TOUT EST DIT

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mardi 4 mai 2010

L'Hadopi sera opérationnelle "fin juin"

Eric Walter, le secrétaire général de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), a confirmé, lundi 3 mai, lors d'une conférence de presse, que l'Hadopi serait opérationelle "fin juin", sur au moins une partie de ses missions, notamment l'envoi de courriels aux internautes.
Le recrutement des premiers agents de la Haute Autorité – à terme, 50 à 70 personnes – est en cours. L'interconnexion entre les systèmes informatiques des ayants droit et ceux des fournisseurs d'accès à Internet devrait être opérationnelle fin juin. La CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) devrait rendre son avis sur le projet à la même époque. Et le gouvernement devait également publier à la fin du mois de juin les derniers décrets d'application nécessaires au fonctionnement de l'Hadopi, notamment celui qui définira l'infraction de "négligence caractérisée".

L'Hadopi ne sanctionnera en effet pas directement le téléchargement illégal, mais plutôt la "négligence" du titulaire d'une connexion à Internet, qui aurait insuffisamment surveillé ou protégé sa connexion pour empêcher quelqu'un de s'en servir pour télécharger illégalement. Pourront donc être sanctionnés tout aussi bien un téléchargeur qu'une personne qui n'aurait pas verrouillé son accès à Internet sans fil, laissant ainsi la possibilité à un tiers d'utiliser la connexion de manière illégale.

"Le cœur d'Hadopi, ce ne sont pas les pirates, qui pourront toujours faire l'objet de poursuites en contrefaçon", précise Mireille Imbert-Quaretta, la présidente de la Commission de la protection des droits. C'est à cette commission-clé de la Haute Autorité – "le bras armé", ironise sa présidente – qu'échoira la tâche de décider quels dossiers seront transmis à la justice, au terme de la procédure de riposte graduée.

RÉSEAUX DE P2P SURVEILLÉS EN PRIORITÉ

Dans un premier temps, l'internaute suspecté de télécharger illégalement recevra un simple courriel d'avertissement, suivi d'une lettre en recommandé en cas de récidive. La troisième fois, son dossier pourra être transmis au parquet, qui décidera ou non de poursuivre, et pourra ordonner la coupure de la connexion Internet. "A tout moment, l'internaute sera tenu informé, et pourra présenter des éléments pour sa défense. Il pourra même demander à être auditionné, en compagnie de son avocat s'il le souhaite", précise Jacques Toubon, membre du collège de l'Hadopi. La commission de protection des droits tranchera ensuite.

Le "repérage" des internautes se fera par le biais d'agents assermentés, mandatés par les sociétés d'ayants droit, comme la société Trident Media Guard. Ce sont eux qui repèreront les adresses IP (Internet Protocol) sur les réseaux d'échanges de fichiers, et qui les transmettront à l'Hadopi. Si la Haute Autorité assure que les réseaux P2P ne seront pas les seuls surveillés, il semble pour l'heure techniquement impossible d'assurer la surveillance d'autres moyens de téléchargement illégal, notamment le téléchargement direct. "Ce n'est pas à l'Hadopi qu'il faut poser cette question ; c'est aux ayants droit et à leurs prestataires techniques", estime Jacques Toubon.

Outre la mise en place du volet répressif, la Haute Autorité devrait également lancer dans les semaines prochaines une série de missions de prospective. Eric Walter souhaite en effet que l'Hadopi soit "force de proposition et d'innovation", avec six groupes de travail – baptisés "labs" – dédiés à des thématiques comme les usages en ligne ou l'économie numérique de la création, qui seront dirigés par des experts extérieurs à l'Hadopi. La Haute Autorité mise aussi largement sur la communication pour faire passer un message qu'elle veut "essentiellement pédagogique". Des ateliers de sensibilisation en direction des professionnels sont prévus pour juin, ou encore un compte Twitter (@InsidOpi) ainsi qu'un nouveau logo, le précédent ayant été largement critiqué parce qu'il utilisait une police de caractères sans l'autorisation de ses créateurs.

"Nous sommes conscients d'être dans un monde en évolution permanente, juge Eric Walter. Notre méthode sera faite de proximité et de recherche du contact avec les internautes." Avec un bémol toutefois : "Nous serons toujours ouverts au dialogue, jamais à la polémique." Les polémiques autour de la Haute Autorité semblent pourtant loin d'être terminées. Dernière en date : le choix de Michel Riguidel, professeur à Télécom Paris Tech, et opposant déclaré à la neutralité du Net, pour définir les spécifications techniques des logiciels de sécurisation.

