TOUT EST DIT

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mercredi 29 juin 2011

Le PS passe du « nous » au « je »

La question n'était plus de prédire si Martine Aubry, comme son père Jacques Delors en 1994, refuserait l'obstacle. Elle était de savoir si le 28 juin serait la date à laquelle sa candidature ferait entrer les socialistes dans leur vie sans Dominique Strauss-Kahn

En passant du « nous » au « je », la première secrétaire du PS - pour quelques heures encore - a créé un non-événement bruyant. Mais une déclaration de candidature a beau être un exercice convenu, il y avait autant de risques de la rater que de chances d'en faire un moment tremplin.

Candidate, non pas à la primaire, mais à la victoire en 2012, elle tourne la page DSK et situe d'emblée son niveau d'ambition. Raisonnable dans ses promesses - « tout ne sera pas possible tout de suite » - elle intègre la crise et évite tout propos qui viendrait dégrader la notation de la France. Ponctuelle, émue, rassembleuse et, pour une fois, synthétique, Martine Aubry, aux yeux de l'opinion socialiste, a plutôt réussi la première épreuve de l'examen.

Il le fallait, car elle s'élance avec quelques handicaps. Elle avait conquis le parti dans des conditions discutables et discutées. Elle est devancée dans les sondages par François Hollande qui affiche, depuis près de deux ans qu'il y travaille, une motivation à toute épreuve et un projet réfléchi. Et elle risquait d'apparaître comme une solution de secours depuis la disparition politique de Dominique Strauss-Kahn.

Elle dispose aussi de quelques atouts. Elle tire sa légitimité d'un parti qu'elle a réformé et remis au travail. Elle dispose d'une expérience politique diversifiée, même si les 35 heures continuent de lui être reprochées, lundi encore par Nicolas Sarkozy, comme une erreur économique majeure. Et elle a la trempe d'une patronne, parfois rugueuse, sectaire disent ses détracteurs.

Mais entre elle, Ségolène Royal et François Hollande, la différence ne se fera pas forcément sur des considérations objectives.

Sauf si les entourages décident de lancer la machine à perdre, la primaire ne devrait pas tourner à l'affrontement brutal. Le Parti socialiste a adopté, à l'unanimité, un socle programmatique de nature à limiter le débat à des nuances de contenu ou de calendrier. Chacun veut faire de la démocratie, de la justice sociale, de l'Europe autrement... Cette similitude des projets est si vraie que Martine Aubry, souvent cataloguée plus à gauche, s'apprêtait à soutenir Dominique Strauss-Kahn.

Sorte de premier tour d'une présidentielle qui en compterait trois, la primaire s'arbitrera plutôt autour de la relation que chaque prétendant saura plus ou moins bien nouer avec l'électorat socialiste d'abord, de gauche ensuite.

Car, pour l'opposition, y compris pour les écologistes et pour les électeurs de Jean-Luc Mélenchon, la question primordiale sera de choisir celui ou celle qui peut atteindre le second tour. Qui peut gagner contre Nicolas Sarkozy. Qui peut faire un bon président après dix-sept ans de pouvoir de droite.

Même si le risque de dérapage n'est jamais loin, et au-delà de la polémique lancée par l'UMP sur la publicité des listes, la réussite de la primaire serait un facteur de dynamique politique et une expérience de démocratie partisane dont toutes les formations auraient à tenir compte. Les socialistes disposent de 110 jours pour en faire la démonstration.



Le commentaire politique de Christophe Barbier




Femmes


La femme est le présent de l’homme. C’est l’actualité qui nous le dit, de Washington à Paris. Christine Lagarde devient la première femme directrice générale du FMI. Martine Aubry, qui fut la première femme à diriger le Parti socialiste, est maintenant sa favorite pour la candidature présidentielle. En concurrence avec une autre femme, Ségolène Royal, et certes un homme, François Hollande. Jusqu’à Eva Joly, dont tant se moquèrent, qui pourrait bien supplanter Nicolas Hulot chez les Verts... Oui, la femme est bien le présent de l’homme - mais pas encore son égale. Dans la réalité quotidienne, c’est toujours papa lit et maman coud, a constaté hier une conférence d’experts. Et sous le sapin de Noël, c’est voiture de course pour les garçons et chariot de ménage pour les filles... Ne nous y trompons pas: l’émancipation de quelques-unes ne fait pas l’égalité de toutes.

