TOUT EST DIT

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mercredi 12 juin 2013

Dsk et la "France d’en bas"

Dsk et la "France d’en bas"


L’image de dsk gravissant les marches du festival de Cannes, smoking, nœud « pap », tout sourire, vedette hollywoodienne, saluant la foule aux bras de sa nouvelle compagne, m’a laissé perplexe. Ce personnage, qui devrait être président de la République aujourd’hui, ce rend-il compte de la situation ? Deux ans auparavant, il était menotté, emprisonné, à New York le visage moribond, pour la sale affaire que l’on sait. Les premiers à l’accabler et à le traiter en pestiféré étaient ses propres amis. Aujourd’hui, le voilà triomphant sur la Croisette, comme si rien ne s’était jamais passé. Provocation ou inconscience ? Dans le premier cas, son expression jubilatoire signifie : « je sais ce que vous pensez, mais j’en ai rien à battre et me revoilà ! » Dans le second, l’ancien président du fmi est à côté de la plaque, étranger à la sensation de vertige que sa présence insolite en ce lieu et en de telles circonstances, suscite pour le commun des mortels. Cette hypothèse, la plus vraisemblable à mes yeux, reflète le drame politique de notre époque : le fossé d’incompréhension entre la classe dirigeante, les élites au sens large, et la population française, se traduisant par le rejet du politique et la montée des votes protestataires. La déconnection entre la « France d’en haut », médiatique, et le ressenti populaire atteint des niveaux historiques. Face aux souffrances quotidiennes du chômage de masse et de l’insécurité, une sorte de résignation fataliste tend hélas aujourd’hui à l’emporter chez les Français. En revanche, l’autosatisfaction et la morgue des puissants, tout comme les airs de contentement et la langue de bois méprisante, engendrent un climat de colère et de révolte qui n’attend plus que l’occasion de s’exprimer. Sauf prise de conscience soudaine et changement de ton radical, préparons nous l’an prochain, aux municipales et aux Européennes, à des séismes électoraux dramatiques et, sans doute, une monstrueuse crise politique.

Les messages de la jeunesse turque

Les messages de la jeunesse turque


Recep Tayyip Erdogan voulait en finir avec les manifestants de la place Taksim à Istanbul comme avec leurs émules d'Ankara et d'ailleurs. Les forces de police sont venues y faire « le ménage », dès hier matin au prétexte de nettoyer les lieux des pancartes et slogans qui « l'enlaidissaient ».
Dans la foulée, elles ont vidé le palais de justice des avocats qui s'y étaient rassemblés en signe de soutien aux manifestants. Le Premier ministre turc n'a manifestement pas compris la nature du séisme auquel il est confronté. Rétablir l'ordre est une chose, prendre la mesure d'un mouvement historique en est une autre. D'ailleurs, le soir même, les manifestants revenaient.
La jeunesse turque a définitivement tourné la page de la peur héritée du coup d'État militaire de 1980. C'est déjà, en bonne partie, la volonté de sortir de l'ère d'un nationalisme conservateur qui avait ouvert la voie à Erdogan pour accéder au pouvoir. Ce dernier avait proposé au peuple turc de troquer le nationalisme contre un islamisme qu'il avait modéré pour ne pas heurter de front la solide tradition laïque née du kémalisme. Mais son succès, et surtout son maintien au pouvoir, reposaient sur un compromis et un malentendu.
Le compromis, c'était une sorte de troc : « Acceptez le retour de l'islam, je vous offre la société de consommation. » Libéral dans le domaine économique, Erdogan a fait de la Turquie un pays en forte croissance, résolument convaincu de son avenir. S'il y a plus de femmes voilées aujourd'hui dans les grandes villes turques, c'est avant tout la conséquence du puissant exode qui amène en masse des populations rurales traditionnelles dans des grandes cités en pleine expansion. Car, en dépit des apparences, la prospérité et le libéralisme dissolvent peu à peu la prégnance religieuse.
Là est le malentendu. Erdogan n'a pas vu que les générations montantes - la moitié de la population a moins de 29 ans - ne sont pas disposées à se laisser enfermer dans une identité religieuse étroite et rigoriste. Elles ne veulent pas davantage être réduites au rôle de consommateurs décervelés. La jeunesse turque veut vivre dans la modernité, dans un monde où les structures du pouvoir doivent se faire souples et discrètes, où la liberté de conscience est assurée, où l'individu peut s'affirmer.
Si la démission d'Erdogan a été demandée, personne cependant ne revendique de prendre sa place. Les manifestants de la place Taksim ou d'Ankara affirment que leur génération n'est pas intéressée par le pouvoir, car ils le voient vide de sens. Ils ne lui opposent évidemment pas le terrorisme ou la violence, mais la dérision, l'humour, avec une efficacité redoutable.
Une société infiniment plus fluide et mouvante que le modèle islamiste, à la recherche de nouveaux modes d'organisation et de fonctionnement, vient de manifester qu'il faut désormais compter avec elle. Au sein de l'AKP, le parti d'Erdogan, certains ont bien compris qu'une page se tournait et des désaccords se sont déjà exprimés.
Certes, pour l'instant, le Premier ministre n'est pas menacé, mais en profondeur, là aussi, les choses ont commencé à bouger. La présence des jeunes « musulmans anticapitalistes » parmi les manifestants montre que les lignes de partage ne sont déjà plus les mêmes. Et dans les rangs des jeunes de l'AKP, le pouvoir de séduction du mouvement de la place Taksim pourrait réserver d'autres surprises.

