TOUT EST DIT

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vendredi 30 septembre 2011

Alain Juppé, le retour du recours

A quoi rêve Alain Juppé ? Si le sujet n'avait jamais troublé le sommeil des électeurs français, le ministre des affaires étrangères a discrètement rappelé que la question méritait d'être posée. Jeudi 30 septembre, invité de l'émission "Des paroles et des actes" sur France 2, le maire de Bordeaux est interrogé sur ses désirs. Il répond qu'il "rêve", et "même avec les yeux ouverts", mais se refuse à dire"de quoi". Relancé sur son ambition présidentielle, il exclut de briguer l'investiture suprême... dans le cas où Nicolas Sarkozy est candidat.  "Il peut y avoir des circonstances qui font que... " précise, souriant, Alain Juppé. En fin d'émission, l'ancien premier ministre souligne toutefois, "pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté": "Je pense que Nicolas Sarkozy est notre meilleur candidat, je le soutiendrai...".
Le message est néanmoins passé, Alain Juppé se positionne toujours en recours au président de la République sortant, particulièrement si les "circonstances " justifient l'avènement d'un nouveau candidat. Celles-ci ne manquent pas : la majorité présidentielle a encaissé quatre défaites électorales en cinq ans, aux municipales de 2008, aux régionales de 2010, aux cantonales et aux sénatoriales de 2011. Les doutes sur une victoire en 2012 au sein du gouvernement et de l'UMP sont palpables.
SARKOZY RESTE LE "CANDIDAT NATUREL" DE LA MAJORITÉ
En réalité, la petite phrase d'Alain Juppé n'est pas si nouvelle. Cela fait plusieurs années que le maire de Bordeaux a laissé filtrer, au sein de la majorité, l'hypothèse de sa candidature et multiplié les rappels. Dès juin 2008, fraîchement réélu à la tête de la ville de Bordeaux, Alain Juppé assure dans une interview au Nouvel Observateur qu'il n'est "fermé à rien" en vue de la présidentielle de 2012.
Une année passe et l'édile, qui est encore loin du gouvernement, veut refaire passer le message. En mai 2009, il assure qu'il sera candidat en 2012... lors des législatives et ne manque pas  ré-ouvrir la porte d'une éventuelle candidature à la présidentielle : "Je ne vois pas aujourd'hui de perspectives mais qui sait ? Dans deux ans ou dans trois ans ?" déclare-t-il  au Grand Jury RTL/Le Figaro/LCI. "La vie politique change vite, les circonstances changent vite", précise-t-il alors.
En 2010 encore, la débâcle de la majorité présidentielle aux élections régionales et la plongée de la cote de popularité de Nicolas Sarkozy inspire à Alain Juppé, à nouveau, le rêve d'un destin présidentiel si ce dernier devait échapper à Nicolas Sarkozy. "Le candidat naturel de la majorité en 2012, c'est Nicolas Sarkozy." Mais l'hypothèse d'un recours se précise : "S'il arrivait, pour des raisons qui lui appartiennent, qu'il ne soit pas à nouveau candidat, moi je pense qu'il faudrait des primaires au sein de l'UMP. Je n'exclus pas à ce moment là d'être candidat à la candidature" avance alors l'édile.

HA !

Le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) s'enfonce dans la crise

Difficile moment que cette campagne présidentielle pour le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA). Depuis qu'Olivier Besancenot, candidat du parti en 2002 et 2007, a annoncé en mai qu'il ne se représenterait pas, le NPA s'enfonce chaque jour un peu plus dans la crise. Et la décision d'élire une "coordination de campagne", qui fait revenir sur le devant de la scène des anciens de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) comme Alain Krivine ou François Sabado, ne devrait pas arranger la situation.
Le but de cette coordination : "L'animation de la campagne au jour le jour", explique Alain Krivine. Mais pas question d'y voir autre chose : "Il ne s'agit pas du tout d'une autre direction ! se défend M. Krivine. Ce n'est pas une double organisation." "S'il y a des désaccords sur certains points politiques importants, ce sera le comité exécutif [la direction du parti] qui tranchera, affirme également Christine Poupin, une des deux porte-parole du NPA. Cette coordination aura une légitimité à organiser mais pas à trancher."
Autre son de cloche chez Myriam Martin, également porte-parole du parti, qui pointe une "dualité de directions qui peut surprendre" : "Il y a une ambiguïté qui demeure avec cette volonté de formaliser les choses. Un certain nombre d'entre nous n'était pas opposé à un élargissement du comité exécutif, mais pourquoi l'élire ? Ça laisse dubitatif sur l'efficacité de tout ça..."
UNE "DIMENSION DE TYPE JURASSIC PARK"
Cet épisode illustre une nouvelle fois les divisons profondes qui minent la direction du parti ces derniers mois. Après le congrès de février, le NPA s'est scindé en deux, notamment sur la question du positionnement vis-à-vis du reste de la gauche radicale. D'un côté, aujourd'hui majoritaires, les partisans d'une ligne dure, hostiles à toute discussion avec le Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon. Parmi eux, Olivier Besancenot, Alain Krivine ou Christine Poupin.
De l'autre, les partisans d'un dialogue plus ouvert avec le reste de la gauche de la gauche. Parmi eux, Pierre-François Grond, ancien bras droit de Besancenot, Myriam Martin ou encore Guillaume Liégard, trésorier du parti. Ce dernier voit dans le retour de Krivine et Sabado une "dimension de type Jurassic Park".
"C'est un signal envoyé, affirme-t-il. Ces derniers mois, on est dans la continuité de la négation de ce qu'a été le NPA". A sa création en 2009, le parti d'Olivier Besancenot voulait tourner la page de la Ligue communiste révolutionnaire et ambitionnait de devenir un grand parti de masse. Neuf mille militants avaient alors poussé la porte du parti. Aujourd'hui, officiellement, ils ne sont plus que 6 000.
"C'EST UN BOULOT TERRIBLE"

Illustration de ces divisions, le choix en juin de la candidature de Philippe Poutou, un ancien de Lutte ouvrière (LO). L'enthousiame des troupes pour faire campagne pour cet ouvrier métallurgiste de 44 ans n'est pas toujours au rendez-vous. Inconnu du grand public, le candidat plafonne autour de 0,5 % quand le facteur de Neuilly avait fait 4 % en 2007. Une candidature qui complique d'autant la chasse aux parrainages.
>> Lire notre reportage : "Au NPA, recherche parrainages désespérement"
"C'était le même problème quand Besancenot s'est présenté pour la première fois, souligne Alain Krivine. Les signatures, ça représente un effort matériel énorme pour les militants : il faut faire des centaines de kilomètres, revenir plusieurs fois. C'est un boulot terrible."
Officiellement, une centaine de promesses de parrainages ont déjà été engrangées. Rien d'inquiétant cependant pour Alain Krivine, lui-même candidat à la présidentielle de la LCR en 1969 et 1974 : "Il y a du boulot mais on reste confiants." D'autres voient le temps filer et sont moins sereins. "On va demander aux militants de mettre les bouchées double pendant les vacances de la Toussaint", indique Myriam Martin. "Même dans la majorité, il y a un problème de conviction", affirme pour sa part Guillaume Liégard, avant de lâcher : "Ce ne sont pas les 100 premières les plus faciles à obtenir, mais bien les 100 dernières."

Paris: toujours et encore la Grèce

L'indice parisien s'enfonce à nouveau dans le rouge, toujours malmené par des opérateurs en mal de confiance dans le monde politique.
Vers 14h00, le CAC 40 accuse une baisse de près de 2,2% à 2961,4 points, tandis que le DAX perd 2,5% et le FTSE 1,4%. L'orientation des contrats 'futures' de Chicago laisse présager d'une ouverture en repli à Wall Street.
Les investisseurs, un temps rassuré par le vote de l'Allemagne en faveur de l'élargissement du Fonds européen de stabilité, se trouvent à nouveau gagnés par la peur d'une résolution lente de la crise grecque.
Ils attendent désormais la ratification des accords du 21 juillet dernier de quatre autres parlements européens, le rapport de la Troïka concernant un éventuel feu vert du versement de la prochaine tranche de huit milliards d'aide à la Grèce ainsi que le taux de participation des créanciers privés au programme d'échange de la dette grecque.
Cet après-midi, leurs yeux seront tournés vers les Etats-Unis, pour prendre connaissance des dépenses et revenus des ménages à 14h30, attendus respectivement en hausse de 0,2% et 0,1%.
Seront dévoilés l'indice PMI de Chicago à 15h45, pour lequel le consensus table sur 56,5, et la confiance des consommateurs du Michigan, attendue à 57,8, dix minutes plus tard.
Au chapitre des données économiques d'ores et déjà publiées, les dépenses de consommation des ménages français en biens ont augmenté de 0,2% en août en volume, après avoir reculé de 0,2% en juillet, indique ce matin l'Insee.
Toujours en France, les prix à la production dans l'industrie sont restés stables au mois d'août, en raison d'un nouveau repli des prix des produits pétroliers, annonce vendredi l'Insee.
La dette publique du pays, selon les critères de Maastricht (dette brute), s'établit à 1692,7 milliards d'euros à la fin du deuxième trimestre 2011, en augmentation de 46,4 milliards sur trois mois, selon les chiffres communiqués par l'Insee.
En zone euro, le taux d'inflation annuel s'établirait à 3% en septembre 2011, selon une estimation rapide publiée par Eurostat. En août, le taux était de 2,5%.
En outre, le taux de chômage corrigé des variations saisonnières s'est établi à 10% en août 2011, stable par rapport à juillet, indique Eurostat.
Sur le front des valeurs, les bancaires tentent de limiter la casse, alors que les analystes de Nomura mettent en évidence des valorisations 'trop basses'. Société Générale plonge de 11,3% à 18,7 euros, dans le sillage d'une dégradation d'UBS.
Soitec avance de 1,4% à 4,1 euros, après avoir confirmé sa prévision pour le premier semestre 2011-2012, une déclaration rassurante après le sévère avertissement de son client AMD mercredi soir.

