TOUT EST DIT

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samedi 11 juin 2011

Marine Le Pen ou la politique du prétoire

 Marine Le Pen multiplie les plaintes pour diffamation depuis qu'elle a pris la tête du Front national. Une politique qui s'inscrit pleinement dans sa stratégie de dédiabolisation du FN.
Depuis qu'elle est présidente du Front national, Marine Le Pen n'hésite plus à brandir l'arme juridique quand elle s'estime victime de diffamation. La plainte est devenue un instrument incontournable de la nouvelle stratégie de communication du FN. 
Contacté par LEXPRESS.fr, le vice-président du FN Louis Aliot, déclare que son parti va porter plainte contre les auteurs de deux livres consacrés au FN qui ont été publiés récemment. Une biographie de Marine Le Pen écrite par la journaliste Caroline Fourest et l'essai Le Front antinational signé par la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet.  
"Nous ne nous laisserons plus insulter sans rien faire, le livre de Caroline Fourest (une biographie consacrée à Marine Le Pen ndlr) est truffé d'inexactitudes. Nous ne pouvons pas accepter de lire que le père de Jean-Marie Le Pen pêchait du poisson pour les Allemands en 1942, nous souhaitons simplement rétablir la vérité", affirme Louis Aliot.  
Dans la journée de samedi, Marine Le Pen enfonçait le clou en déclarant qu'elle envisageait également de porter plainte contre Jacques Chirac. Dans une interview au Figaro, l'ex-Président avait qualifié le FN de "parti de nature raciste et xénophobe." 
Ces procédures n'ont rien de décisions isolées. En l'espace de six mois, une vingtaine de plaintes a été déposée par Marine Le Pen. Dès qu'elle s'estime calomniée, la nouvelle présidente du FN saisit les tribunaux. Parmi les personnes visées récemment, Rama Yade, Jean-Luc Mélenchon, Fadela Amara ou bien encore le rappeur Cortex....  
Une cellule juridique au Front
La technique d'intimidation a fait ses preuves. Mis en accusation pour des propos très musclés, le directeur de publication de Rivarol, Jérôme Bourbon, confie qu'il fait beaucoup plus attention à ses propos. "Sur le fond rien n'a changé, sur la forme je suis beaucoup plus mesuré. Marine Le Pen n'hésitant pas à sortir l'artillerie lourde dès qu'elle se sent critiquée". 
Trésorier du parti et avocat de formation, Wallerand de Saint-Just est la pierre angulaire du dispositif. Joint par LEXPRESS.fr, il reconnaît qu'il y a "beaucoup de procédures judiciaires intentées" depuis que Marine Le Pen est présidente du Front. Un changement de ton qui le réjouit, "le FN ne se fera plus marcher sur les pieds désormais".  
Depuis quelques temps, cette cellule juridique s'est même étoffée avec l'arrivée de Gilbert Collard. "Il va prendre de plus en plus d'affaires à son compte", confie Louis Aliot. L'avocat marseillais "va plaider les procès les plus médiatiques comme celui du rappeur Cortex", ajoute Wallerand de Saint-Just.  
"Cette multiplication des plaintes s'inscrit dans la quête de crédibilité et de dédiabolisation de Marine Le Pen", analyse Jean-Yves Camus. "Elle avait même menacé de porter plainte contre les commentateurs politiques qui parlaient d'extrême droite, ça aurait fait beaucoup de monde", précise ce politologue et chercheur associé à l'IRIS. 
Cette attitude procédurière tient également au parcours personnel de Marine Le Pen, selon le sociologue Sylvain Crépon. "A travers cette multiplication des plaintes, on perçoit une blessure narcissique, avance-t-il. Elle cherche à la fois à rénover l'image du FN mais également à sauver l'honneur de son père, à dédiaboliser son parti mais également à terroriser les journalistes qui pourraient l'attaquer." 
Une stratégie de communication
Pour l'historien Nicolas Lebourg, ce comportement s'inscrit dans le cadre d'une nouvelle stratégie de communication. "Tout au long de sa carrière politique, Jean-Marie Le Pen s'est servi des plaintes intentées contre lui pour se victimiser. Sa fille n'a pas le même passé et ne peut donc plus utiliser ce procédé. Aujourd'hui, la situation s'est inversée, c'est elle qui porte plainte pour se poser en victime des attaques qu'elle déclare subir."  
L'arme judiciaire a souvent été utilisée dans l'histoire du Front. Pour le politologue Erwan Lecoeur, "le FN s'est toujours placé dans l'utilisation médiatique du juridique, c'est une culture familiale (Marine Le Pen et son père ont fait des études de droit, ndlr). Jean Marie Le Pen a perdu beaucoup de procès en diffamation mais ceux qu'il a réussi à gagner, il s'en vante encore".  
Un avis que partage Lorrain de Saint-Affrique, ancien conseiller en communication de Jean-Marie Le Pen entre 1984 et 1994, ayant rompu avec l'extrême droite. "Je me rappelle qu'après plusieurs procès perdus, Jean-Marie Le Pen m'avait dit: 'Les magistrats sont en train de remarquer qu'on les instrumentalise'. Ils se sont rendus compte que le FN ne cherchait pas à réparer un préjudice mais à profiter de l'aspect publicitaire de certaines décisions de justice. D'ailleurs très souvent Jean-Marie Le Pen annonçait une plainte mais n'allait pas au bout de sa démarche. Marine Le Pen a systématisé cette stratégie et ne laisse plus rien passer."  

L'Allemagne doit aider la Grèce (Merkel)

L'Allemagne n'a d'autre choix qu'aider les pays de la zone euro en proie à une crise de leurs finances publiques, sinon la reprise allemande pourrait être compromise, a averti la chancelière Angela Merkel samedi dans un message vidéo.

A la question "la crise de la dette dans la zone euro peut-elle menacer la reprise économique allemande ?", elle a répondu: "Si nous n'agissons pas comme il faut, cela peut arriver, mais c'est exactement ce que nous voulons éviter".


"Et c'est pourquoi nous disons que nous ne pouvons pas autoriser une banqueroute incontrôlée d'un pays, et qu'au contraire il faut d'une part regarder comment faire pour augmenter la compétitivité des pays qui sont en difficulté, comment leur donner la possibilité de réduire leur dette, et d'autre part se montrer solidaire", a ajouté Mme Merkel.

