TOUT EST DIT

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jeudi 23 juin 2011

L'improbable bug du baccalauréat

Le standard du ministère de l'Éducation nationale - et sans doute les oreilles de certains - ont chauffé hier. Ce n'est plus une boulette, c'est un couac gros comme un mammouth : un exercice de probabilité d'une épreuve de maths a été divulgué sur Internet la veille du bac ! Un attentat impeccable, imparable. La capture photographique du sujet était assez nette pour éviter toute ambiguïté - la fraude est avérée -, et elle a été postée assez tôt pour que 165 000 candidats puissent bachoter. Dans un tel cas, que faire quand on est ministre, à part brûler un cierge ? Eh bien, un calcul de… probabilité pour trouver la solution du moindre mal ! Luc Chatel a décidé non pas d'annuler l'épreuve mais de neutraliser l'exercice, au nom du principe républicain de l'égalité. Le problème, c'est qu'il résulte de son application une… inégalité. Si le compromis fait des heureux, ceux qui ont séché sur l'exercice, il mécontente ceux qui l'ont réussi. Petit sujet de philo en passant : n'est-il pas injuste de léser une majorité d'élèves scrupuleux pour punir quelques tricheurs ? Plus sérieusement, cette affaire montre que le phénomène des fuites, vieux comme le bac, évolue au rythme des technologies. Le smartphone a remplacé l'antisèche, les réseaux sociaux transforment l'internaute astucieux en détenteur de la bombe atomique. À en juger par la série noire des récents incidents, elle démontre que Luc Chatel a pas mal de fuites à colmater dans la maison. Ainsi cette perle à l'agrégation d'histoire : le texte présenté comme authentique était en réalité un pastiche. Au moins l'égalité était parfaite, tous les candidats ayant planché sur du faux !

Les citoyens ont droit à la vérité

La crise a mis à nu les tromperies et les subterfuges en politique, mais les dirigeants européens continuent à nier les évidences. Seule la franchise et le courage de dire les choses pourrait sauver l’Europe, assure l'éditorialiste Barbara Spinelli. 

Au fur et à mesure que se multiplient les crises et les banqueroutes des Etats, grandissent en Europe les révoltes des indignés : en Grèce, en Espagne, et aussi en Italie où la faillite n’est pour l’heure qu’une menace. Les gouvernements ont tendance à ne voir que le côté noir des révoltes : la pénible prise de conscience de la réalité, la colère quasi aveugle.
Mais la cécité n’explique qu’en faible partie une rébellion qui vise non seulement les politiques, mais les formes de comportement (et donc l’éthique) des gouvernements : leur navigation à courte vue, agrippée au prochain vote ou sondage, leur vocation à dissimuler les comptes publics chancelants, à ne pas dire la vérité sur l’immigration ou sur les déficits, à accuser la presse, les Banques centrales, l’Europe, tous suspectés de propager de mauvaises nouvelles.

On répond à la crise par la transparence des informations

L´Italie est en ce domaine aux avant-postes. Depuis son retour au gouvernement, Silvio Berlusconi  répète le même refrain : le naufrage est dans vos têtes, bande de défaitistes : nous nous en sortons mieux que tant de pays vertueux. Le 20 juin, il a déclaré que "la crise n’est pas finie". Il n’en n’avait jamais annoncé le commencement.
N’oublions pas qu’une des initiatives les plus intéressantes des "indignés" espagnols concerne l’information. Elle a été prise par le professeur de sciences politiques Antòn Losada, et elle s’intitule "Sin preguntas no hay cobertura" (#sinpreguntasnocobertura sur Twitter, "sans questions pas de couverture" médiatique). Des milliers de journalistes y ont adhéré. Si une conférence de presse n’admet pas ces empêcheurs de tourner en rond, elle sera boycottée et le pouvoir restera seul avec ses promesses chancelantes.
C’est le signe que dans ces révoltes, il y a une demande, pressante, de vérité et de justice. On ne répond pas à la crise en imposant aux citoyens de se serrer davantage la ceinture et en instillant dans le peuple des peurs incongrues ; on répond par la transparence des informations : sur les impôts que l’on ne peut baisser, sur la faible démographie qui ne pourra être freinée que par l’immigration, sur ces ingrédients de la croissance que sont la justice, la légalité, le mérite, le prix que peuvent payer les riches et les plus fortunés.
Dans son éditorial du 15 juin, Nikos Konstandaras, le directeur du quotidien grec Kathimerini, parle du "charme impossible de la solitude" : l’illusion que si les Etats ferment les yeux au lieu de se confronter à l’Europe, au monde, aux marchés, la crise n’éclatera pas. Certes les marchés sont des bêtes étranges : ils peuvent se déchaîner jusqu’à l’hystérie — ils ont soif de sang. Ils ont la vue courte, mais ils n’anticipent pas complètement les catastrophes au hasard : ils tirent une instantanée des gouvernements à un instant T, et ils en tirent leurs conclusions. Ils sont notre deuxième tribunal, au côté des urnes électorales.