Sarkozy est-il fichu pour 2012 ?

Sans comparer les sénatoriales et la présidentielle, on voit toutefois que Nicolas Sarkozy s'avance seul vers la tempête de 2012. Le président de la République n'a plus le soutien de l'opinion et il a perdu une bonne partie des éléments majeurs de sa victoire de 2007.




Primaires PS : Le parfum des années 1980

Le deuxième débat des candidats socialistes fut plus éclairant que le premier en ce qui concerne la découverte des personnalités et de leurs propositions programmatiques. Au plan des capacités des hommes et des femmes à exercer dans sept mois la fonction suprême de notre République, il est apparu assez nettement que tous les sondages ont raison de placer en tête depuis des mois le duo François Hollande-Martine Aubry, avec avantage au premier. Les deux révélations que sont pour beaucoup de Français Manuel Valls et Arnaud Montebourg prennent une nouvelle dimension grâce aux débats et gagnent leurs galons de futurs ministres importants en cas de victoire, mais ils ne peuvent prétendre cette fois-ci à porter le flambeau face à Nicolas Sarkozy. M. Baylet, qui fait du bon sens comme M. Jourdain de la prose, est lui aussi ministrable, tout comme Ségolène Royal, qui en revanche n’est plus dans l’air du temps présidentiel.
– Pour le programme du candidat de la gauche, c’est plus compliqué, car on a vu que Mmes Royal et Aubry et M. Montebourg tirent le programme vers la gauche radicale et étatiste de l’ère Mitterrand. On ne parle que de mise sous tutelle des entreprises, de nationalisations, de blocage des prix, de rétablissement de l’autorisation administrative de licenciement. Une vraie course aux propositions dirigistes qu’ont dénoncée courageusement MM. Valls et Baylet tandis que François Hollande restait plus discret. Le futur candidat socialiste sera donc forcément très lesté à gauche avant même qu’il ne prenne des engagements vis-à-vis des écologistes et de l’extrême gauche en vue du deuxième tour. Quant au coût de ces propositions, il reste flou mais ce sera cher : rien que les 300.000 contrats d’avenir plus les contrats de génération, plus les embauches de milliers de policiers et d’enseignants, tout cela sera financé par peu d’économies et beaucoup d’impôts. On en reparlera.

Grèce : « l’union sacrée », vraiment ?

Un grand « ouf » de soulagement a salué la large approbation par la Bundestag, jeudi, de la mise en œuvre du plan de sauvetage de la Grèce. L’Union européenne jubile. On parle du sens des responsabilités et du poids du « G2 » franco-allemand : Mme Merkel affiche sa satisfaction de ne même pas avoir eu besoin de votes de son opposition pour emporter l’adhésion, Sarkozy a chaleureusement « félicité » le chancelier allemand, et sa propre garde rapprochée a mis en évidence le rôle crucial joué par la France pour obtenir cette « union sacrée » (l’expression est de Jean-François Copé). C’est un bien fâcheux détournement de ces mots qui nous renvoient au sacrifice indicible de la jeunesse française pendent la Grande Guerre contre l’Allemagne.

L’approbation du plan par 13 pays de l’UE à ce jour – dont le poids lourds des poids lourds qu’est aujourd’hui l’Allemagne – s’annonce bien comme devant s’étendre à l’ensemble des 17 pays membres de la zone euro pour obtenir l’unanimité requise, même si la Slovaquie traîne des pieds et a remis le vote de son Parlement au 25 octobre. Il porte sur un élargissement de la capacité de crédit du FESF à 440 milliards d’euros (Fonds européen de stabilité financière) dont on sait déjà aujourd’hui qu’il ne suffira pas à combler les besoins des différents pays dont les difficultés deviennent de plus en plus manifestes – l’Italie, le Portugal, l’Espagne.

Ceux-ci, et d’autres peut-être, car pourquoi refuser à l’un ce que l’on fait pour l’autre, vont peser à leur tour sur le processus de sauvetage de l’euro. De nouveaux scénarios s’échafaudent déjà pour accorder plus de fonds, de pouvoirs et de droits au fameux FESF. La spirale infernale – ou le tonneau des Danaïdes, comme vous voudrez – a de beaux jours devant elle.

Pour reprendre une image glanée sur le blog de Harry Dent – financier américain qui a établi une intéressante corrélation entre les périodes de récession et le vieillissement des populations – : « C’est comme un vote approuvant l’achat d’un deuxième navire de guerre dont les militaires ont déjà établi qu’il ne suffira pas à la tâche, parce qu’il vous faut une flotte entière. A quel moment acceptera-t-on que la guerre ne sera pas gagnée, que la Grèce, et d’autres peut-être, ne seront pas “sauvés”, et que les tentatives successives vont seulement réussir à entraîner la chute des membres les plus forts de l’euro ? »

Quant aux plus pauvres, mais qui cherchent à assainir leurs finances, ils seront bien vite aux prises avec leurs propres difficultés politiques devant l’impopularité de la mise sous perfusion de la Grèce. L’Estonie est devenu jeudi soir le 13e pays de la zone euro à approuver le plan d’élargissement du FESF, mais non sans une opposition bruyante même au sein du Parti de la Réforme au pouvoir. Pour Igor Grazin, qui en est membre, la cause est absurde : « Je ne peux pas comprendre comment le FESF va sauver l’Europe et la Grèce. Comment Harry Potter bat Voldemort est quelque chose que chacun peut comprendre mais comment le FESF va sortir l’Europe de la crise c’est un conte de fées. (…) Le FESF ne résout pas les problèmes, il prend juste de l’argent », a-t-il lancé devant le Parlement.

Le petit pays balte devra contribuer de 1,995 milliard au fonds, ce qui a fait dire à Mailis Reps, député du Parti du Centre : « Quand on regarde les salaires des professeurs, le soutien de l’Etat pour les enfants, etc., tout est beaucoup plus réduit ici que dans les pays que l’Estonie va devoir aider financièrement. »

D’autant que tous ces « sauvetages » successifs ont essentiellement pour but d’assurer aux pays en difficulté – le Grèce, mais aussi l’Italie qui a bénéficié de rachats de ses créances par la Banque centrale européenne – la possibilité d’emprunter encore, d’emprunter toujours, mais à des taux dits « raisonnables » d’environ 5 % : une stratégie de court terme. Et de « rassurer les marchés », dont le seul objectif est de gagner de l’argent et dont la nervosité aggrave les conditions imposées aux pays défaillants… de fait. Leur nervosité s’explique, cela dit, par la cacophonie des responsables politiques et le manque absolu de crédit qu’on est prêt à accorder à leurs déclarations.

Renouer avec la croissance, comme ils le promettent régulièrement, est-ce concevable pour la Grèce ou l’Italie ? Faut-il vraiment parier sur un assainissement de leur situation quand ils n’ont plus de ressources de croissance, avec une natalité désastreuse depuis 30 ou 40 ans qui en elle-même annonce à la fois la contraction de l’économie et l’alourdissement continu des charges liées à la vieillesse ?

D’ailleurs la Grèce rechigne, traîne des pieds, remet à plus tard des réformes qui vont peser contre ceux qui créent encore des richesses dans ce pays. La troïka (UE-FMI-BCE) est retournée jeudi en Grèce après avoir claqué la porte au début du mois de septembre pour reprendre son inspection des comptes. Il va falloir notamment déterminer le poids de la fonction publique dans le budget, car nul en Grèce ne sait aujourd’hui combien il y a de fonctionnaires et combien ils sont payés. Du travail de la troïka dépend le versement des prochaines tranches de milliards de sauvetage décidés en mai, et la mise en place de la nouvelle rallonge de 159 milliards décidée le 21 juillet.