"Nous ne pouvons rien faire qui mette à nouveau en danger la reprise mondiale et donc celle de l'Allemagne", a-t-elle dit. "La faillite de la banque Lehman Brothers a eu pour conséquence chez nous (en Allemagne) une chute de près de 5% du PIB", une répétition d'un tel scénario doit "absolument être évitée", a encore fait valoir la chancelière.

Vendredi, le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a obtenu le soutien de principe des députés pour une nouvelle aide à la Grèce, après un ardent plaidoyer au Bundestag pour la "responsabilité allemande envers l'Europe". "C'est nous qui avons le plus bénéficié de l'euro", a notamment souligné le ministre, en appelant à la solidarité.

Mme Merkel a abondé dans ce sens: l'euro "a fait beaucoup de bien" à l'Allemagne. Et "c'est pourquoi il est bon et juste que nous nous engagions pour l'euro en tant que monnaie forte", a-t-elle ajouté.

La Grèce prête à demander au secteur privé de payer une partie de sa dette

Sous l'insistance de l'Allemagne, Athènes est prête à envisager un effort de ses créanciers.

La nouvelle aide à la Grèce doit comprendre entre autres une participation "volontaire" du secteur privé, a indiqué vendredi le ministre grec des Finances, Georges Papaconstantinou. La zone euro "analyse la faisabilité d'un rééchelonnement" de la dette grecque sur une base volontaire de la part des créanciers, a déclaré peu après à Bruxelles un porte-parole de la Commission européenne.
La nouvelle aide à la Grèce doit être une combinaison "du montant provenant des privatisations prévues par le pays, une participation volontaire du secteur privé et les éventuels prêts" des pays de la zone euro, a souligné Papaconstantinou au cours d'une conférence de presse. Cette aide devrait couvrir les besoins du pays pour les "deux ou trois années à venir", c'est-à-dire 2012, 2013 et éventuellement 2014, a souligné le ministre.
110 milliards d'euros d'aide en 2010
Selon Papaconstantinou, "les efforts" de tous les partenaires européens se conjuguent pour "trouver une solution pour la Grèce lors du sommet de l'Union européenne (UE) en juin". Le sommet européen est prévu pour les 23 et 24 juin et sera principalement centré sur la nouvelle aide à la Grèce.
La discussion sur la participation du secteur privé à la nouvelle aide au pays se trouve au centre des discussions dans l'UE et à l'origine des divergences des pays de la zone euro et de la Banque centrale européenne (BCE). Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a obtenu vendredi le soutien de principe des députés pour une nouvelle aide à la Grèce après celle accordée au pays en 2010, d'un montant de 110 milliards d'euros en mai 2010.
Une nouvelle aide de 90 milliards d'euros
L'Allemagne réclame avec insistance une participation des créanciers privés, banques, assureurs et fonds. Le montant de cette nouvelle aide est estimé au total à quelque 90 milliards d'euros. Les modalités proposées par Berlin pour cette participation du privé - un échange de toutes les obligations en circulation pour des titres de maturité beaucoup plus longues - vont trop loin pour ses partenaires, pour qui elles s'apparentent à la restructuration de la dette qu'ils veulent éviter à tout prix.
C'est le cas de la France, dont les banques sont les premières créancières de la Grèce, et surtout de la Banque centrale européenne (BCE). Mais Schäuble a affirmé qu'il ne ferait rien sans l'aval de la BCE.

Fonds souverains : la Norvège détrône Abou Dhabi

Le fonds de pension public norvégien est désormais le plus gros au monde, grâce notamment aux revenus pétroliers.

 

Le fonds de pension public norvégien a détrôné l'Autorité d'investissement d'Abou Dhabi (ADIA) pour devenir le plus gros fonds souverain au monde, selon un rapport publié cette semaine par un cabinet de conseil américain. Alimenté par les revenus pétroliers de l'État, le fonds norvégien pèse 560,5 milliards de dollars contre 342 milliards de dollars pour le fonds souverain de l'émirat, affirme le cabinet américain Monitor Group.
Les comparaisons sont toutefois compliquées car l'ADIA ne publie pas de rapports de performance contrairement au fonds norvégien, qui fait le point tous les trimestres. Le SWF Institute, organisation spécialisée dans le suivi des fonds souverains, opère ainsi avec des chiffres très différents et estimait à 627 milliards de dollars la valeur de l'ADIA dans son classement de juin, ce qui en fait le plus gros bas de laine public au monde.
Versements amputés à Abou Dhabi
Mais, selon Monitor Group, dont les analyses sont reprises par le journal d'affaires Dagens Naeringsliv (DN), le fonds d'Abou Dhabi a en réalité fondu pour cause de dépenses publiques croissantes - amputant les versements visant à l'abonder -, de pertes liées à la crise financière et d'investissements malheureux.
"Même si ce n'est pas une fin en soi d'être le plus gros, c'est toujours agréable de voir que le fonds grossit", a réagi le ministre norvégien des Finances, Sigbjoern Johnsen, par la voix d'un porte-parole. "D'une manière générale, nous sommes l'objet de beaucoup d'intérêt sur notre façon de gérer nos revenus pétroliers. Plusieurs sources indépendantes font notamment de nous les champions en matière de transparence", a-t-il ajouté, disant vouloir faire du fonds norvégien "le fonds le mieux géré au monde". Outre ses rapports d'étape trimestriels, le fonds norvégien publie ainsi tous les ans la liste de ses investissements en actions, en obligations et, depuis récemment, dans l'immobilier.
Un porte-parole de la banque centrale norvégienne, chargée de la gestion du fonds au jour le jour, a décliné tout commentaire. Mais, en coulisses, plusieurs responsables de la Norges Bank abondent dans le sens des conclusions de Monitor Group, selon DN.