Damien Leloup


UNE LOI DE PLUS QUI NE SERVIRA À RIEN, HADOPI EST D'ORES ET DÉJÀ PIRATÉ

Télé: l'audience de TF1 baisse toujours

Avec une part d'audience de 24,3% en avril selon l'institut Médiamétrie, TF1 se maintient sur la première marche du podium des chaînes françaises.

Mais la chaîne du groupe Bouygues accuse une baisse de 2 points sur un an. Il s'agit de la plus mauvaise part d'audience mensuelle de son histoire. L'érosion de l'audience se poursuit donc pour TF1, comme pour d'autres chaînes généralistes: France 2 perd 0,5 point de part de marché et France 3 affiche moins 1,7 point.

Les vrais gagnants sont en fait les nouvelles chaînes de la TNT qui s'installent progressivement: Direct 8 passe ainsi de 1,2% en avril 2009 à 1,9% un an plus tard, TMC de 2,4% à 3,2% et NR12 de 1,4 à 2%.

TF1 MANQUE D'AUDACE, ELLE EST À L'IMAGE DE SON PDG. PAOLINI EST UN CRÉTIN NOTOIRE, LES PROGRAMMES DE LA CHAINE LUI RESSEMBLENT.

Distance capitale


Oublier Paris, c'est toujours un exercice de style dans notre pays jacobin. S'éloigner de la ville-lumière ? Un risque ! On a si peur de se priver du rayonnement qu'elle prodigue. Et on a tort bien sûr. Ce serait une conception bien frileuse de l'art que de le croire prisonnier des bords de Seine, et privé de son prestige quand il parvient à s'en échapper. En ignorant ces préventions, le Centre Pompidou-Metz fait preuve d'une audace aussi insolente que réjouissante.
Malraux aurait aimé. « L'inventeur » des ambitieuses maisons de la Culture, qui virent le jour à la fin des années 60 dans plusieurs métropoles régionales, applaudirait le concept ouvert de ce lieu monumental et en perpétuel mouvement, où toutes les disciplines vont se croiser. Sans doute, l'iconoclaste ministre de la Culture du général de Gaulle regretterait-il qu'il ait fallu attendre plus de quarante ans après lui pour célébrer l'avènement de la première-institution-culturelle-nationale-décentralisée. Ses successeurs - Catherine Trautmann, notamment - s'étaient bien employés à donner de l'air aux oeuvres, aux spectacles et à la création en général, pour que le meilleur ne soit pas réservé aux élites parisiennes. Mais on ne change pas si facilement les mentalités.
Il s'agit pourtant de renouer avec un héritage de la Révolution - d'essence girondine - qui voulait que la richesse des musées, des collections, et de l'esprit soit partagée par la nation toute entière. La création du Louvre, en 1793, répondit même très officiellement à cette ambition allégorique. Plus tard, y compris sous l'Empire, on parla de « part sacrée » qu'il fallait réserver aux régions avant d'oublier pour longtemps ces exhortations.
Aujourd'hui, le Beaubourg messin, et le futur Louvre-Lens, contrarient avec bonheur un inconscient recentralisateur qui, ces derniers temps, a réveillé les vieux soupçons sur les capacités de la province et de ses grandes villes à incarner des rêves nationaux. En Lorraine, comme dans le Nord-Pas-de-Calais, les collectivités territoriales se sont emparées pleinement de ce dessein pour assumer une triple dimension européenne, hexagonale et locale. Dans ces deux régions touchées par les épreuves de la désindustrialisation, ces grands équipements culturels sont autant de phares rassembleurs. Des lueurs optimistes, génératrices d'emplois, de vie, d'imagination. Leurs faisceaux réveillent des quartiers, comme à Metz et mobilisent déjà toutes les énergies avant d'attirer des milliers de visiteurs.
A Bilbao, au pays basque espagnol, « l'effet Guggenheim », provoqué par l'installation, en 1997, du musée d'art moderne dessiné par Franck Gehry a radicalement changé le destin d'une ville ravagée par le marasme économique. Par modestie, Metz et Lens n'osent pas revendiquer pareil phénomène. Mais elles ne s'interdisent pas un songe aussi excitant.

Emprunter c'est gagner...


