TOUT EST DIT

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mercredi 31 mars 2010

Boomerang fiscal

Destiné à empêcher qu'aucun contribuable ne verse plus de la moitié de ses revenus au fisc, le bouclier fiscal est le symbole par excellence du sarkozysme en matière économique et sociale. Grâce à cette mesure, présentée dès le 20 juin 2007 dans le cadre du premier projet de loi du quinquennat, le nouveau président entendait donner un contenu concret à ses engagements de campagne : "travailler plus pour gagner plus", "briser le tabou de l'argent" pour créer un "choc de confiance et de croissance" et faire enfin baisser le niveau des prélèvements obligatoires en France.
Dix jours après la lourde défaite de l'UMP aux élections régionales, c'est ce totem très encombrant qui est désormais remis en cause. Les critiques n'avaient certes pas manqué, depuis trois ans. Elles venaient évidemment de la gauche, mais aussi de voix de moins en moins isolées à droite : dès 2007, le centriste Pierre Méhaignerie ou l'UMP Charles de Courson s'étaient inquiétés ; en 2008, les sénateurs Jean Arthuis et Philippe Marini, relayés par le président (socialiste) de la commission des finances à l'Assemblée, Didier Migaud, avaient proposé d'aménager ou de suspendre le dispositif ; en 2009, l'ancien premier ministre Edouard Balladur et le président de la Cour des comptes Phillipe Séguin s'étaient joint à eux. A chaque fois, le président de la République avait sèchement rappelé son engagement cardinal : je ne serai pas le président des hausses d'impôt.

Désormais, la bronca tourne à la fronde, conduite par les caciques : le président du groupe UMP du Sénat, Gérard Longuet, estime que l'on ne peut plus éluder la question de "recettes nouvelles" et de leur équitable répartition ; Jean-François Copé, son homologue de l'Assemblée - et inventeur du bouclier fiscal en 2006 - admet que sa "religion n'est pas totalement définitive sur le sujet". Et, pour faire bon poids, l'ancien premier ministre Alain Juppé ajoute : "Ça ne me choquerait pas qu'on demande aux très riches de faire un effort de solidarité supplémentaire vis-à-vis de ceux qui souffrent dans la crise."

Tout est dit : pour faire face à la crise économique et à l'ampleur alarmante des déficits publics, l'Etat ne pourra se contenter de limiter ses dépenses ; il devra également, d'une manière ou d'une autre, augmenter ses recettes, donc les impôts et prélèvements. Pour bon nombre de responsables de la majorité, il apparaît politiquement impensable d'exonérer les plus riches (les quelque 19 000 bénéficiaires, en 2008, du bouclier fiscal) de cet effort supplémentaire. Bref, ce qui était souhaitable en 2007, dans la perspective d'une croissance vigoureuse, est devenu indéfendable.

Pour Nicolas Sarkozy, qui recevait ce 31 mars les parlementaires de la majorité, le choix est crucial. Soit il refuse de céder à la pression et maintient son cap envers et contre tous, au nom de ses promesses initiales. Soit il y cède et c'est alors sa parole et son autorité qui sont dangereusement fragilisées. On espère que, au courage de l'entêtement, le chef de l'Etat saura opposer celui de la lucidité. Pour lui-même et pour le pays.

Bouclier fiscal : Sarkozy ne peut pas céder maintenant

Nicolas Sarkozy peut-il céder à sa majorité qui lui demande de renoncer au "bouclier fiscal" ? La réponse est non. Du moins pas aujourd'hui. Pas sans prendre le temps d'habiller soigneusement une telle décision pour qu'elle n'apparaisse pas comme une capitulation en rase campagne.

Depuis l'adoption en juillet 2007 de cette mesure – grâce à laquelle aucun contribuable ne doit verser plus de la moitié de ses revenus au fisc –, les critiques n'ont pas manqué, à gauche évidemment mais aussi à droite.
Avec la crise économique et la hausse record des déficits publics, elles se sont multipliées sur la base d'un constat simple : pour redresser ses comptes, l'Etat ne pourra pas se contenter de réduire ses dépenses, il devra également augmenter ses recettes, c'est-à-dire les impôts et les prélèvements sociaux. Et, à ce moment-là, comment imaginer d'exonérer les Français les plus riches de cet effort supplémentaire ?

SYMBOLE DU QUINQUENNAT

Dix jours après la lourde défaite de la majorité aux régionales, ces interrogations ont pris l'allure d'une fronde. Gérard Longuet, président du groupe UMP au Sénat, Jean-François Copé, son homologue à l'Assemblée, Alain Juppé, l'ancien premier ministre, et bien d'autres réclament désormais des aménagements ou mieux une suspension de cet avantage accordé à quelque 19 000 contribuables les plus fortunés.

Pour le chef de l'Etat, c'est inacceptable. Le bouclier fiscal est, en effet, le symbole par excellence de son quinquennat, la traduction dans la réalité de ses engagements de sa campagne : "travailler plus pour gagner plus", "briser le tabou de l'argent" et créer ainsi un "choc de confiance et de croissance" capable de remettre en mouvement l'économie et la société française.

Y renoncer aurait pour conséquence immédiate d'affaiblir dangereusement sa parole et son autorité. Cela ferait d'abord la démonstration qu'il ne tient décidément pas ses promesses. Quelques jours seulement après l'enterrement de la taxe carbone, cela aurait un effet encore plus dévastateur dans l'opinion.

Ce serait ensuite, en totale contradiction avec la logique présidentielle de la Ve République, admettre qu'il se laisse dicter sa conduite par les parlementaires et, en particulier, par quelques candidats à sa succession. Inacceptable.

Il reste que Nicolas Sarkozy ne pourra pas s'entêter éternellement contre la réalité calamiteuse des comptes de l'Etat. Le plus vraisemblable est qu'il prendra le temps de proposer une réforme plus vaste de la fiscalité, de nature à masquer la réalité de son renoncement.
Gérard Courtois

Egalité des chances, égalité des places

Le sentiment d'injustice est de retour ,

avec une virulence qui rappelle les années 70 ou encore la campagne présidentielle de 1995. C'est évidemment la crise importée des Etats-Unis et de Grande-Bretagne qui en est à l'origine, avec son cortège de souffrances : chômage, précarité, niveau de vie - et avec sa traduction politique déjà bien visible dès le premier tour des élections régionales. La question sociale va donc de nouveau s'imposer impérieusement dans le débat français. Elle le fait cependant en des termes différents de ceux qui se posaient il y a une génération. D'où l'intérêt particulier, à la fois intellectuel, social et politique, du petit livre que publie le sociologue François Dubet sous le titre « Les places et les chances » (1). Prenant le contrepied des idées à la mode, ilpart en effet en guerre contre l'idéologie dominante de l'égalité des chances pour prôner au contraire ce qu'il appelle l'égalité des places. Face au modèle social-libéral, il plaide en somme pour un modèle social-démocrate rénové. Sa thèse est stimulante et dérangeante plus que convaincante.

Son point fort est de démontrer de façon lumineuse les limites pratiques de l'égalité des chances. Il est vrai qu'effectivement depuis une dizaine d'années elle marque le pas dans notre pays. Si François Dubet reconnaît les efforts déployés pour lutter contre les discriminations de toute sorte envers les minorités, il n'a pas de mal à prouver que le système scolaire échoue à promouvoir l'ascension sociale. Il admet certes que des trajectoires individuelles peuvent réussir, que des symboles positifs existent, mais il établit clairement que, globalement, le système scolaire reproduit le système social sans le modifier. La méritocratie républicaine s'enlise, les grandes écoles se sont socialement refermées, l'accès aux diplômes supérieurs n'a pas permis de promotions significatives des enfants d'ouvriers, a fortiori d'immigrés.

Il préconise donc l'égalité des places,

c'est-à-dire la réduction des inégalités entre les classes ou les couches sociales. Il reconnaît d'ailleurs que ce n'est pas une tâche facile : la gauche s'attache plus à défendre les positions acquises des salariés les mieux intégrés que celles des plus précaires ou des plus vulnérables. Il prend modèle sur le système scandinave pour proposer davantage d'égalité collective plutôt que des prouesses individuelles. Il sous-estime au passage ce qui est fait en France (RSA, boursiers, aides individuelles aux élèves en difficulté). C'est cependant sa recette principale - alourdissement de la fiscalité sur les revenus et sur les patrimoines - qui apparaît bien vétuste pour une tentative de modernisation audacieuse : les dépenses publiques représentent déjà 55 % du PNB et c'est plutôt leur utilisation que leur masse qu'il faudrait rénover.

President Obama and President Sarkozy at the White House

La Licra contre Zemmour : révisez vos maths ! par Jean-Michel Claverie

Ce n'est pas tous les jours qu'être un peu "matheux" peut aider à défendre la liberté d'expression. Tiens, on va aider Zemmour, même s'il n'est pas toujours sympathique, à se dépêtrer de la Licra qui décidément tire sur tout ce qui bouge, des pigistes du Figaro aux humoristes anarchistes (on se souvient du procès contre Siné).
M. Zemmour donc, se retrouve condamné par toutes les bonnes consciences pour avoir proféré ces paroles sacrilèges : "la plupart des trafiquants sont noirs et arabes".

