TOUT EST DIT

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vendredi 18 octobre 2013

Bas de plafond !

Bas de plafond !


Exit le « shutdown » ! L'irrespirable suspense a pris fin… comme prévu. Et jusqu'à la prochaine fois, puisque ce « show » budgétaire, pourtant débile, fait recette, si l'on peut dire. Il y a avait déjà eu une paralysie budgétaire entre 1995 et 1996 et il pourrait y en avoir une autre à la mi-janvier 2014 puisque l'accord intervenu mercredi au Congrès ne relève le plafond de la dette que jusqu'au 7 février. Les Américains vont-ils, encore une fois, jouer à se faire peur, et à nous faire peur, avec la complicité de commentateurs qui agitent abusivement des scenarii apocalyptiques ? Le drame est qu'à « s'amuser » à côtoyer les précipices, on finit parfois par tomber dedans.
C'est, au final, le triste spectacle d'une classe politique irresponsable qu'a offert la première puissance mondiale. Dans son bras de fer inconséquent avec Obama, l'opposition républicaine mérite en tout cas le titre de « droite la plus bête du monde ». Dans cette affaire de relèvement du niveau de la dette, ce sont surtout les républicains qui se sont montrés bas de plafond ! Sous la pression des ultra-conservateurs du Tea Party, ils ont soumis la Maison-Blanche à un chantage inacceptable avant de capituler sans conditions.
Leur tort a été de spéculer sur un manque de détermination d'Obama après ses déboires récents. Tout au contraire, le président américain a choisi de reconstruire une autorité entamée à l'international en s'avérant intraitable sur les problèmes domestiques. Il n'empêche que lui et les démocrates ne sortent pas pour autant indemnes du feuilleton.
Barack Obama, qui envisageait son second mandat sous le signe d'un bicamérisme constructif, va devoir poursuivre son combat contre les blocages partisans. Il va devoir aussi lutter contre un isolationnisme qui gagne du terrain dans le pays. Dans la bataille qui vient de s'achever, c'est un peu de leur crédibilité et de leur exemplarité que les États-Unis ont perdu. Certes, le pire a été évité mais à s'endetter toujours plus, c'est l'action politique qui se trouve dévaluée. Et l'avenir de tous qui est hypothéqué.

Un nouveau nuage sur le plan de sauvetage de la Grèce

Un nouveau nuage sur le plan de sauvetage de la Grèce


Peu de dirigeants de banque centrale n'ont autant de pouvoir que Georgios Provopoulos qui a joué un rôle crucial dans le plan de sauvetage de la Grèce et de l'euro. Mais, d'après l'« International New York Times » qui a eu accès à un document confidentiel, le gouverneur de la Banque de Grèce doit affronter un nouveau défi : une enquête sur un éventuel conflit d'intérêts pour avoir donné son feu vert à une transaction bancaire entre son ancien employeur, la Piraeus Bank, et un homme d'affaire, Lavrentis Lavrentiadis, qui a été par la suite accusé de malversation et de fraude. D'après ce rapport de mai dernier d'un procureur de la république grecque, la décision de Georgios Provopoulos aurait été prise en dépit des mises en garde des experts de la banque sur la solidité financière de l'acquéreur. Il n'y a cependant aucune indication selon laquelle le gouverneur aurait profité personnellement de cette transaction. « Mais, estime le quotidien, son rôle - et la possibilité, très minime, qu'il puisse être traduit devant la justice - pourrait avoir des implications au-delà de la Grèce. » Car le plan de sauvetage de 40 milliards d'euros pour les banques grecques suggérait bien qu'Athènes lutte contre la corruption et le favoritisme. La transaction autorisée par le gouverneur a permis à M. Lavrentiadis de prendre le contrôle de Proton, une autre banque dont le sauvetage a coûté 1,3 milliard d'euros. Dans une interview au journal, Georgios Provopoulos a affirmé que ses décisions ont été prises pour éviter l'implosion dusystème financier et que le conseil de la Banque de Grèce a approuvé la transaction avec Proton « à l'unanimité ».