Vers un duel franco-mexicain pour prendre la direction du FMI

La limite de dépôt des candidatures est dépassée. Agustin Carstens et Christine Lagarde devraient être les deux seuls candidats.
Le Fonds monétaire international se dirige, sauf surprise, vers un duel entre le Mexicain Agustin Carstens et la Française Christine Lagarde pour prendre le poste de directeur général de l'institution. La limite pour déposer sa candidature à la succession du Français Dominique Strauss-Kahn a été dépassée à vendredi minuit, heure de Washington (6 heures samedi à Paris). Mais le FMI a prévenu qu'il ne ferait aucune déclaration sur les noms des candidats avant lundi. Entrés en lice très tôt, Lagarde et Carstens se disputeront, selon toute vraisemblance, les voix des 24 membres du conseil d'administration du Fonds.
"Nous avons clairement deux candidats remarquables", estime Domenico Lombardi, professeur d'économie et ancien conseiller du FMI. Christine Lagarde, ministre des Finances depuis quatre ans, peut faire valoir une expérience solide au sein du G20 et de la zone euro. Le soutien des sept administrateurs de l'Union européenne lui est acquis. Agustin Carstens, qui cumule quatre ans et demi à la tête du ministère des Finances puis de la banque centrale du Mexique, "a plus d'expérience" au sein des institutions financières internationales, estime Fred Bergsten, directeur du Peterson Institute, un centre de recherches de Washington sur l'économie internationale.
Il avait accédé au poste de directeur général adjoint du FMI (soit son numéro trois) en 2003, époque où Christine Lagarde était encore avocate. Vendredi, à New Delhi, il a défendu ses "qualifications", espérant que la désignation se ferait au "mérite". "Si je devais être élu, je mobiliserais toutes les ressources pour aider l'Europe", a-t-il assuré dans un entretien au quotidien allemand Die Welt à paraître samedi. Un troisième candidat déclaré, le président de la banque centrale du Kazakhstan Grigori Martchenko, a finalement renoncé. "J'ai décidé de ne pas y aller", a-t-il déclaré vendredi à la chaîne américaine CNN, estimant "plus ou moins évident que Christine Lagarde va être élue". Il n'avait pas fait campagne.
Tradition
Des États membres parmi les plus importants, au premier rang desquels les États-Unis, le Japon et la Chine, se donnent encore du temps pour se prononcer. Le FMI s'est fixé pour objectif de désigner un nouveau dirigeant le 30 juin. Le Fonds prévoit de publier le nom des candidats en début de semaine prochaine, s'il y a trois candidats ou moins, ce qui paraît très probable. S'il y avait quatre candidats ou plus, le conseil d'administration se donnerait une semaine pour se mettre d'accord sur trois personnes, les mieux placées, qu'il veut entendre à Washington. Pour Colin Bradford, économiste spécialiste du FMI, "ce serait une surprise qu'un candidat apparaisse à la dernière minute" et se lance dans une campagne avec trois semaines de retard sur Carstens et Lagarde.
Les États-Unis et l'Europe se partagent, en vertu d'une convention non écrite, la direction du FMI et la présidence de la Banque mondiale depuis 1946. La tradition pourrait durer encore un peu. L'Union européenne a poussé très fort en faveur de sa candidate et, "dans ces circonstances, il est difficile de gagner contre Christine Lagarde", souligne Colin Bradford. Mais cette tradition est très critiquée. "Il est temps à présent pour un non-Européen, particulièrement un Africain, d'être à la tête du FMI", a affirmé l'Union africaine dans un communiqué daté de mercredi.
Or, vendredi, l'ancien ministre des Finances sud-africain Trevor Manuel, qui a été le seul Africain cité comme candidat possible, a déclaré sur la radio publique SAfm qu'il ne postulerait pas. Et le ministre des Finances de la République démocratique du Congo, Matata Mapon, a affirmé à Lisbonne que l'Afrique subsaharienne se rangerait derrière Christine Lagarde. L'Asie orientale et du Sud, malgré son émergence spectaculaire dans l'économie mondiale, n'aura vraisemblablement pas de candidat.




FMI : Agustin Carstens promet de soutenir l'Europe s'il est élu
 Le Mexicain Agustin Carstens, candidat au poste de directeur général du Fonds monétaire international, promet à l'Europe un soutien total. "Si je devais être élu, je mobiliserais toutes les ressources pour aider l'Europe", affirme-t-il, samedi, dans un entretien au quotidien allemand Die Welt, alors que le journal l'interroge sur son image de "dur", qui pourrait se montrer moins enclin à aider les pays en difficulté qu'un Européen.
M. Carstens, actuellement gouverneur de la Banque du Mexique, répète qu'il peut apporter "un regard extérieur" sur les problèmes de la zone euro, parce qu'il ne les voit pas à travers "des lorgnettes européennes". "Et si je n'arrivais pas à imposer mes vues, je n'aurais aucun problème à céder mon mandat", continue-t-il.
Fin mai, le Mexicain avait relevé, lors de son passage en Espagne qu'"après trois ans de crise et avec un directeur général européen, la crise européenne n'était pas résolue". Un non-Européen verrait "les problèmes européens avec plus d'objectivité (...) ce qui pourrait donner un plan d'action peut-être un peu plus sévère mais aussi plus réaliste", avait-il poursuivi.
Sa seule adversaire dans la course au poste de directeur général, la ministre française des finances, Christine Lagarde, a déjà obtenu le soutien des sept administrateurs de l'Union européenne au FMI. Elle semble bien partie, compte tenu de la tradition qui veut qu'un Européen dirige le FMI.
Mais ce soutien rapide et unanime pourrait être le signe d'une influence politique trop forte sur le FMI, insinue M. Carstens. "Quand le personnel est choisi en fonction d'intérêts nationaux, l'influence politique a tendance à croître plutôt qu'à diminuer", juge-t-il.

Ni à l’Est, ni à l’Ouest, mais vers le haut

Contrairement à l’Union européenne en plein marasme économique et politique, c’est un pays sûr de lui et en plein essor économique qui se rend aux urnes le 12 juin. Une puissance émergente érigée en modèle par les démocraties moyen-orientales naissantes que l'UE n'a pas su garder dans son giron. 