Mon conseil à Zemmour est de prendre comme avocat un prof de math (d'abord ils sont moins chers) qui seul pourra irréfutablement démontrer à la cour que ses propos ne constituent pas une attaque raciste. Car ce qui est condamnable, ce n'est pas de constater statistiquement que "la plupart des trafiquants sont noirs et arabes", mais de prétendre en déduire, comme le font ses accusateurs, que "la plupart des Noirs et des Arabes sont des trafiquants", un propos qui, lui, tombe clairement sous le coup de la loi.

Or, comme l'a démontré le peu médiatique Thomas Bayes, un pasteur et mathématicien qui vécut à Londres dans les années 1750, le premier énoncé n'implique absolument pas l'autre, loin s'en faut. Dans le cours que je donne chaque année à mes étudiants, je leur montre, en utilisant le fameux théorème de Bayes, que la proportion (techniquement la "probabilité conditionnelle") des émigrés parmi les délinquants peut largement dépasser 50 % (propos de Zemmour) sans que la proportion des délinquants parmi les émigrés (le propos raciste) soit beaucoup plus élevée qu'elle ne l'est parmi la population des Français "de souche", chère à Gérard Longuet. Et si l'on introduit, en plus, le fait avéré que le taux de délinquance est plus fort parmi les tranches de population à bas revenus, on peut même trouver des situations où les émigrés sont simplement plus vertueux que les franchouillards, dans toutes les tranches !

La formule (de Bayes) qui relaxe immédiatement Zemmour, la voici : p(trafiquants?émigrés)=p(émigrés?trafiquants)x p(trafiquants)/p(émigrés)

A = B x C/ D
Application numérique : avec B=1/2, C=1/10 000 et D = 1/10,


La proportion des trafiquants parmi les émigrés est de 1/2 000 ! Pas de quoi justifier de renvoyer chez eux les 1 999 autres qui ne font rien de répréhensible. Une autre chose que montre ce calcul, c'est l'influence terriblement négative que peut avoir une infime fraction de délinquants sur la perception de la minorité dont ils sont issus. Pour garder votre souplesse d'esprit, pratiquez le "retournement bayésien" une fois pas jour !

Jean-Michel Claverie est directeur du Structural & Genomic Information Lab et professeur de médecine génomique et de bioinformatique à l'University of Mediterranee School of Medecine.

Un rapport souligne les dysfonctionnements des hôpitaux de Paris

En plein débat sur la réorganisation des Hôpitaux de Paris, un rapport de la chambre régionale des comptes d'Ile-de-France vient critiquer la gestion de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris. Alors que le plan, suspendu pour le moment, prévoit la suppression de 3 000 à 4 000 postes sur 91 000 et le regroupement de certains établissements, le rapport pointe justement un sureffectif dans les hôpitaux parisiens et de graves difficultés dans l'organisation des soins.
Datant du 18 février, mais rendu public le 28 mars, le rapport estime que la situation des hôpitaux de l'AP-HP est plus favorable que dans le reste de la France. Ainsi, par rapport à sa part d'activité de soins (9,4 % des lits), l'AP-HP dispose de plus de personnels médicaux à plein temps que les autres établissements (13,1 %). "Ainsi, contrairement au sentiment d'un manque de temps médical exprimé par différents interlocuteurs de l'AP-HP, on peut chiffrer, en 2007 à partir des ratios rapportant les lits ou journées aux équivalents temps plein médicaux (ETP), à 550 ETP l'écart entre le personnel médical de l'AP-HP et celui des CHU", note le rapport. Même chose pour les personnels non médicaux, qui selon le rapport seraient "près de 20 000 emplois à plein temps de plus" que l'effectif correspondant à sa part d'activité nationale (11,6 % des postes, contre 8,7 % d'activité).

INADÉQUATION DES MOYENS AUX BESOINS

Pour expliquer cet écart entre "le sentiment de manque" de personnel et le sureffectif à l'AP-HP s'explique, selon la chambre des comptes, par des problèmes d'organisation et de suivi de l'activité médicale. La chambre s'est particulièrement penchée sur le cas de trois hôpitaux d'Ile-de-France : Henri-Mondor, Pompidou et Bichat. Elle note que "les tableaux prévisionnels d’activité sont également peu nombreux à l’AP-HP et les tableaux de service réalisé sont inégalement produits, tout au moins dans les établissements contrôlés". Tableaux, obligatoires depuis 2003, qui permettent normalement de suivre l'activité de chaque médecin et d'organiser la permanence des soins. De plus, le rapport note que très peu de contrôles sont réalisés quant à la conformité de ces tableaux et des services effectués : "Comme dans beaucoup d’hôpitaux, les
chefs de service ne s’estiment pas en charge du contrôle du service fait."

Autre problème dans l'organisation des soins pointée par le rapport : "la prégnance des équipes du matin", qui sont beaucoup plus fournies que celles de l'après-midi, dont le temps de travail est légèrement plus long et dont "les horaires sont moins conciliables avec une vie de famille". Une disparitié qui influe sur les capacités d'accueil des hôpitaux. Les écarts dans le nombre de personnels présents varie aussi beaucoup en fonction de plannings très fluctuants. "Ils présentent, en cours de semaine, de fortes variations du nombre de personnels soignants", remarque le rapport. Dans certains services, le nombre de personnels présents peut varier du simple au double d'un jour à l'autre. "Faute de réflexion institutionnelle sur les besoins en personnels soignants des services, il est extrêmement difficile de se prononcer sur l'adéquation des effectifs à l'activité", regrette la chambre des comptes.

Plus qu'une charge contre les personnels, le rapport note que, de manière générale, les moyens de l'AP-HP n'ont pas été correctement déployés en fonction de ses besoins. "Les différentes ressources, qu’elles soient humaines ou médico-techniques, sont encore réparties sur des bases influencées par le passé que les réformes récentes", estime-t-il.
Le Monde.fr

Les Etats sont déterminés à taxer les banques, mais chacun à sa façon

Taxer les banques pour épargner au contribuable le coût d'une future crise : le principe devait être entériné, mercredi 31 mars, par le gouvernement allemand. La ministre de l'économie et des finances, Christine Lagarde, était l'invitée exceptionnelle de ce conseil des ministres, signe de la volonté de Paris et Berlin d'aplanir leurs différends sur la gestion de la crise grecque et l'écart de compétitivité franco-allemand.
L'idée d'une taxation des établissements financiers fait désormais consensus au niveau international. Des Etats-Unis à l'Europe, tous les grands pays ont commencé à exposer leurs idées, devançant le rapport que le Fonds monétaire international (FMI) doit remettre en avril au G20 sur ce sujet.

Mais les projets sont, dans leur conception et leurs objectifs, souvent très différents. Le directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, a mis en garde, mardi, contre des propositions "sinon totalement, du moins partiellement incompatibles entre elles" et plaidé pour une "solution globale".

Le plan allemand. La réflexion est bien engagée en Allemagne, où l'Etat a mis beaucoup d'argent sur la table pour soutenir des banques, durement ébranlées par la crise. La proposition du ministre des finances, Wolfgang Schäuble, censée être convertie en projet de loi d'ici à l'été, prévoit la création d'une taxe qui viendrait abonder un fonds dit de "restructuration", destiné à rester en dehors du budget fédéral.

Ses ressources seraient mises à disposition en cas de nouvelle crise bancaire. Tous les établissements seraient soumis à cette contribution, qui permettrait de collecter près de 1,2 milliard d'euros par an. L'ampleur du prélèvement dépendra toutefois de la taille des banques et du risque qu'elles font courir au système.

Le plan comprend un autre volet visant à organiser, en douceur, le "démantèlement" d'une banque en grandes difficultés. La Commission européenne comme le FMI demandent en effet aux Etats d'adopter des testaments bancaires. Il s'agit d'une rupture avec le principe du "too big to fail" (trop gros pour faire faillite), qui, sauf dans le cas de Lehman Brothers, a toujours prévalu.

Selon M. Schäuble, le plan allemand a vocation à s'étendre, en concertation avec Paris, à l'échelle européenne. "L'idée d'une taxation internationale est un projet concret qui rassemble la France et l'Allemagne", confirme-t-on dans l'entourage de Christine Lagarde.

En France, rien n'est arbitré. "Nous sommes dans un calendrier plus détendu, toutes les options restent ouvertes", poursuit-on à Bercy, où l'on rappelle à l'envi que l'aide aux banques, pendant la crise, n'a pas servi à les sauver mais à soutenir l'offre de crédits à l'économie. Ce soutien n'a finalement pas coûté à l'Etat, mais lui a rapporté 2 milliards d'euros grâce aux intérêts des prêts.

En clair, la France devrait attendre le rapport du FMI en avril, et les conclusions de la mission confiée à l'ex-président du Conseil national de la comptabilité Jean-François Lepetit sur "la régulation des acteurs et des marchés systémiques", pour forger sa position.

Ni le périmètre de la taxe ni son assiette (banques, assureurs, fonds, etc) ne sont encore établis. Mais l'idée est de bâtir un dispositif de prévention des crises, en taxant les activités les plus risquées, donc les plus dangereuses pour la stabilité du système bancaire.

S'agissant de l'affectation de la taxe –directement au budget de l'Etat ou à un fonds dédié, comme le ferait l'Allemagne–, là encore, la question n'est pas tranchée. M. Lepetit et le cabinet de Mme Lagarde redoutent que la création d'un fonds spécifique n'encourage l'aléa moral, en donnant aux banques le sentiment d'une protection inconditionnelle en cas de crise. Or, martèle-t-on en haut lieu, "l'Etat n'est pas le réassureur des banques".