La théorie du genre à l'école, une réalité pour des centaines d'écoliers !


Innovation à l'école : des pratiques pour enseigner les théories du genre ont déjà investi de nombreuses classes.
À quelques heures du vote à l’Assemblée d’un texte qui pourrait ouvrir plus largement encore les portes des écoles aux théories du genre, il faut ouvrir les yeux sur les pratiques qui ont déjà investi de nombreuses salles de classe. Le site du Syndicat Unitaire des Instituteurs et Professeurs des Écoles nous aide à faire un point sur les innovations des enseignants, dont certains sont prêts à faire de l’école la tête de pont des questions de société et s’enorgueillissent d’ouvrir l’esprit des jeunes enfants aux idées les plus controversées de notre modernité.
Théorie du genre, ou comment faire une tarlouze de votre garçon
Le rapport du SNUIPP (15 mai 2013), c’est 193 pages de réflexions théoriques, de prises de positions syndicales, mais aussi de… témoignages. Témoignages des nombreux professeurs qui ont déjà engagé leur classe dans la « lutte contre l’homophobie et les stéréotypes du genre ». Comment ? En faisant travailler en classe de CP le livre « Papa porte une robe », ou l’un des nombreux ouvrages faisant la promotion des « familles Arc-en-Ciel », comme « Dis MamanS », « Jean a deux mamans », ou « J’ai deux papas qui s’aiment ». Le rapport fournit une bibliographie abondante. Et si vous voulez surveiller ce que votre enfant fait en classe, sachez que la suspicion est réciproque et que vos réactions de parents ont été prévues et circonscrites : « Est-il utile d’informer les parents ? S’il s’agit d’une séquence isolée et ponctuelle en réaction à un événement (insulte dans la cour) ou d’un travail sur un livre particulier en lien avec d’autres livres (travail sur les familles par exemple) sans doute pas. S’il s’agit par contre d’un ensemble de séquences permettant d’approfondir la question, il sera probablement utile d’évoquer le thème choisi lors d’une réunion avec les parents et de préciser les raisons qui ont amené l’enseignant ou l’équipe à ce travail. Entendons-nous bien, non pour demander une autorisation, mais pour informer en amont afin d’éviter des réactions de surprise ou d’incompréhension. Nos conseils en cas de problème : s’assurer du soutien de l’équipe, prendre contact avec son IEN… et avec le SNUipp-FSU ! » (p.46).