Respect

Respect


La question du port du voile dans l’espace public et professionnel n’en finit pas de susciter des controverses. Même la justice française se divise sur ce problème de société. Le procureur de la République de Paris vient de demander aux juges de ne pas suivre les recommandations de la Cour de cassation dans l’affaire Baby-Loup. Tout cela prouve bien que les textes destinés à éviter les dérives religieuses ne sont pas assez clairs. À moins qu’ils ne soient plus adaptés aux multiples provocations destinées à passer outre les lois de la République.
Le procureur a été clair hier. François Falletti a mis en avant « un impératif d’intérêt général » pour justifier le licenciement de la salariée de la crèche. Il estime par ailleurs que « « les missions d’éveil et du développement de l’enfant […] sont de nature à justifier des restrictions ».
Ce plaidoyer pour la laïcité n’aurait jamais dû être prononcé si les règles de la République avaient été respectées. Au nom d’on ne sait trop quel « humanisme » ou reniement, la France a fermé les yeux sur un prosélytisme qui met à mal le fondement même du vivre ensemble : le respect des lois. La gêne évidente des pouvoirs politiques les a conduits à bricoler des textes et à courir derrière ceux qui n’ont de cesse de pousser chaque jour un peu plus loin les limites de la tolérance.
Laissons à leurs imprécations ceux qui hurlent à l’islamophobie. La France s’est fait une spécialité des procès en sorcellerie depuis quelques décennies. La République est officiellement « une et indivisible ». Cette mise en avant permanente du fait religieux est insupportable, quel que soit d’ailleurs le camp des zélotes. L’histoire de France est assez lourde de haines religieuses et de sang versé au nom d’une « vérité », où l’amour du prochain passe par son expédition prématurée dans l’au-delà.
Il suffit de voir ce que le communautarisme a fait du Liban pour mesurer l’ampleur des dégâts. La France, ses écoles ou ses entreprises sont des lieux ouverts qui ont une mission : enseigner ou produire. Si d’aucuns ont envie de témoigner de leur foi, il existe des lieux de culte qui les accueilleront bien volontiers. Surtout, que cesse cette prise d’otage permanente de la société française au nom de… Dieu sait qui !