Soyons réalistes avec Pékin

La crise de la dette européenne ouvre une voie royale aux investissements chinois. Voilà pourquoi il est nécessaire de comprendre quelle puissance est en train de devenir la Chine, affirme Timothy Garton Ash. 

Il fut un temps lointain où l’Europe colonisait la Chine petit bout par petit bout. Aujourd’hui, c’est la Chine qui colonise l’Europe de la sorte. Le tout de façon informelle, bien sûr, et avec infiniment plus de politesse que quand la balle était dans l’autre camp. L’ascension de la Chine jette une lumière crue sur le déclin relatif de l’Europe autant qu’elle en profite.
Le Premier ministre Wen Jiabao vient de se rendre en Allemagne, en Grande-Bretagne et en Hongrie. Pourquoi la Hongrie ? En partie parce que c’est Budapest qui assure la présidence tournante de l’Union Européenne, mais aussi parce que Pékin y a considérablement investi et compte continuer — comme ailleurs en Europe du Sud et du Sud-Est. Une étude qui devrait bientôt être publiée par le Conseil européen des relations étrangères (ECFR) estime que 40 % des investissements effectués par la Chine dans l’UE sont à destination du Portugal, de l’Espagne, de l’Italie, de la Grèce et de l’Europe orientale.

L'Europe a besoin de l'argent chinois

Pourquoi un tel intérêt pour la périphérie ? Eh bien, on peut y réaliser des investissements prometteurs, et ces économies périphériques, plus modestes, offrent un moyen plus aisé d’accéder au marché unique et à ses 500 millions de consommateurs. Le marché de l’UE est beaucoup plus ouvert aux investisseurs de Pékin que son équivalent chinois ne l’est aux Européens. Et il est également rentable sur le plan politique d’investir vigoureusement dans ces pays. Ce n’est pas faire preuve de trop de cynisme que de supposer que la Chine se constitue une sorte de lobby au sein des structures décisionnelles de l’Union, où les Etats les plus petits ont, du moins en principe, autant de poids que les plus grands.
Disposant des plus grandes réserves de devises étrangères de la planète — soit, actuellement, environ 3 000 milliards d’euros —, la Chine pourrait racheter la moitié des actifs publics grecs privatisables d’un claquement de doigt. Les Grecs devraient-ils se méfier de ces cadeaux chinois ? Ma foi, à cheval offert, on ne regarde pas les dents. Comme l’a déclaré, avec une exquise délicatesse, un spécialiste chinois de la géostratégie à l’un des auteurs du prochain rapport de l’ECFR : "Vous avez besoin de notre argent."
Toutefois, il ne faut pas non plus basculer dans la paranoïa. Quand on défend le libre échange et la loi des marchés, alors, il faut pratiquer ce que l’on prône. Il ne fait cependant aucun doute que la puissance économique chinoise a déjà atteint le cœur de l’Europe, et qu’elle s’y traduit par une influence politique.
Quelques-uns des voisins asiatiques de Pékin ont éprouvé à la dure l’ascension de la Chine. Si, en Europe, certains rêvent encore d’un monde postmoderne fait de souveraineté partagée, et où l’UE deviendrait le modèle d’une gouvernance planétaire, en Asie, la géopolitique ressemble de plus en plus à celle de l’Europe à la fin du XIXe siècle — plutôt qu’à celle de la fin du siècle suivant. Des puissances souveraines impatientes jouent des coudes pour la suprématie, se dotent de marines et d’armées, se disputent le contrôle de territoires (comme le Cachemire) et d’espaces maritimes. Les intérêts et les passions nationales passent avant l’interdépendance économique.
Si le rayonnement émergeant de la Chine a des facettes économiques et militaires, il compte aussi une dimension politique, culturelle, celle d’une "puissance douce". Yan Xuetong, un des principaux auteurs chinois dans le domaine des relations internationales, vient de publier un nouvel ouvrage fascinant intitulé Pensée chinoise antique, puissance chinoise moderne. Il y analyse les leçons de la pensée politique d’avant les Qin, autrement dit, antérieure à 221 avant notre ère, pour les adapter au rôle de la Chine dans le monde moderne. Yan affirme que l’on peut dégager deux images opposées de la puissance de l’Etat chez ces penseurs chinois antiques : l’hégémonie ou ce qu’ils définissaient comme "l’autorité humaniste". Avec cette dernière, la sagesse, la vertu et la bienveillance des dirigeants non seulement satisfont leur propre population, mais en attirent d’autres, diffusant du même coup leur vision des choses au-delà de leurs frontières.