Tout cela déborde du contenu même des cours, pour imprégner la pédagogie dans son ensemble, et même le comportement des éducateurs : « Il est nécessaire que les enseignant-es et leur formation prennent en compte les études sur le genre dans leurs pratiques quotidiennes, tant au niveau des contenus d’enseignement que des interactions qu’ils/elles ont avec leurs élèves, ainsi que dans la gestion des relations entre enfants. Il faut veiller à ne pas enfermer les élèves dans des schémas étriqués, mais au contraire leur laisser ouvert le champ de tous les possibles (choix d’orientation scolaire et professionnelle et de loisirs en particulier), afin de permettre l’épanouissement de toutes et tous. Il s’agit de lutter contre les stéréotypes, de promouvoir la diversité. Pas question donc de cultiver le genre à l’école ! Pas question, par exemple, d’écrire les prénoms des filles en rose et ceux des garçons en bleu ! Ni de s’adresser régulièrement de manière collective « aux filles » ou « aux garçons ». Attention aussi à la manière de répartir les tâches et les activités entre les élèves. Différencier, oui, mais pas selon le sexe ». (p.18)

Les contes traditionnels sont abondamment utilisés… comme contrepoint pour bien faire comprendre ce qu’est un « stéréotype de genre » et pour aider les élèves à s’en défaire. Dans le Xème arrondissement de Paris par exemple : « Une approche comparée de contes traditionnels de princesses comme La belle au bois dormant, Blanche Neige, La princesse aux petits pois ouCendrillon a mis en évidence les rôles et les attributs des princesses et des princes. Cette démarche préalable a débouché sur deux albums de « déconstruction » qui montrent des princesses émancipées : Rose Praline et La révolte des princesses… La classe a imaginé pour le carnaval de l’école une manifestation des princesses avec leurs revendications. Les élèves, déguisés en princesses, ont défilé dans le quartier avec les pancartes qu’ils avaient préparées : « Je veux faire le tour du monde et voyager », « J’en ai marre de dormir sur des lits inconfortables », « Je ne veux plus porter de robes mais des pantalons », (…), « On veut pouvoir se marier avec une fille »… » (p.75). On apprend donc à « déconstruire les stéréotypes du genre et à construire sa personnalité au sein de la communauté scolaire » (p.76) et… à manifester, ce qui est toujours utile, avouons-le.

L'impossible gestion de la retraite par les socialistes

On s'en souvient (vaguement) : le candidat Hollande avait promis, outre quelques ruisseaux de miel et de lait, des fesses roses aux bébés et des retraites heureuses aux anciens. Le président Hollande, pour conserver son pouvoir, va cependant devoir fermer le robinet à miel et à lait, arrêter la distribution de talc et réformer les retraites. Ou, au moins, faire comme si.

Et c'est donc après avoir ramené la retraite à 60 ans (pour les salariés ayant commencé jeune, scrofuleux et avec un pied bot) avec la sagacité qui caractérise les démagogues débonnaires que notre président a décidé, à l'odeur de la situation générale qui ne sent plus trop la rose, de lancer une grande et belle réformichette de la retraite afin de sauver (une fois encore) ce système par répartition qui, comme chacun le sait, fait saliver le reste du monde.
Pour cette tâche, qu'on imagine fort ingrate, il a désigné ce dont le pays avait vraiment besoin : un super-Ayrault, qui redressera les comptes, réformera les retraites et guérira les écrouelles (enfin pour les écrouelles, on verra demain, car aujourd'hui il doit aller voir où en sont les travaux de l'aéroport Notre-Dame des Landes). Cette courageuse remise à plat d'un système presque séculaire a été saluée comme il se doit par toute l'intelligentsia politique de Paris comme en témoigne par exemple la palpitante exégèse de la pigistechroniqueuse attitrée d'Europe1 dont la profondeur d'analyse permet même aux bambins de garder pied sans petits brassards mickey gonflés aux bras, et qu'on peut résumer sommairement (mais avec exactitude) ainsi : Hollande doit faire une réforme, et comme il y en a eu d'autres, celle-ci sera la réforme Ayrault, ça va dépoter les petits amis je ne vous dis que ça fouyaya fouyaya. Ah et puis aussi Marisol et Michel veulent se faire mousser.