Leonarda, hochet des élites

Leonarda, hochet des élites




Non mais franchement, vous croyez vraiment que Valls, Ayrault, Peillon et tous les autres ténors de la politique qui s’émeuvent de l’expulsion d’une Kosovare de 15 ans se préoccupent en quoi que ce soit de son sort ou de son avenir ? A d’autres ! Leonarda sert à remuer des idées politiques, à peaufiner leur image électorale ; ou plus cyniquement encore, à jouer sur les deux registres des « méchants » et des « gentils » parce qu’il faut bien tenir compte de l’état de l’opinion. Ne pas désespérer Brignoles…
Jeudi matin, quatorze lycées parisiens étaient perturbés, et quatre carrément bloqués en signe de protestation, dont le prestigieux lycée Charlemagne où – la « sélection » n’est pas morte – on n’entre qu’avec un dossier scolaire en béton.
La collégienne a été interpellée le 9 octobre dernier lors d’une sortie scolaire à Levier, dans le Doubs, à sa descente du car. Tous les copains étaient là. Il faut avouer qu’il y avait de quoi faire larmoyer Margot.
Les faits ? Cette jeune fille qui dit ne pas connaître son pays ni sa langue d’origine ne serait pourtant arrivée en France qu’il y a cinq ans, avec ses parents et ses frères et sœurs dont le nombre s’est agrandi depuis. Installation clandestine, sans titre de séjour, rejet définitif du statut légal de demandeurs d’asile. Le père, Reshat Dibrani a été interpellé à Mulhouse et expulsé le 8 octobre. Le même jour, le reste de la famille a été assigné à résidence à Levier – mais Leonarda, elle, est partie dormir chez une amie. L’expulsion était annoncée ; d’ailleurs les Dibrani avaient préparé leurs affaires. Et c’est donc une affaire de « regroupement familial » qui s’est jouée le 9 octobre devant le car scolaire à Levier. Fallait-il donc exécuter la décision de justice en expédiant la mère et les cinq autres enfants Dibrani auprès de leur mari et père et laisser cette mineure seule sur le territoire français ? Avec son petit copain, peut-être ? Il est vrai que Leonarda ne donne pas l’impression d’être une frêle et innocente adolescente pré-pubère…
Et maintenant c’est la guerre au PS. Si Manuel Valls, un œil sur les sondages et la main toujours calée sur les lacrymos pour sévir contre les partisans du mariage vrai, insiste sur la légalité de l’embarquement de Leonarda vers l’aéroport où l’attendait sa famille, Matignon annonce une enquête administrative sur le respect des procédures, ce qui constitue un désaveu au moins apparent. On ne s’étonnera pas d’avoir vu s’y joindre Harlem Désir et d’autres ténors socialistes, et jusqu’à Najat Vallaud-Belkacem qui, en tant que porte-parole du gouvernement Hollande, a déclaré jeudi matin : « Si les choses se sont passées telles qu’elles sont décrites ici ou là, c’est-à-dire si on est allé arrêter un car scolaire et extirper une enfant au vu et au su de ses camarades, alors elles sont éminemment choquantes, mais aujourd’hui il n’est pas avéré qu’elles se soient passées comme ça. »
Voilà qui est intéressant : la petite Leonarda aurait-elle menti ?
Claude Bartolone – nouvel Antigone – ne s’encombre pas de ce genre de questions, lui qui a déclaré du haut de sa responsabilité de président de l’Assemblée nationale : « Il y a la loi. Mais il y a aussi des valeurs avec lesquelles la gauche ne saurait transiger. Sous peine de perdre son âme. » Incroyable ! Une loi au-dessus de la loi républicaine ? Encore un peu et il se joindra aux Sentinelles en arborant le sweat-shirt de la Manif pour tous… Pardon, je divague. Ceux qui contestent la légitimité de la loi Taubira, même quand ils réclament un référendum, sont des « ennemis de la démocratie » (comme le disait Bartolone) parce qu’il n’y a pas de loi morale qui prime sur la loi civile.
Vincent Peillon, lui, propose de « sanctuariser » l’école. Bien vu : n’est-ce pas le temple de sa religion de la République ?
Revenons donc à Leonarda. Et ses récits diversifiés. Par téléphone depuis le Kosovo elle a indiqué que sa famille dort dehors, sur des bancs. Libération et BFM-TV montrent un cliché et des images tournées dans l’appartement familial à Mitrovica… (Merci au site FdeSouche qui a soulevé ce lièvre.) Modeste mais hors d’eau.
Pendant ce temps, l’Ordre de Malte s’émeut à juste titre de ce qu’une jeune mère ait passé le 11 octobre près de douze heures dans le centre de rétention administrative de Lesquin, séparée de son nourrisson de 17 mois qu’elle allaitait encore, en vue de son expulsion vers la Guinée-Conakry. La police n’a même pas été capable de lui dire où avait été placé son enfant… La préfecture du Nord a fait ce qu’il fallait pour les réunir. Mais on attend toujours le déluge d’indignation médiatique.

Balkanisation du PS

Balkanisation du PS


Manuel Valls est devenu le pire ennemi de la gauche, à en juger par les attaques dont il est victime depuis l’expulsion d’une jeune Kosovare, Leonarda. Abandonnant le FN et l’échec électoral, une partie du PS, le Front de gauche, les Verts et le PC clouent le ministre de l’Intérieur au pilori. L’outrance de certains propos laisse entendre que l’accusé serait un dangereux liberticide.
Garant des lois de la République, Manuel Valls et ses services ne font qu’appliquer les textes en vigueur. Assez mollement, si l’on compare les chiffres des expulsions de cette année à ceux de 2012. On est donc très loin de l’image de forces de l’ordre traquant les réfugiés que voudraient donner les adversaires du ministre. Le cas de cette jeune fille est douloureux, c’est certain. Elle aurait pu être emmenée dans d’autres conditions, mais au bout du compte le résultat eût été le même : sa famille et elle ne pouvaient rester en France.
Derrière cette affaire se cache surtout un véritable enjeu politicien : une partie de la gauche reproche au gouvernement d’avoir vendu son âme en s’adaptant aux réalités que dicte la vie d’un État. Réalités comprises par les Français eux-mêmes. Ils font de Manuel Valls l’un des hommes politiques les plus appréciés.
Derrière les attaques qui visent le premier flic de France, on retrouve la pensée d’une minorité agissante, persuadée de détenir la vérité dans un pays composé d’êtres aussi réactionnaires que primaires. La référence de certains à la Résistance minoritaire et opposée aux « 40 millions de pétainistes » est à la mode.
Manuel Valls incarne, aux yeux des tenants de la « vraie gauche », la figure du traître. On est en pleine chasse aux sorcières, et ces appels à l’exclusion témoignent d’une interprétation partisane d’événements sensibles.
De manière illusoire, les ennemis du ministre de l’Intérieur espèrent toujours que la rigueur doctrinale ramènera au bercail les brebis égarées. Cette politique quasiment clanique risque, à l’inverse, de détourner un peu plus les Français de partis sourds à leurs préoccupations.
En attendant, l’affaire Leonarda aura abouti à un premier résultat : la balkanisation du PS.