On l'avait oublié. Et pourtant. Nicolas Sarkozy avait convié en juin dernier les parlementaires à Versailles pour leur annoncer. L'Etat français lancerait un grand emprunt pour "financer nos priorités nationales". Bigre, il en allait de notre plus haute destinée par temps de crise. À telle enseigne que deux anciens Premiers ministres aux neurones incontestés étaient chargés de plancher sur le montage idéal. Le débat a battu son plein jusqu'à la remise de leur rapport, baptisé "Juppé-Rocard", préconisant un effort public en faveur des investissements d'avenir de l'ordre de 35 milliards d'euros. La fourchette eut l'heur de satisfaire le président de la République qui arbitra en sa faveur. Et puis plus rien. Silence radio, le Grand Emprunt avait disparu des écrans. Un peu comme si notre rutilant futur disparaissait au profit d'un morne présent. Déficits publics abyssaux, dette globale insupportable, on avait le sentiment que la maison France n'avait plus les moyens de lever les milliards nécessaires. Eh bien si, elle les a puisque François Fillon a validé hier le lancement des premiers projets. Et qu'on ne vienne pas accuser le gouvernement d'aggraver notre situation financière. D'abord une partie des dépenses devrait être couverte par les intérêts que les banques ont versés à l'Etat en contrepartie de l'argent prêté pour les sauver du naufrage. Ensuite, grâce à l'effet de levier, les fonds alloués aux projets prometteurs devraient rapporter gros, foi de Premier ministre. Cela s'appelle un "retour sur investissement". C'est comme le prêt à la Grèce. Non seulement, nous n'aurons pas à bourse délier, puisque nous allons prêter sur notre capacité à émettre des obligations, mais nous allons faire du bénéfice sur les taux. Plus de doute. Emprunter, c'est gagner !



Hélène Pilichowski

Grenelle, la soupe à la grimace


Le contraste est saisissant. Fin 2007, le Grenelle de l'environnement était porté aux nues. Nicolas Sarkozy et son ministre de l'Écologie, Jean-Louis Borloo, se targuaient d'avoir pris la tête du combat écologique planétaire. Dans la foulée, la loi Grenelle 1 était votée à la quasi-unanimité. Seules les plus radicales des associations écologistes, les antinucléaires, criaient à la duperie. Toute la classe politique semblait s'être miraculeusement convertie à l'écologie.

Aujourd'hui, la loi dite Grenelle 2 est soumise au vote des députés. Avec ce « monument législatif », selon Borloo ¯ 250 articles, 1 600 amendements ¯, on passe du registre des belles intentions et des incantations aux décisions, règlements et normes sur les constructions, les transports, l'énergie, l'alimentation... La loi s'attaque au plus dur, à la transformation de nos modes de production et de consommation. Et rien ne va plus de soi. Le consensus politique s'est évanoui. Le Grenelle vire à l'aigre, à la soupe aux grimaces.

Le vent, cette girouette, a quelque peu tourné. À l'Élysée, depuis les élections régionales et les bons scores d'Europe Écologie, la défense de l'environnement n'est plus en grâce. Symptomatique, la phrase du président de la République au dernier Salon de l'agriculture : « L'environnement, cela commence à bien faire ! » Sans doute voulait-il renouer avec un monde agricole en pleine crise des revenus. Une petite phrase démagogique, pas de quoi en faire un reniement. Mais, depuis, le ministre de l'Agriculture a emboîté le pas présidentiel. Il a souhaité le report de certaines mesures du Grenelle. Un rapport parlementaire s'est dressé contre la guerre aux pesticides. Les rendements agricoles seraient en danger.

La magie du Grenelle n'opère plus. L'écolo-scepticisme fait des ravages. La taxe carbone a été abandonnée. La taxe sur les poids lourds repoussée. L'éolien est attaqué. Au nom de la défense du patrimoine paysager. La France suivrait, au fond, le cours déprimé de l'écologie à la bourse mondiale des idées, depuis l'échec du sommet de Copenhague. Les gouvernements, confrontés à la crise financière, au chômage, à une croissance en berne, n'auraient plus la tête à la défense de la planète.

Illusion d'optique. L'écologie bouscule des intérêts puissants, des positions acquises, des habitudes ancrées, des lobbies très organisés qui ont leurs entrées à l'Assemblée nationale et au Sénat. Le Grenelle dérange nécessairement. Il suscite forcément des oppositions, des débats, des manifestations et des contre-manifestations. Il vit. Il n'est pas l'« astre mort » décrit par le député Vert Noël Mamère. Dans la société, les comportements changent. Des modes de production se transforment, y compris en agriculture. La croissance verte tarde, certes, à se manifester, mais elle est en germe.

Politiquement, on voit donc mal la majorité détricoter brutalement ce Grenelle et mettre à bas ses années laborieuses de conversion à l'environnement. En vue de la présidentielle de 2012, Nicolas Sarkozy peut-il laisser dépérir cette fibre verte cultivée jusque-là avec un certain culot et talent par Jean-Louis Borloo ? Ce serait se rabougrir soi-même. La loi Grenelle 2 va sans doute vivre des heures difficiles à l'Assemblée nationale, mais parier sur sa mort est hasardeux.