Malgré cette volée de steaks dodus et roboratifs, on comprend bien sûr que cette "réforme" sera du même acabit que les précédentes : de la dentelle législative finement ouvragée, toute en nuances subtiles et aérée comme du coton d’Égypte, ménageant toutes les susceptibilités et plus encore. Bien sûr que l’État ne peut plus attendre ! Bien sûr que la réforme est indispensable pour faire croire qu'on veut et qu'on peut sauver quelque chose ! Bien sûr qu'Ayrault va batailler avec les partenaires sociaux, entre deux bâillements et un petit somme sur les bancs de l'Assemblée, pour obtenir -- à l'arrachée -- un magnifique texte de Rénovation de la Retraite en France qui sera proclamé, ubi et orbi, trompettes et cors inclus, dans les journaux télévisés pour assurer aux Français que leur système social tiendra le coup.
Car il n'a pas le choix : il lui faudra faire bonne figure ou déclencher l'ire de ses concitoyens.
Mais pour la réforme de fond, celle qui remettra vraiment le système sur des rails solides, qui donnera une vraie perspective aux retraités de toucher, dans les cinq ou dix ans à venir, autre chose que des clopinettes marqué "Don de l'Etat Français" dessus, n'y comptez-pas. Il faut être chroniqueuse à Europe 1 et béatement amoureuse du socialisme appliqué par la fine équipe de Hollande pour voir dans Ayrault un chevalier de la réforme. En réalité, le petit rond de cuir villageois va nous enfumer comme ses prédécesseurs, et le système de retraite continuera cahin-caha comme devant, vers son destin funeste et inévitable. Même si le pesant carrosse vermoulu n'avance plus très vite, il versera dans le fossé, écrasera les chevaux salariés et tuera, plus ou moins vite, ses passagers endormis.
Car la solution, tout le monde la connaît. Elle est économiquement balisée, assez simple à comprendre ... mais politiquement impossible à faire passer ; et elle sera donc oubliée entre la page 173 et la page 789 du copieux rapport qui sera pondu suite aux moulinets oratoires qui s'enchaînent actuellement sur le sujet. Cette solution, c'est la capitalisation, sans laquelle il n'y aura pas de salut. Et pour la façon d'y arriver, d'autres pays ayant expérimenté le trajet avec succès, on sait déjà comment on peut procéder.
Mais, comme je l'ai dit, cette capitalisation est politiquement impossible : d'une part, le mot est tabou. D'autre part, une telle réforme nécessitera de remettre à plat tout le système, et concernera donc tous les retraités.
Tous les retraités ?
Non. Un petit village de plusieurs millions de fonctionnaires résiste à l'envahisseur ultra-turbo-libéral et refusera catégoriquement toute modification à ses privilèges. Et alors même que les (âpres) négociations n'ont pas encore commencé entre patronat, syndicats et État, une chose est déjà dans les tuyaux ; la grève de la fonction publique aura lieu, motivée par les raisons habituelles : pas d'alignement du public sur le privé ! Jamais. Scrogneugneu.
la retraiteEt pourquoi diable s'opposent-ils donc tant à cette réforme ? Pourquoi l'alignement strict des retraites du public sur le privé serait-il scandaleux alors que ceci répond vraiment à l'objectif d'égalité de tous devant les droits du merveilleux système social français ? Tous ces gens seraient-ils des socialistes de pacotille ? D'autant qu'en plus, outre ce vrai effort de solidarité et d'égalité, cet alignement permettrait aussi de gagner de précieuses années pour passer sans trop de casse à la capitalisation...
Peut-être cette opposition est-elle aussi forte parce que, précisément, la capitalisation, ils en bénéficient déjà et qu'après tout, c'est encore mieux si c'est un privilège à eux seuls réservé ? Allez savoir.