Wen Jiabao, un homme réfléchi, "authentiquement séduisant"

S’il ne semble pas totalement hostile à l’hégémonie pure et simple, Yan suggère que la Chine devrait aspirer à cette version plus ambitieuse du pouvoir politique en s’efforçant, entre autres, de "rénover constamment le système politique". Si sa formulation paraît un rien elliptique sur ce point, il avance par ailleurs que “la Chine doit faire du principe moral de la démocratie un de ceux qu’elle défend”.
Disons-le, en 2011, la Chine est bien loin de cette "autorité humaniste". Elle peut prétendre, en remontant au grand réformateur Deng Xiaoping, avoir arraché à la misère des centaines de millions de ses habitants. Aux yeux des pays en développement de par le monde, son modèle de capitalisme d’Etat représente un défi idéologique pour le modèle désormais ravagé par la crise du capitalisme de marché.
En la personne de l’homme qui se rend en Europe, Wen Jiabao, elle dispose d’un numéro deux réfléchi, authentiquement séduisant, qui fait preuve d’une remarquable ouverture d’esprit pour débattre des questions critiques avec les étrangers, et qui est populaire même auprès de la jeunesse chinoise, extrêmement critique. Mais depuis deux ans, le parti communiste se montre nerveux.
A la veille de la passation de pouvoir de 2012, il est revenu à une forme d’autorité qui n’a rien d’humaniste — du traitement réservé aux minorités ethniques du pays à la détention de l’artiste Ai Weiwei. Face au spectre du Printemps arabe, il a manifesté une inquiétude a priori injustifiée, si l’on en croit la plupart des observateurs.
Il est impossible de dissocier les trois facettes, économique, militaire et politique, de la puissance chinoise. Toutes évoluent. Des relations critiques, comme David Cameron et Angela Merkel espèrent en établir avec l’admirable M. Wen, sont souhaitables. Mais soyons réalistes, l’influence extérieure sur le développement de cette superpuissance émergeante restera limitée. Par conséquent, autant mettre de l’ordre chez nous, garder l’œil ouvert, et ne pas perdre espoir.

Crise de la dette

Les milliards de Pékin n’ont pas de prix

"Il n'y a pas si longtemps, la visite d'un Premier ministre chinois était synonyme de protestations et de débats sur les droits de l'homme et sur la répression au Tibet", observe El País. Or, note le quotidien espagnol, "ces jours-ci, la présence en Hongrie, au Royaume-Uni et en Allemagne de Wen Jiabao n'est vue pratiquement qu'à travers le prisme de l'importance qu'a le géant asiatique pour l'économie européenne. Et l'invité a même pris la liberté de sermonner son hôte sur les risques de vouloir imposer la paix en Libye avec les armes. Prévoyants, les Chinois ont libéré plusieurs dissidents, dont l'artiste Ai Weiwei à la veille de la visite".
"Lorsque Wen Jiabao a visité le Royaume-Uni pour la dernière fois, en 2009, un jeune lui lança une chaussure alors qu'il tenait une conférence à l'Université de Cambridge. Aujourd'hui, deux ans et une crise plus tard, Wen a promis à Budapest que la Chine ne laissera pas tomber l'Europe, il s'est promené dans une usine de voitures chinoises à Birmingham comme s'il était chez lui et il devait discuter ce 28 juin avec Angela Merkel des vicissitudes de l'euro. Tout cela, garni de plusieurs milliards d'euros de contrats".
Le rachat par Pékin de titres de la dette des pays de la zone euro en difficulté, comme l'Espagne, l'Irlande, le Portugal ou la Grèce, ainsi que sa soif de technologie suscitent la sympathie et le sens des affaires de l'Europe, ajoute El País. Voilà pourquoi, conclut-il, "elle est enchantée de l'aider. Même si elle doit se boucher le nez et se tourner de l'autre côté à chaque fois que cela sera nécessaire. Cela s'appelle le pragmatisme, et ça existe depuis toujours".

A quoi tient l'avenir de la Grèce?

Le Parlement grec doit adopter d'ici jeudi le nouveau plan de rigueur pour débloquer la dernière tranche d'aide internationale. S'il vote non, il sera dès juillet en défaut de paiement. Les différents scénarios.

