem, quel salmigondis ! » Un salmigondis dont, à Paris, NKM, avec Jean-François Martins, déguste le morceau le plus amère.
Jamais avec le Front
Mais cette dernière a aussi une autre préoccupation. Mesuré dans plusieurs sondages, aux environs de 10 %, (trois fois plus que lors des précédentes municipales parisiennes) le Front national, si les urnes confirment cette estimation, pourrait se maintenir au second tour dans plusieurs arrondissements traditionnellement « acquis à l’UMP ». Or si NKM côtoie, cigarette au bec, des SDF (le temps d’une photo) elle refuse en revanche obstinément tout contact avec des représentants de la droite nationale, jugeant celle-ci « infréquentable ». A Paris, NKM va dans le mur, en klaxonnant à s’en déchirer les tympans (et quelques milliers de bulletins de vote) son mépris pour les électeurs nationaux. Ça tombe bien puisque ces derniers, de leur côté, entendent bien demeurer sourds aux appels à voter pour la boboïsante candidate UMP…
Politique spectacle
Politique spectacle
Et voici qu'en plus, Dieudonné, sans le moindre complexe, nous offre sa tournée ! À partir de cette semaine, il entreprend en effet son tour de… bras d'honneur en commençant par Angers, où Serge Klarsfeld appelle à manifester devant le Zénith, puis Tours et Orléans, où les maires s'interrogent sur une interdiction de son spectacle. Dans l'urgence, Manuel Valls prétend vouloir être efficace dès les premières représentations. Autrement dit, obtenir de la justice administrative une interdiction par anticipation au motif que le « show » de Dieudonné, en lui-même, constitue un trouble à l'ordre public.
Jusqu'alors, cette interprétation a toujours été refusée. Seuls des risques avérés pouvaient justifier une interdiction. On voit bien que dans son souci de briser « la petite entreprise de haine » de M. M'Bala M'Bala, Manuel Valls est prêt à maltraiter une jurisprudence constante. Confronté aux actuelles limites des moyens de droit, le ministre de l'Intérieur flirte avec la tentation de la censure. Pour quel résultat ? On peut craindre qu'il ne soit l'inverse de celui recherché.
Dans la vacuité de l'information, en cette période de fêtes, Dieudonné est devenu l'ennemi public n°1. C'était sans doute lui faire trop d'honneur. Il n'a fait qu'y gagner en notoriété. Il n'est pas question ici de contester que Dieudonné soit un provocateur obsessionnellement antisémite. On ne doit pas être dupe des grossières ambiguïtés qu'il entretient. Mais il existe un moyen très simple de le sanctionner sans le « victimiser » : c'est obtenir sa condamnation en justice à chaque fois que ses actes ou propos contreviennent à la loi.
Le seul problème est que, condamné à plusieurs reprises, Dieudonné a organisé son insolvabilité pour se soustraire au paiement des amendes. À quoi servent dès lors les moulinets de Valls si la justice est impuissante ? Plutôt que d'ouvrir dangereusement la porte à une censure aux limites incertaines, mieux vaudrait que notre État de droit fasse appliquer la loi. Si Dieudonné est coupable d'avoir transformé son show en indigne spectacle politique, nos dirigeants ne sauraient, en revanche, travestir leur action en politique spectacle !
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