Misère et pauvreté : les pays et catégories de population qui en sont sortis, ceux qui y sont restés, ceux qui y sont tombés depuis 2008

Se tenait ce jeudi 17 octobre la Journée mondiale du refus de la misère, un concept large et d'une rare complexité tant il peut, d'un pays ou d'un continent à l'autre, augmenter ou se résorber sous des formes diverses, reflétant la difficulté d'évaluer celle-ci avec de simples outils statistiques. Bilan de l'évolution de la misère dans le monde depuis le début de la crise économique.

L’ONU annonce dans son dernier rapport sur la pauvreté que la proportion des personnes vivant dans une extrême pauvreté a été réduite de moitié au niveau mondial. Le nombre de personnes se trouvant dans des conditions d’extrême pauvreté aurait ainsi baissé de près de 700 millions entre 1990 et 2010. Qu’entend-on par les termes "pauvreté" et "misère" ? Comment évalue-t-on justement ce degré de pauvreté ?

Francine Mestrum : Les organisations internationales travaillent avec deux concepts de pauvreté : une pauvreté "extrême" qui, selon les normes de la Banque mondiale concerne les personnes vivant avec moins de 1.25 $ par jour et la pauvreté, que l’on pourrait dire ‘normale’ qui concerne les personnes vivant avec moins de 2 $ par jour. Il s’agit d’une pauvreté "absolue" qui ne tient pas compte de la richesse ou du bien-être des sociétés dans lesquelles elle se manifeste. Ces seuils de pauvreté sont calculés en PPA ou parités de pouvoir d’achat afin de pouvoir comparer les statistiques des différents pays.
Certes, ces seuils sont critiquables, et le calcul des PPA est très aléatoire, mais ce sont les seules statistiques dont nous disposons, et même si on peut avoir des doutes quant à leur pertinence, elles donnent des ordres de grandeur. Il existe encore bien d’autres possibilités de mesurer la pauvreté, par exemple la pauvreté dite "multidimensionnelle", allant au-delà des revenus monétaires, ou les "brèches de pauvreté" pour calculer le montant total qu’il faudrait pour éradiquer totalement la pauvreté. Toutefois, toutes ces mesures n’aident pas nécessairement à mieux lutter contre la pauvreté ou à aider les personnes et les populations pauvres.
Eliane Mosse : La plupart des définitions de la pauvreté reposent sur des critères purement quantitatif : moins de 2$ par jour et par personne pour l'ONU, moins de la moitié du revenu médian pour eurostat. Personnellement, je définirais la pauvreté par trois critère : faibles revenus, précarité, exclusion. De plus, dans des pays où une économie familiale non chiffrable existe, la barre des 2 ou 2,5$ est illusoire

Est-il réellement pertinent d’évaluer la pauvreté au niveau mondial ou faut-il l'analyser à un niveau local ? La notion de pauvreté n’est-elle pas relative à l’espace géographique étudié ?