  L'austérité ou la faillite. Voilà l'alternative peu alléchante qui devrait convaincre le Parlement grec de voter oui d'ici jeudi au plan de rigueur. Le programme pluri-annuel prévoit 28,4 milliards d'euros de mesures d'économies et 50 milliards d'euros de privatisations. La majorité des Grecs n'en veulent pas et ont entamé mardi une grève générale de 48 heures pour le faire savoir. Sauf que si le projet de loi budgétaire ne passe pas, le pays n'obtient pas la dernière tranche de l'aide de l'UE et du FMI et ne peut donc pas faire face à ses prochains remboursements de dette. En somme, il fait défaut. Voici les différents scénarios qui pourraient se dérouler dans les prochains jours, décisifs pour l'avenir de la zone euro.

Le Parlement vote le plan... Plus rien ne s'oppose au versement des 12 milliards d'euros permettant à la Grèce de faire face à ses échéances de remboursement à court terme. Mais cela ne fait que repousser le problème de son insolvabilité à plus tard : la dette du pays s'élève à 340 milliards d'euros, soit plus de 150% du PIB. Avec les marchés qui exigent des taux d'intérêt à 10 ans record de plus de 17%, l'Etat grec n'est pas près d'y retourner pour se refinancer. D'où la décision de la zone euro d'accorder une rallonge d'environ 110 milliards d'euros, dont les grandes lignes doivent être bouclées le 3 juillet. Encore faut-il toutefois que les dirigeants européens s'accordent sur les modalités du nouveau prêt. Berlin n'en démord pas : les créanciers privés doivent participer. Or la BCE s'oppose catégoriquement à un rééchelonnement, craignant qu'il soit considéré par les marchés comme un événement de crédit, dont les conséquences seraient aussi dévastatrices qu'imprévisibles.
... Et les créanciers privés adoptent la proposition française de restructuration Une autre solution a été proposée lundi par le Trésor et les banques françaises. Elle se traduirait par un renouvellement sur 30 ans de la moitié des engagements des créanciers privés. De quoi laisser du temps au pays pour redresser ses finances publiques.
Concrètement, les établissements français réinvestissent, chaque fois qu'une obligation grecque est remboursée au cours des trois prochaines années, 70% de la somme qui leur est restituée. Sur ces 70%, 50% seulement vont directement dans des obligations à 30 ans de l'Etat grec. Les 20% restants sont investis dans des obligations à zéro coupon achetées auprès d'un ou plusieurs Etats, institutions supranationales ou agences européennes, notés AAA. Le taux des nouvelles obligations grecques est proche de ceux obtenus par le Fonds de stabilité européen (FESF), qui bénéficie d'une notation "AAA".
Toute la difficulté est d'éviter que la formule adoptée ne soit interprétée comme un défaut de paiement. Il faut pour cela qu'elle soit perçue comme vraiment volontaire de la part des banques. Ce qui est loin d'être garanti.
La France souhaite que ce plan serve de modèle pour les autres pays. Les représentants de plusieurs banques mondiales et des responsables gouvernementaux l'ont évoqué lundi lors d'une réunion à Rome, mais n'ont pas pris de décision. Les ministères des Finances allemand et néerlandais ont salué l'initiative, mais les banquiers allemands ont fait savoir qu'ils préféreraient des échéances plus courtes, de 10 ou 15 ans.
La proposition française comprend aussi une autre possibilité selon Reuters: les participants investiraient un minimum de 90% - un taux de 100% est souhaité - du montant qu'ils recevraient dans de nouvelles obligations de l'Etat grec d'une échéance de cinq ans et portant un intérêt de 5,5%.
Dans les deux cas, un accord avec les banques ne résoudrait qu'une partie du problème. Car les banques commerciales ne détiennent que 27% de la dette grecque, 43% étant détenue par d'autres types d'investisseurs, 14% par la BCE et 16% par l'UE et le FMI, selon le Financial Times.
Le Parlement rejette le planAlors l'UE et le FMI ne versent pas les 12 milliards d'euros prévus, Athènes ne rembourse pas les 2,4 milliards d'euros dus le 15 juillet prochain, et la Grèce est en défaut de paiement. Et là le pire est à craindre. Le parallèle avec la faillite de Lehman Brothers est d'ailleurs souvent évoqué pour mettre en garde contre les effets de contagion planétaire qu'aurait la faillite de l'Etat. Car non seulement les banques grecques s'effondrent, mais les banques européennes détentrices de dette grecques subissent aussi de lourdes pertes. Et les banques américaines qui avaient assuré, via des CDS, leurs consoeurs européennes contre le risque de défaut, se retrouvent également exposées. Surtout, les investisseurs craignent que les autres maillons faibles de la zone euro fassent défaut aussi et se mettent donc à vendre en masse leurs obligations publiques portugaises et irlandaises mais aussi espagnoles et italiennes. Cela fait exploser les taux d'intérêt exigés à ces pays, qui ont par conséquent plus de mal encore à se refinancer. Le FSFE est insuffisant pour renflouer tous les pays à la fois. Plus rien ne les empêche de faire défaut et de quitter la zone euro pour retrouver une monnaie plus compétitive.
Le Parlement rejette le plan, mais il y a un plan B Officiellement, il n'y en a pas. Mais d'après le Financial Times, Berlin aurait poussé pour un plan alternatif qui procurerait suffisamment de liquidités à la Grèce pour éviter le défaut de paiement en juillet au cas où le vote grec serait négatif. Parmi les options possibles pour répondre à une telle situation, il y a "la question de la réactivation du FESF", qui peut prêter de l'argent à un Etat en grande difficulté, indique un diplomate européen. Mais, selon lui, il serait difficilement imaginable que les partenaires de la Grèce acceptent de mettre au pot sans le FMI et sans contrepartie de la Grèce sous forme d'un nouveau plan d'austérité. Une autre solution serait d'utiliser ces fonds publics pour racheter à bas prix des obligations grecques aux banques. Ce qui revient à une restructuration volontaire de la dette.