L'option budget de l'Etat, par ailleurs opportune en période de disette budgétaire, pourrait donc être préférée.

Si toutefois un fonds devait être créé, il serait conçu comme un fonds de résolution des crises, petit et manœuvrable. Il servirait notamment à conduire des opérations de découpe des banques en difficultés.
Anne Michel et Marie de Vergès

La crise, moteur du capitalisme.

L'histoire du capitalisme se confond avec l'histoire de ses crises. Sur la période 1970-2007, on ne compte pas moins de 124 crises bancaires, 208 crises de change et 63 crises de la dette souveraine ! Même si la plupart d'entre elles restent limitées à des pays périphériques, cela n'en demeure pas moins un constat très impressionnant.

Devant de tels chiffres, l'idée d'une autorégulation par les marchés apparaît comme insuffisante. Pour comprendre comment le capitalisme gère ses excès, il semble que l'hypothèse alternative d'une régulation par les crises ne manque pas d'arguments. Pour s'en convaincre, il n'est que de considérer ce qu'on nomme les "grandes crises" ou crises structurelles. Parce qu'elles sont des périodes de profonde mutation, leur rôle dans l'évolution historique du capitalisme est crucial. La plus célèbre d'entre elles est la Grande Dépression (1929-1939).

Il s'agit de crises profondes, non seulement quantitativement par leur intensité, mais également qualitativement par l'ampleur des transformations institutionnelles qu'elles initient. Ces crises ont pour origine l'épuisement d'un modèle de croissance qui ne réussit plus à contenir ses déséquilibres. Pour repartir, le système économique a besoin de nouvelles règles du jeu, de nouvelles institutions, de nouveaux compromis. Tel est l'enjeu des grandes crises : réinventer un nouveau modèle de croissance.

Ainsi, au cours de la période 1929-1945, le capitalisme a-t-il dû se transformer en proposant un projet original, fondé non plus sur la concurrence à tout-va, mais sur une adéquation permanente, centrée sur la grande entreprise industrielle, entre augmentations du salaire réel, gains de productivité et croissance. Pour désigner ce modèle qui émerge au sortir de la seconde guerre mondiale, on parle de "régulation fordienne", par référence à Henry Ford, qui avait compris que, pour pouvoir vendre ses automobiles et faire des profits, ses ouvriers devaient être bien payés.

Après avoir conduit à une exceptionnelle prospérité, connue sous le nom des "trente glorieuses" (1945-1973), le régime fordien entre, à son tour, en crise. C'est la stagflation des années 1970 (1973-1982), qui mêle d'une manière inédite inflation et croissance faible. Si cette grande crise diffère de celle de 1929, sa signification reste identique : la fin d'une époque et l'avènement d'une nouvelle forme de capitalisme. En conséquence, après la stagflation, au début des années 1980, émerge le capitalisme financiarisé, encore appelé "capitalisme patrimonial" ou "capitalisme néolibéral".

La rupture avec le régime antérieur est prodigieuse, particulièrement par l'ampleur que connaît la dérégulation financière. On assiste au démantèlement progressif du cadre réglementaire qui, fait notable, avait conduit à l'élimination de toute crise bancaire durant la période fordienne, entre 1945 et 1970. Politiquement, c'est l'arrivée au pouvoir des gouvernements libéraux de Margaret Thatcher au Royaume-Uni (mai 1979) et de Ronald Reagan aux Etats-Unis (janvier 1981) qui marque le début de cette nouvelle phase. Mais, du point de vue de la régulation économique, l'origine de ce nouveau capitalisme est à trouver dans la transformation révolutionnaire que connaît la politique monétaire. Désormais, l'inflation devient la cible prioritaire.

Pour la combattre, Paul Volcker mis à la tête de la Réserve fédérale américaine (Fed) en 1979 procède à une augmentation étonnante du taux d'intérêt à court terme, jusqu'à atteindre 20 % en juin 1981. Cette politique engendre une mutation complète et définitive du rapport de forces entre débiteurs et créanciers au profit de ces derniers. Désormais, les possesseurs d'actifs financiers ne risquent plus de voir leur rentabilité rongée par l'inflation. Ils ont le champ libre. C'est le début d'une période de vingt-cinq ans qui a pour caractéristique centrale de placer la finance de marché au centre de la régulation, bien au-delà de la seule question technique du financement. Pour le dire simplement, ce sont les marchés financiers qui contrôlent désormais les droits de propriété, ce qu'on n'avait jamais connu auparavant.

Dans les capitalismes antérieurs, la propriété du capital s'exerçait sous la forme du contrôle majoritaire au sein de structures spécifiques hors marché, à l'exemple de la Hausbank allemande ("banque maison") ou du contrôle familial. Le représentant emblématique du capitalisme patrimonial est l'investisseur institutionnel. Il est porteur d'une nouvelle gouvernance des entreprises, centrée sur la "valeur actionnariale".

La crise qui débute en août 2007 doit, selon nous, être comprise comme marquant l'arrivée aux limites du capitalisme patrimonial et son entrée en grande crise. Comme les capitalismes précédents, il succombe lorsque le principe même de son dynamisme se retourne contre lui pour devenir source de déséquilibres. En l'occurrence, c'est la question financière qui s'avère déterminante. Le capitalisme patrimonial ne réussit plus à contrôler l'extension de son secteur financier, dont le poids devient handicapant à partir d'un certain seuil.

Pour le voir, considérons l'endettement total des Etats-Unis, tous secteurs confondus. Entre 1952 et 1981, durant la période fordiste, sa croissance reste modérée : de 126 % à 168 % du PNB. Pendant la phase néolibérale, ce même ratio explose, pour atteindre 349 % en 2008 ! De même pour le total des actifs financiers des Etats-Unis. Il reste stable de 1952 à 1981, entre 4 et 5 fois le PNB, pour se mettre ensuite à croître jusqu'à plus de 10 fois le PNB en 2007. Au niveau mondial, l'observation est identique : le total des actifs financiers, qui vaut 110 % du PNB mondial en 1980, atteint 346 % en 2006.

Si, dans un premier temps, l'expansion financière a participé activement à la formation de la croissance néolibérale, il apparaît qu'aujourd'hui elle est devenue disproportionnée. Pensons que ce secteur s'approprie 40 % des profits totaux américains en 2007, contre 10 % en 1980, alors qu'il ne représente que 5 % de l'emploi salarié. La démesure est extrême. Elle pèse sur l'ensemble de l'économie par de nombreux canaux. D'abord au travers des exigences de rentabilité. La mondialisation financière des droits de propriété a donné aux actionnaires relayés par les investisseurs institutionnels une puissance inédite. Elle a permis l'émergence d'une norme de rendement aux alentours de 15 % pour les sociétés cotées. Cette exigence de rentabilité est intenable à long terme. Trop peu d'activités industrielles offrent des rendements aussi élevés.


En conséquence, faute d'emplois rentables, sous la pression de la valeur actionnariale, les entreprises ont été amenées à rendre le capital aux actionnaires sous forme de dividendes ou de rachats d'actions. On sait qu'aux Etats-Unis l'émission nette d'actions est négative depuis une quinzaine d'années. Autrement dit, le marché boursier américain finance les actionnaires et non l'inverse. Parce qu'elle pèse sur la croissance des pays développés et nourrit les stratégies de délocalisation, cette rentabilité exigée conduit à une baisse importante de l'emploi manufacturier en Europe et aux Etats-Unis.


La deuxième conséquence se déduit immédiatement : une forte pression sur les salaires. Elle découle d'un rapport de forces très inégal entre une représentation unifiée des actionnaires et une extrême fragmentation des organisations syndicales. En conséquence, alors que, dans le régime fordiste, une part importante des gains de productivité revenait aux salaires, ce qui nourrissait le dynamisme de la demande, ce n'est plus vrai dans le capitalisme patrimonial. Le salaire réel stagne, ce qui constitue un frein permanent à la croissance économique. D'où le recours à l'endettement des ménages avec les effets que l'on connaît.

Troisième conséquence : une montée massive des inégalités. En effet, une caractéristique essentielle de la nouvelle gouvernance d'entreprise est d'avoir fait basculer le haut management du côté des propriétaires. C'est toute la question des nouvelles règles de rémunération visant à aligner les intérêts des dirigeants sur ceux des actionnaires. Il s'en est suivi un éclatement des inégalités dans les pays développés. L'écart entre le salaire moyen des ouvriers et le salaire des dirigeants est passé de 40 à 500 aux Etats-Unis.

Encore plus impressionnant : si l'on considère les 90 % des salariés les moins riches et qu'on compare leur revenu moyen au revenu moyen des 1 % les plus riches, alors que, sur la période 1933-1973, un certain rattrapage est observé, sur la période 1973-2006 (33 ans), on constate qu'en termes réels le revenu moyen des premiers décroît légèrement quand il est multiplié par 3,2 pour les seconds. De telles inégalités ont des effets politiques autant qu'économiques. A terme, c'est l'unité du corps social qui se trouve mise en péril.