Mais si tout cela était essentiellement politique ? L’enjeu, c’est bel est bien une confiscation de la souveraineté grecque, et au-delà un contrôle des budgets, l’unification de la fiscalité européenne au nom de l’euro et de ce fait la fin de la liberté et de l’indépendance des Etats membres. L’« auto-détermination » ? Un vieux souvenir…

Si vous n’y croyez pas, écoutez Alain Juppé, qui est, tout de même et malgré Bernard-Henri Lévy, ministre des Affaires étrangères et voix autorisée du gouvernement Sarkozy. Multipliant les intimidations face à ceux qui envisagent de sortir de l’euro – « conséquences négatives », « danger mortel », « irresponsable » sont quelques-uns de ses mots choisis –, il a affirmé que les Européens sont en train de « franchir une première étape » dans la constitution d’un gouvernement économique européen ». Et il pense « surtout qu’il faut aller plus loin ». « Je suis favorable à une véritable fédération européenne. »

On s’en doutait un peu.

La ruée vers l'Ouest

En vingt ans, les trois régions de l'Ouest (Basse-Normandie, Bretagne, Pays de la Loire) ont vu leur population totale croître de plus d'un million d'habitants. Soit l'équivalent d'un grand département de plus ! Cette énorme progression démographique est liée à la persistance d'un « solde naturel » positif, c'est-à-dire au fait qu'il y a eu nettement plus de naissances que de décès. Mais cela n'explique qu'une partie du phénomène (notamment en Bretagne et Pays de la Loire) : cet essor est surtout à rattacher à l'existence d'un important « solde migratoire » positif. Depuis les années 1970, il arrive dans nos régions beaucoup plus d'habitants qu'il n'en part. Quel contraste avec les années d'après-guerre où « l'avenir était synonyme de partir » !

Ce renversement des courants migratoires constitue désormais le principal moteur de l'essor de nos populations ; qui plus est, toutes les analyses actuelles estiment que cette ruée vers l'Ouest va se poursuivre, et même s'accentuer d'ici à 2040. Au point que les migrations façonneront plus les territoires que le solde naturel (y compris cette fois en Basse-Normandie)...

Mais qui sont ces nouveaux arrivants ? Quelle peut-être leur influence et quels défis leurs afflux lancent-ils à nos territoires ? Ces arrivants sont principalement des actifs (et leurs familles), plutôt jeunes, principalement attirés par les perspectives d'emplois qu'offre un Ouest en plein essor... Ou tout simplement désireux de quitter la supernova parisienne pour aller voir si l'herbe n'est pas meilleure ailleurs. Ce sont aussi des retraités, de plus en plus nombreux, séduits par un cadre de vie agréable, ou un foncier assez abordable. Ce sont encore des étudiants et des chercheurs attirés par les opportunités de nos régions désireuses de fixer des talents. Ce sont enfin des étrangers, en nombre assez faible, il est vrai, et pour la plupart originaires d'Europe.

Ce rôle croissant des migrants va influencer, souvent de façon déterminante, l'évolution de nos régions. Sur le plan démographique, elle va provoquer un accroissement de la population et, dans l'immédiat, précipiter son vieillissement... Sur le plan économique, l'arrivée de tous ces migrants va se traduire par l'apport de revenus souvent substantiels au sein de certains territoires (retraites, transferts de salaires, versements de revenus sociaux ou financiers). Ceux-ci vont alimenter des demandes locales de biens et services, ce qui va favoriser dans la foulée la naissance d'activités multiples, et être ainsi à l'origine du renouveau de certains territoires. Sinon, comment expliquer l'essor de bien des communes rurales ou même de certains ports côtiers qu'on disait condamnés il y a encore quelques années ?

L'arrivée de populations nouvelles lance à nos régions des défis évidents. Défis en matière de développement d'habitats, de services de proximité et d'équipements scolaires, sociaux, sportifs supplémentaires pour accueillir un surcroît de population souvent mal anticipé... Défis attachés à la nécessité de développer des emplois... Défis liés à la préservation des espaces, surtout quand bon nombre de ces populations sont attirées par les zones littorales, là où les conflits d'occupation des sols sont nombreux... Plus généralement, défis de type socio-politique, lorsqu'il s'agit d'assurer l'intégration de ces populations nouvelles.

Répit à l’allemande

Sans enthousiasme et sous des défections dans la majorité mais avec le concours massif de l’opposition europhile (sociaux-démocrates et Verts), le Bundestag a approuvé la quote-part de l’Allemagne pour la création de l’indispensable Fonds européen de stabilité financière, donc aussi pour le deuxième plan d’aide à la Grèce. Un soulagement, sans aucun doute, en attendant encore les ratifications de cinq autres pays de l’Eurogroupe avec des difficultés prévisibles en Slovaquie. Un répit, surtout, car une «rallonge» de ce FESF ne passera plus, ont averti la CSU bavaroise et le minuscule FDP, deux partis indispensables à la coalition de la chancelière Merkel.

Or, ce n’est un secret pour personne, même porté à 440 milliards, l’actuel FESF ne suffira pas si un État comme l’Espagne devait à son tour appeler au secours. Sans même parler de l’Italie ! Encore faudrait-il déjà déduire de ces 440 milliards les plans d’assistance consentis à la Grèce, à l’Irlande et au Portugal, soit 200 milliards, voire rembourser à la BCE de Francfort l’achat de quelque 150 milliards de dettes publiques douteuses ! Même pas encore ratifié par tous, le FESF est déjà en voie de tarissement. D’autres outils s’imposent. Par exemple ces euro-obligations honnies ou encore la possibilité pour le FESF de contracter des prêts auprès de la BCE. Un tabou pour nos voisins, car il changerait tout le catéchisme de l’euro. Et ce n’est pas tout : selon la récente décision de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, toute modification, même infime, de cette politique financière doit avoir l’aval du Bundestag. Une lourdeur impossible à gérer à une époque où les marchés réagissent à la nanoseconde. Sans oublier un autre psychodrame en vue lorsqu’il faudra ratifier l’année prochaine le «Mécanisme de stabilité européen» censé remplacer le FESF en 2013…

Bien que les critiques de Barack Obama fassent penser à l’Hôpital qui se moque de la Charité, le président américain a raison de dénoncer l’inertie de l’Europe. Que de milliards sauvés si la crise grecque avait été prise à cœur dès l’automne 2009, si la zone euro avait été, dès la création de la monnaie unique, dotée de véritables moyens d’intervention ! Certes, l’idée fait enfin son chemin avec pour premières étapes le FESF, les interventions de la BCE sur les marchés financiers et le « Six-Pack » adopté mercredi par le Parlement de Strasbourg. Toutefois, avec plus d’une «guerre» de retard…

Seul un gouvernement économique peut sauver la monnaie européenne. Mais lequel ? Celui très vague évoqué par le président Sarkozy et la chancelière Merkel ? Ou celui que voudrait en son nom imposer la Commission de Bruxelles, enfin sortie de sa torpeur bureaucratique ? Incarnation des Vingt-Sept, donc également des États très réservés envers l’euro (le Royaume-Uni, le Danemark, la Suède…), on voit mal la Commission régenter seule la politique de la monnaie unique. Aux dix-sept de l’Eurogroupe, premier cercle de l’UE, de prendre les affaires en main. Mais vite, très vite…

Ripoux

Au cinéma, les histoires de ripoux nous feraient plutôt rire. Dans la vraie vie, elles nous choquent, car nous rêvons tous d’un monde en noir et blanc - les voyous d’un côté, les flics de l’autre. Sans mélange possible, sans zone d’ombre, pour notre plus grande sécurité, et notre confort moral. Autant dire que l’arrestation de Michel Neyret fait tomber tout le monde de l’armoire : un grand flic, expérimenté, respecté de la justice — soudain mis en garde à vue comme un voyou ? Et pas pour des peccadilles, non, pour des motifs de grand voyou : trafic international de stupéfiants, blanchiment d’argent… Un « cataclysme », comme le dit son chef. Alors n’oublions pas que les flics ont droit à la présomption d’innocence, au moins autant que les voyous. Et espérons que l’on pourra déterminer si Michel Neyret est ou bien un flic, ou bien un voyou - si tant est que le monde puisse se peindre en noir et blanc.