Francine Mestrum : Pour avoir une idée plus correcte de la pauvreté et pour s’approcher de la façon dont les pauvres vivent leur réalité, il est en effet beaucoup plus intéressant de regarder les statistiques nationales ou locales. Par ailleurs, ces statistiques sont souvent fort différentes. Ainsi, en Amérique latine, on utilise des seuils de pauvreté différents, ce qui donne des résultats nettement plus élevés que ceux de la Banque mondiale. En Europe, nous mesurons la pauvreté relative : a "un risque de pauvreté" la personne qui gagne moins de 60 % du revenu médian d’un pays. Ainsi, on tient compte de l’inégalité et on peut se faire une idée de ce qu’il faut pour que les individus puissent vivre dignement et puissent participer à la vie sociale.
Eliane Mosse : Oui, on peut donner une évaluation globale mais plutôt par régions du monde : ainsi, on se rend compte que la pauvreté a beaucoup plus diminué en Asie qu'en Afrique, la Chine tirant vers le haut le niveau de vie moyen. Dans ce pays, la pauvreté selon les critères Banque mondiale a diminué de moitié en 20 ans. Sa localisation a sans doute évolué : une pauvreté urbaine apparaissant, alors que la pauvreté se situait jusqu'au décollage économique de la Chine, en milieu rural

Depuis 2008 et le début de la crise, quelles sont les grandes tendances d'évolution de la pauvreté en fonction des différentes aires de développement et des pays ? Les économies émergentes ont-elles, en terme de paupérisation, subit les mêmes conséquences que les pays en développement et développés ?

Francine Mestrum : En fait, l’histoire de la pauvreté dans le monde fait l’objet de luttes idéologiques importantes. Il faut savoir que dans les années 1950 ou 1960, quand les théories sur le développement ont émergé, on ne parlait jamais de la pauvreté. On étudiait les "problèmes sociaux" et leur solution était "le développement", économique et social. Au début des années 1970, la Banque mondiale a essayé de mettre la pauvreté à l’ordre du jour international, mais cela n’a pas marché, faute d’enthousiasme des pays pauvres et dû au début de la crise dans les pays du Nord. Ce n’est que dans les années 1990 que la pauvreté a finalement été accepté comme priorité de la coopération au développement. Mais cette nouvelle priorité n’a pas modifié d’un iota les politiques dite du Consensus de Washington et étaient en fait un remplacement des politiques de sécurité sociale que pas mal de pays essayaient de mettre en place. La plupart des services sociaux (santé, éducation, crèches …) ont été démantelés ou privatisés et des politiques assistancielles ont pris le relais.
En 2000, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté les "Objectifs du Millénaire", une série de 8 objectifs sociaux à réaliser avant 2015. Le premier objectif était de réduire de moitié entre 1990 et 2015 la proportion des personnes extrêmement pauvres dans le monde en développement. Cet objectif a été atteint dès … 2010 mais c’est essentiellement grâce à la Chine et à l’Inde, deux pays qui n’ont pas dû suivre les recettes néolibérales de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. En Amérique latine, la pauvreté extrême a été réduite, mais nettement moins. Là aussi, les politiques néolibérales ont eu un impact extrêmement négatif, mais des gouvernements progressistes ont commencé à mettre en place des politiques sociales avec des transferts monétaires. Le résultat positif a été immédiat ! En Afrique, par contre, la pauvreté n’a presque pas diminué et en nombre de personnes, on voit un quasi-doublement de la pauvreté extrême. Certes, il y a d’autres causes à part les politiques néolibérales, mais leur influence est incontestable. Au niveau mondial, donc, les Objectifs du millénaire ont été atteint, mais en fait, les pays pauvres restent toujours aussi pauvres. Les pays qu’on dit "les moins développés" étaient 25 en 1971. Il sont aujourd’hui à 49 ! C’est pourquoi certains chercheurs parlent de "l’africanisation de la pauvreté" et de l’occidentalisation de la richesse.
Les pays émergents sont quant à eux dans une situation paradoxale. Au Brésil, la pauvreté a diminué, certes, mais le pays reste un des plus inégalitaires au monde. En Chine, la pauvreté a été réduite de façon spectaculaire, mais les inégalités aussi. En Inde, la pauvreté a diminué, mais le plus grand nombre de personnes extrêmement pauvres vivent en Asie du Sud (Inde, Bangladesh, Pakistan …).
Eliane Mosse C'est essentiellement en Afrique sub-saharienne que se trouvent les poches les plus importantes de pauvreté, en dépit des ressources potentielles importantes de ces pays : guerres tribales, religieuses, ethniques. Par contre, l'Amérique latine est sortie de l'extrême pauvreté. 

Dans le monde, la crise économique et financière a "créé" un déficit d’emploi pour 67 millions de personnes. La crise économique est-elle justement par ce biais au cœur des dernières évolutions de la pauvreté dans le monde ? Qui sont les principales victimes induites par celle-ci ?