Il est frappant de constater à quel point les marchés se sont montrés incapables d'infléchir ou même simplement de modérer ces déséquilibres. C'est une leçon qu'il faut garder à l'esprit. Ainsi, selon la théorie de l'efficience financière, la concurrence aurait-elle dû accroître le bien-être des consommateurs, en l'occurrence les emprunteurs hypothécaires, en leur fournissant des produits de bonne qualité, capables de gérer les risques que comporte l'accession à la propriété, à des coûts faibles.

C'est au nom d'un tel résultat qu'a été justifiée la libéralisation des marchés. Et non pour accroître les bonus bancaires. Il n'en a rien été. De même, attirés par de fortes rémunérations, un grand nombre de nos ingénieurs les mieux formés migrent vers le secteur financier. Est-ce là une situation satisfaisante lorsqu'on songe à tous les défis techniques que nous aurons à affronter ? L'entrée en crise correspond au moment où ces déséquilibres prennent une ampleur telle que la cohérence d'ensemble se trouve remise en cause. La question d'une nouvelle régulation est alors posée.

Cependant, la crise n'offre pas de solution toute prête. Loin de là, dans un premier temps, elle ne fait qu'aggraver les problèmes car elle accentue les tendances propres au capitalisme patrimonial. Prenons la question financière, dont on a vu qu'elle joue un rôle crucial. Durant les quinze dernières années, le secteur bancaire a évolué vers un haut degré de concentration autour d'un tout petit nombre de très grandes banques. Cette évolution est problématique, parce qu'elle produit des géants qui, en raison de leur taille, sont porteurs d'un risque systémique.

En conséquence, les autorités publiques se trouvent de facto contraintes de leur venir en aide en cas de difficultés. Tous les économistes sont d'accord pour juger qu'une telle situation n'est pas acceptable. Elle conduit ces acteurs à prendre des risques excessifs, puisque les profits leur reviennent alors que les pertes sont socialisées. Or la crise et les mesures d'urgence prises par les autorités publiques ont encore accentué la concentration du secteur bancaire. Bear Stearns, Lehman Brothers, Merrill Lynch, Wachovia et Washington Mutual ayant disparu, les banques restantes sont devenues encore plus importantes.

Autrement dit, les banques déjà trop grandes pour faire faillite sont devenues encore plus grandes ! Dans ces conditions, démanteler ces conglomérats énormes, par exemple en séparant banque d'investissement et banque de dépôts, devrait être un objectif prioritaire. Une banque trop grande pour faire faillite devrait également être trop grande pour exister. Mais une telle politique suppose une mutation en profondeur des esprits. Pour l'instant, elle semble bien éloignée. Globalement, le G20 continue à penser dans le cadre du capitalisme néolibéral. Cependant si notre diagnostic est exact, la persistance de la crise nécessitera un changement de paradigme.

Les difficultés à venir sont de deux ordres : non seulement le maintien d'un chômage de masse dans les pays développés, mais également le développement d'importantes difficultés monétaires. Notons que jusqu'à maintenant, la crise a été principalement de nature financière et bancaire. Les autorités publiques ont réussi à la contrôler grâce au maniement vigoureux de l'arme monétaire. Pour le dire simplement, elles ont noyé les difficultés sous les liquidités avec l'aide active des banques centrales.

Cependant, aujourd'hui, la masse des liquidités ainsi produites associée à la croissance vertigineuse des dettes publiques fait entrer la crise dans un nouveau stade où la question de la valeur des monnaies arrive sur le devant de la scène. En la matière, les lieux d'une possible rupture ne manquent pas : quid de l'hégémonie du dollar, de l'unité de la zone euro, de la parité du yuan ou de la faiblesse de la livre sterling ? C'est la cohésion internationale du néolibéralisme qui se trouverait alors directement questionnée.

Les forces d'ébranlement apparues au grand jour en août 2007 n'ont pas encore fini de faire sentir leurs effets dévastateurs.

Le rapport explosif sur les Hôpitaux de Paris

Personnel en surnombre, absentéisme record… La chambre des comptes d’Ile-de-France jette un pavé dans la mare au moment où la réforme de ces établissements de soin est en pleine négociation.
Voilà un document qui ne manquera pas de relancer la polémique sur la restructuration de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Sous la pression des personnels et des médecins, qui ont mené une guérilla ces dernières semaines (séquestration de directeurs d’hôpitaux, lobbying auprès des députés…), le directeur de l’AP-HP , Benoît Leclercq, a officiellement suspendu son plan de réorganisation dans l’attente du résultat des discussions avec les syndicats.
Or un rapport explosif de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France, programmé depuis 2007, relance la question de la réforme des 37 établissements de l’ AP-HP .

Un inventaire de 55 pages

Non seulement, rappellent les magistrats qui ont eu accès à des données hautement confidentielles, la situation de ces hôpitaux, qui emploient près de 91 000 personnes est bien plus favorable que celle des autres centres hospitaliers universitaires, mais c’est un véritable inventaire des privilèges qui se dessine au fil des 55 pages : jours de RTT, congés maladie records, autonomie totale des praticiens hospitaliers, chefs de service en tête, boudant massivement ces tableaux de service qui permettent de savoir qui travaille. Personne ne semble vraiment piloter ce vaste navire, les effectifs présents l’après-midi sont parfois cinq fois inférieurs à ceux du matin, des équipements essentiels (IRM, scanners) restent trop peu utilisés, et, en moyenne, on procède à 1,7 intervention par jour dans les blocs opératoires, ce qui est très peu.
Signe de la gêne occasionnée par ce document, plusieurs médecins contactés n’ont pas souhaité nous répondre.
De son côté, le directeur de l’AP-HP estime que « ce rapport démontre que nous avons encore de grandes marges d’amélioration en matière d’organisation ».

La situation financière des hôpitaux s’est « significativement améliorée » depuis 2007, ce qui permet d’« espérer un retour à l’équilibre en 2012 », a estimé hier la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, à l’Assemblée nationale.


Des privilèges exorbitants

Voici les points clés du rapport de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France*

1 Médecins : 500 postes de plus qu’ailleurs
Alors que l’AP-HP représente 9,4 % des lits et places des centres hospitaliers (CH) et universitaires (CHU), elle « emploie 13,1 % » des personnels médicaux à plein temps.

« L’effectif en la matière de l’AP-HP est donc supérieur de 44 % à celui des autres hôpitaux pour réaliser la même part d’activité. » Comparé à l’ensemble des CHU, l’AP-HP, à activité comparable, dispose de « 550 emplois à temps plein » en plus (NDLR : sur un peu plus de 7 200 postes).
Par ailleurs, « le coût du personnel médical est très variable d’un établissement à l’autre : « de 34 693 € par lit à Mondor à 55 188 € à l’HEGP (Pompidou) », qui « ont des structures d’activité comparables ».

2 Des agents trop nombreux
Alors que l’AP-HP représente 8,7 % des lits dits de court séjour en France, elle emploie « 11,6 % » des personnels non médicaux à plein temps, soit « près de 20 000 emplois à plein temps de plus » que l’effectif correspondant à « la part d’activité de l’AP-HP ». Si on compare « aux seuls CHU », l’écart est encore de « 9 % pour les soignants et de 10 % pour les personnels administratifs, dont 40 % pour les personnels de direction ».3 La bombe du compte épargne temps
A l’AP-HP, entre 2002 et 2006, les praticiens hospitaliers ont accumulé en moyenne 47,9 jours sur leur compte épargne-temps, avec de grandes disparités d’un établissement à l’autre (27 jours à Bichat, 61 à Pompidou).
Dans deux hôpitaux sur trois, il n’y a même pas « de suivi des jours de RTT pris ». « La gestion du temps médical demeure contraire à la réglementation ». Les médecins sont « libres d’organiser leur temps de travail comme ils l’entendent », notamment entre soins, recherche et enseignement. Or, « aucun des trois établissements contrôlés (Bichat, Henri-Mondor et Pompidou) n’a été en mesure de produire des tableaux généraux d’activité », en dépit de la demande expresse de la direction générale en février 2008.

4 Des hôpitaux désertés l’après-midi
Sans personnel soignant, impossible de garder des lits ouverts. Or, entre le matin et l’après-midi, à Henri-Mondor par exemple, les effectifs de soignants sont parfois divisés par cinq. A Pompidou, les effectifs chutent, passant de plus de 1 052 à 77 personnes. Les magistrats soulignent la faible attractivité des postes de l’après-midi, « moins conciliables avec une vie de famille ».

5 Des plannings en yoyo
D’un jour à l’autre, les plannings varient fortement : à Henri-Mondor, (Créteil, Val-de-Marne) en médecine interne, fin 2008, le nombre de soignants a varié selon les jours de 8 à 4, indépendamment de l’activité. Et en neurochirurgie, le matin, l’effectif varie de « 8 à 14 soignants, en semaine ». A l’hôpital européen Georges-Pompidou, le nombre d’infirmiers varie de « 25 %, sans relation avec l’activité ».

6 Un absentéisme élevé

En plus des 18 jours de RTT décidés au niveau national, les agents de l’AP-HP ont 2 à 6 jours supplémentaires. « Ces jours complémentaires » n’ont « pas réduit l’absentéisme », comparable aux autres CHU. « Un agent non médical est absent 22,25 jours, soit plus d’un mois par an. » * Rapport d’observations définitives de février 2010 sur l’« Organisation des soins à l’AP-HP », exercices 2004 et suivants.