Une res publica qui dépasse nos frontières

Se cacher n’est pas une politique, pas plus que de se faire passer pour des Etats souverains qui décident seuls, et d’ignorer l’existence d’un espace public européen envers lequel nous sommes responsables au même titre que nous le sommes envers la nation. Il existe désormais une res publica qui dépasse nos frontières, qui a ses règles, et dont les dirigeants ne sont pas des émanations des gouvernements mais qui répondent à des institutions plus vastes.
Prenons l’exemple de la nomination de Mario Draghi à la présidence de la Banque centrale européenne (BCE). Un choix irréprochable, mais qui a été de la manière la plus brouillonne et archaïque : en échange de cette nomination, Nicolas Sarkozy a demandé que soit libéré pour Paris un siège à l’exécutif de la BCE et Berlusconi lui a offert en échange la tête de Lorenzo Bini Smaghi [membre du directoire de la BCE], comme si ce dernier était un homme à lui, et non pas un dirigeant de l’Union.
Le mandat de Lorenzo Bini Smaghi, élu en 2005 pour huit ans, se termine le 31 mai 2013 et il ne peut être révoqué ni par les Etats membres, ni par des accords entre ces Etats. Ce n'est pas à lui que cette gifle s'adresse mais aux institutions européennes auxquelles va sa loyauté. L’affaire crée en outre un précédent inquiétant : chaque gouvernement pourra désormais décider de soustraire mandats et règles à la juridiction européenne. La violation du traité de Maastricht, justifiée par une soi-disant "règle non écrite entre les Etats", est manifeste.

Le besoin d'une Commission européenne autonome

Là encore, les informations transparentes et la reconnaissance de l’espace public européen ont fait défaut. De même qu’il n’y a pas de transparence sur les impôts qu’il est impossible de baisser, sur l’immigration dont nous avons besoin, économiquement et démographiquement.
Ces équivoques sont en grande partie imputables à l’Union européenne, à l’inertie de ses dirigeants, soumis aux Etats membres. Encore une fois, le parler vrai ne se fait guère entendre, et c’est par un excès de rapports d’obligeance et une déférence absurde envers les grands pays que l´Europe se retrouve confrontée aux banqueroutes actuelles, écrit l’ancien commissaire européen Mario Monti dans un article très éclairant dans le Financial Times du 21 juin. Il y a tant de questions sur lesquelles l’Union pourrait faire valoir sa parole, à commencer par les missions de guerre, abusivement dites "de paix".
Une Commission européenne autonome, consciente de son autorité, saurait réagir à tous ces événements (affaire Bini Smaghi, dettes souveraines, guerres) comme au temps de Walter Hallstein. Le premier chef de l’exécutif de Bruxelles n’avait pas hésité à réfuter les exigences de De Gaulle, à la fin des années 1960, au nom de la naissante res publica européenne. Il fut un "perdant désigné", mais il y a des défaites qui sauvent — si on veut bien les sauver — les institutions humiliées.