Malléables frontières

"En Europe, les principes ne sont plus ce qu’ils étaient", écrivait România libera le jour de la réunion des ministres européens. Le 22 septembre, ces derniers ont décidé de reporter l’adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie à l’espace Schengen, faute de compromis avec les Pays-Bas et la Finlande, qui demandent plus de garanties en matière de lutte contre la corruption et la criminalité.
A Bucarest et Sofia, les gouvernements se sentent trahis, car ils ont le sentiment d’avoir accompli en vain les efforts exigés. Mais au-delà de cette perspective nationale, tout indique aujourd’hui que l’Europe est devenue un sorte de labyrinthe dans lequel plus personne ne reconnaît ses frontières.
Les frontières extérieures, celle de l’espace Schengen, soumises à des tensions sur leur flan grec ou italien, sont renforcées à coup de barbelés (entre la Grèce et la Turquie) ou de patrouilles maritimes accrues (en Méditerranée), sans qu’une ligne directrice n’ait été tracée au niveau européen.
Les frontières internes, qui ne sont désormais théoriquement que des lignes administratives largement symboliques, sont de leur côté l’objet de manoeuvres qui portent atteinte au principe-même d’espace de libre circulation.
Le Danemark a rétabli le contrôle à ses frontières, officiellement pour lutter contre la criminalité transfrontalière ; la France l’a également fait pour empêcher des Tunisiens en provenance d’Italie d’entrer sur son territoire. Enfin, d’autres frontières, politiques celles-là, apparaissent là où on ne s’attend pas forcément, en fonction d’enjeu domestiques : aux Pays-Bas, en Finlande ou au Danemark, sous la pression du parti de Geert Wilders, des "Vrais Finlandais" ou du Parti du peuple danois.
"Je reproche à l'Europe et à l'Italie de dormir et de ne pas se rendre compte des forces nationalistes et centrifuges qui la tiraillent. Nous n'avons pas retenu la leçon des Balkans : il suffit que l'on indique un ennemi à une population en manque de repères pour que celle-ci l'adopte comme tel", prévient l’Italien Paolo Rumiz dans son livre Aux frontières de l’Europe (éd. Hoebeke, 2011). Il aurait pu ajouter qu’elle risque de laisser une partie de son âme se perdre entre des frontières plus ou moins malléables.

Tous pour un !

Nicolas Sarkozy et son Premier ministre ont été contraints hier de donner un nouveau coup de sifflet pour remettre en ordre de marche des troupes bien déboussolées, en proie à la panique et, une fois encore, au doute sur le pilote du Titanic. Première clarification, à propos du Sénat. Il est perdu. Dont acte. Pas question de chipoter. Tant pis pour Gérard Larcher et ceux qui parient encore sur un vote surprise samedi. Le président en fait une question de dignité. Il a surtout compris l'effet dévastateur d'un tripatouillage sénatorial pour lui et sa majorité.

L'appel à l'union s'impose d'autant plus que les divisions viennent de coûter très cher et qu'on en voit mal la fin dans cette grande famille où les rivalités et coups de poignard sont une seconde nature. Pour éviter que les trois ou quatre mois d'ici l'entrée en campagne de Nicolas Sarkozy ne tournent à la baston entre amis, le patron en appelle donc à la mobilisation et au combat pour 2012. Histoire de fixer un but et d'occuper les esprits, à défaut de remonter le moral, pour l'instant dans les chaussettes !

Le cap fixé d'ici la présidentielle, c'est de tenir bon dans la tempête financière et de tout faire pour sauver l'euro, condition jugée essentielle pour permettre à la France de s'en sortir. Priorité donc au sauvetage de l'Europe, donc à la double exigence de réduire la dette et de relancer la croissance qui s'imposera comme le sujet majeur de la campagne. Le président pense convaincre le jour venu les Français que leurs sacrifices ne sont pas vains et qu'il sera le mieux placé pour continuer à tenir la barre.

La bataille se jouera sur la crédibilité des propositions et des aptitudes des candidat(e)s à piloter en temps de crise. Nul ne peut prévoir où elle en sera dans sept mois, mais Nicolas Sarkozy ne manque pas d'atouts. Il a cette volonté hors du commun, condition sine qua non pour mener le combat politique à ce niveau. Mais il a aussi une forte pente à remonter dans l'opinion, tant est profond son discrédit et sérieux les doutes sur ses chances de l'emporter. Le candidat présenté avec insistance comme naturel n'a pas encore rassuré tout son petit monde.

Sauver la Grèce : clap ! 36e prise…

Comme un mauvais film au scénario si mal ficelé que personne n’y croit plus… Les bourses mondiales, et surtout européennes, montent et descendent en yo-yo au fil des informations qui se succèdent et ne se ressemblent pas, de contradiction en affirmation volontariste, d’annonce d’éclatement en promesse tranquille (comme Barroso qui promettait mercredi que la Grèce resterait dans la zone euro ; foi d’animal).

On n’a plus envie de commenter les aléas de ce sauvetage-dépeçage de la Grèce, tant ils mettent en évidence la langue de bois des responsables européens qui savaient, pourtant, depuis le début que la juxtaposition de pays comme la Grèce et l’Allemagne, la Pologne et le Portugal, et les autres, ne pourrait se faire sans de douloureux équilibrages. Dans un continent qui se meurt faute d’enfants, dans des pays où le poids du vieillissement pèsera encore plus lourd que les endettements actuels, à quoi sert de poser des pansements ?

Mercredi, on apprenait la remise en route de la troïka (UE, Banque centrale européenne et le FMI qui s’était si lourdement « trompé » sur l’état des finances grecques), alors tout le monde était content. On rajoute quelques couches d’organismes supra-nationaux et le tour est joué ?

Jeudi, on attendait avec optimisme (à l’heure d’écrire) le vote des élus allemands sur l’élargissement du fonds de sauvetage de la zone euro (Fonds de secours européen, FESF) créé en 2010, dont on veut augmenter les compétences en lui attribuant des moyens d’action à effet de levier, l’autorisation d’emprunter et d’investir comme une banque par exemple et de racheter des titres de dettes des pays fragiles (surévaluées) pour les fournir à la BCE, ou de garantir ces rachats effectués par la BCE elle-même. Dans tous les cas, refourguer les mauvais placements sur le dos du contribuable européen, au bout du compte…

D’aucuns estiment que les banques créancières devraient endosser au moins une partie des pertes de valeur de la dette grecque (en attendant l’Italie, le Portugal, l’Espagne… ?) : c’est le cas, par exemple, de la banque britannique Royal Bank of Scotland (RBS) ou de l’assureur allemand Allianz, qui ont amputé d’autorité la valeur de leurs titres publics hellènes de 50 % dans leurs comptes du premier semestre, les alignant ainsi sur les prix du marché.

De sources concordantes, selon l’AFP, plusieurs banques européennes, françaises notamment, envisageraient très sérieusement d’aligner la valeur de leur portefeuille sur les prix du marché, avec à la clef une provision supplémentaire dans les comptes du troisième trimestre. Cela réduirait mécaniquement le poids de la dette grecque de 10 milliards, et correspondrait à un meilleur respect de la réalité et – selon un responsable européen – rares sont les établissements dont la solidité financière serait affectée par cette nouvelle charge.

Il semblerait cependant que la troïka, une fois obtenu le soutien des Etats-membres de l’UE, ne veuille pas s’abstenir de verser de nouveaux milliards dans le tonneau des Danaïdes.

Et internet bruit des déclarations d’un « trader » londonien filmé en train de dire qu’il « rêvait » de récession pour « faire de l’argent » dans un marché qui s’effondre : il suffit de savoir faire, disait Alessio Rastani. Il ajoutait : « Les gouvernements ne dirigent pas le monde. Goldman Sachs dirige le monde. Goldman Sachs s’en fiche de ce plan de sauvetage, tout comme les importants fonds spéculatifs. »

Trop beau pour être vrai ? D’aucuns crient à la supercherie, à la mise en scène, même si la BBC, qui a interviewé le jeune homme, affirme être sûre de son identité. Mais il est symptomatique que ces propos aient pu paraître vraisemblables à une foultitude d’internautes et repris par des journaux britanniques sérieux.

Ce qui est vrai, c’est que les grandes crises économiques ne détruisent pas tout le monde, et que certains en profitent même beaucoup. Il est temps de retourner sérieusement à nos livres d’histoire.

Paris et Berlin appellent à ratifier l'accord sur le FESF

Après le vote allemand en faveur de l'élargissement des prérogatives du Fonds européen de stabilité financière (FESF), la présidence française a indiqué que le chef de l'Etat s'est entretenu avec la chancelière allemande, Angela Merkel, et "l'a vivement félicitée du vote positif intervenu ce matin à une très large majorité au Bundestag sur la ratification de l'accord renforçant le FESF".
"C'est un pas important qui a été accompli au service de la stabilité de la zone euro", poursuit l'Elysée.