Francine Mestrum : Il est évident que la crise économique a une conséquence négative sur l’évolution de la pauvreté. Cependant, n’oublions pas que la crise la plus importante pour le monde en développement a été celle des années 1980 quand la Banque mondiale et le Fonds monétaire internationale ont commencé à imposer leurs "ajustements structurels". Dans plusieurs pays, les salaires sont toujours en deçà de leur niveau des années 1970. Par ailleurs, ce sont ces mêmes politiques qui sont aujourd’hui mises en place dans les pays de l’Union européenne : les protections sociales sont démantelées, les services publics sont privatisés, l’âge de la retraite est reporté, les budgets doivent être en équilibre. Et les effets sont les mêmes que dans le tiers-monde : une augmentation de la pauvreté. Aujourd’hui, un quart de la population de l’Union européenne vit avec "un risque de pauvreté". Le chômage des jeunes atteint des niveaux insoutenables, au-delà de 50 % en Grèce et en Espagne !
Eliane Mosse : La crise a certainement entraîné avec la montée du chômage un appauvrissement de certaines catégories de population (jeunes, essentiellement). Mais le tissu de protection sociale empêche, heureusement, des cas de misère du type de ceux définis par la Banque mondiale. Par contre, si la pauvreté est contenue, la précarité (risque de perdre l'emploi, le logement etc.) et l'exclusion quant à elles se renforcent.

Quels sont aujourd’hui les outils à la disposition des leaders politiques pour réduire la pauvreté dans le monde ? Sont-ils efficients et utilisés à bon escient ?

Francine Mestrum : Le constat est inévitable : les politiques dites de "réduction de la pauvreté" ont échoué. Les organisations internationales sont aujourd’hui en train de mettre en place des politiques de protection sociale mais il n’est par certain que cela aille au-delà des politiques de réduction de la pauvreté. Leur concept de la protection sociale est en tout cas fort différent de ce que nous entendons par cela en Europe occidentale. Quant à l’Europe elle-même, elle passe de plus en plus à la charité et à la philanthropie, elle cherche à aider "les plus pauvres parmi les pauvres", les enfants. Au risque d’oublier leurs parents et leur famille. Non, les politiques ne sont pas efficaces.
Ce dont les pauvres ont besoin est une allocation qui leur permette de vivre dignement. C’est essentiel. Ensuite, il faudra un changement de cap politique, avec des politiques de l’emploi, le développement d’une économie sociale et solidaire, une fiscalité juste, etc. Les solutions existent, mais la volonté politique n’y est pas, dans aucun de nos pays. C’est pourquoi certains proposent de faire adopter une loi pour déclarer la pauvreté illégale. Cela pourrait être un levier important pour mieux organiser les actions nécessaires.
Eliane Mosse La seule et unique véritable solution n'est autre que la croissance. Il n'y a pas de secret puisque c'est comme ça que la Chine a réduit de moitié en 20 ans sa pauvreté ! les aides diverses sont souvent à fonds perdus.


Pourquoi l'obsession française sur les revenus des riches nous fait passer à côté du problème du poids croissant des rentiers


Affaire Bettencourt, feuilletons Bernard Arnault ou Gérard Depardieu : depuis un an, les "riches" font figure de bouc émissaire idéal aux problèmes économiques de la France. Au risque de détourner l’opinion publique d'autres catégories plus "gênantes" que sont les rentiers. Quatrième épisode de notre série "Les riches, entre fantasmes et réalité".

Alors que l'opinion publique semble orienter ses griefs sur les riches, est-il bien pertinent de se focaliser sur cette catégorie de population ? L'origine de leur richesse est-elle "immorale", issue de rentes ou de privilèges ?