Analyse

La tour de Babel de Bruxelles

L'euro risque de suivre le même sort que la tour de Babel, constate la Frankfurter Allgemeine Zeitung, pour qui les Européens ont perdu le langage qui leur permettait jadis de parvenir aux célèbres compromis bruxellois. Si, avant la crise de l’euro, l’Europe avançait en effet au rythme de ces marchandages — "si tu lâches du lest sur la politique agricole, j’ouvre plus vite mes frontières aux travailleurs en provenance de ton pays" — ce procédé ne peut plus être appliqué aujourd’hui. Tout comme les ouvriers de la tour biblique, les Européens ne se comprennent plus, car les préjugés ont pris le dessus. Ainsi :
"Les hommes politiques allemands ne peuvent plus ignorer la résistance de leurs électeurs contre des aides supplémentairesà la Grèce. Ils formulent donc des exigences dont ils savent pertinemment qu'elles sont dépourvues de sens économique". Parallèlement, la Grèce n’est pas en situation de négocier cette aide dont elle a besoin et "le Premier ministre Papandréou est ainsi obligé d'ignorer les conséquences sociales néfastes de l'austérité". N’ayant rien à demander à son tour, "il se transforme en ennemi de ses propres administrés. Et à la fin, les citoyens des deux Etats se sentent dupés."
Mais il n’est pas possible de trancher des questions existentielles comme la survie de l’euro selon cette méthode, note la "FAZ" : en hésitant entre la fermeté et la disponibilité vis-à-vis de la Grèce, ils ne résolvent rien. "Personne ne commande à Bruxelles". A force de vouloir ménager tout le monde — électeurs déçus, marchés, Banque centrale européenne — l'UE cherche des compromis qu’elle n’est plus capable de trouver et ne parvient pas à trancher.

Grèce : l'Europe convoque les banques

En amont du sommet européen qui démarre ce soir, les négociations avec les créanciers d'Athènes ont débuté à Paris, Berlin, Amsterdam et Milan. 

Pour la première fois, après des semaines d'atermoiements, la contribution du secteur privé au nouveau plan de sauvetage de la Grèce a été discutée directement avec les principaux protagonistes, à savoir banquiers et assureurs. À Paris, Berlin, Milan ou Amsterdam, une sorte de course contre la montre a été orchestrée en amont du sommet européen qui démarre ce soir. Sous l'égide de chaque ministère des Finances, les gros porteurs identifiés de dette grecque se sont réunis pour faire le point sur la situation et faire part de leurs positions. Charles Dallara, le directeur général du lobby bancaire IIF (Institut de la finance internationale), qui regroupe 400 institutions financières, était quant à lui à Athènes.

Demandes de garanties 

À Bercy, mercredi matin, ce sont les banquiers qui ont ouvert le bal, suivis par les assureurs et leurs fédérations. Les François Pérol, président de BPCE et de la Fédération bancaire française, et autres Jean-Paul Chifflet, le directeur général de Crédit agricole SA, s'étaient largement concertés, la veille, en amont de cette importante rencontre. «La grande question, c'est comment on met en musique un “roll-over”», relate un proche des discussions.
Un consensus politique, en effet, se profile sur un scénario dans lequel la Grèce rembourserait à leur échéance les emprunts émis mais verrait ses nouvelles obligations souscrites «volontairement» et pour des montants similaires par ses ex-prêteurs. Mais le cadre juridique d'une telle opération doit être calé au millimètre afin d'éviter qu'elle soit assimilée à un défaut de crédit d'Athènes, dont la BCE ne veut pas entendre parler. Après les rencontres au sommet de la matinée, les experts juridiques et comptables devaient ainsi plancher dans l'après-midi au Trésor. «Nous regardons deux ou trois pistes», commente un banquier. Parmi les solutions étudiées, les institutions financières souhaitent que la nouvelle dette émise par l'État grec soit assortie d'une garantie, qui pourrait être apportée par l'Europe, par l'intermédiaire de son Fonds de stabilité financière. Cette demande se fait particulièrement insistante de l'autre coté du Rhin: «il faut qu'il y ait une réelle incitation pour accepter le “roll-over”», plaide un banquier allemand.
Les banquiers et les assureurs européens ne sont pas les seuls qui détiennent de la dette souveraine grecque. Les gestionnaires d'actifs et autres fonds alternatifs ont également acheté des emprunts qui bénéficient d'un coupon très élevé. Ce sont autant d'investisseurs dont il est difficile d'anticiper le comportement. D'autant qu'une partie des porteurs de dettes a un intérêt objectif à voir la Grèce faire défaut pour bénéficier des couvertures financières -les fameux CDS (credit default swaps)- qu'ils ont acquises.
Désormais entrées dans la phase concrète, les négociations vont se poursuivre dans les prochains jours, en prévision de la réunion décisive des ministres des Finances du 3 juillet.