« On se retrouve à un infirmier pour 14 malades »

«J’ai parfois l’impression qu’on veut nous réduire à la fonction de pousse-seringue… » Vincent Lanza, 45 ans, ne cache pas son amertume. Infirmier depuis vingt ans, il manifestait hier, avec Sophie et Séverine, ses deux collègues de l’hôpital Tenon (Paris XX e ), pour défendre les retraites de la profession.
« Aujourd’hui, déplore-t-il, on ne sait pas faire aussi bien qu’il y a vingt ans, alors que les moyens techniques ont progressé. » Même constat de la part de Sophie, 38 ans, dont dix-huit en tant qu’infirmière spécialisée en gériatrie : « Au fil des ans, on nous a fait perdre la logique du travailler ensemble, de la solidarité. »
La faute, selon ces professionnels, aux réorganisations mises en oeuvre à l’hôpital. « Notre pôle (NDLR : entité créée par la loi Bachelot de 2005) englobe la médecine interne, la neurologie, la psychiatrie, la gériatrie et les urgences. Cela fait plus d’une centaine de patients », souligne Sophie. « Je change souvent de service et, à chaque fois, de façon de travailler », soupire Séverine, 25 ans. Conséquence : « Cela a un impact sur la qualité des soins : les pathologies ne sont pas les mêmes, les médecins sont différents, on ne connaît pas les patients. C’est très stressant », souligne Sophie. « On perd le sens de notre métier », se désole Vincent.
Quant à la réforme en cours de l’Assistance publique, elle se traduira par le regroupement de leur hôpital, Tenon, avec trois autres hôpitaux parisiens (Saint-Antoine, Trousseau, Rothschild). « Le risque, c’est que l’on se retrouve à être envoyé dans ces différents établissements », s’inquiète Séverine. Autre point noir : les 35 heures. Les hôpitaux n’ont pas assez embauché pour contrebalancer les effets de la réduction du temps de travail. « On n’arrive pas à prendre nos jours de repos, ni nos vacances, on est en permanence à flux tendu. Certaines journées, on peut se retrouver à être un infirmier à gérer 14 malades, alors que la règle veut qu’il y en ait 1 pour 2 », explique Vincent.
« Et puis, renchérit Séverine, l’administration essaie de faire des économies sur tout. Le matériel médical, comme les masques ou les garrots sont de mauvaise qualité. Mais au final, c’est idiot : on est obligé d’en utiliser deux au lieu d’un seul »… Ces trois blouses blanches restent malgré tout passionnées par leur métier. Mais « la pénurie de main-d’oeuvre est logique. Rien n’est fait pour attirer du monde », explique Vincent qui, au bout de vingt ans de carrière, touche 2 200 € net.

Bernard Tapie pourrait solder vendredi ses comptes avec la justice française

Bernard Tapie pourrait solder vendredi ses comptes avec la justice française, le tribunal correctionnel de Paris devant se prononcer sur les dernières poursuites engagées contre lui, pour "banqueroute".

A l'audience du 10 février, le ministère public avait requis la relaxe de M. Tapie, poursuivi pour avoir continué à renflouer par l'emprunt deux de ses sociétés, GBT et FIBT, qui se trouvaient en état de cessation de paiement et sans grande chance de redressement rapide.

Initialement prévu en 2005, ce procès avait été renvoyé à une dizaine de reprises. Le tribunal attendait que soient purgés d'autres dossiers concernant l'homme d'affaires, dont une décision rendue par le tribunal de commerce de Paris.

Le 7 décembre, ce dernier a en effet ordonné la révision, c'est-à-dire l'annulation, de la liquidation des deux holdings du comédien: Financière et Immobilière Bernard Tapie (FIBT) et Groupe Bernard Tapie (GBT).

La FIBT détenait le patrimoine industriel et financier de M. Tapie et la GBT coiffait ses actifs personnels. Les deux holdings avaient été placées en liquidation judiciaire en 1994.

La révision prononcée en décembre est intervenue à la suite de la sentence arbitrale rendue en juillet 2008 dans le litige Adidas. Le Crédit Lyonnais a alors été condamné pour avoir floué Bernard Tapie d'une plus-value importante réalisée par la banque lors de la revente d'Adidas en 1993.

Le Consortium de réalisation, la structure publique chargée de gérer le passif du Crédit Lyonnais, a été condamné à verser aux liquidateurs de GBT une indemnité de 285 millions d'euros.

Or, ont plaidé le 10 février les avocats de Bernard Tapie, Mes Maurice Lantourne et Hervé Témime, "l'infraction de banqueroute n'est plus possible", puisque "l'élément préalable" indispensable à une banqueroute, à savoir une procédure collective (liquidation ou redressement judiciaire), n'existe plus.

Le président du tribunal Noël Miniconi avait alors calmé leurs ardeurs: "Le fait que la banqueroute n'existe plus, c'est un point (...) difficilement contestable", avait-il reconnu, mais cela "n'interdit pas d'éventuelles requalifications", en abus de confiance par exemple.

Pour le parquet, une telle requalification ne tient pourtant pas la route.

Politique économique : les régionales renforcent la crédibilité de l'opposition

Pas moins de 70 % des personnes interrogées par BVA pour « Les Echos », France Info et Absoluce considèrent « mauvaise » la politique économique du gouvernement. Un record depuis le début du quinquennat. Une majorité de sondés estiment désormais que le PS ferait « mieux » que l'équipe Fillon sur la plupart des grands dossiers du moment.
Difficiles lendemains de défaite électorale pour la droite. Après le vote sanction des régionales, la majorité doit désormais faire face à une véritable crise de confiance avec l'opinion. La politique économique du gouvernement n'a jamais été jugée aussi sévèrement par les Français depuis le début du quinquennat, révèle le baromètre mensuel BVA pour « Les Echos », France Info et Absoluce. Pas moins de 70 % des personnes sondées la considèrent aujourd'hui « mauvaise » contre 27 % à peine qui l'estime « bonne ». Un score calamiteux, proche du record établi par Dominique de Villepin au moment du CPE au printemps 2006 (74 % contre 23 %).
Un grand écart

Impopulaire depuis déjà un bon moment, la politique économique du gouvernement a subi un vrai décrochage ce mois-ci : les mauvaises opinions bondissent de 7 points, tandis que les bonnes chutent de 5 points. Un grand écart que Gaël Sliman, le directeur général adjoint de BVA impute pêle-mêle « au déni de réalité de la droite après sa défaite au premier tour des régionales, à l'absence de remaniement ministériel important et de changement de cap de la part de l'exécutif ». Les sympathisants de droite soutiennent encore majoritairement l'action de François Fillon (à 57 %), mais cet appui s'érode aussi (- 5 points).

Plus inquiétant pour la majorité et plus surprenant, l'opposition socialiste est jugée globalement plus crédible que le gouvernement pour régler les grands problèmes de l'heure. Quasiment une première depuis l'élection de Sarkozy. Les personnes interrogées par BVA estiment que le PS ferait « moins bien » que la majorité sur deux sujets seulement : la sécurité et la lutte contre les déficits publics. Et encore d'une courte tête. Sur tous les autres sujets, les Français pensent que les socialistes feraient « mieux ». C'est particulièrement net sur l'éducation, la santé et l'environnement. Un peu moins sur les retraites, le pouvoir d'achat, le chômage et la situation économique, une majorité relative de sondés considérant que le PS ferait « ni mieux ni moins bien » sur ces questions.

« Jusqu'à présent, les Français renvoyaient l'opposition socialiste et la majorité dos à dos. Ce n'est plus le cas, constate Gaël Sliman. Son succès aux régionales a donné un surcroît de crédibilité au PS, explique-t-il. Mais tout cela reste fragile », prévient-il aussitôt. « Ce n'est pas un blanc-seing. Le PS doit encore transformer l'essai. » Il en est, semble-t-il, conscient. C'est en tout cas l'état d'esprit de nombreux leaders socialistes, dont Pierre Moscovici en charge du projet (lire ci-dessous).