Christine Lagarde à la tête du FMI

Actualisé à 20h. Les Etats-Unis soutenaient la candidature de la Française Christine Lagarde au poste de directeur général du Fonds monétaire international. Ce soir, dans un communiqué, l'Elysée indiquait que Christine Lagarde était désignée à la tête du FMI, considérant qu'il s'agissait d'«une victoire pour la France».

Libérale pragmatique, adepte d’une certaine régulation, Christine Lagarde, désignée ce soir à la tête du FMI, est surtout une négociatrice hors pair qui devrait approfondir les chantiers déjà engagés, du renforcement des outils anti-crise à l’ouverture vers les pays émergents.
En tant que ministre française de l’Economie, puis pendant sa campagne, celle qui devient la première directrice générale du Fonds monétaire international a plaidé pour un «libéralisme tempéré».
«Le libéralisme est une affaire de règles bien appliquées», aime-t-elle aussi théoriser.
Selon un ancien collaborateur à Bercy, Christine Lagarde se situe à mi-chemin entre les défenseurs d’une dérégulation totale et ceux d’une économie ultra-réglementée.
«Sa vision a gagné du poids avec la crise. Elle garde un certain recul sur le modèle américain, qu’elle connaît bien et auquel elle adhère en grande partie», dit-il.
L’ex-avocate d’affaires n’a pas de formation académique en économie. Certains voient là sa principale faiblesse, au moment où elle devient le médecin et le gendarme d’une économie mondiale convalescente.
«Elle n’a pas vraiment une capacité autonome de réflexion sur ces questions», estime Charles Wiplosz, directeur du Centre international d’études monétaires et bancaires de Genève.
A ses yeux, ce n’est pas un défaut: «Christine Lagarde a une capacité remarquable à absorber ce que son staff lui dit et un talent unique pour le vendre à qui il faut. C’est très bien pour le FMI.»
«Fine diplomate»
«Fine diplomate» et «négociatrice incroyable» sont des qualificatifs qui mettent tout le monde d’accord, y compris ses détracteurs, lorsqu’il s’agit de décrire la Française.
«Une de ses grandes qualités consiste à trouver des consensus là où ça paraissait impossible», explique Agnès Bénassy-Quéré, directrice du Centre français d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii).
Christine Lagarde va donc surtout s’appuyer sur les équipes «très qualifiées» du Fonds qui, relève Charles Wyplosz, «ont pour l’essentiel été mises en place par Dominique Strauss-Kahn».
Si le patron démissionnaire a infléchi la doctrine de l’institution de Washington, lors de la crise, en faveur d’une intervention publique accrue, Christine Lagarde devrait donc suivre ses pas.
«J’ai le sentiment qu’elle poursuivra les réformes entreprises, elle a l’autorité nécessaire», confirme Eswar Prasad, économiste à la Brookings Institution.
D’autant qu’avec la crise, «les différences dogmatiques se sont beaucoup atténuées», souligne Agnès Bénassy-Quéré, le gouvernement de droite dont Christine Lagarde était membre en France s’étant distingué par «une intervention très forte de l’Etat pour relancer l’économie».
Sa déclaration de candidature résume ses positions: elle n’annonce pas de révolution mais entend «renforcer» la «légitimité» du FMI, avec une meilleure représentation des puissances émergentes, son «efficacité», notamment en matière de «surveillance» des déséquilibres mondiaux, et enfin «sa capacité à répondre aux besoins des pays membres».
«Elle devra gagner la confiance des pays émergents en mettant en oeuvre les réformes de son prédécesseur et en allant plus loin», prévient Eswar Prasad. La marge de manoeuvre est étroite, car il lui faudra «convaincre les Européens» au moment où, avec la sortie de crise, «l’élan réformateur faiblit».
Sur la régulation, les flux de capitaux ou le système monétaire, le FMI et la présidence française du G20, incarnée jusqu’ici par Christine Lagarde, sont plus ou moins au diapason.
Mais c’est le dossier brûlant de la crise de la dette en Europe qui l’attend dès sa prise de fonctions. Alors que le Fonds est en première ligne en Grèce, celle qui revendique «un rôle clé» joué en tant que ministre écarte tout risque de «bienveillance» vis-à-vis de la zone euro.
Selon Charles Wyplosz, la Française devrait «prendre ses distances par rapport aux Européens», justement pour faire oublier ses origines à des pays émergents agacés de voire l’Europe monopoliser la direction du FMI. «Beaucoup trouvent que la zone euro n’a pas bien géré la crise de la dette», relève-t-il.