Le nouvel apprentissage des droits

La nomination du nouveau Défenseur des droits est a priori un progrès pour notre démocratie. A priori seulement. Cette nouvelle institution souligne en creux, en effet, les insuffisances de la France dans un domaine où elle s’est toujours flattée d’être une experte.

C’est douloureux mais il faut bien l’admettre : le pays qui a inventé les droits de l’Homme et les a même placés en préambule de sa Constitution n’est pas – n’est plus – le champion des droits de l’Homme. À force de considérer qu’il était un modèle, il a fini par admettre un certain nombre de compromis avec ce que ses principes auraient dû considérer comme inacceptable. Ce n’est pas être sceptique que de l’énoncer mais au contraire faire preuve d’une lucidité salutaire digne des élans du siècle des Lumières et de 1789.

Sur les discriminations de toutes sortes, sur l’égalité des sexes, sur les abus de pouvoir de l’administration, trop de dysfonctionnements minent le socle qui devrait donner au citoyen sa véritable dimension. Il était temps, sûrement, de remédier à ces dérives invisibles en donnant à la défense des droits une véritable incarnation.

La centralisation de l’ancienne médiature de la République, et de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité, entre autres, sous une tête unique, pourrait être un gage de reconnaissance et d’efficacité. Encore faudrait-il que l’énorme machine que la réforme a fabriquée ne soit pas si lourde et si tentaculaire qu’elle y perde sa mobilité et sa force de réaction. Malgré toutes ses limites, la Halde, par exemple, avait su se montrer particulièrement combative parce que son mode de saisine était simple, direct, et facilement identifiable. Une structure plus large pourra-t-elle avoir le même degré de réactivité ? Pour affaiblir un contre-pouvoir, rien n’est plus tentant que de le rendre impotent… Ce risque est aujourd’hui d’autant plus grand que ce quinquennat a été marqué par l’affaiblissement systématique de tous les corps intermédiaires.

La personne de Dominique Baudis, elle-même, pose problème. La qualité de l’homme n’est évidemment pas en cause. Mais le chef de l’État a-t-il été bien inspiré en choisissant une personnalité qui a été, elle-même, victime d’une injustice ? Le symbole est tout de même un peu lourd pour une institution neuve qui méritait sans doute un souffle nouveau.


Le Bourget, salon de la reprise

Le contraste est saisissant. Alors que les idéologues du déclin et les chantres du repli sur soi font feu de tout bois, le salon du Bourget leur inflige un démenti cinglant. Les industriels et leurs clients y affichent un moral d'acier. Les commandes décollent en formations serrées sur tous les continents, chez tous les constructeurs : la compagnie indienne IndiGo a signé, hier, pour 180 Airbus A 320. La plus grosse commande de l'histoire en nombre d'avions.

Le principal salon aéronautique mondial donne le signal d'une reprise économique quasi généralisée et d'une relance de la mondialisation. Mieux, le Bourget signe une sorte de nouveau pacte de confiance en l'avenir, en faisant redécoller les projets futuristes. Papy Concorde aura une descendance. Intéressant, non ?

Les excellentes nouvelles volent, elles aussi, en escadrilles. Primo, le rebond aéronautique, c'est tout bon pour Airbus. Ce qui rappelle à ceux qui auraient la mémoire courte ou l'esprit critique un peu systématique que l'avion le plus vendu dans le monde est le fruit du volontarisme européen. L'Europe ne se résume pas à des querelles paralysantes, c'est aussi une entreprise industrielle qui réussit.

Secundo, ce qui est bon pour Airbus est bon pour l'industrie française, bon pour les usines de Nantes-Saint-Nazaire et la myriade de sous-traitants qui ont embarqué dans l'aventure, et bon in fine pour l'emploi. Qui s'en plaindrait dans un pays qui peine à descendre sous la barre des 10 % de chômeurs ? Tertio : il est symptomatique et rassurant que l'Airbus A320 neo, qui consomme 15 % de moins que ses aînés, soit aujourd'hui la vedette. Les avionneurs auront appris au moins une chose utile durant la crise : la tempérance. On le sait, quand les jets picolent de trop ¯ comme les voitures ¯ c'est la planète qui trinque.

Cet effort écologique, réalisé le dos au mur d'une montée incontrôlable du prix du pétrole, ne doit pas être surestimé. C'est un service minimum sur la seule variable du carburant. Les défis environnementaux sont encore devant nous. Ils exigeront une révolution culturelle qu'on ne décèle que timidement dans la remotorisation de l'A320 par exemple. Et qui semble emprunter parfois des voies glissantes, comme celle des agrocarburants.

