L'analyste financier Raoul Pal prévoit
une série de défauts souverains à travers le monde, menant la communauté
internationale vers " la plus grande crise bancaire de l'histoire ", et
ce dès 2012.
L'analyste financier Raoul Pal a été à la tête
de GLG Global Macro Fund, et c'est aussi un ancien de Goldman Sachs. Il
prévoit une série de défauts souverains à travers le monde, menant la
communauté internationale vers "la plus grande crise bancaire de l'histoire". Selon lui, nous n'avons plus beaucoup d'option pour éviter la catastrophe.
Le monde n'a plus de moteur de croissance puisque la
plupart des pays du G20 arrive au bord du gouffre en même temps. Le
monde occidental est sur le point d'entamer sa seconde récession au sein
d'une dépression qui n'en finit pas.
Pour
la première fois depuis les années 1930, nous entrons dans une nouvelle
récession – sans que les indicateurs économiques n'aient eu le temps de
revenir à leur hauteur normale. En d'autres termes : le scénario
redouté de la “récession à double creux”, aussi appelée "récession en
W", est en train de se produire. Les principaux indicateurs économiques
le montrent, partout dans le monde comme le montrent les graphiques
ci-dessous.
Pour Raoul Pal, c'est un fait : nous allons vivre le pic le plus bas de croissance du PIB dans l'histoire du G7 (le
groupe financier international composé des ministres des finances de
sept pays riches : France, Allemagne, Italie, Japon, Royaume-Uni,
États-Unis, Canada).
(Cliquez pour agrandir)
Commandes de biens durables par habitant – en dollars par personne
Part de la population américaine active
Production industrielle du Royaume-Uni
Production industrielle européenne
PIB des États-Unis depuis 1802
Ce sont les pires fondations possibles pour entrer dans une récession. Dans
un entretien accordé au Daily Mail,
le président de la Banque mondiale jusqu'au 30 juin 2012 Robert
Zoellick, est un peu moins alarmiste que Raoul Pal. Il explique
néanmoins que "
les marchés financiers font de nouveau face à la grande panique de 2008", ajoutant que "
l'Europe, déchirée par la crise, se dirige vers une zone de danger".
Le problème se résume maintenant à une seule chose : la dette. La somme des dettes des dix nations les plus endettées du monde s'élève à 300% du PIB mondial.
L'histoire
nous enseigne que lorsque un défaut souverain se produit, il est suivi
par une série de défauts : c'est l'effet " domino ". "Nous devons comprendre l'histoire pour saisir le présent.",
explique-t-il. Le président de la Banque mondiale évoque lui aussi dans
son entretien avec le Daily Mail ce fameux effet " domino " : "Si
la Grèce quitte la zone euro, la contagion est impossible à prédire. Les
craintes sont que l'Espagne sera paralysée par son secteur bancaire et
que le pays sera le prochain domino à tomber." Et ensuite ?
Il se produirait une série de défauts en chaîne
: défauts souverains en Europe, défaut souverain au Royaume-Uni, au
Japon, puis en Corée du Sud, en Chine, provoquant la plus grave crise
bancaire de l'histoire.
Sans savoir précisément ce qui va se produire, Raoul
Pal estime qu'on peut logiquement prévoir l'effondrement de la première
banque mondiale, et, dans la foulée, du système bancaire européen dans
sa totalité, en raison du manque de marge de manœuvre pour de nouveaux
plans de sauvetage. Suivra donc la banqueroute des
gouvernements eux-mêmes. Selon le spécialiste, personne ne réalise la
gravité de la situation, qui est presque inextricable : il n'existerait presque aucune méthode pour arrêter le carnage.
Le problème n'est pas le montant des dettes gouvernementales en elles-mêmes, mais plutôt les dommages collatéraux.
La
dette des pays du G10 (Allemagne, Belgique, Canada, États-Unis, France,
Italie, Japon, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède, Suisse) s’élève à 70 000
milliards. Mais ses dérivés seraient dix fois plus élevés, à 700 000
milliards, ce qui équivaut à 1200% du PIB mondial.
Si
l'Europe fait faillite, la crise touchera inévitablement le
Royaume-Uni, puis le Japon et la Chine, et, bien sur, les États-Unis ne
seront pas épargnés.
Une cascade qui entraînerait
la fin du système bancaire à réserves fractionnaires et de la monnaie
fiduciaire. Une remise à plat totale.
Le plus inquiétant est peut-être le calendrier : car l'analyste prévoit ce grand chamboulement pour 2012 et 2013, années qui devraient ouvrir la voie à l'apocalypse financière.
Un
effondrement bancaire généralisé et des défauts massifs provoqueraient
le plus grand choc économique de tous les temps : la fin des échanges
financiers, la fin du crédit-bail, la fin des financements maritimes,
agricoles, la fin des marchés obligataires...
Les
marchés sont en train de réaliser que les plans de sauvetage,
l'opération de refinancement à long terme de la BCE (LTRO), le Fond
Européen de Stabilité Financière (FESF), le Mécanisme Européen de
Stabilité (MES) sont impuissants.