Seul sujet de réconfort pour la droite, le report sine die de la taxe carbone est salué par 61 % des personnes sondées par BVA (contre 33 %). Même les sympathisants de gauche l'approuvent majoritairement (54 %). Mais « c'est sur un renoncement que le gouvernement parvient à être plébiscité, corrige Gaël Sliman. Dans un tel climat de défiance généralisée et de profond mécontentement, il n'est pas assuré qu'il puisse réussir sans trop de dégâts sa réforme des retraites et traverser sans trop d'encombre le brûlant printemps qui s'annonce ».
STEPHANE DUPONT, Les Echos

La majorité aiguise ses critiques contre le "bouclier fiscal"

La majorité, de l'UMP au Nouveau Centre, redouble de virulence contre le "bouclier fiscal", dont elle questionne la pertinence au coeur de la crise et à l'orée de la réforme des retraites.
Le dispositif, qui fut l'un des engagements électoraux de Nicolas Sarkozy, limite à 50% des revenus les impôts dus par un particulier.
Nombre d'élus de la majorité plaident pour la suspension de cette mesure de la loi Tepa du 1er août 2007, vivement contestée par l'opposition et les syndicats, voire son abrogation.
Ils font notamment valoir que le consensus qu'appellent de leurs voeux Nicolas Sarkozy et François Fillon pour la réforme des retraites sera impossible sans justice fiscale.
"Je pense qu'il faut s'interroger sur ce que l'on appelle le bouclier fiscal parce que les choses ont changé, la crise est venue", a redit Alain Juppé mardi sur France Info.
"Aujourd'hui, il y a une petite minorité de très riches qui ne cessent de s'enrichir", a affirmé l'ancien Premier ministre. "Cela ne me choquerait pas qu'on demande aux très riches de faire un effort de solidarité supplémentaire vis-à-vis de ceux qui souffrent", a-t-il ajouté.
Jean Arthuis, président de la commission des finances et chef de file des centristes au Sénat, se prononce quant à lui pour la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et du bouclier fiscal et pour l'instauration d'une tranche supplémentaire dans le barème de l'impôt sur le revenu.
"Le bouclier fiscal est une mauvaise réponse au mauvais impôt qu'est l'ISF", dit-il dans une interview à paraître mercredi dans Libération.
"Actuellement, l'ISF rapporte à l'Etat trois milliards d'euros. Pour compenser cette perte, je propose que l'on crée une tranche supplémentaire dans le barème de l'impôt sur le revenu qui frapperait les contribuables les plus aisés, et une augmentation de l'imposition des plus-values", ajoute-t-il.
Le nouveau ministre du Budget, François Baroin, salue en revanche la "stabilité" du dispositif.
"C'est un bon principe d'équité fiscale", déclare-t-il dans un entretien à paraître mercredi dans Les Echos. "Laissons le dispositif fonctionner sur la durée et faisons le bilan".
"J'aime l'idée d'une stabilité fiscale sur un outil comme celui-ci", ajoute le ministre, qui "ne doute pas que ce sera un des sujets, notamment avec la majorité, au coeur du débat budgétaire".
Le secrétaire général de l'UMP, Xavier Bertrand, a lui aussi défendu une mesure qui permet selon lui d'éviter un exode fiscal pour un coût limité à quelque 500 millions d'euros par an.
"MAUVAIS IMPÔT"
Jean-François Copé, qui se prononçait jusqu'à présent contre une correction du bouclier, a jugé le débat "un peu prématuré" tout en soulignant la nécessité d'en discuter.
"Je n'ai pas une religion totalement définitive sur le sujet", a dit à la presse le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale. "C'est un élément de compétitivité important par rapport aux risques de délocalisation d'un certain nombre de fortunes en France", a-t-il cependant fait valoir.
Le président du groupe Nouveau Centre à l'Assemblée, François Sauvadet, souhaite, lui, "remettre les choses à plat" et renouvelle sa proposition d'extraire la CSG et la CRDS de ce "mauvais impôt".
Le Premier ministre a déclaré dans une interview au Journal du Dimanche que son gouvernement ne reviendrait pas sur le bouclier fiscal afin de ne pas "casser le retour de la croissance".
Lors du séminaire des parlementaires UMP, lundi à Paris, le sénateur Jean-Pierre Fourcade et le député Gilles Carrez, rapporteur général du budget à l'Assemblée, ont plaidé pour une suspension du dispositif "le temps que les finances publiques soient assainies", ont rapporté des participants.
L'ancien Premier ministre Dominique de Villepin demande pour sa part l'abrogation du bouclier fiscal - mesure instituée en 2006 sous son gouvernement avec un plafond à 60%.
Le chef de file des sénateurs UMP, Gérard Longuet, souhaite une réflexion sur la fiscalité des revenus de tous les Français dans le contexte de la crise économique.
Selon un rapport de Gilles Carrez, le dispositif a coûté 700 millions d'euros à l'Etat en 2009, un chiffre qui devrait être le même cette année. En 2008, le "bouclier" avait bénéficié à 19.000 foyers fiscaux français, selon des statistiques du ministère de l'Economie.

(Sophie Louet, Emile Picy, Jean-Baptiste Vey, Elizabeth Pineau et Nicole Dupont)

Poniatowski prône un nouveau partenariat transatlantique


Le Figaro - Le Talk A
envoyé par murphybrac. - L'info video en direct.
Invité du Talk Orange-Le Figaro Le président de la commission des affaires étrangères à l'Assemblée nationale, Axel Poniatowski, estime que les États-Unis et l'Europe ont un intérêt stratégique à coopérer ensemble.

Sarkozy et Obama déterminés à sanctionner l'Iran

A l'issue d'un entretien de plus d'une heure dans le Bureau ovale, les deux présidents ont cherché à montrer qu'ils étaient sur la même longueur d'ondes sur les dossiers internationaux, dont celui du nucléaire iranien.

«Nous nous comprenons, nous nous respectons». Dans une brève intervention devant la presse à l'issue d'un entretien bilatéral dans le Bureau ovale, Barack Obama et Nicolas Sarkozy ont cherché à afficher leur complicité en échangeant quelques plaisanteries, avant de montrer la proximité de leurs analyses sur les sujets de préoccupation mondiale. Les deux présidents, qui se sont appellés toujours par leurs prénoms, ont ensuite rejoint les appartements privés du couple Obama pour un dîner en compagnie de leurs épouses.

• Iran

Barack Obama a concédé qu'il n'y avait «pas encore» d'unanimité internationale sur des sanctions contre l'Iran. Mais le président des Etats-Unis, qui garde toujours une main tendue vers Téhéran, espère arriver à un consensus sur des sanctions à l'ONU «pendant le printemps». De son côté, Nicolas Sarkozy a assuré son homologue américain de «tout (son) soutien pour obtenir les sanctions les plus fortes au Conseil de sécurité». Pour le président français, «le temps est venu des décisions». Plus tôt, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton avait également prédit un consensus à l'ONU.

• Afghanistan

«Nous soutenons la stratégie du président Obama. Nous ne pouvons pas perdre», a déclaré le président français aux côtés de son homologue américain. «En se battant en Afghanistan, nos soldats se battent pour la sécurité dans le monde», a-t-il insisté, sans annoncer de renfort de soldats français dans ce pays comme le lui avait demandé Washington l'an dernier. Avant l'entretien le porte-parole de la Maison-Blanche, Robert Gibbs, avait précisé que le président américain ne reformulerait pas sa demande lors de cet entretien bilatéral, tout en regrettant que «les progrès soient trop lents» en Afghanistan.

• Proche-Orient

«C'est une très bonne nouvelle que les Etats-Unis s'engagent à ce point au Proche-Orient. La colonisation n'amène rien à la sécurité d'Israël», a déclaré Nicolas Sarkozy. Le président français s'est ainsi aligné sur la position de Barack Obama, alors les relations entre Israël et les Etats-Unis se tendent sur fond de plans de construction à Jérusalem. La semaine dernière, la visite de premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou à la Maison-Blanche n'avait donné lieu à aucune déclaration commune, alimentant les spéculations sur une éventuelle «humiliation» américaine à l'égard de l'homme fort d'Israël.

Outre les grands dossiers de politique internationales, Barack Obama et Nicolas Sarkozy ont également évoqué l'épineuse question des ravitailleurs et de la régulation financière, au cours de leur conférence de presse commune.

Le bouclier fiscal divise la majorité

Honni par la gauche, le bouclier fiscal trouve de plus en plus d'adversaires dans les rangs d'une majorité désorientée par sa déroute aux régionales. Nombre d'élus plaident pour la suspension de cette mesure, qui fut l'un des engagements électoraux de Nicolas Sarkozy et limite à 50 % des revenus les impôts dus par un particulier.
Rejoint dans sa critique par Dominique de Villepin ou Gérard Longuet, l'ex-premier ministre Alain Juppé a répété mardi qu'il fallait aménager cette règle qui plafonne les impôts à 50 % du revenu d'un contribuable. "Cela ne me choquerait pas qu'on demande aux très riches de faire un effort de solidarité supplémentaire vis-à-vis de ceux qui souffrent", a-t-il dit, estimant que les choses avaient "changé" depuis l'adoption du "paquet fiscal" contenant cette mesure, dans la foulée de l'élection de Nicolas Sarkozy.

Lundi, dans le huis clos du séminaire des parlementaires UMP à Paris en présence de François Fillon, le sénateur Jean-Pierre Fourcade a carrément demandé la suspension de la mesure "tant que la situation financière" du pays ne s'améliore pas, ont rapporté des participants. "Jusqu'à présent, on n'osait pas parler du bouclier fiscal. La parole s'est un peu libérée, on s'autorise à verbaliser sur ce dispositif en proposant d'autres solutions", s'est félicitée le lendemain la députée filloniste de Meurthe-et-Moselle Valérie Rosso-Debord.

UN "ARGUMENT DÉMAGOGIQUE" SELON FRANÇOIS FILLON

Même le président du groupe à l'Assemblée, Jean-François Copé, jusqu'ici farouche défenseur de la mesure sarkozyste, se fait désormais plus prudent, jugeant "prématuré" d'évoquer le sujet mais sans rejeter l'idée d'un aménagement : "Je n'ai pas une religion totalement définitive". De son côté, le secrétaire général de l'UMP, Xavier Bertrand, a défendu une mesure qui permet selon lui d'éviter un exode fiscal pour un coût limité à quelque 500 millions d'euros par an. "La France est un pays où l'on paye trop de charges, trop d'impôts, trop de cotisations et il n'est pas question aujourd'hui d'augmenter les impôts, ce serait une erreur", a-t-il dit sur i-Télé.

