Contacté par LEXPRESS.fr, le vice-président du FN Louis Aliot, déclare que son parti va porter plainte contre les auteurs de deux livres consacrés au FN qui ont été publiés récemment. Une biographie de Marine Le Pen écrite par la journaliste Caroline Fourest et l'essai Le Front antinational signé par la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet.
"Nous ne nous laisserons plus insulter sans rien faire, le livre de Caroline Fourest (une biographie consacrée à Marine Le Pen ndlr) est truffé d'inexactitudes. Nous ne pouvons pas accepter de lire que le père de Jean-Marie Le Pen pêchait du poisson pour les Allemands en 1942, nous souhaitons simplement rétablir la vérité", affirme Louis Aliot.
Dans la journée de samedi, Marine Le Pen enfonçait le clou en déclarant qu'elle envisageait également de porter plainte contre Jacques Chirac. Dans une interview au Figaro, l'ex-Président avait qualifié le FN de "parti de nature raciste et xénophobe."
Ces procédures n'ont rien de décisions isolées. En l'espace de six mois, une vingtaine de plaintes a été déposée par Marine Le Pen. Dès qu'elle s'estime calomniée, la nouvelle présidente du FN saisit les tribunaux. Parmi les personnes visées récemment, Rama Yade, Jean-Luc Mélenchon, Fadela Amara ou bien encore le rappeur Cortex....
Trésorier du parti et avocat de formation, Wallerand de Saint-Just est la pierre angulaire du dispositif. Joint par LEXPRESS.fr, il reconnaît qu'il y a "beaucoup de procédures judiciaires intentées" depuis que Marine Le Pen est présidente du Front. Un changement de ton qui le réjouit, "le FN ne se fera plus marcher sur les pieds désormais".
Depuis quelques temps, cette cellule juridique s'est même étoffée avec l'arrivée de Gilbert Collard. "Il va prendre de plus en plus d'affaires à son compte", confie Louis Aliot. L'avocat marseillais "va plaider les procès les plus médiatiques comme celui du rappeur Cortex", ajoute Wallerand de Saint-Just.
"Cette multiplication des plaintes s'inscrit dans la quête de crédibilité et de dédiabolisation de Marine Le Pen", analyse Jean-Yves Camus. "Elle avait même menacé de porter plainte contre les commentateurs politiques qui parlaient d'extrême droite, ça aurait fait beaucoup de monde", précise ce politologue et chercheur associé à l'IRIS.
Cette attitude procédurière tient également au parcours personnel de Marine Le Pen, selon le sociologue Sylvain Crépon. "A travers cette multiplication des plaintes, on perçoit une blessure narcissique, avance-t-il. Elle cherche à la fois à rénover l'image du FN mais également à sauver l'honneur de son père, à dédiaboliser son parti mais également à terroriser les journalistes qui pourraient l'attaquer."
L'arme judiciaire a souvent été utilisée dans l'histoire du Front. Pour le politologue Erwan Lecoeur, "le FN s'est toujours placé dans l'utilisation médiatique du juridique, c'est une culture familiale (Marine Le Pen et son père ont fait des études de droit, ndlr). Jean Marie Le Pen a perdu beaucoup de procès en diffamation mais ceux qu'il a réussi à gagner, il s'en vante encore".
Un avis que partage Lorrain de Saint-Affrique, ancien conseiller en communication de Jean-Marie Le Pen entre 1984 et 1994, ayant rompu avec l'extrême droite. "Je me rappelle qu'après plusieurs procès perdus, Jean-Marie Le Pen m'avait dit: 'Les magistrats sont en train de remarquer qu'on les instrumentalise'. Ils se sont rendus compte que le FN ne cherchait pas à réparer un préjudice mais à profiter de l'aspect publicitaire de certaines décisions de justice. D'ailleurs très souvent Jean-Marie Le Pen annonçait une plainte mais n'allait pas au bout de sa démarche. Marine Le Pen a systématisé cette stratégie et ne laisse plus rien passer."