Avec la chute de
l'Italie et de l'Espagne, la prochaine phase serait la nationalisation
des banques, qui semble avoir déjà commencé avec
le cas de Bankia en Espagne.
Ce faisant, les États prennent à leur compte les dettes des banques dans leur propre balance budgétaire. Robert Zoellick confirme que "
les
dirigeants de la zone euro doivent être prêts à recapitaliser les
banques. Dans ces pays, les garanties des dettes souveraines ne
devraient pas être suffisantes." Le président de la Banque mondiale ajoute : "
Ce
n'est pas très clair si les dirigeants de la zone euro sont prêts pour
cette étape, mais ils faut qu'ils le soient. Les ministres des Finances
n'auront pas le temps d'organiser des réunions sur les perspectives et
la politique à suivre."
Après la
recapitalisation des banques, il faudrait ensuite s'attendre au blocage
des marchés financiers, avec une série de paramètres. Les
obligations seront bloquées à 1% aux États-Unis, en Allemagne, au
Royaume-Uni et au Japon, tuant ainsi tout le marché obligataire. Seront
bannis : la vente à découvert sur les obligations, la vente à découvert
sur les stocks, les crédits default swap, les contrats à court terme. Il
ne restera alors que le dollar et l'or.
Le
risque se portera alors sur une fermeture du système bancaire tout
entier, comme cela s'est déjà produit en Argentine en 2001, en Russie en
1998, et au Brésil en 1991.
En
conséquence, il nous resterait environ 6 mois d'échanges sur les marchés
occidentaux pour nous protéger, ou gagner suffisamment d'argent pour
compenser les pertes qui suivront irrémédiablement, "passer notre
temps à évaluer les risques, pour finalement finaliser que rien ni
personne n'est à l'abri. Après, nous mettrons nos fins casques de
protection et attendront que le nouveau système émerge."
Sa conclusion ? "J'aimerais
pouvoir voir une autre issue se produire avec une égale probabilité,
mais ce n'est pas le cas...Tout ce que nous pouvons faire, c'est espérer
que j'ai tort, mais quoi qu'il arrive, un nouveau système émergera, et
il ouvrira un éventail tout nouveau d'opportunités. Mais nous retournerons 40 ans en arrière, puis 1500 ans, et 3000 ans ...", ce qui ne signifie pas que le monde régresserait à l'activité économique d'il y a 3000 ans.
Pal
fait plutôt référence aux relations commerciales vieilles de 3000 ans
entre les nations le long de l'Océan Indien, qu'il croit être le centre
des opportunités mondiales. Tout comme l'Ouest il y a 50 ans, ils ont à
la fois de faibles dettes, de fortes épargnes, et une population jeune.
Un tel pessimisme est-il justifié, à l'heure où
l'Espagne s'est enfin résolue à accepter un plan de sauvetage de 100 milliards de d'euros pour stabiliser son système bancaire ? La
décision a été accueillie avec soulagement par les marchés financiers
partout dans le monde, et a provoqué une fonte du prix des obligations.
Pourtant, les analystes financiers ne semblent toujours pas satisfaits, s'étonne
The Daily Beast.
Le monde financier serait devenu intrinsèquement méfiant, cynique et
méprisant, lassé par trois ans de crise de confiance continuelle en
Europe. D'abord la Grèce, puis l'Italie, enfin l'Espagne et le Portugal.
A
cela s'ajoute la crise mondiale, le pénible redressement des Etats-Unis
et les inquiétudes renouvelées au sujet de la trajectoire économique de
la Chine, et d'une éventuelle crise immobilière. Il existerait
maintenant une sorte de consensus dans le monde financier, qui s'accorde
pour prédire l'arrivée inévitable d'une Grand Soir, d'une crise totale,
remettant tout à plat (la Grèce étant perçue comme le déclencheur
potentiel d'une réaction en chaine.)
Pourtant, selon l'économiste Zachary Karabell, ces inquiétudes sont largement exagérées. D'après ce spécialiste,
le monde financier est aujourd'hui tellement obsédé par l'idée que le
pire est possible, qu'il en perd tout sens des réalités, et oublie de se
poser la seule bonne question : "Tout cela est-il probable ?"
L'Occident,
enlisé dans la crise, serait enlisé dans un cercle vicieux de
pessimisme et de négativité, laissant totalement de coté la recherche
d'idées innovantes et constructives.
L'économiste
compare la situation actuelle à la Guerre Froide, et la peur permanente
de la guerre nucléaire qui régnait alors. A l'époque, il avait fallu des
années aux gouvernements et aux populations pour réaliser que, si le
risque existait, il restait peu probable, et qu'il fallait continuer à
vivre en prenant conscience des améliorations continuelles qui, d'accord
international en accord international, de résolution et résolution,
acheminaient le monde vers davantage de paix.
Comme à l'époque, la crise pousse la communauté internationale à prendre ses dispositions. Chaque
résolution, aussi temporaire et inadéquate soit-elle, est un pas de
plus vers une normalisation et une stabilisation du système. Karabell note ainsi avec optimisme :
"Les nations européennes avancent plus rapidement vers l'union fiscale
que les observateurs pouvaient s'y attendre il y a encore quelques mois,
et ce précisément grâce à la crise".