Enfin... Je dis qu'ils en bénéficient, je vais un peu vite en besogne.
Sur le papier, nos amis fonctionnaires ont effectivement la possibilité de bénéficier de ce genre de mécanismes qu'ils semblent résolus à ne pas voir appliqué aux salariés du privé. Mais si les structures qui gèrent ce genre de retraites sont aussi bien gérées que la MRFP, nos amis obstinés peuvent s'attendre à quelques déboires.
Et pour ceux qui ont un peu perdu de vue les aventures de René Teulade, rappelons simplement que l'ancien ministre et sénateur PS avait été à la tête de la Mutuelle Retraite de la Fonction Publique (MRFP) qui, après de nombreuses années à ses bons soins (1974 - 1992), a terminé sa course dans une faillite mémorable. Faillite qui aura conduit Teulade au procès dans lequel il fut condamné à 18 mois de prison avec sursis et 5.000 euros d’amende pour abus de confiance et dont l'appel va se dérouler dans les jours qui viennent.
Fâcheuse coïncidence avec l'actualité, ne trouvez-vous pas ?
Surtout si l'on se rappelle que le même Teulade fut ancien député suppléant de ... François Hollande, en Corrèze, et que le président lui avait accordé toute son amitié en octobre 2012 -- au grand dam des cotisants à la défunte mutuelle, spoliés par Teulade -- allant jusqu'à déclarer, je cite : « Je salue les présidents qui ont marqué l’histoire de votre organisation. René Teulade auquel je suis lié par une fidélité corrézienne (....) »
Surtout si l'on se rappelle que Hollande, dans ce cadre, pourrait être appelé comme témoin, et qu'il avait clairement dit, pendant sa campagne, qu'en tant que président, il ferait tout pour aider à la manifestation de la vérité, quitte à témoigner : « Moi, président de la République, j’aurai à cœur de me rendre à la convocation de tel ou tel magistrat. »
Surtout si l'on se rappelle que le brave président a laissé la Corrèze dans un état catastrophique, faisant de ce département l'un des plus endettés de France par habitant (sa dette sera passée de 300 à 345 millions pendant qu'il y sévit), à coup d'iPads pour collégiens et autres dépenses ridicules.
Bref : on aura bien du mal à trouver dans la gestion de cette mutuelle, et les liens présidentiels, un quelconque argument en faveur des socialistes en matière de gestion, que ce soit des retraites ou d'autre chose...
Ce pays s'est acharné, pendant les presque 70 ans qui ont suivi la Libération, à distribuer des petits privilèges et des passe-droits à chacun, de façon différente, en faisant croire à tous que c'était économiquement tenable, quitte à faire des promesses absurdes et à endetter les générations futures. Pour la retraite, il en a été comme pour le reste : on a patiemment construit un système où chacun avait tout intérêt à tirer la couverture à lui, en utilisant le levier de la répartition pour gommer des injustices de plus en plus fortes. Mieux : comme le prouve la petite histoire ci-dessus, on a placé à la tête d'organismes de gestion de ces retraites de parfaits aigrefins qui ont, chacun à leur façon, amené le pays dans la position catastrophique qu'on connaît actuellement. Et maintenant que l'addition arrive, une partie du peuple refuse obstinément tout ajustement ou tout compromis, pendant que l'autre, toute aussi butée, frétille de joie à l'idée d'avoir placé au pouvoir de besogneux bureaucrates aux desseins exclusivement personnels et aux compétences plus que douteuses.
Franchement, je peine à voir en France une issue réjouissante au problème des retraites avec de telles prémices...