Cela faisait des années qu'on se demandait si la Turquie était européenne ou asiatique, si elle était tournée vers l'Occident ou vers l'Orient, et on a enfin trouvé la réponse. En fait, la question était mal posée. La Turquie ne va ni vers l'est ni vers l'ouest, elle va vers le haut. En seulement une décennie, la Turquie a vu son PIB multiplié par quatre, passant de 200 à 800 milliards de dollars (550 milliards d'euros); elle a triplé son revenu par habitant, qui est passé de 3 000 à 10 000 dollars; elle a réduit sa dette publique de 75 % à 40 % du PIB et ramené sa prime de risque très en dessous du niveau de la plupart des pays du Sud de l'Europe.
Entre-temps, l'Union européenne stagne, et beaucoup se demandent si elle n'a pas cessé de progresser, si son avenir n'est pas marqué par le déclin, si les Européens ne sont pas résignés à un recul de leurs niveaux de vie.

Les calvinistes islamiques

Alors même que l'Europe débattait sur l'adhésion de Turquie, s'offrant le luxe de négliger ce pays, voire de le mépriser ouvertement, les Turcs ont battu en brèche tous les stéréotypes et ont volé de succès en succès. Certains parlent même de "calvinistes islamiques" pour décrire la nouvelle classe d'entrepreneurs turcs, apparue dans les villes les plus dynamiques d'Anatolie. Cette Turquie pauvre et analphabète qu'on nous a si souvent dépeinte, qu'on disait peuplée de paysans anatoliens ignorants, avides de prendre d'assaut la forteresse du bien-être européen, appartient au passé.
Dans les rues de Rabat, de Tunis ou du Caire, l'Europe a cessé d'être le modèle à suivre au profit de la Turquie, un pays qui démontre qu'il peut être à la fois musulman, démocratique et prospère, et même avoir une politique extérieure indépendante, non soumise aux diktats de l'Occident. Apparue dans un espace méditerranéen sous le joug de dictatures serviles, la Turquie [du Premier ministre] Recep Tayyip Erdogan laisse présager un avenir où de nombreux régimes indépendants et fiers n'hésiteront plus à montrer du doigt l'Europe quand elle appliquera deux poids, deux mesures face à Israël, à l'ouverture des marchés, aux droits de l'homme, à la prolifération nucléaire ou à l'immigration.
On le voit, les Turcs n'ont jamais connu un meilleur niveau de vie ni envisagé l'avenir avec autant d'optimisme. Dès lors, rien d'étonnant à ce que personne ne doute de la victoire du Parti pour la justice et le développement (AKP) aux élections législatives de dimanche prochain: le seul doute (et source d'inquiétude) est de savoir s'ils obtiendront les 367 sièges (sur un total de 560) qui permettront au parti d'Erdogan de modifier unilatéralement la Constitution sans devoir organiser de référendum, et d'accentuer à ce que beaucoup perçoivent comme une dangereuse dérive autoritaire qui se manifesterait depuis quelques années.

Erdogan pourrait s'inspirer du modèle russe

Jusqu'à présent, la perspective d'adhésion à l'UE a eu des répercussions très favorables sur la politique intérieure de la Turquie: pour les islamistes, l'Europe était la garantie que les militaires n'interviendraient pas dans la vie politique, comme ils l'avaient souvent fait par le passé; pour les militaires, les laïques et les libéraux, que la majorité islamiste ne leur impose pas leurs valeurs et ne restreigne pas les droits de l’homme et les libertés individuelles.
Mais au fur et à mesure que le lien avec l’Europe s’affaiblit – les négociations d’adhésion sont complètement bloquées et le nombre de Turcs persuadés que la procédure d’adhésion va aboutir est chaque fois moins important – les islamistes de l’AKP augmentent leur marge de manœuvre.
C’est pourquoi, même si la Turquie d’aujourd’hui est infiniment plus démocratique, plus riche et plus stable que celle qui avait obtenu une promesse d’adhésion en 1999 et qui avait entamé les négociations en 2005, d’aucuns craignent qu’une majorité aussi forte ne permette aux islamistes de se détacher du poste démocratique auquel l’Europe les avait ancrés.
Si pour de nombreux Arabes, la Turquie est un modèle, la référence des islamistes du AKP n’est pas nécessairement notre idéal européen: certaines mauvaises langues vont même jusqu’à dire qu’Erdogan pourrait bien vouloir s’inspirer d’un autre archétype européen: la Russie de Poutine, un autoritarisme déguisé en démocratie, avec des médias et des entreprises complètement assujettis au pouvoir politique.
Si cette dérive autoritaire venait à s’imposer, l’Union Européenne (qui a fait preuve de maladresse et de myopie dans ses relations avec la Turquie) aura laissé passer une occasion stratégique unique de faire de la Turquie un pays phare de la démocratie qui aurait pu rayonner dans toute l’Asie Centrale et le Caucase, le Proche-Orient et le nord de l’Afrique.

Elections

Super Erdogan vers un troisième mandat

Au cours de cette dernière législature, des inquiétudes concernant [le Premier ministre Recep Tayyp] Erdogan s'expriment de façon croissante. L'excès de confiance d'Erdogan qui se voit comme "le seul homme de la situation" suscite de craintes. A fortiori lorsqu'il évoque la possibilité que la Turquie évolue vers un système présidentiel inspiré du modèle français voire russe. Le gouvernement AKP, qui considère le développement non pas comme un moyen mais comme une fin en soi et qui considère que "la croissance doit se faire à n'importe quel prix", ne prête par exemple aucune attention à la défense de l'environnement. 
Malgré tout cela, grâce à ses succès sur le plan économique et parce qu'il a réussi à faire reculer le système imposant la tutelle d'une oligarchie bureaucratique sur la société, il est évident que l'AKP va rempiler pour une troisième législature.
Mais pour qu'une démocratie puisse fonctionner correctement, il faut une opposition conséquente et attachée aux principes démocratiques. Les tentatives menées par Kemal Kiliçdaroglu, nouveau président du Parti républicain du peuple [CHP, kémaliste, opposition parlementaire], pour que son parti ne soit plus systématiquement associé à l'appareil d'Etat, de même que ses tendances désormais affichées à vouloir défendre les libertés, permettent d'envisager que le CHP puisse un jour véritablement incarner cette opposition démocratique. 
La possibilité par ailleurs que le Parti pour la paix et la démocratie [BDP, pro-kurde] puisse cette fois être représenté à l'Assemblée nationale par un groupe plus important [il dispose actuellement de 20 députés] représente un autre enjeu de taille de ce scrutin dans la mesure où cela permettrait aux Kurdes d'exprimer leurs revendications dans un contexte démocratique. Sahin Alpay, Zaman, Istanbul (extraits) 
Une version inégrale et en français de cet article est disponible sur le site de Courrier international.