Les deux responsables européens "tiennent à rappeler que c'est la mise en œuvre résolue des décisions prises au sommet du 21 juillet qui permettra de surmonter les difficultés que traverse actuellement la zone euro", ajoute l'Eysée. Ils "incitent" en outre "l'ensemble des partenaires qui n'auraient pas encore procédé aux ratifications parlementaires à mener à terme ce processus dans les plus brefs délais".
Nicolas Sarkozy et Angela Merkel "se sont également réjouis de l'adoption hier par le Parlement européen des textes sur la gouvernance économique européenne, qui renforcent la coordination et la surveillance budgétaire et créent un nouvel outil pour prévenir et corriger les déséquilibres macroéconomiques", poursuit le texte du communiqué.
LES INCERTITUDES PERSISTENT SUR LE VOTE SLOVAQUE
Le premier ministre grec, Georges Papandréou, compte se rendre à Paris vendredi 30 septembre pour y discuter avec le président Nicolas Sarkozy de la crise de la dette de la zone euro et de l'accord du 21 juillet avec l'Union européenne. L'Elysée a confirmé cette rencontre qui devrait avoir lieu dans l'après-midi de vendredi.
Le ministre grec des finances, Evangélos Vénizélos, a de son côté exprimé jeudi sa "satisfaction" après le vote allemand. Il a aussi fait part dans un communiqué de son "optimisme" quant à la conclusion, après le feu vert allemand, du processus de ratification du renforcement du FESF, destiné à soutenir les maillons faibles de la zone euro.
Six pays doivent encore donner leur aval, dont la Slovaquie, qui menace de faire traîner l'affaire.
Le ministre grec a "lié" le oui allemand "au fait que la Grèce a envoyé à l'étranger un message clair et déterminé quant à sa volonté de respecter les obligations" contractées en matière de redressement budgétaire, de privatisations et de réformes structurelles, en échange du sauvetage du pays par ses partenaires.

jeudi 29 septembre 2011

Et si, à droite, Juppé était "la" solution ?

A l'heure de la crise et des défaites, la droite s'intéresse de plus en plus au revenant Alain Juppé, invité ce soir de France 2. 
Jeudi soir à 20h 35, Alain Juppé est l'invité, en direct sur France 2, de l'émission Des paroles et des actes. Alors que les socialistes, avec leurs primaires, monopolisent les antennes, c'est une façon pour le service public de donner la parole à un représentant -et pas n'importe lequel!- de la majorité. Mais ce qui est d'abord intéressant dans cette invitation spectaculaire, c'est que le ministre des Affaires étrangères et maire de Bordeaux -celui dont Jacques Chirac disait il y a quelques années: « C'est le meilleur d'entre nous »- est aujourd'hui (qui l'aurait imaginé il y a deux ou cinq ans ?) l'homme fort du gouvernement... sarkozyste.
Un comble : l'austère Juppé est même devenu, à droite, le ministre à la mode. Au point que certains rêveraient, à l'heure des « affaires » en cascade et des défaites qui s'accumulent, de le voir porter en 2012 les couleurs de la droite. Encore faudrait-il que Nicolas Sarkozy -et on n'en est pas là- choisisse de jeter l'éponge. On se souvient cependant que le loyal Juppé -qui mènera campagne pour le président sortant s'il est candidat à un second mandat- avait, il y a quelques mois, publiquement pris date: « Si Nicolas Sarkozy n'était pas, par hypothèse, candidat, je serai candidat à la candidature... ».
Pourquoi l'hyper-diplomé Juppé -hier cabossé et marginalisé, toujours désespérément sérieux, voire cassant- est-il aujourd'hui à la mode, au point d'être pour beaucoup de députés UMP qui le brocardaient autrefois un repère rassurant ?
Il est l'anti bling-bling, et la dureté de la crise redonne de l'éclat à son profil très classique, très Vème République.
Il a le cuir tanné, et a montré jusque dans le tribunaux ses capacités d'encaisseur.
Il aime l'Etat, et c'est un homme d'ordre.
Il a des bonnes relations avec le centriste François Bayrou, mais incarne sans états d'âme et sans tentations frontistes la droite républicaine.
Il n'a jamais eu de tentations communautaristes, et défend ardemment la laïcité « à la française ».
Au quai d'Orsay, il se veut toujours, malgré la crise, l'homme de « l'exception française ». Sans alignement sur les Américains. 

Les relations de Nicolas Sarkozy et d'Alain Juppé sont devenues, c'est un fait, excellentes. Si, à droite, tant de regards se tournent vers le maire de Bordeaux, c'est que ce super-chiraquien rassure. Et ce n'est pas de trop quand, au sein de l'UMP, le doute est partout.
Juppé joue donc jeudi soir -peut-être pour lui, sûrement pour son camp- une partie importante. Double objectif: d'abord redonner le moral à des troupes désoirentées et souvent abattues; ensuite ouvrir, s'il le peut, des pistes en débloquant... le frein à main. Car tandis que la gauche fonce, la droite, aujourd'hui, est carrément à l'arrêt. 

Crépuscule à la française

Le perroquet est l'espèce la plus répandue dans le monde politico-médiatique. Il répète, il répète, c'est à peu près tout ce qu'il sait faire.

Pour l'heure, il est convaincu que l'élection présidentielle est déjà jouée. Soit, s'il est sarkozyste, que le super-président renaîtra de ses cendres à l'occasion d'une super-crise salvatrice pour lui. Soit, s'il est antisarkozyste, que François Hollande, le candidat socialiste le mieux placé pour battre le candidat sortant, a déjà gagné avant même de faire campagne.

Or il n'est pas besoin d'être grand clerc pour penser que la campagne présidentielle ne se déroulera pas comme prévu. Pour une raison bien simple : la France est en train de s'enfoncer dans trois grandes crises concomitantes. Politique, morale et financière. Il règne aujourd'hui dans ce pays un climat délétère et crépusculaire qui ne peut que réserver, demain, de mauvaises surprises.

Tandis que certains politiciens misérables se retrouvent les doigts pleins de la confiture qu'ils ont transportée impunément, pendant des années, dans leurs mallettes, voilà que la perte pour la France du triple A des agences de notation nous pend au nez, après trente ans de laxisme budgétaire frénétique. Si ce pays était une entreprise, tous ses dirigeants, de droite ou de gauche, auraient dû faire depuis longtemps un tour au tribunal de commerce avant d'être mis en redressement judiciaire ou de se faire dégommer par leurs actionnaires.

Puissent les Français ne pas écouter, lors de la campagne à venir, les imbéciles ou les charlatans qui, avec leurs solutions débiles, leur promettront d'augmenter le pouvoir d'achat ou les dépenses publiques...

Gulliver empêtré

L'envahissement de la crise s'éternise. Nous avons, en 2008, frôlé le gouffre, nous continuons de le longer. Revient en mémoire que la crise dite de 1929 n'imposa ses malheurs qu'au fil des années 30. Pour en sortir, l'expertise tant économique que politique n'a rien de rassurant : sa cacophonie transpire le désarroi.

Les économistes, unis pour n'avoir rien vu venir, se divisent pour dire où aller. Un festival ! Faut-il ou non "sortir" une Grèce insolvable ? Veut-on un euro requinqué ou d'ores et déjà condamné ? Et, chez nous, faut-il le tour de vis pour réduire la dette ou la relance pour réveiller la croissance ? Un peu ou pas d'inflation ? Avec ou sans impôts nouveaux ? Avec ou sans charger la TVA ? Et j'en passe... Comme je suis à la fois moins savant mais moins surpris par ce qui nous accable, je m'en tiens aux convictions inchangées où je jouais les Cassandre,"à l'insu de mon plein gré"...

Mon antique conviction, c'est que le mal originel français tient à la dette, et à son addiction, depuis trente ans, par tous nos pouvoirs de gauche ou de droite. A sa sacralisation par les "avantages acquis" de Mitterrand, bâtardise du Programme commun de la gauche. Et, à droite, à sa perpétuation dans le slogan électoraliste de la "fracture sociale" cher à Chirac.

On vous dira que ce fut un mal de pays riches et, à des degrés divers, général en Occident. Qu'il a installé en Europe, et à l'abri abusif des recettes du docteur Keynes, un emballement général, tant privé que public, des déficits. Et, dans des Etats-providence d'une providence ruineuse, l'euphorie d'un accroissement insensé des dépenses publiques. Oui, et alors ? Un mal partagé reste un mal...

De surcroît, on vous dit moins que l'obésité de l'Etat français est, elle, monstrueuse. Qu'en Europe des pays ont résisté au mal et d'autres non. Que l'Allemagne, avec la réforme magistrale du socialiste Schröder, a remis sa machinerie en marche et que, si son endettement s'est emballé dans la crise, il était et redevient enviable. La Suède a réduit en dix ans, drastiquement, ses dépenses publiques sans pénaliser sa croissance. Laquelle repart en Allemagne, où le chômage baisse quand le nôtre s'enkyste.

Même si l'on simplifie à l'excès, on voit qu'en Europe le Nord se soignait quand le Sud s'enfonçait. La Grèce, dans ses vices, n'est qu'un extrême cas clinique. Mais au tréfonds de maints pays du Sud, France incluse, il y avait une Grèce qui sommeille.

Pour la France des 35 heures, de RTT qui octroient à des millions de Français deux ou trois semaines annuelles de vacances de plus que chez nos pairs, où l'âge légal de la retraite fut à grand-peine porté à seulement 62 ans, bref dans un pays où l'on travaille moins qu'ailleurs et où la pression fiscale sur le travail est accablante, il n'y aura pas de répit à la méfiance des marchés prêteurs sans une sorte de révolution culturelle et sociale. C'est peu dire qu'elle ne sera guère prêchée dans le nouveau Sénat...