Grèce. Le gouvernement ferme brutalement la télévision publique

Le gouvernement grec a annoncé et immédiatement mis en application ce mardi la fermeture des chaînes de la télévision publique ERT, engageant par surprise une épreuve de force inédite avec les syndicats sous la pression de ses bailleurs de fonds internationaux.

Une annonce sans préavis
Vers 23 h, les chaînes d’ERT ont cessé d’émettre et les écrans sont devenus noirs, la police ayant neutralisé selon une source syndicale le principal émetteur situé près d’Athènes.

La décision a été annoncée dans l’après-midi par le porte-parole du gouvernement, Simos Kedikoglou. « La diffusion d’ERT s’arrêtera après la fin des programmes ce soir », a déclaré à la presse le porte-parole.
ERT constitue « un cas exceptionnel d’absence de transparence et de dépenses incroyables. Et tout ceci prend fin maintenant », a asséné le porte-parole.
Il a assuré que ce service public, où les grèves se multipliaient ces derniers mois pour s’opposer aux plans de restructuration, rouvrirait sous une autre forme, avec un nombre réduit de salariés.
Tous les salariés actuels d’ERT, au nombre de 2 656, recevront une compensation et seront autorisés à postuler à nouveau à un emploi dans la nouvelle structure, a-t-il dit.
Cette mesure radicale et sans précédent a été annoncée sans préavis au moment où les chefs de file de la troïka des créanciers de la Grèce (UE-BCE-FMI) sont à Athènes.
« Un choc total »
ERT appartient aux multiples organismes d’Etat qui devaient être restructurés ou fusionnés en vertu du protocole d’accord signé entre la Grèce et ses bailleurs de fonds.
Les réactions syndicales et politiques ont été très vives.

« ERT appartient au peuple grec […] c’est le seul média indépendant et la seule voix publique, qui doit rester dans le domaine public […] nous condamnons cette décision soudaine », a déclaré dans un communiqué le syndicat GSEE.
« C’est un choc total », a commenté auprès de l’AFP un journaliste de la rédaction, Pantelis Gonos. « Le gouvernement, sans consultations ni discussions, a choqué tout le monde en annonçant la suspension à minuit de la télévision », a-t-il dit.
La télévision publique et la radio « sacrifiée »
Peu après l’annonce du gouvernement, des milliers de personnes ont afflué vers le bâtiment principal d’ERT dans la banlieue nord d’Athènes pour apporter leur soutien à la télévision publique. Près de 500 personnes se sont aussi rassemblées devant le bâtiment d’ERT à Thessalonique, dans le nord de la Grèce.
Le syndicat de journalistes Poesy a appelé à une grève immédiate de soutien dans les médias privés. « Le gouvernement est déterminé à sacrifier la télévision publique et la radio » pour satisfaire ses créanciers, a déploré le syndicat.
Les chaînes d’ERT ont effectivement cessé d’émettre peu après 23h.« C’est illégal. Le gouvernement a arrêté l’émetteur principal », a déclaré à l’AFP le président du principal syndicat des salariés de la télévision, Panayotis Kalfayanis.
« Cela ressemble plus à un gouvernement de Ceausescu qu’à une démocratie », a-t-il lancé, dans une référence au dictateur roumain Nicolae Ceausescu.
Le ministère des Finances a publié au même moment un communiqué annonçant qu’ERT en tant qu’entité n’existait plus.
« Un coup d’État »
Les deux partenaires de la Nouvelle Démocratie (ND), la formation du Premier ministre conservateur Samaras, au sein de la coalition ont fermement exprimé leur opposition à la fermeture d’ERT.
« Nous sommes absolument en désaccord avec les décisions et la gestion du gouvernement dans cette affaire », a déclaré le Pasok (socialiste).
« Nous réitérons notre ferme opposition à la fermeture d’ERT », a également dit la Gauche démocratique (Dimar).
« C’est un coup d’Etat », a pour sa part déclaré aux journalistes Alexis Tsipras, leader du principal parti d’opposition Syriza (gauche radicale), venu en toute hâte au siège d’ERT.
Rupture de la solidarité gouvernementale
Pasok et Dimar ont annoncé qu’ils ne voteraient pas pour le décret gouvernemental lorsqu’il serait présenté au Parlement pour être validé après son entrée en application.
Cette rupture de la solidarité gouvernementale pourrait provoquer une crise politique au sein de la fragile coalition en place depuis un an sous la direction du Premier ministre conservateur Samaras, à un moment où la Grèce est surveillée de près par ses créanciers internationaux.
L’Union européenne de radio-télévision (UER), dans un communiqué publié à Genève, a appelé M. Samaras à annuler la décision revenir de fermer ERT.
Le président de l’UER, Jean-Paul Philippot, et sa directrice générale, Ingrid Deltenre, ont appelé dans une lettre le Premier ministre à « user de tous ses pouvoirs pour annuler immédiatement cette décision », indique le communiqué.
Satisfaire les créanciers
Selon les syndicats, en fermant ERT, le gouvernement remplit d’un coup l’objectif assigné par les créanciers de la Grèce de supprimer 2 000 emplois publics d’ici à la fin juin.
C’est une « solution facile pour répondre aux exigences de la troïka », estime le syndicat Poesy.
Les hauts responsables de la troïka ont repris lundi à Athènes l’audit des comptes grecs et le contrôle des réformes, parmi lesquelles figurent la réduction du nombre des fonctionnaires et la fusion ou la suppression des organismes publics.
Lundi soir, les responsables de la troïka ont eu un entretien avec le ministre de la Réforme administrative Antonis Manitakis sur la restructuration du secteur public