Dette publique grecque : danger sur la zone euro

Si la Grèce cessait subitement de rembourser une partie de sa dette, une spirale infernale risquerait de se déclencher en Europe : les partenaires européens pourraient cesser d’accorder leur aide à la Grèce et Athènes pourrait sortir de l’euro afin de monétiser sa dette en drachmes (l’ancienne monnaie grecque), d’où une forte dévaluation. Cela permettrait certes de restaurer la compétitivité, la Grèce ne réalisant que 35 % de ses échanges avec des pays de la zone euro. Mais si une monnaie trop forte est pénalisante, une monnaie trop faible a également des inconvénients : sachant que 80 % de la dette grecque est détenue par l’étranger et libellée en euros, la Grèce ne verrait son endettement que très faiblement réduit. Le renchérissement des importations entraînerait un choc inflationniste et une perte de pouvoir d’achat. Ensuite, une faillite grecque exposerait l’Europe à un choc financier terrible. Certes, la Grèce ne contribue au PIB de la zone euro qu’à hauteur de 2,6 % et ne représente que 4 % de ses déficits cumulés. Mais ce qui nous pend au nez, c’est un vaste choc provoqué, comme en 2008, par l’arrêt de la distribution de crédit par les banques. Le risque global généré par la dette des « PIGS » (Portugal, Italy, Greece, Spain) est bien réel. Bien que d’ampleur et de nature différentes (140 % du PIB de la Grèce, premier pays touché ; dette croissante depuis 10 ans pour le Portugal ; dette plus récente liée à l’éclatement de la bulle immobilière pour l’Espagne et l’Irlande), ces dettes sont contagieuses car elles sont liées aux créances interbancaires européennes. La France, l’Allemagne, le Royaume Uni, qui détiennent 700 milliards de créances, sont fortement exposés. En cas de défaut de paiement des Etats, les banques devraient payer, mais contrairement à la crise de 2008, les Etats ne pourraient plus les renflouer… Ensuite, rappelons que la France compte parmi les pays les plus endettés : elle est passée de 35 % d’endettement dans les années 1980, à 82 % en 2010 (1.500 milliards d’euros !). Si l’on veut éviter la déstabilisation générale de la zone euro, déjà mise à mal par la guerre des monnaies et la concurrence déloyale asiatique, sauver la Grèce est donc une absolue nécessité. Mais la politique d’austérité prônée par le FMI ou l’UE ne permettra pas à elle seule un rééquilibrage, l’effort demandé aux ménages devenant insupportable et risquant de détruire ce qui reste de croissance. Dans ce contexte de récession, la diminution brutale des dépenses publiques accélère donc la chute du PIB, qui diminue plus vite que la dette publique. Et le fait que les prêts consentis à la Grèce le soient actuellement à des taux supérieurs à sa croissance nominale, aggrave l’endettement du pays. Face à ce dilemme, la solution pourrait résider dans des prêts à taux moindres et dans une relance de la croissance par l’investissement, comme le proposent, dans un rapport récent, les experts du Capec (*). Selon eux, il conviendrait de faire de la Banque européenne d’investissement une véritable banque européenne de développement et de créer un Commissariat européen à l’investissement. Une solution intelligente qui implique une vision à long terme et une véritable coordination européenne.
(*) Les Dossiers du Capec : « Grèce. Deux questions pour une proposition de sortie de crise – Juin 2011 », www.fondscapec.

Borloo pose la première pierre

Hier matin sur RTL, Jean-Louis Borloo a véritablement posé sa première pierre pour l’élection de 2012, au point que tous ceux qui l’ont entendu sont désormais convaincus qu’il sera bien candidat. Le détonateur de cette accélération est la disparition de DSK de la scène politique. L’absence d’un candidat socialiste au profil centriste a créé un appel d’air favorable à une candidature Borloo, même si les difficultés qui l’attendent restent nombreuses.Côté positif, Jean-Louis Borloo bénéficie d’un capital de sympathie important lié à sa personnalité, à son style et à ses succès en tant que maire de Valenciennes. Il est par nature un homme de dialogue et de concertation et un rassembleur des bonnes volontés ; il peut faire une campagne attractive pour l’opinion aussi bien sur le terrain que dans les médias, même si son assise politique reste faible autour d’un petit Parti radical et d’une nébuleuse centriste qui a du mal à s’organiser. Son électorat potentiel est sollicité à la fois par MM. Bayrou et de Villepin et surtout par Nicolas Sarkozy. Le président de la République paraît déterminé à empêcher une candidature Borloo qu’il décrit comme de « petites ambitions qui ne déboucheront sur rien », il peut aussi lui savonner la planche en faisant entrer des centristes au gouvernement lors du départ de Mme Lagarde.

Mais le plus difficile pour Jean-Louis Borloo sera d’expliquer aux Français comment lui qui voulait succéder à François Fillon comme Premier ministre de Nicolas Sarkozy est devenu en quelques mois son contempteur après l’avoir servi pendant quatre ans sans états d’âme.

La Croatie à la porte de l'Union européenne

La Commission européenne a donné, ce vendredi, son feu vert à l'entrée de la Croatie dans l'Union européenne en juillet 2013. Cette recommandation doit encore être confirmée par les 27 Etats du bloc.