Interrogé sur l'éventualité d'une révision par Les Echos, le nouveau ministre du budget, François Baroin, estime que "c'est un bon principe d'équité fiscale et par nature j'ai toujours trouvé qu'on ne laissait pas assez de temps à un dispositif fiscal pour produire ses effets." "Laissons le dispositif fonctionner sur la durée et faisons le bilan", a-t-il insisté.

Dimanche, dans une longue interview visant à assurer qu'il maintiendrait le cap des réformes, François Fillon s'est refusé à envisager une abrogation, qualifiant d'"argument démagogique" une suppression du bouclier fiscal afin d'envoyer un signe de justice sociale au pays. "Nous avons déjà le niveau de prélèvements obligatoires le plus élevé du monde. Il ne faut pas casser le retour de la croissance", a tranché le premier ministre, soucieux de ne pas donner l'impression que le gouvernement va une nouvelle fois faire machine arrière après le revirement sur la taxe carbone.

UNE "GUERRE D'OPINION PUBLIQUE"

Difficile en effet de revenir sur le "symbole" des 50 % sans se déjuger face à une gauche qui en a fait un symbole, reconnaît le président UMP de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, Pierre Méhaignerie : "Nous sommes dans une guerre d'opinion publique", dit-il.
Lui propose toutefois quelques pistes d'aménagements "sans remettre en cause le plafond", comme "un rabotage de l'ensemble des niches fiscales", ou la création d'une "tranche supplémentaire pour les plus hauts revenus".

Selon un rapport du rapporteur du budget Gilles Carrez – adversaire déclaré du bouclier dans sa forme actuelle –, le dispositif a coûté 700 millions d'euros à l'Etat en 2009, un chiffre qui devrait être le même cette année. En 2008, le "bouclier" avait bénéficié à 19 000 foyers fiscaux français, selon des statistiques du ministère de l'économie.

Les CD et DVD ne sont pas éternels

Peu de gens pensent à archiver leurs données numériques. Pourtant, photos de famille, vidéos de vacances, documents personnels stockés sur disque dur, CD ou DVD ont une durée de conservation limitée.
Loin de permettre un archivage durable, disques durs, CD, DVD enregistrables risquent de ne conserver que quelques années photos, vidéos ou autres documents personnels, ont alerté hier des experts des académies des sciences et des technologies, invitant à une « prise de conscience ».

Dix milliards de disques optiques numériques enregistrables (DONE) ont été vendus en 2009 dans le monde, « mais personne ne sait pendant combien de temps on pourra les lire », a déclaré devant la presse Erich Spitz, ancien directeur général adjoint chargé de la recherche et de la technologie du groupe Thomson, membre des deux Académies.

« L’information numérique dont personne ne s’occupe meurt au bout de quelques années », prévient le rapport sur la longévité de l’information numérique rendu public hier.

« Beaucoup d’informations personnelles, médicales, scientifiques, techniques, administratives… sont en danger réel de disparition », mettent en garde les auteurs. « Les données que nous voulons garder vont-elles s’effacer ? », s’interrogent Jean-Charles Hourcade, Franck Laloë et Erich Spitz.

Le rapport ne porte pas sur les CD de musique ou films DVD vendus déjà enregistrés (dits « pressés »), dont la durée de vie est « relativement bonne, sans commune mesure avec celle des disques type CD-R ou DVD-R enregistrables à l’unité », préviennent-ils d’emblée.

Faute d’usure mécanique lors de la lecture optique de ces disques, « beaucoup ont longtemps cru que ces supports seraient éternels. Malheureusement nous savons maintenant que, dans la réalité, ils se dégradent constamment, même s’ils ne sont pas utilisés », ajoutent-ils dans le rapport.

Coût astronomique

Les différents tests ne permettent pas de dire si ces supports resteront lisibles après avoir été enfermés dix ou vingt ans « dans une armoire normande », note Franck Laloë, du Laboratoire Kastler Brossel, ajoutant que certains peuvent devenir illisibles au bout de quatre ans. « Les disques en or ne sont pas meilleurs que les autres et les fameux Blu-ray semblent être encore plutôt moins bons que des supports moins récents », prévient-il.

D’où les conseils de multiplier les sauvegardes de disques durs et d’autres supports peu fiables sur la durée. Si les 25 millions de foyers français s’attelaient à recopier périodiquement les données afin de conserver au bout de 25 à 50 ans un « patrimoine numérique » de 100 gigaoctets à 1 teraoctet chacun, cela pourrait représenter un budget annuel de 2 à 20 milliards d’euros, selon le groupe d’experts.

Pour éviter à la collectivité ce « coût astronomique », ils recommandent d’élaborer une véritable politique d’archivage numérique, de développer la recherche et favoriser l’innovation.

Une invention française prometteuse


Invention française des années 80, le Century disc, gravé sur verre trempé, est un support numérique durable mais coûteux, déjà utilisé lors de missions spatiales, et qui offre des « perspectives prometteuses », selon le rapport des Académies des sciences et des technologies. Ces disques, lancés par la société Digipress, ensuite plusieurs fois revendue, « utilisent un procédé de lithogravure qui les rend très stables dans le temps : ils passent haut la main tous les tests de vieillissement », précise le groupe d’experts. Parmi les techniques envisagées, ce procédé serait « le plus près de parvenir à une conservation de données sur des siècles », selon Franck Laloë du Laboratoire Kastler Brossel. Mais faute d’une fabrication automatisée, le prix d’un Century Disc CD ou DVD est actuellement de l’ordre de 100 euros, ce qui est « environ dix fois trop élevé pour être accessible aux particuliers ». Déjà utilisé pour conserver des informations sur notre civilisation terrestre à destination d’éventuels extraterrestres, lors de la mission Mars Pathfinder lancée en 1996 par la Nasa. L’autre solution serait la mise au point de machines recopiant des DVD-R sur des Century disc. Parmi les perspectives d’avenir, le rapport évoque également les disques holographiques, « où l’information est écrite en volume, ce qui permet de s’affranchir de tous les problèmes liés aux diffusions et pollutions en surface ».

L’aéroport de Deauville s’apprête à rouvrir après trois mois de travaux

La direction de l’aviation civile Ouest a autorisé ce mardi après-midi l’aéroport de Deauville Saint-Gatien à reprendre son trafic commercial comme prévu jeudi 1er avril à 8 h. La plateforme deauvillaise était en travaux depuis le 18 janvier pour renforcer sa piste et se mettre aux normes d’assainissement et de sécurité. Des travaux de 5,5 millions d’euros. Pour la partie visible, le parking de véhicules passe de 550 à 950 places. Le premier vol est prévu à la mi-journée jeudi à destination de Marrakech.

Les terres agricoles mangées par la ville

L'agriculture normande a vu son chiffre d'affaires fondre de 585 millions d'euros en 2009. Les élus consulaires agricoles s'inquiètent du grignotage des terres agricoles par la ville.

Année noire pour le revenu normand

En 2009, le produit agricole des cinq départements de Haute et Basse-Normandie baisse de 585 millions d'euros. En cause, la brutale baisse des cours des produits végétaux, des produits animaux, des produits laitiers (en volumes livrés de surcroît) et de la viande bovine. Les prix des engrais, produits phytosanitaires, entretien du matériel énergie nécessaires à la production restent à un haut niveau. Ils ne diminuent de 72 millions d'euros. Ainsi le revenu net d'entreprise par unité de travailleur diminue de 62,7 % ! Il passe de 26 070 € en 2008 à 9 730 € en 2009. Parmi les cinq départements normands, l'Eure accuse la chute la plus prononcée.

Loi de modernisation agricole

Dominique Brimbaum, conseillère spéciale de Bruno Le Maire, ministre de l'Agriculture, rappelle que les principes de la contractualisation agricole, sont subordonnés aux négociations européennes. Elles doivent, en principe, favoriser la maîtrise de la production et la rémunération des producteurs par des prix corrects. Les discussions de la loi de modernisation agricole vont commencer au Sénat, « dès le mois d'avril », et devraient être promulguées « avant la fin de l'année ».

Économiser les terres agricoles

Les surfaces urbanisées qui prenaient 3 000 ha par an entre 1992 et 2003, ont augmenté en 2006, 2007 et 2008. En Basse-Normandie, la surface urbanisée est passée de 7,5 % du territoire en 1992 à 9,9 % en 2008. En Haute-Normandie, il passe de 10,1 % en 1992 à 11,7 % en 2008. Les zones périurbaines et le littoral sont les zones les plus impactées. « Conformément aux futures dispositions de la Loi de modernisation agricole, les chambres d'agriculture proposent d'être associées à la mise en oeuvre de chartes foncières départementales, engageant les signataires à conduire une gestion programmée et économe du foncier. »

L'exemple de l'Orne

Les élus consulaires prennent comme modèle celle signée dans l'Orne par le Préfet Michel Lafon, Alain Lambert, président du conseil général de l'Orne et de l'association des maires et Régis Chevallier, président de la chambre d'agriculture. Elle donne des recommandations concrètes pour « freiner l'étalement urbain et le mitage ».

François LEMARCHAND.