Fillon, bouche d'or, avait trouvé un "pays en faillite" et il suggère pour les retraites un nouveau tour de vis. Il a raison ! Mais accrochons nos ceintures ! Quand l'Etat prodigue déversait sa manne sur une France sociale, je lui voyais déjà les dents rentrantes du brochet qui engoule mais ne dégorge pas. Comment désormais l'y contraindre sans lui arracher la tête ?

Voici ma seconde conviction : la vulnérabilité identifiée de la Terre, la pression démographique, la solidarisation planétaire du commerce et des médias, du porte-conteneurs et d'Internet, ont changé la face du monde, mais nous continuons de sous-estimer la mondialisation. Et avec elle l'émergence inexorable des peuples pauvres délivrés de la domination tricentenaire de l'Occident.

Cette lame de fond jette l'Europe au pied du mur. Soit elle affirme sa solidarité pour sauver ses cigales du Sud et parvient à mutualiser la dette grecque. Soit elle enterre un demi-siècle d'idéal communautaire. Les optimistes croient qu'au bord du gouffre l'Europe abandonnera son statu quo intenable. Les pessimistes, voyant que la construction élitaire de l'Europe n'a jamais enflammé les peuples, croient que les fourmis, à commencer par l'Allemagne, ne voudront plus payer pour les cigales. Et que sonnent "le déclin et la chute" du Vieux Continent (1).

Voici bel et bien la grande affaire du siècle : le meilleur ou le pire à notre porte. L'Europe est un géant économique du monde. Mais elle gît encore sur le flanc, comme Gulliver à Lilliput, empêtrée par des nains politiques. Dans cette fable, Swift moquait leurs divisions débiles. Qu'est-ce donc qui alors l'inspirait ? Je vous le donne en mille : un krach. Celui de 1720...
Claude Imbert

1.Time Magazine : "The Decline and Fall of Europe", 22 août 2011.

Derrière les "fadettes", deux leçons pour la démocratie

Derrière l'affaire Bettencourt, l'affaire Courroye/Prévost-Desprez ou l'affaire des "fadettes", il y a deux leçons pour notre démocratie. Il faut une véritable indépendance de la justice avec une responsablilité maximum et une véritable indépendance de la presse avec des libertés garanties. Le prochain président devra faire des progrès. L'édito vidéo de Christophe Barbier.

Grèce: Papandréou veut voir Sarkozy

Le Premier ministre grec Georges Papandréou voudrait rencontrer le président français Nicolas Sarkozy à Paris vendredi pour évoquer le plan de sortie de crise, a-t-on appris jeudi de source proche du dossier à Athènes.

La France est l'un des principaux bailleurs de fonds de la Grèce, avec l'Allemagne, où se trouvait mardi M. Papandréou, qui a rencontré la chancelière Angela Merkel. La chancelière a indiqué qu'elle attendait les conclusions de l'audit mené par la troïka des créanciers du pays, les représentants de l'UE, de la BCE et du FMI, qui arrivent jeudi à Athènes, pour savoir s'il faudrait ou non renégocier les modalités du deuxième plan d'aide internationale décidé le 21 juillet à Bruxelles par la zone euro.

Le déficit budgétaire d'Athènes inquiète

"Devons nous renégocier, ou ne pas renégocier? Nous préférerions bien sûr que les chiffres restent inchangés, mais je ne peux pas anticiper (les conclusions de) la troïka", a déclaré mercredi la chancelière allemande dans une interview à la télévision publique grecque NET.

"Nous avons évidemment été déçus de voir qu'apparemment les chiffres (du déficit budgétaire grec, NDLR) en septembre n'étaient pas comme ils auraient dû être. Du coup nous devons attendre de voir à quelles conclusions arrive la troïka, la mission d'experts, ce qu'elle nous dit", a ajouté Mme Merkel.

Guerre des juges et justice déboussolée

Dans sa quête effrénée des informateurs de journalistes enquêtant sur l'affaire Bettencourt, le procureur de Nanterre a-t-il franchi la ligne jaune ? Telle est la conviction d'une juge qui lui reproche d'avoir violé le secret des sources en examinant leurs relevés téléphoniques, et ainsi d'avoir eu recours à un procédé irrégulier. Ce n'est pas la réalité des faits qui est en cause mais leur légalité, et ce qu'ils révéleraient des méthodes controversées de Philippe Courroye, passé d'une réputation d'intransigeance à celle d'un ami du pouvoir. Le chef du deuxième parquet de France, en plein cœur de la Sarkozie, convoqué en vue d'une mise en examen, voilà qui est inédit. Comment pourrait-il en effet continuer à exercer le ministère public ? Voilà qui en dit long sur cette justice troublée, contrainte, pour assurer la sérénité de l'instruction et mettre fin au déchirement des juges, de dépayser le dossier à Bordeaux. Une justice amenée à dessaisir la juge Prevost-Desprez d'une enquête sensible que son ennemi Courroye, dit-elle, aurait cherché à entraver pour protéger l'Élysée. Cette même juge qui prend des libertés avec la déontologie en livrant un témoignage accusateur à un journaliste alors qu'elle a obligation de saisir… la justice. Quel micmac ! Quel tohu-bohu ! Et quelle image calamiteuse d'institutions - justice et police - qui donnent l'impression d'être plus préoccupées de déloger des « gorges profondes » et de couvrir un clan que d'établir la vérité. L'espionnage de la presse relèverait-il de l'intérêt supérieur de l'État ? Qu'elles soient mitterrandiennes ou « guéantistes », ces écoutes espiègles ne grandissent pas la démocratie.

La limite de l’exercice

Ils ne se sont pas entre-tués! Les «observateurs» en seront presque déçus tant ces primaires ont nourri l’attente, un peu morbide, de voir les prétendants se déchirer en direct. N’était-ce pas le piège le plus dangereux de ce numéro démocratique qui, défiant la nature gauloise de nos débats publics, risquait de dériver vers les jeux du cirque socialiste? Mais non, décidément, ils ne sont pas tombés dedans et sans doute n’y tomberont-ils pas davantage lors du troisième débat.

On a bien senti, à l’odeur de poudre diffusée par quelques escarmouches, la tentation d’en découdre entre camarades. Mais, pour la deuxième fois, les rivaux se sont bien tenus. Le goût de la victoire, et les promesses de succès en 2012, auraient pu désinhiber l’agressivité (ça s’est déjà vu...) Ils l’ont, au contraire, canalisée. Ségolène titillant son ex, Arnaud moquant Manuel, Martine reprenant François et vice-versa, les exaspérations ont été contenues jusqu’au bout même si les quelques sous-entendus laissaient planer de temps à autre des désaccords assez nets. Cette paix armée est en soi un bilan... Un petit exploit qu’on s’est bien gardé d’entailler à coup d’amour-propre. Pas question d’ouvrir des plaies sur le plateau clinique de LCI!

L’inconvénient de tant de retenue, c’est la logique du plus petit dénominateur commun. Tant d’énergie pour produire avec soulagement le constat qu’ils et elles étaient «tous d’accord» pour «moins taxer le travail», pour faire de «la jeunesse une priorité absolue, pour traiter l’immigration clandestine «au cas par cas, avec humanité», etc: est-il besoin de préciser que ce 18-20 heures ne fut pas ébouriffant, ni bouleversifiant?

Les uns et les autres ont déroulé leurs propositions comme des tapis sans qu’on discerne dans cet étalage la trame d’une gouvernance de gauche dans une réalité du capitalisme qui ne l’est pas. A un moment, on a bien cru qu’on était revenu aux temps glorieux d’un dirigisme d’État pouvant manier l’interdiction et l’interventionnisme comme avant jusqu’à ce que «la bande des six» prenne conscience, sous l’œil des caméras, des dégâts sur sa crédibilité que pouvaient laisser de tels argumentaires.

Dès lors l’aimable conversation a flâné des vertus comparées des emplois aidés à la célébration des PME sans parvenir à dégager vraiment un socle de gouvernance commun à toutes les sensibilités de la gauche. Dans ce patchwork un peu laborieux, Ségolène Royal a apporté de la couleur vive (un peu trop parfois), Arnaud Montebourg un fil théâtral pour une fois mesuré, Manuel Valls quelques mailles bien identifiables, Martine Aubry des contrastes de tons. Quant à François Hollande, synthétiseur accompli, il s’est contenté du terne du favori qui veut rester discret. Un peu trop professeur. Un brin phraseur. Pour tout dire, un peu creux. La peur de gagner, déjà?

Débat primaires PS : L'UMP ironise

Le débat des primaires socialistes a beaucoup fait parler les supporters de chaque candidat mais à droite aussi. Des ministres et des membres de l'UMP ont réagi ce jeudi matin.