Le tonneau des Danaïdes

Le tonneau des Danaïdes


1995, 2003, 2010, 2013… L’accélération du calendrier des réformes sur les retraites dit à elle seule l’urgence d’une situation qui ne cesse de se dégrader. Elle souligne tout autant la faible portée des mesures adoptées ces vingt dernières années qui n’ont bien souvent consisté qu’en un poreux colmatage, repoussant sans cesse le moment de trancher dans le vif.
Il faudra pourtant bien se résoudre un jour à en finir avec cet illusionnisme collectif nourri à crédit. Le pays ne pourra faire l’économie d’une vraie réforme structurelle s’il veut assurer la pérennité du système. Même admissible par tous, l’allongement de la durée des cotisations ne peut pas être une solution suffisante à très long terme.
Cette restructuration globale, qui pourrait emprunter à d’autres systèmes européens, n’est pas pour demain. Ni pour septembre prochain d’ailleurs puisque les propositions du rapport Moreau sont une fois de plus prises dans l’urgence et donc grosso modo calquées sur celles de 2010. En nettement plus radical et un peu plus équitable aussi, avec notamment la fin du tabou sur le traitement des fonctionnaires qui était une injustice flagrante, quoi qu’en disent les syndicats.
François Hollande espérait secrètement faire l’économie de cette question des retraites, surtout après une première année de gouvernement économiquement et socialement extrêmement difficile. La réforme Woerth de 2010, celle qui a conduit des mois durant des centaines de milliers de personnes dans les rues, était en effet censée ramener l’équilibre à l’échéance 2020 et il était tentant d’y croire. Trois ans plus tard, on parle d’un déficit de 20 milliards d’euros à cet horizon-là et tout est à refaire…
S’engager sur cette même voie est donc particulièrement risqué pour le gouvernement de Jean-Marc Ayrault. Pas seulement parce qu’elle est impopulaire, mais surtout parce qu’à long terme elle est inefficace.