Près de seize ans après une sanglante guerre d'indépendance, la Croatie s'apprête à s'amarrer pour de bon à l'Union européenne, la Commission de Bruxelles ayant proposé, ce vendredi, aux Vingt-Sept la fin des négociations d'adhésion. 
"La Commission européenne vient juste de proposer au Conseil des ministres européens de boucler les quatre derniers chapitres" sur les 35 qui ont jalonné près de six ans de pourparlers, a indiqué le président de l'exécutif européen José Manuel Barroso dans un communiqué. "Ceci ouvre la voie à ce que la Croatie rejoigne l'UE en tant que 28ième Etat membre". 
Zagreb mise sur une adhésion effective d'ici la mi-2013. Date "indicative" que Barroso a également suggérée ce vendredi, "si cette date indicative proposée par la Commission devait être retenue par le Conseil".  
Après la Slovénie
La Croatie devrait être le deuxième pays issu de l'ex-Yougoslavie à rejoindre l'UE, après la Slovénie, qui fait partie de l'Union depuis 2004. Mais à la différence de la Slovénie, dont l'indépendance de la Yougoslavie a été très rapide et peu coûteuse en vies humaines, celle de la Croatie s'est effectuée dans le sang et les combats, qui se sont poursuivis pendant quatre années (1991-1995). 
Cette fin des négociations d'adhésion survient aussi à quelques jours du vingtième anniversaire de la proclamation d'indépendance de la Croatie et de la Slovénie, le 25 juin 1991, mettant en évidence combien le rapprochement de Zagreb de l'UE a été plus difficile et long que celui de Ljubjlana. Il a notamment été freiné par un différend frontalier entre ces deux pays
L'événement constitue également une étape supplémentaire dans les perspectives européennes des pays des Balkans, qui avaient été solennellement affirmées par les Européens lors du sommet de Thessalonique en 2003.
Le président croate, Ivo Josipovic, avait résumé en décembre devant des journalistes ce que représentait une adhésion de son pays à l'UE, à savoir un basculement définitif du passé vers l'avenir. "On ne peut pas vivre dans le passé, ou bien on ne peut pas y vivre avec succès", avait-il dit. Tout progrès vers l'Union réalisé par un pays des Balkans, ajoutait-il, "élargit l'espace de sécurité et de stabilité de tous les autres" et contribue donc à la réconciliation régionale. 
La Première ministre, Jadranka Kosor, a évoqué un "objectif historique", tout en affirmant que la Croatie s'est toujours sentie plus proche de l'Europe occidentale que des Balkans. Et pourtant, les Croates paraissent plus réservés, voire sceptiques. Selon les derniers sondages, 44,6% d'entre eux soutiennent l'adhésion de leur pays à l'UE, alors que 41,8% s'y opposent. 
Beaucoup considèrent en Croatie que les négociations d'adhésion ont duré trop longtemps, près de six années. Certains ont mal perçu aussi que Bruxelles ait tant insisté sur une pleine coopération de Zagreb avec la justice internationale en matière de crimes de guerre. 


  Retombées économiques
Le gouvernement croate table sur des fonds européens d'environ 3,5 milliards d'euros au cours des deux premières années après son adhésion, selon les responsables locaux. Des experts économiques s'attendent à ce que la perspective d'adhésion encourage aussi les investissements étrangers, nécessaires pour le redressement économique du pays, après deux années de sévère contraction provoquée par la crise économique mondiale. 

L’homme qui a niqué tout un pays

En près de vingt ans de politique, dont plus de dix au pouvoir, Silvio Berlusconi aura marqué son pays comme personne. Alors que son aura se ternit, dans un article qui a beaucoup fait parler en Italie, The Economist estime que l’héritage du Cavaliere "va hanter l’Italie pour les années à venir". 

Silvio Berlusconi a de quoi avoir le sourire. En 74 années d’existence, il a créé un empire médiatique qui a fait de lui l’homme le plus riche d’Italie. Il domine la vie politique depuis 1994 et peut aujourd’hui se targuer du plus long mandat de premier ministre de l’histoire italienne après Mussolini. Il a démenti les innombrables prédictions annonçant sa chute. Pourtant, malgré tous ces succès personnels, l’homme est un dirigeant calamiteux, et ce pour trois raisons.
Deux de ces raisons sont bien connues. La saga sensationnelle de ses parties fines, les soirées “bunga bunga”, est la première, offrant le spectacle consternant d’un premier ministre poursuivi en justice à Milan, accusé de relations sexuelles tarifées avec une mineure. L’affaire du Rubygate a éclaboussé non seulement Silvio Berlusconi, mais tout son pays.
Aussi scandaleuse que soit cette affaire, ses conséquences sur l’action politique du Premier ministre restent limitées. Nous avons souvent dénoncé son second échec : ses magouilles financières. Il a été jugé une dizaine de fois pour cela et il s’en est tiré d’affaire en raison du dépassement des délais de prescription ou parce que Berlusconi a changé la loi. Il est évident que ce ne sont ni ses pratiques sexuelles répréhensibles ni les épisodes louches de sa vie d’homme d’affaires qui peuvent pousser les Italiens à porter sur Berlusconi le constat d’un échec lamentable, voire délétère.

Le mépris total de la situation économique de l'Italie

Son troisième défaut est bien pire : c’est son mépris total de la situation économique de son pays. Peut-être distrait par ses démêlés avec la justice, à aucun moment depuis neuf ans qu’il est premier ministre, il n’a résolu ni même vraiment reconnu les graves lacunes économiques de l’Italie. Autant dire qu’il laissera derrière lui un pays dans une situation épouvantable.
Une conclusion funeste qui surprendra sans doute les observateurs de la crise de l’euro. Le fait est que, grâce à la politique budgétaire restrictive de Giulio Tremonti, le ministre des Finances de Berlusconi, l’Italie est parvenue pour l’heure à échapper au courroux des marchés. C’est le "i" d’Irlande, pas celui d’Italie, qui compose l’acronyme PIGS ["cochons" en anglais, qui désigne les pays européens jugés "irresponsables"], aux côtés du Portugal, de la Grèce et de l’Espagne. L’Italie n’a pas connu de bulle immobilière, ses banques n’ont pas fait faillite. Le marché de l’emploi se maintient : le taux de chômage est à 8 %, contre plus de 20 % en Espagne. Le déficit budgétaire s’élèvera en 2011 à 4 % du produit intérieur brut (PIB), contre 6 % en France.
Mais ces chiffres rassurants sont trompeurs. L’Italie ne souffre pas d’un mal économique aigu : c’est une maladie chronique qui ronge lentement sa vitalité. Quand les économies européennes se contractent, l’économie italienne se tasse plus encore. Dans les années 2000-2010, seuls le Zimbabwe et Haïti ont enregistré une croissance plus lente que l’Italie. Pire, son PIB par habitant a même reculé. En raison de cette absence de croissance, et malgré l’action de Giulio Tremonti, la dette publique reste encore à 120 % du PIB, soit la troisième la plus élevée au sein des pays riches. Et c’est d’autant plus inquiétant que la population italienne connaît un vieillissement rapide.