Le débat socialiste s'attire les foudres de la droite. Certains membres de l'UMP n'ont pas tardé à critiquer la prestation des candidats aux primaires. Des députés de la majorité qui suivaient la retransmission télévisuelle ont estimé que les idées étaient « vieillotes » et « n'apportaient pas grand chose aux Français ». Mais les réactions les plus vives sont venus de ténors du parti.
Dans un communiqué, Benoist Apparu, secrétaire d'Etat au Logement s'est exprimé disant « c'est Masterchef mais avec des vieilles recettes et des produits périmés. Comme l'a justement souligné Manuel Valls, les formules magiques ne vont pas résoudre les problèmes des Français. Les socialistes veulent relancer la croissance, créer des emplois, réduire les inégalités, soutenir les entreprises, aider la jeunesse. Quel responsable politique ne partage pas ces objectifs ? Mais que proposent-ils ? Aucune réponse concrète n'est apportée. Les incantations et les slogans démontrent l'absence totale de solutions du parti socialiste ».

Christian Jacob, président des députés UMP a lui aussi réagi dans un communiqué expliquant « le second débat socialiste a oscillé entre populisme, incohérence et mensonges. La vérité est que les propositions socialistes accroitront les déficits publics et pèseront lourdement sur nos entreprises et les ménages français (...). La vérité est que les propositions socialistes sont de vieilles recettes du passé qui n'ont aucun sens dans un pays ouvert, exportateur et engagé dans la compétition européenne et mondiale. La vérité c'est que les socialistes veulent nous faire croire qu'ils s'occuperont de la sécurité des Français alors que les années Jospin ont connu une explosion sans précédent de la délinquance. La vérité enfin c'est que les socialistes nous ont annoncé le démantèlement de notre politique familiale ».

Le réveil des enseignants

Luc Chatel, le ministre, s'était félicité en septembre d'une rentrée scolaire techniquement réussie. La réplique des syndicats d'enseignants n'a pas tardé. Ils peuvent se targuer d'une grève réussie hier. Au-delà de l'habituelle querelle sur le taux de participation, ce qui frappe c'est l'union syndicale au sommet entre l'enseignement public et l'enseignement privé. Notamment dans les trois académies de l'Ouest.

Au ministère, tout comme à l'Élysée, on a trouvé qu'après tout ces manifestations étaient « légitimes », « normales dans une démocratie » selon Nicolas Sarkozy. Vue de la rue de Grenelle, la grève de rentrée est un phénomène saisonnier, une sorte de prologue obligé avant de s'engager plus avant dans l'année scolaire. Pourtant, cette fois, un changement de climat est perceptible.

Trois constats. Dans l'enseignement catholique sous contrat, la grève n'est pas inscrite dans les traditions. Loin de là. Elle a pourtant été suivie. Les suppressions de postes ne l'épargnent plus. La rentrée de leurs deux millions d'élèves a parfois été acrobatique. Et alors que 30 000 inscriptions ont été repoussées, il a fallu se résoudre à fermer des classes au lieu d'en ouvrir.

Dans l'enseignement public, les syndicats, jadis puissants, retrouvent une certaine vigueur. Que n'a-t-on glosé sur la déprime des maîtres, le creusement des inégalités scolaires et le déclassement social des professeurs. Ils seraient les derniers de la classe européenne en matière de rémunérations. Aujourd'hui, ils redressent la tête et semblent prêts à des réformes profondes au sein des établissements.

C'est le troisième phénomène constaté. Le plus nouveau. Certes, hier les enseignants se sont mobilisés contre les pertes de postes - 65 000 depuis 2007, 14 000 encore à venir. C'est une cure d'amaigrissement décrétée selon eux à l'aveugle, au nom d'un diktat budgétaire, un départ à la retraite sur deux non remplacé. Ils déplorent le « saccage » de la formation des maîtres, qui a heurté y compris certains ministres. Mais ce n'est plus le discours syndical unique du « toujours plus » de moyens.

Le coeur du métier, ce qui se passe dans la classe, redevient essentiel. La rénovation pédagogique retrouve voix au chapitre. Les enseignants ont pris conscience qu'en s'arc-boutant sur une organisation des établissements scolaires héritée du lycée napoléonien, leur cause était perdue. Des idées refleurissent. Sur la réorganisation du temps scolaire. La réduction du nombre d'heures de cours. Le travail en équipe. Le soutien aux élèves en graves difficultés. Et le sujet interdit, celui du statut même des enseignants, vieux de soixante ans, n'est plus intouchable.

La question de l'école s'installe petit à petit au coeur du débat politique. L'opinion a parfaitement saisi que pour espérer sortir des affres de la crise économique qui mine l'Europe, l'école, de la maternelle à l'université, est un enjeu majeur. Un investissement sur l'avenir. Mais le débat ne peut se réduire à une empoignade budgétaire, à quelques slogans séducteurs d'électeurs. Il serait paradoxal, par exemple, que l'opposition, qui dénonce des suppressions de postes à l'aveugle, réplique par des recréations à l'emporte-pièce. L'école de la République mérite mieux.

La Droite populaire rejoint en partie le programme du FN

Marine Le Pen la nomme "l'agence de publicité mensongère", une "entreprise d'enfumage électoraliste". La Droite populaire, collectif de députés les plus à droite de l'UMP, vient de remettre 12 propositions pour le projet présidentiel de 2012. Ce groupe d'élus, qui va s'ouvrir "dans le mois qui vient, à tous ceux qui veulent adhérer à [leur] charte", se présente comme un regroupement de gardiens du sarkozysme, dont le socle électoral de 2007 s'était notamment nourri d'électeurs du FN.
Aujourd'hui, Marine Le Pen a regagné du terrain sur cet électorat. Une dynamique que la Droite populaire, fondée par le ministre chargé des transports, Thierry Mariani, aimerait enrayer, afin que Nicolas Sarkozy ne se fasse pas doubler sur sa droite.
Parmi les 12 propositions avancées mardi 27 septembre par la Droite populaire, certaines reprennent des thèmes mis en avant par Marine Le Pen, mais ce ne sont pas non plus des "copiés-collés" du programme du FN. Revue de détails.
UNION EUROPÉENNE ET RÔLE DE L'ÉTAT
Au chapitre des différences, l'Europe et le rôle de l'Etat figurent en bonne place. Chez Marine Le Pen, l'idée est claire : il faut sortir de l'Union européenne pour bâtir un "Etat stratège" et interventionniste.
Pour la Droite populaire, il faut "corriger (…) le trop plein de l'Etat providence et ses effets néfastes". Et il n'est pas question de sortir de l'UE. Il faut en outre "redonner confiance en l'Europe en fixant trois priorités : la gouvernance économique et la libre circulation des hommes et des biens tout en maintenant un contrôle extérieur rigoureux aux frontières".
La Droite populaire reprend notamment la taxe Tobin,  qui vise à taxer les flux financiers, mais le Front national apparaît d'une manière générale comme plus interventionniste économiquement. La Droite populaire défend notamment l'idée d'un CDI plus flexible et la disparition des CDD.
PATRIOTISME ÉCONOMIQUE
Sur le soutien aux PME et TPE ou la lutte contre la grande distribution, les propositions de la Droite populaire et du FN se font écho.
Comme le FN, la Droite populaire envisage des "barrières douanières modulables pour les importations en provenance des pays qui ne respectent pas les normes sociales et environnementales" dans le cadre de ce qui est nommé une "TVA protection de l'emploi".
Une proposition qui n'est pas sans rappeler le protectionnisme "raisonné" du FN, qui préconise des "écluses douanières" non pas aux portes de l'Europe mais aux frontières françaises. Des droits de douanes qui ne frapperaient pas "de manière uniforme tous les produits importés, mais seraient ciblés selon des critères intelligents et utiles", comme les normes sociales, environnementales et sanitaires.
De la même manière, Droite populaire et Front national défendent un "patriotisme économique".
PARTICIPATION SALARIALE
Autre point de rapprochement, la participation salariale. Pour la Droite populaire, il faut la favoriser en "incluant une part de cogestion (présence systématique dans les Conseils d'administration)".
Le FN va un peu plus loin en lançant l'idée d'un "capitalisme populaire". Dans les entreprises de plus de 50 salariés, serait instaurée une "réserve légale de titres" : les salariés "dans leur globalité",  pourraient ainsi devenir collectivement "propriétaires" de 10 % de l'entreprise. Cependant, ils n'auraient pas le droit de vote.
SÉCURITÉ ET IMMIGRATION
Évidemment, ce sont sur les thèmes de la sécurité, de la lutte contre l'immigration, de la lutte contre la fraude sociale, de la "laïcité", ou encore sur "le refus du communautarisme" que les points communs sont les plus nombreux.
Il en va ainsi de la limitation "au strict minimum vital" de l'Aide médicale d'Etat (AME) pour les sans-papiers, de l'opposition au droit de vote pour les étrangers, ou des conditions renforcées d'acquisition de la nationalité française.
Ainsi, Marine Le Pen veut supprimer "l'acquisition automatique de la nationalité. Il faudra faire preuve d’un talent, d’une ambition, d’une envie particulière pour devenir français". La Droite populaire aussi, en mettant en place "un droit de la volonté" pour "l'acquisition de la nationalité française à 18 ans".
FN et Droite populaire mettent également en avant une politique de codéveloppement pour inciter les populations candidates à l'immigration à rester dans leur pays d'origine. Côté UMP, on parle d'un "plan Marshall du codéveloppement en jumelant chaque nation européenne à tous les pays de bonne gouvernance".
Côté FN, on veut "prendre l'initiative d'organiser régulièrement une conférence euro-africaine réunissant les pays concernés afin de déterminer les besoins et de mettre en œuvre les moyens destinés à fixer les populations (...) dans leurs pays d'origine", comme le décrit le site du parti d'extrême droite.
Sur plusieurs sujets, le FN va plus loin que la Droite populaire. Ainsi, la Droite populaire veut "restreindre" le regroupement familial "en supprimant son automaticité". Le FN veut, lui, le "supprimer".
Le parti d'extrême droite parle de "rétablir l’expulsion des délinquants multirécidivistes étrangers" quand la Droite populaire veut "rendre possible le non renouvellement du titre de séjour à tout étranger condamné à une peine d'au moins un an de prison".
Ou encore, quand l'aile droite de l'UMP parle "d'instaurer des sanctions renforcées pour les trafiquants", Marine Le Pen, elle, s'est prononcée à plusieurs reprises pour le rétablissement de la peine capitale pour "les gros trafiquants".
LES AIDES SOCIALES
A première vue, le Front national peut paraitre plus "social" que la Droite populaire concernant les aides. Sur le RSA notamment, Marine Le Pen déclare que "le RSA est un minimum auquel ont légitimement droit de nombreux Français particulièrement démunis, et il apparaît totalement stupide de vouloir réduire les revenus de ceux qui ne font aujourd’hui que survivre".
De leur côté, les députés de la Droite populaire veulent "limiter la perception du RSA dans le temps et instaurer une compensation au versement", c'est-à-dire un temps de travail obligatoire. Si la position du FN semble plus "généreuse", il ne faut pas oublier que, concernant les aides sociales ou le logement social, tout passe, au Front national, par le tamis de la "préférence nationale" – véritable pierre angulaire du programme – qui entend réserver les aides aux seuls Français, ce qui n'est pas le cas de l'aile droite de l'UMP.
LUTTE CONTRE LA FRAUDE SOCIALE ET DÉMOCRATIE DIRECTE
La fraude sociale est aussi un des thèmes majeurs que FN et Droite populaire se partagent. Ils tombent d'accord sur la création d'une carte vitale sécurisée ainsi que sur la volonté de renforcer les fichiers existants. Pour le FN, en autorisant le croisement de fichiers, pour la Droite populaire, en créant un registre national centralisé et coordonné.
Au chapitre des institutions, Droite populaire et Front national tombent d'accord sur l'instauration d'un référendum d'initiative populaire, sur le modèle suisse.
Abel Mestre