Bernard Zimmern : Depuis plus de 10 ans, une campagne s’organise pour essayer de faire croire que nos sociétés, à commencer par les USA, souffrent d’inégalités de fortune et de revenus. C’est absolument faux car lorsque l’on regarde attentivement les statistiques corrigées de l’âge, qui est le principal facteur de changement de revenu, des retraites, des transferts de sécurité sociale, ou des impôts, les écarts de richesse apparaissent finalement normaux, de 1 à 9, ce qui correspond à la moyenne historique.
Pour en savoir plus, retrouvez les autres articles de la série "Les riches, entre fantasmes et réalité" dans notre dossier spécial.
Plus grave, non seulement ces statistiques sont fausses, mais elles nous trompent également sur le profil-type des 1% les plus riches. Alors qu’on nous laisse penser qu’il s’agît le plus souvent de banquiers, de financiers ou de traders, les statistiques montrent au contraire qu’aux Etats-Unis, 75% des 1% les plus riches sont des gens qui détiennent un patrimoine de moins de 10 millions de dollars. En outre, 60% de ce patrimoine est généralement constitué d’une entreprise unique, très souvent créée par eux. De même, dans le classement annuel de Forbes, entre 2/3 et 3/4 des "lauréats" proviennent de la "new money", c’est-à-dire d’une fortune qu’ils ont eux-mêmes créés à partir de rien.
Laisser croire que les 1% les plus riches sont des rentiers est donc grave. Cela amène en effet à penser qu’il faudrait accroître les taxes qui pèsent sur eux en oubliant que ces 1% sont à l’origine de plus de la moitié des investissements industriels aux USA et en France. Les hausses d’ISF et autres taxes pénaliseraient les investissements de ces gens-là. Or il ne peut y avoir d’économie en expansion sans prises de risque de la part d’entrepreneurs, dont la grande majorité, rappelons-le, essuie des échecs. Ces idées fausses ne conduisent donc pas à moins d’inégalité mais en créent au contraire car on elles produisent du chômage.

Plutôt que les riches qui créent souvent de la richesse, les situations de rente ne sont-elles pas plus handicapantes pour notre modèle ? Qui sont ces "rentiers" dont on ne parle jamais et qui bénéficient d’avantages sociaux qu’ils ne perdront jamais ?

Lorsque l’on voit combien les charges sociales ont explosé ces dernières années, il est certain que beaucoup de personnes bénéficient de ces sommes. Il n’est pas si compliqué en France, en étant malin, de bénéficier d’avantages cumulés de la part des communes, des départements, des régions, et même de l’Etat. Ces fraudes peuvent parfois représenter jusqu’à plusieurs milliers voire dizaine de milliers d’euros par mois.
Quand ces aides sont méritées parce qu’elles correspondent à une situation familiale ou professionnelle difficile, il n’y a aucun problème. En revanche, je suis certain que tous les français seraient outrés d’apprendre que des jeunes en abusent pour faire le tour du monde au frais de la société.

Ne serait-il pas plus productif de se concentrer sur d'autres catégories de personnes bénéficiant d'acquis sociaux plus coûteux pour la société ? Quelles sont les réformes qui permettraient d’éviter ces abus ?

Il est impossible pour la Sécurité sociale de contrôler réellement les congés maladie ou le respect des jours de carences de tous les salariés par exemple. Une solution pour y remédier serait la fiscalisation de ces aides sociales. Sans forcément les taxer mais en obligeant en tout cas les organismes qui les distribuent à les déclarer à Bercy. Cela permettrait d’éviter de nombreux abus. C’est une proposition à la fois simple et sensée.
Mais le vrai problème français se situe plutôt du côté des entrepreneurs et de la création de richesse que de la chasse aux abus. Pour supporter la charge publique, si nous avons plus d’emploi, la dépense publique serait beaucoup plus supportable.

Dans quelle mesure peut-on alors considérer qu'il y ait de bons et de mauvais riches pour la société ?

Il est certain que les meilleurs riches sont ceux qui appartiennent à la "new money" et ont créé leur richesse par eux-mêmes. Quand ils arrivent vers les 60 ans, ils utilisent en effet leur fortune accumulée à créer des fondations et essayer d’aider leurs semblables. C’est cela la vocation des bons riches dans une société. Aux USA, ce phénomène est particulièrement remarquable : pratiquement tous les entrepreneurs devenus riches, à l’image de Bill Gates, le font, et ce, tant qu’ils sont encore en possession de leurs moyens physiques. Ils mettent ainsi leur imagination et leurs moyens au service de la collectivité. Dans une moindre mesure, les riches de la "old money", qui ont hérité de leur fortune font également profiter l’économie de leurs moyens en essayant le plus souvent de maintenir des entreprises familiales dans le tissus économique français. En revanche, je en sais pas ce qu’est un "mauvais riche" pour une société.