Au moins un quart des jeunes sans emploi

La faiblesse du taux de chômage moyen cache de plus d’importantes inégalités. Un quart de la jeunesse – et bien plus dans le Sud défavorisé - est sans emploi. Le taux d’activité des femmes, à 46 %, est le plus bas de toute l’Europe de l’Ouest. Un cocktail néfaste de faible productivité et de salaires élevés érode la compétitivité. L’Italie émarge à la 80e place du classement “Doing Business” de la Banque mondiale, derrière la Biélorussie et la Mongolie, et à la 48e place du classement sur la compétitivité mondiale établi par le Forum économique mondial, après l’Indonésie et la Barbade.
Mario Draghi, le gouverneur sortant de la Banque d’Italie (parti prendre la direction de la Banque centrale européenne), a dressé un tableau éloquent dans son percutant discours de départ. Soulignant que l’économie italienne a cruellement besoin de grandes réformes structurelles, il a montré du doigt une productivité stagnante et s’en est pris à des politiques gouvernementales qui "sont incapables de soutenir le développement [de l’Italie], quand elles ne l’entravent pas."
Autant de facteurs qui commencent à affecter la fameuse qualité de vie italienne, réputée à juste titre. Les infrastructures se dégradent. Les services publics sont saturés. L’environnement est mis à mal. Les revenus réels, au mieux, stagnent. Les jeunes Italiens ambitieux quittent leur pays en masse, abandonnant le pouvoir à des élites vieillissantes et déconnectées. Peu d’Européens méprisent autant leurs hommes politiques pourris gâtés que les Italiens.

L'idée fausse d'un impossible changement

Quand nous avons dénoncé Berlusconi pour la première fois dans nos pages, de nombreux représentants des milieux d’affaires nous ont répliqué qu’il n’y avait que son culot d’entrepreneur sans scrupule pour espérer moderniser l’économie italienne. Plus personne ne tient aujourd'hui ce genre de propos. Ils préfèrent désormais dire qu’il n’y est pour rien, la faute à ce pays irréformable.
Cette idée d’un impossible changement est non seulement défaitiste, mais fausse. Au milieu des années 1990, les gouvernements italiens successifs, prêts à tout pour ne pas être écartés de l’euro, mirent en œuvre des réformes impressionnantes. Silvio Berlusconi lui-même est parvenu sporadiquement, entre deux passages par les tribunaux, à introduire des mesures de libéralisation. Il aurait pu faire bien plus s’il avait mis son pouvoir et sa popularité immenses au service d’autre chose que la défense de ses propres intérêts. Ce sont les entreprises italiennes qui vont payer ses plaisirs au prix fort.
Et si les successeurs de Silvio Berlusconi se révélaient aussi négligents que lui ? La crise de l’euro force aujourd’hui la Grèce, le Portugal et l’Espagne à adopter des réformes colossales, envers et contre l’opposition de leur opinion. A court terme, ces réformes seront douloureuses ; mais à long terme, elles pourraient donner à ces économies périphériques un nouvel élan. Certains pays pourraient aussi alléger le fardeau de leur dette en la restructurant. Une Italie non réformée, stagnante, affichant une dette publique bloquée au-dessus de la barre des 120 %, se retrouverait épinglée comme la grande retardataire de la zone euro. Et à cause de qui ? D’un Silvio Berlusconi qui, à n’en pas douter, n’en perdrait pas pour autant le sourire.
 

Familles


Le privilège de la famille est de pouvoir se haïr sans rime ni raison, pour le seul fait d’être intime. Depuis Adam et Eve se poursuit ainsi l’éternel feuilleton de la haine familiale, le plus souvent dans une ambiance à la Simenon, banale, pesante et silencieuse... Il arrive que la querelle perce les murs, bouscule les voisins et requière la justice. Mais que dire de l’affrontement entre Liliane Bettencourt et sa fille Françoise, qui ne cesse d’accumuler les victimes collatérales ? Leur lutte a déjà abattu le ministre Eric Woerth, brisé le bouclier fiscal, ébranlé L’Oréal, et failli éclabousser notre Président... Elle reprend aujourd’hui, plus haineuse que jamais, menaçant cette fois un célèbre avocat et un businessman non moins célèbre, également ami de notre Président. Une morale ? La vaisselle cassée des riches fait toujours plus de bruit et de blessures.

Bettencourt, la saison 2

Les vieilles dames fortunées traversent d’insoupçonnables tourments. Leurs cheveux argentés – eux aussi – semblent inspirer les convoitises davantage que la tendresse. Assises sur un tas d’or, elles souffrent d’une immense pauvreté affective. Entourées de mille et un courtisans, la solitude les hante.

Leona Helmsley, décédée en 2007, régla l’affaire de manière radicale. La richissime New-Yorkaise, déshéritant ses petits-enfants, avait légué 18 millions au “toutou” de la maison. Où l’indigence du cœur ne va pas se nicher… Le bichon maltais vient de mourir, laissant le reliquat du magot à une œuvre caritative. Merci, le chien !

Chez nous, Liliane Bettencourt connaît d’autres tracas. Sa fille tente à nouveau de la placer sous tutelle. La France entière les croyait réconciliées, fausse piste. Un gros chèque consenti par l’octogénaire à un producteur de téléréalité a rouvert les hostilités. L’investissement, a priori rentable, se trouve critiqué sur un plan éthique. La famille l’Oréal dans le “Loft” de Loana, pouah !

Pour changer un peu, “l’abus de faiblesse” ne vise pas le gigolo photographe. On accuse maintenant l’avocat. Le rôle joué par le majordome, les soubrettes, la marquise et le colonel Moutarde reste à éclaircir.

Ainsi s’ouvre la saison 2 d’une inépuisable saga. À 88 ans, blessée mais toujours solvable, Liliane va en payer le prix. Bien décidée, même, à rendre à l’adversaire “la monnaie de sa pièce”. Quelle misère…

La favorite

Elle peut afficher cette décontraction des premières de la classe à qui tout, jusque-là, a semblé réussir. C’est en position de force, en effet que Christine Lagarde va briguer la direction générale du Fonds monétaire international. Le soutien que lui ont accordé, hier, les pays de l’Afrique subsaharienne lui donne un avantage symbolique qui complète son avance arithmétique. Que pouvait-elle espérer de mieux que l’appui des états qui comptent parmi les plus pauvres de la planète pour faire taire les critiques ses détracteurs : ils ne pourront plus moquer si facilement l’ultra libéralisme d’une bourgeoise «candidate des banques». qui n’aurait d’autre programme que de faire rendre gorge aux économies les plus misérables.