Christine Lagarde félicitée pour sa nomination

Dès les premières minutes qui ont suivi sa nomination à la tête de la FMI, de nombreuses personnalités ont félicité Christine Lagarde.

Egalement en lice pour succéder à Dominique Strauss-Kahn, Agustin Carstens, gouverneur de la banque centrale du Mexique, a adressé ses vœux de réussite à Mme Lagarde. "Je salue le choix de Christine Lagarde comme directrice générale du FMI ; je lui souhaite le meilleur et elle a tout mon soutien", a-t-il dit dans un communiqué.
Le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, estime qu'il s'agit "d'une fierté pour la France" et "une chance pour l'Europe". Dans un communiqué, M. Copé rend hommage à la "femme exceptionnelle qui a toutes les qualités et les compétences requises pour faire une remarquable directrice générale du FMI".
Côté socialiste, François Hollande s'est félicité de la nomination de Christine Lagarde, l'invitant à s'inspirer de son prédécesseur. "Christine Lagarde est une Française, elle a des qualités", a déclaré le candidat à la primaire socialiste. "Je devrais donc me féliciter, mais elle n'est pas de la même orientation que son prédécesseur et il faut qu'elle comprenne qu'elle n'est plus ministre de Nicolas Sarkozy." "Nous aurons à travailler avec elle après 2012. Je lui dis 'travaillez avec le souci de la continuité'", a-t-il ajouté.
Le ministre des finances allemand, Wolfgang Schäuble, a jugé que la nomination de la Française était "un excellent choix". L'Allemagne avait apporté son soutien à la candidature de Mme Lagarde à la tête de l'institution internationale, affirmant notamment qu'elle était "une personne dotée d'une grande compétence".
Le président de la Commission européene, José Manuel Barroso, a salué un "excellent choix" pour le FMI. "Par cette nomination qui fait de vous la première femme à la tête de cette institution, le Fonds monétaire international a fait un excellent choix, celui de l'expertise, de l'expérience et du talent", a affirmé M. Barroso dans un communiqué. M. Barroso a également salué le "rôle décisif" joué selon lui par la ministre française de l'économie sur "les dossiers économiques et monétaires européens" au cours de ces cinq dernières années, "qui ont vu l'éclatement de la plus grave crise financière et économique qu'ait connu le monde depuis un siècle". Le ministre des finances britannique, George Osborne a estimé qu'il s'agissait d'une "bonne nouvelle pour l'économie globale et pour la Grande-Bretagne". "C'est la personne la plus qualifiée pour le poste, et c'est la raison pour laquelle la Grande-bretagne a été l'un des premiers pays à proposer son nom", a-t-il poursuivi.
Le président de la Banque mondiale, l'Américain Robert Zoellick, a rendu hommage à Mme Lagarde avec qui il a eu "grand plaisir de travailler en tant que ministre française de l'économie, des finances et de l'industrie, et en tant que présidente du G20 finances". "Le groupe Banque mondiale et le FMI ont travaillé en collaboration de plus en plus étroite ces dernières années pour soutenir les pays qui se remettent de la crise économique mondiale et prévenir des crises à l'avenir", a-t-il souligné.