Eureca, le "plan secret" pour venir en aide à la Grèce

Le casse-tête grec n'en finit pas de faire réfléchir les économistes. Cette fois, c'est le cabinet allemand Roland Berger Consultants qui propose un nouveau plan pour voler au secours de la Grèce et de la zone euro. Baptisé "Eureca", ce projet vise à alléger la dette grecque sans nuire aux créanciers, et à relancer l'économie du pays pour stabiliser l'euro. Un programme ambitieux, dont le mécanisme est calqué sur la Treuhand, le système mis en place en Allemagne au moment de la réunification, en 1990, pour restructurer et privatiser près de huit mille cinq cents entreprises de l'ex-RDA.

D'après le quotidien La Tribune, qui en publie les grandes lignes, l'élément central de ce ce "plan secret" est en effet la création d'une société holding reprenant les actifs de l'Etat grec (ports, aéroports, banques, autoroutes, téléphonie, immobilier...). Au total, la valeur de ces actifs est estimée à 125 milliards d'euros par l'influent cabinet allemand. Ce holding serait ensuite vendu à une institution européenne "financée par les Etats, dont le siège pourrait être situé au Luxembourg, proche de celui du Fonds européen de stabilisation financière".
Grâce à ces fonds dégagés, la Grèce pourrait alors rembourser une partie de sa dette auprès des pays de la zone euro. Selon les évaluations des experts, cette opération aurait pour effet immédiat de ramener à 88 % son ratio dette/PIB, au lieu de 145 % aujourd'hui. De plus, "l'exposition de la BCE à la dette grecque serait réduite à zéro, ce qui ne peut qu'exercer un effet apaisant sur les contribuables européens".
ÉVITER DE "BRADER" LES ACTIFS GRECS
Le holding européen, de son côté, pourrait restructurer ces actifs grecs avant de les privatiser. Ils seraient privatisés et non plus bradés, ce qui serait le cas s'ils devaient être vendus maintenant, dans l'urgence. C'est ce qui fait toute la force de ce projet, pour l'économiste Jean-Paul Fitoussi, directeur de recherche à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) : "On a poussé la Grèce à effectuer un vaste plan de privatisations, et ce que l'on sait, c'est que vendre des actifs à l'heure actuelle serait une catastrophe tant les marchés financiers ne savent pas à quel saint se vouer, et ne savent pas apprécier ces actifs", analyse-t-il. Vendre ces actifs aujourd'hui reviendrait donc à "les brader". Dans cette perspective "si un système est inventé qui permet de différer leur vente, c'est une excellente chose".
Pour maximiser la valeur des actifs privatisés de l'Etat grec, l'institution fiduciaire européenne devrait investir environ 20 milliards d'euros supplémentaires pour les restructurer. Une partie des recettes réalisée grâce à ces privatisations serait alors réinjectée dans l'économie grecque pour relancer la croissance et créer des emplois. Un vaste stimulus qui représenterait 8 % du PIB du pays, et qui permettrait "d'améliorer les recettes fiscales, de créer deux cent cinquante mille emplois, et de relancer la Grèce dans une spirale où elle peut aller vers une réduction de sa dette", selon Charles-Edouard Bouée, membre du comité exécutif du cabinet de stratégie Roland Berger, interrogé par France Info.
"LA DETTE REDESCENDRA SOUS LES 70 % DU PIB"
Les experts allemands tablent ainsi sur une reprise de la croissance grecque "d'environ 5 % par an au cours des trois ou quatre prochaines années, au lieu des 5 % de récession qu'elle affronte aujourd'hui." Une reprise de la croissance "qui permettrait également de faire en sorte d'augmenter les recettes fiscales de l'Etat", selon Bruno Colmant, associé chez Roland Berger, cité par le webmagazine économique belge Express.be.

Le holding serait chargé de piloter la privatisation de ces actifs, avec une échéance fixée à 2025 pour "déboucler" (clore) les opérations. Un horizon beaucoup plus long que la durée de vie de la Treuhand, créée en 1990 et fermée en 1994, "même si un certain nombre d'opérations se sont finalisées au cours des années 2000", note La Tribune. Les économistes de Roland Berger Consultants ont calculé que, même si aucune privatisation n'était réalisée – hypothèse peu probable, souligne le quotidien économique – "la dette de la Grèce redescendra mécaniquement sous les 70 % du PIB, ce qui est une amélioration notable par rapport à la situation d'aujourd'hui".
RÉTICENCE DES BANQUES ET DES MARCHÉS
Ce nouveau plan pourrait apporter une bouffée d'oxygène à une économie grecque asphyxiée par la pression des marchés. "C'est une solution qui pourrait être extrêmement attractive pour les Grecs, car il s'agit d'une relance économique, et en même temps cela permettrait d'arrêter la spéculation", analyse Charles-Edouard Bouée. Les spéculateurs devraient en effet encaisser leurs pertes, ce qui devrait freiner la spéculation sur d'autres dettes et limiter la casse dans la zone euro.
Toutefois, ce plan ne fait pas l'unanimité. Le gouvernement allemand et certains responsables de la troïka (l'Union européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international) se sont prononcés en faveur d'une telle mesure. Mais le projet risque de se heurter à l'opposition des banques et des marchés financiers, "les premières parce qu'elles ont probablement leur idée sur la privatisation des actifs grecs, les seconds parce que la situation d'incertitude actuelle permet des jeux multiples et rémunérateurs", analyse La Tribune. D'autant que de nombreux acteurs financiers doutent déjà des estimations de base retenues par le cabinet pour développer leur plan. Notamment celles concernant le montant de la dette grecque, qui aurait aujourd'hui dépassé les 145 % évoqués dans le rapport.