Gentiment moquée à son arrivée à Bercy pour son amateurisme, il y quatre ans, la très distinguée ministre de l’économie et des finances de la France fait preuve, dans sa campagne planétaire d’une maturité politique certaine. Elle se donne les moyens de conforter sa réputation d’experte compétente jouant tout à la fois de son assurance naturelle, de son aisance dans la langue anglaise et de son sens aigu de la négociation acquise aux États-Unis.

Elle n’hésite pas, non plus, à utiliser son statut actuel pour faire campagne. Toujours ministre, elle dirige sa maison depuis son avion. La France est généreuse, qui lui laisse autant de liberté pour se vendre, dans une séquence économique aussi cruciale. La ministre est à ce point libérée qu’elle envisage d’aller rencontrer DSK à New York. Bien joué : elle donnera ainsi l’image d’une femme courageuse tout en récupérant les précieux conseils de celui qui fut peut-être le meilleur directeur du FMI depuis 1946. Il en connaît toutes les ficelles…

Mme Lagarde se placerait ainsi, sans le dire, dans sa continuité, ce qui – contrairement aux apparences – serait loin de constituer un handicap. Elle-même brave avec aplomb l’épée de Damoclès suspendue au-dessus de sa tête par la Cour de justice de la République dans le règlement de l’affaire Tapie. Elle se dit sûre d’être épargnée par la justice, son principal obstacle désormais sur la route de Washington.

Si le probable duel avec le patron de la banque centrale du Mexique, Agustin Carstens, sera probablement moins serré qu’elle ne le redoutait, le mano a mano avec la CJR sera sans doute moins facilement gagné qu’elle ne l’imagine. Si rien, en effet, ne peut lui être reproché dans le recours à un tribunal arbitral – une solution fréquente et la plupart du temps juridiquement satisfaisante pour dénouer des affaires inextricables – elle apparaît plus fragile face aux accusations de légèreté voire de complaisance à l’égard de conflits d’intérêt manifestes dans la procédure qui a permis d’accorder plusieurs centaines de millions d’euros à l’homme d’affaires controversé. Et la logique du droit est souvent moins prévisible que celles des courbes tendancielles des taux de profit.

Syrie : « Je ne me tairai pas ! »

« Je ne me tairai pas ! », clame un Syrien sur son blog où il continue à critiquer le régime, sa police, sa répression, malgré les menaces dont il est l'objet. Des dizaines de milliers de Syriens font de même et non seulement protestent, mais manifestent malgré les balles, les arrestations, les tortures.

Le pouvoir syrien s'imagine sans doute que, comme il y a trente ans, il peut recourir à la force la plus brutale : à l'époque il avait écrasé une insurrection dans la ville de Hama, faisant plusieurs dizaines de milliers de morts. L'ordre gouvernemental avait alors été rétabli par le père de l'actuel dictateur.

Cependant les moyens d'hier ne peuvent obtenir un tel résultat aujourd'hui à Deraa, Douma, Baniyas et ailleurs. Bien au contraire, car tout le pays, tout le Moyen-Orient, le monde entier savent ce qui se passe et désapprouvent Bachar el-Assad. Son masque de Président libéral et réformateur est tombé. Il est comme son père un dictateur tortionnaire, s'appuyant sur quatre réseaux de police aussi terribles les uns que les autres. Mais il sent la fragilité de son régime. La minorité alaouite dont il fait partie a de plus en plus de mal à s'imposer aux 80 % de sunnites qui peuplent la Syrie. Il pense sans doute que, s'il montrait quelque ouverture, ce pourrait être compris comme une faiblesse, une faille dans laquelle s'engouffreraient tous les opposants et qu'alors sa famille pourrait être balayée. Pourtant la répression ne résoudra pas le problème et n'assurera pas sa stabilité. Au contraire, elle accroît la détestation dont il est l'objet.

Attentisme

Mais Assad a pensé pouvoir obtenir l'acquiescement, au moins tacite, des Occidentaux en tentant de leur faire croire que la rébellion était une rébellion islamique. Jusqu'à ces dernières semaines, les Occidentaux s'étaient rapprochés de lui considérant que la Syrie pouvait être un élément de poids pour stabiliser la région face à ce genre de menace. Mais plus personne n'est dupe. Aussi, après certes trop d'hésitations, les Occidentaux le condamnent enfin.

Cependant, personne ne semble avoir de stratégie vis-à-vis de la Syrie. Or, pendant que la répression s'intensifie (on en est à plus de 1 200 morts connus), d'autres forces se mettent en marche. L'Iran, par exemple, qui apporte son soutien, ce qui inquiète le Conseil de coopération des pays du Golfe qui craint que l'escalade ne conduise à renforcer dans la région les tensions entre chiites et sunnites. Cela pourrait donner une tout autre ampleur aux divers conflits qui sommeillent ou sont en cours.

L'Europe, les États-Unis, l'Otan ont fait savoir qu'ils n'envisageaient pas d'intervenir comme cela a été le cas en Libye. Deux poids, deux mesures donc. Ce qui relativise le devoir d'assistance à population en danger qui a pourtant été proclamé avec force ces derniers temps...

Quoi qu'il en soit, les choses peuvent dériver, s'aggraver et prendre une plus vilaine tournure encore. Chacun le sait et pourtant reste attentiste... Car les condamnations de l'Onu, si bienvenues soient-elles, ne changent pas grand-chose à cette situation.

Pendant ce temps-là, l'économie syrienne s'effondre, le pays se meurt avec nombre de ses habitants assassinés. Les réfugiés fuient vers la Turquie. Ce qui est désormais certain, c'est que rien ne sera plus comme avant, car la volonté des Syriens, désireux d'entrer libres dans le XXIe siècle, ne faiblit pas.

Ils ne se tairont pas !