Christine Lagarde nommée directrice du FMI

Sans surprise, le conseil d'administration du Fonds monétaire international (FMI) a désigné la Française Christine Lagarde directrice générale du FMI, mardi 28 juin, pour un mandat de cinq ans. Elle devient ainsi la première femme à occuper ce poste.

Après les annonces successives des soutiens de la Chine, de la Russie, du Brésil et des Etats-Unis, le choix de Christine Lagarde par le conseil d'administration du Fonds était quasiment acquis. Restait à savoir quand ce choix interviendrait, les vingt-quatre membres du conseil – parmi lesquels une seule femme – ayant jusqu'à jeudi pour se pononcer.
Christine Lagarde, 55 ans, a été préférée "par consensus", selon le communiqué du FMI, au gouverneur de la Banque du Mexique, Agustin Carstens, 53 ans. Celui-ci lui a adressé ses vœux de réuLa Française, qui prendra ses fonctions le 5 juillet, a fait part sur Twitter de son "honneur" et de sa "joie" d'être désignée directrice du FMI.

>> Lire l'analyse de Sylvie Kauffmann, directrice éditoriale du Monde, sur les forces et faiblesses de la candidature de Christine Lagarde et les réactions à sa désignation.
  • Les dossiers qui l'attendent au FMI
C'est le dossier brûlant de la crise de la dette en Europe qui attend Christine Lagarde dès sa prise de fonction. Interviewée sur TF1 peu après l'annonce de sa désignation, Christine Lagarde a notamment insisté sur l'action du FMI en Grèce, et a appelé les partis politiques grecs à "l'entente nationale" alors que le Parlement examine l'adoption de nouvelles mesures de rigueur.
Une éventuelle sortie de la Grèce de la zone euro "est un scénario du pire", qu'il faut "impérativement et par tous les moyens éviter", a ajouté Mme Lagarde. "Il faut que tous les prêteurs se penchent au chevet de la Grèce, mais il faut que la Grèce se prenne en charge de manière responsable", a relevé la nouvelle responsable du FMI. Cela implique toutefois de rester "attentif" aux "plus démunis".
Sur la régulation, les flux de capitaux ou le système monétaire, le FMI et la présidence française du G20, incarnée jusqu'ici par Christine Lagarde, sont plus ou moins au diapason. La Française devra également se pencher sur la question de la gouvernance du FMI, les pays émergents y réclamant plus de poids. Sa déclaration de candidature résume ses positions : elle n'annonce pas de révolution mais entend "renforcer" la "légitimité" du FMI, avec une meilleure représentation des puissances émergentes, son "efficacité", notamment en matière de "surveillance" des déséquilibres mondiaux, et enfin "sa capacité à répondre aux besoins des pays membres".
  • Un remaniement ministériel en vue
Le départ de Christine Lagarde pour Washington entraîne la nomination d'un nouveau ministre de l'économie à Bercy. Nicolas Sarkozy et François Fillon se sont entretenus mardi soir pendant une vingtaine de minutes, juste après que Mme Lagarde eut été nommée au FMI, ce qui laisse augurer l'imminence d'un remaniement de l'équipe gouvernementale. Christine Lagarde participera toutefois au conseil des ministres, mercredi matin à 10 heures ; l'annonce du remaniement ne devrait donc pas intervenir d'ici là, comme l'a d'ailleurs confirmé Matignon à l'agence Reuters.
Les noms de trois poids lourds de la majorité circulent pour lui succéder. Ceux de l'actuel ministre du budget, François Baroin, et de sa collègue de l'enseignement supérieur, Valérie Pécresse, reviennent régulièrement dans les cabinets ministériels ; celui du ministre de l'agriculture Bruno Le Maire est aussi souvent cité, mais ce proche du président est déjà très sollicité pour organiser la future équipe de campagne en vue de la présidentielle de 2012 et devrait donc passer son tour.
Selon plusieurs sources à l'UMP, M. Baroin aurait la préférence à présent du tandem exécutif, après que Mme Pécresse a tenu longtemps la corde.
Le remaniement sera aussi l'occasion de pourvoir le portefeuille des anciens combattants, vacant depuis le remaniement de novembre dernier, et celui de la fonction publique, après la démission fin mai du secrétaire d'Etat George Tron, inculpé pour viol et agression sexuelle. Le remaniement pourrait intervenir dès mardi soir ou mercredi matin, juste avant le départ du premier ministre, François Fillon, qui quitte Paris dans la soirée de mercredi pour un déplacement au Cambodge et en Indonésie.
>> Faites le bilan de l'action de Christine Lagarde à Bercy avec le blog Contes publics.
  • Les démélés judiciaires auxquels elle doit encore faire face
Malgré sa nomination à la tête du FMI, Christine Lagarde n'en a pas pour autant terminé avec ses ennuis judicaires en France, même si Mme La. La menace la plus immédiate concerne l'enquête pour "abus d'autorité" que pourrait lancer le 8 juillet la Cour de justice de la République (CJR) contre elle, dans le cadre de l'affaire Tapie. Le parquet général reproche notamment à Mme Lagarde d'avoir recouru à un arbitrage en faveur de Bernard Tapie dans la vente litigieuse d'Adidas par le Crédit lyonnais en 1993, alors qu'il s'agissait de deniers publics. S'il y a enquête aboutissant au renvoi de Mme Lagarde devant la CJR, elle sera longue et, le cas échéant, la ministre ne serait pas jugée avant plusieurs années.
Parallèlement, Mme Lagarde pourrait être éclaboussée par l'enquête ouverte mi-juin par le parquet de Paris sur le rôle de hauts fonctionnaires qui ont conclu l'arbitrage favorable à Bernard Tapie. Cette enquête pour "abus de pouvoirs sociaux" ne la cible pas directement, mais vise implicitement Jean-François Rocchi, le président du Consortium de réalisation (CDR), la structure publique où étaient cantonnés les actifs douteux de l'ex-Crédit lyonnais.
>> Lire notre éclairage "Comment l'affaire Tapie a rattrapé Christine Lagarde" et un décryptage des pressions judiciaires sur la future directrice générale du FMI.