Les engagements de Sarkozy à l'épreuve des faits

Le ton chiraquien du Président masque mal son absence de marge de manoeuvre en France ainsi qu'à l'échelle européenne.
L'avancée est symbolique, mais digne d'être relevée : la France et l'Irlande ont obtenu, au sommet européen de la semaine dernière, que l'agriculture soit intégrée dans la « Stratégie 2020 de l'Union européenne ». C'était bien le moins après les propos fracassants de Nicolas Sarkozy, au lendemain des régionales, disant préférer une crise à un démantèlement de la politique agricole commune.

Un ton chiraquien auquel les agriculteurs, échaudés par une longue période d'indifférence de Nicolas Sarkozy pour leur cause, ne croient guère. Le congrès de la FNSEA, qui s'ouvre aujourd'hui à Auxerre, va évidemment commenter ces propos dans les conversations de couloirs. Officiellement, on feint la surprise «enfin !», lâchait Jean-Michel Lemétayer, il y a quelques jours. En réalité, officieusement, bien des cadres syndicaux ne croient guère à la capacité de la France d'entraîner toute l'Europe vers un maintien de la Pac. «Il nous promet la lune », remarque un administratif du syndicalisme majoritaire.

Le plus ennuyé est peut-être le ministre de l'Agriculture lui-même. Certes, il est conforté par les propos présidentiels, mais surtout, c'est lui qui devra ramer pour tenir les promesses de Nicolas Sarkozy. Et ce sera dur. Hier, il a de nouveau tenté de faire avancer le dossier de la régulation européenne auprès des 26 autres ministres de l'Agriculture européens. Il est loin d'avoir gagné la partie d'autant que l'identité de vues entre la France et l'Allemagne est encore à finaliser.

Un document est attendu pour avant juin. Aujourd'hui, c'est en France, à son ministère, que Bruno Le Maire va tenter de faire fléchir les industriels pour qu'ils acceptent le principe de la hausse des prix du lait payé aux producteurs. Les deux dossiers sont plus liés qu'il n'y paraît. Les laiteries industrielles ne cessent de faire référence au prix du lait payé en Allemagne pour justifier leur refus d'une hausse.

L'État français n'a aucun moyen juridique de faire fléchir les industriels. De même qu'il n'a aucun moyen pour forcer le mariage entre Sodiaal et Entremont, condition nécessaire pour l'émergence d'un nouveau grand groupe français capable de payer correctement les producteurs de lait.

Les salariés d'Entremont inquiets

Annoncé pour décembre, ce mariage n'est pas encore consommé fin mars. Une situation qui inquiète les salariés. Jean-Pierre Trouboul, secrétaire général du Comité de groupe Entremont (4200 salariés) craint ainsi de voir un quart de la collecte du groupe laitier abandonné par Sodiaal, candidat à la reprise d'Entremont. Une telle réduction « entraînerait le licenciement de 60 à 80 des seuls chauffeurs », estime le syndicaliste. Pour Gérard Budin, président de Sodiaal, ces « affirmations » sont « infondées ». Le ministère de l'Agriculture nie de son côté avoir eu connaissance de cette proposition.

C'est cela, l'équation compliquée de la nouvelle politique agricole à la française : d'un côté des propos très définitifs du chef de l'État; de l'autre des moyens très limités pour ceux qui devront tenir... ses promesses.

Hervé PLAGNOL.

Un dîner atlantique


Carla et Michelle, Barack et Nicolas. Le dîner privé, organisé hier soir à la Maison-Blanche, avait tout pour plaire aux photographes. Un côté magazine patiné, sommet glamour, politique people. Les experts en communication raffolent de ce mélange des genres entre vie intime et vie publique. Même si son utilité est somme toute relative.

Si l'on s'en tient aux apparences, ce dîner avait quelque chose de réparateur. Il fallait effacer le souvenir de la visite en France de Barack Obama, en juin 2009. Le tout nouveau président avait alors boudé l'Élysée, préférant passer une soirée en famille dans un bon bistrot parisien.

En outre, la visite à Washington de Nicolas Sarkozy intervient bien après celles d'Angela Merkel, Gordon Brown ou même Silvio Berlusconi. Il ne s'agit que de simples signaux sans grande conséquence pratique. Ils n'en sont pas moins révélateurs de l'importance ¯ et de l'intensité ¯ d'une relation bilatérale.

En cela, Sarkozy et Obama, si différents par leur tempérament, sont en fait les héritiers d'une curieuse tradition. Des deux côtés de l'Atlantique, la relation personnelle entre les deux présidents a rarement été un modèle du genre. On peut reprendre la série. Du couple De Gaulle/Kennedy au couple Chirac/Bush, les divergences profondes, voire les tensions, n'ont pas manqué. Sans pour autant jamais véritablement entamer le lien franco-américain, si ancien, si profond et si stratégique.

Car, au fond, si Paris et Washington recherchent toujours un soutien réciproque, ils ne renoncent jamais ni à leur vision universaliste ni à leurs intérêts propres. Ainsi, sur l'Afghanistan, Obama aurait souhaité un soutien militaire plus effectif ; Sarkozy ne veut pas aller au-delà de la mission de formation des forces de sécurité afghanes. Sur le dossier iranien, Paris n'a jamais cru que la politique américaine de la main tendue pourrait produire quelque effet. La normalisation en cours à Téhéran le confirme tristement.

Sur l'économie, les différences d'approche sont encore plus flagrantes. Au coeur de la crise financière, Nicolas Sarkozy a pu invoquer la refonte du système international, décréter bruyamment la mort des accords de Bretton Woods, fondateurs de la Pax Americana de l'après-guerre. Ces effets de manche, réitérés à New York lundi, ont laissé de marbre le statuaire Obama. Soucieux de faire d'abord sortir son propre navire de la tempête sans nécessairement scier la branche sur laquelle il était assis.

Et pourtant, tout cela n'entame pas vraiment la conviction qu'en cas de coup dur, l'alliance tiendra. L'échange constant de renseignements sensibles dans la lutte contre le terrorisme n'y est d'ailleurs pas étranger. En juillet 1981, Mitterrand avait joué cette carte pour rassurer un Reagan préoccupé par l'arrivée de la gauche aux affaires. En septembre 2001, le renseignement français n'a pas agi différemment. C'est encore vrai aujourd'hui.

Certes, le retour de la France dans le commandement intégré de l'Otan, par sa valeur symbolique, aurait dû booster la relation bilatérale. Cela n'a pas été le cas, loin de là. Sans doute du fait que la mondialisation et l'émergence de l'Asie comme puissance viennent, comme on l'a vu à Copenhague, de déplacer le centre de gravité des affaires internationales vers le Pacifique. Enlevant du lustre au dîner atlantique d'hier soir. Malgré les flashs.

Un si subtil compromis...


Tout le monde est « contre » la « burqa ». Tout le monde. Ou presque. Bien sûr que c'est une prison de coton. Un symbole d'aliénation des femmes. Une forme de méfiance à l'égard de l'autre. Un rejet brut, même. Un défi manifeste, sûrement, lancé à notre vivre ensemble républicain. Et pour bon nombre de musulmans, le détournement des principes de leur propre religion. Bien sûr, bien sûr. A quoi bon disserter sur l'évidence ?
La question n'est pas celle là, en effet, mais celle du bien-fondé d'une interdiction totale dans un pays qui place la liberté - et la confiance qu'elle suppose - au sommet de ses valeurs. Dans un vieil Etat de droit comme le nôtre, le Conseil d'État a sagement replacé le débat là où il doit l'être. La prohibition absolue du voile intégral n'a tout simplement pas de fondement juridique. La fausse sécurité - purement théorique d'ailleurs - qu'elle offrirait aurait un coût exorbitant pour notre démocratie : la limite des interdits est une frontière fragile qu'on ne repousse pas sans danger.
Avec une grande sobriété dans un dossier obscurci par les passions électorales, la plus haute juridiction administrative française s'est dressée contre une forme de démagogie législative indigne de la France des Lumières. Faudrait-il que notre pays soit à ce point fébrile pour légiférer aussi durement avec un texte qui ne concernerait que... 2 000 femmes tout au plus. C'est encore trop ? D'accord. Mais pas une menace suffisante, tout de même, pour mettre en péril l'équilibre de notre pays.
Et puis, comme toutes les prohibitions absolues, l'interdiction totale du voile intégral aurait de nombreux effets pervers. Inapplicable, elle serait source de contestations et de surenchères malsaines. Elle déchaînerait, à coup sûr, tous les amalgames, risquant de mettre à l'index le port du voile traditionnel souvent dénué, lui, de tout prosélytisme. Et même elle cloîtrerait chez elles ces femmes Belphégor qu'elle prétend délivrer ! Où serait le progrès d'une société mettant en oeuvre une forme d'exclusion aussi aveugle ?En revanche, les interdictions sélectives, préconisées par le Conseil d'État, dans les services publics, dans certains lieux sensibles, ou dans certaines circonstances, apparaissent pertinentes, suffisantes et justes. Elles se placent dans la même logique mesurée que l'interdiction du port ostensible des signes religieux à l'école proposée par la commission Stasi, et devenue loi en 2004.
En défendant un pays ou l'on se parle à visage découvert, et en refusant qu'on puisse se dissimuler dans des occasions essentielles, c'est à un respect de l'autre - personne individuelle ou collective - que nous rappelle le Conseil d'État. Un choix de civilisation qui célèbre l'essence même de la laïcité, ce subtil et indéfinissable compromis de toutes les libertés.