Le pédalo de la Méduse

Le pédalo de la Méduse

Marie-Arlette Carlotti est « fanny », comme on dit à l’heure de la pétanque du côté de Marseille. Favorite des primaires socialistes, la ministre en charge de la lutte contre l’exclusion a été exclue au premier tour. Les électeurs lui ont préféré la sénatrice Samia Ghali et le député Patrick Menucci.
Dans la plus pure tradition du drame méditerranéen, la battue a eu recours aux imprécations pour expliquer ce qui, à ses yeux, s’apparente à un crime de lèse-gouvernement. Mme Carlotti se dit victime du « clientélisme » et d’un « système paramilitaire ». Une telle sortie dans la bouche d’un adversaire UMP n’aurait surpris personne, mais là, Madame la ministre saborde le bateau-lavoir de son parti. Dans une ville où quelques élus socialistes sont déjà en délicatesse avec la justice, lancer des accusations pareilles revient à fragiliser un peu plus le PS.
À aucun moment, la battue de ce dimanche de chien ne s’est posé la question de savoir si sa défaite était plus celle du gouvernement auquel elle appartient que le fruit de magouilles claniques. Si l’on regarde du côté de Brignoles, la gauche a été laminée dès le premier tour. À Marseille, pour cause de primaires, seuls les socialistes étaient en jeu. Le résultat s’annonçait délicat. Il s’achève en un combat fratricide. Les électeurs de gauche étaient tentés de sanctionner un gouvernement qui les déçoit. Et, comme ils avaient sous la main un membre de l’équipe Ayrault, ils l’ont immolé sur l’autel de leur frustration.
Le sort malheureux d’une collègue ne semble guère gêner le gouvernement. Cette nouvelle défaite et le triste spectacle marseillais n’ont apparemment perturbé ni le Premier ministre, ni le chef de l’État. Chaque dimanche électoral a beau se transformer en épisode de « Plus moche la vie », ils gardent leur cap. Un cap plein de bonne espérance pour François Hollande, en voyage en Afrique du Sud. Le président aura peut-être vu un symbole dans ce promontoire qui défie l’océan en furie.
Celui qui fut comparé naguère à « un capitaine de pédalo » inaugure un nouveau commandement : celui du radeau de la Méduse, où les survivants s’entre-dévorent pour survivre.

Le chef Bernard Vaussion quitte l'Elysée


Il est le chef de l'Elysée depuis 1974 et aura vu passer sixprésidents. Bernard Vaussion prend sa retraite le 30 octobre des cuisines du palais. Il aura préparé des repas non seulement pour le chef de l'Etat français, mais aussi pour tous les dîners officiels
Bernard Vaussion a 16 ans lorsqu'il commence sa carrière en 1970 à l'ambassade des Pays-Bas puis à l'ambassade de Grande-Bretagne. Alors qu'il effectue son service militaire, il entre dans les cuisines de l'Elysée en tant que commis le 2 janvier 1974. Il devient demi chef de partie en 1975. Jacques Chirac le nomme chef des cuisines en 2005. 

Une réception le 30 octobre

Rester aussi longtemps à la tête des cuisines de l'Elysée n'est pas automatique. En effet, chaque nouveau Président peut nommer le chef qu'il souhaite. Cependant, aucun n'a préféré d'autre nom à celui de Bernard Vaussion. En 2011 et en 2012, il a cosigné deux livres retraçant les recettes de l'Elysée et dévoilé les préférences de chaque chef d'Etat. Ainsi, Jacques Chirac adorait la choucrouteaccompagnée d'une bière Corona, Nicolas Sarkozy était un adepte du chocolat et de poissons à la vapeur, François Mitterrand aimait les fruits de mer... 
Son adjoint, Guillaume Gomez prendra sa suite le 1er novembre. Meilleur Ouvrier de France 2004 -le plus jeune lauréat, à 25 ans-, il travaille avec Bernard Vaussion depuis 1997. Après une réception en son honneur le 30 octobre en présence de François Hollande, le jeune retraité deviendra président honoraire du Club des chefs de chefs, l'association des cuisiniers présidentiels.