Aubry n'est pas candidate à la primaire

Martine Aubry a annoncé ce mardi qu'elle était candidate... à la présidentielle. L'analyse de Christophe Barbier.




Le président de l’intérêt général

A l’occasion de sa conférence de presse sur le grand emprunt et les programmes d’investissements d’avenir, Nicolas Sarkozy s’est félicité du fait qu’en dix-huit mois 20 milliards d’euros ont déjà été engagés sur 400 projets et pôles d’excellence car il s’agit de préparer la France au défi du XXIe siècle et de la mondialisation. Mais au-delà de ce premier bilan, en filigrane, le président de la République a subtilement brossé le portrait du futur candidat qu’il sera. Il estime que son devoir est de gouverner jusqu’au bout du mandat, mais cela ne l’empêche pas de tacler ses futurs adversaires. Aux socialistes, qui veulent revenir sur la diminution du nombre des fonctionnaires et sur la réforme des retraites, il rappelle l’erreur des 35 heures, prédit l’explosion de la dette et des déficits et rappelle qu’il n’y a pas d’alternative au nucléaire. A l’usage du Front national et de Mme Le Pen, il qualifie d’insensé et de folie le projet de sortie de l’euro. Entre ces politiques de la gauche et de l’extrême droite, Nicolas Sarkozy se positionne comme le président du bon sens, du juste milieu, garant de l’intérêt général et des intérêts supérieurs de la nation. Il se présente comme le président protecteur qui a su éviter la pire des catastrophes de la crise, maintenu notre modèle social et qui a préservé le pouvoir d’achat, même celui des fonctionnaires. Certes, il ne nie pas la déception et les souffrances liées au chômage et se déclare choqué par les salaires faramineux des patrons « qui vivent dans un autre monde ». Lui, Nicolas Sarkozy, a déjà un pied dans le monde de 2012 !