Ces défis peuvent certes rimer avec le meilleur de la recherche, du côté des algues éventuellement ¯ une ressource dont la France est bien pourvue ¯ mais aussi avec le pire d'une déforestation incontrôlée et contradictoire avec la nécessité de nourrir la planète.

Le second grand danger, plus prosaïque, qui guette l'aéronautique tout particulièrement européenne, est celui de la concurrence. Il est évident que la Chine veut sa part du gâteau de constructeur-fournisseur, au moment où elle devient le principal acheteur-consommateur mondial, civil et peut-être demain militaire.

Face à une puissance qui ne s'embarrasse pas toujours du respect des règles des vieilles nations industrielles, l'Europe n'a d'autre choix que de s'unir davantage, quitte à retrouver l'esprit pionnier de la création de l'Airbus. Et là, ce n'est pas gagné. Quand on voit comment chacun construit, aujourd'hui, son drone dans son jardin ¯ Dassault, EADS - on ne peut s'empêcher de craindre un remake du combat fratricide dans le domaine militaire entre le Rafale et l'Eurofighter dans les années 1990. À cette différence près qu'entre-temps, la concurrence s'est démultipliée. Et le risque d'autant.



Zone euro, BCE, FMI: les protagonistes de la crise grecque

Depuis le début de la crise grecque, l'Europe et ses partenaires peinent à parler d'une seule voix. Revue des protagonistes de cette polyphonie:

LA GRÈCE: LE MAUVAIS ÉLÈVE REPENTI
La crise éclate au grand jour le 21 octobre 2009, quand le gouvernement socialiste grec révèle que son prédécesseur conservateur a maquillé les statistiques pour cacher un endettement abyssal. La défiance des investisseurs ne fera que s'aggraver, jusqu'à rendre impossible à la Grèce d'emprunter de l'argent sur les marchés.
Face à une faillite imminente, le gouvernement présente le 2 mai 2010 une cure d'austérité d'une ampleur inédite qui lui permet d'obtenir une aide de 110 milliards d'euros sur trois ans de la zone euro et du Fonds monétaire international (FMI). Cette bouffée d'oxygène s'avèrera insuffisante: le déficit tarde à refluer et Athènes ne regagne pas la confiance des marchés.
Qui plus est, la grogne monte. Les Grecs dénoncent des dirigeants qui ont laissé pourrir la situation et leur demandent maintenant toujours plus d'efforts. Jusque-là uni, le gouvernement vacille: remanié vendredi, il a obtenu dans la nuit de mardi à mercredi la confiance du Parlement qui doit adopter un énième plan d'austérité et des privatisations à marche forcée.
LES MARCHÉS: L'ARBITRE IMPATIENT - ET TOUT-PUISSANT
Rien ne calme l'inquiétude des marchés. Après chaque mesure annoncée par l'Europe, les investisseurs demandent davantage ou changent de cible (Irlande puis Portugal, maintenant Espagne et demain, peut-être, Italie et Belgique). Le risque de contagion plane toujours.
Les dirigeants européens ont un temps dénoncé les spéculateurs qui parient sur une faillite de la Grèce, voire l'effondrement de l'euro. En filigrane, ressurgit la vieille querelle avec les marchés, dont certains acteurs à la City ou à Wall Street n'ont jamais cru en la monnaie unique et voient dans ses déboires la réalisation de leur prophétie.
LES AGENCES DE NOTATION: LES CENSEURS CRITIQUÉS
Moody's, Fitch et Standard and Poor's, critiquées pour n'avoir pas vu venir la crise de 2008, se montrent implacables, abaissant toujours plus la note de la Grèce et lui prédisant un défaut de paiement.
LA ZONE EURO: LES (PLUS OU MOINS) BONS CAMARADES
Les voisins de la Grèce s'époumonent à répéter qu'ils ne laisseront pas tomber Athènes car il en va de la survie de leur monnaie commune. Mais ils manient la carotte et le bâton, exigeant à chaque étape, en contrepartie de l'aide, qu'Athènes réduise drastiquement son déficit, malgré la récession et les manifestations. Les Européens critiquent les retards, notamment dans la lutte contre l'évasion fiscale endémique en Grèce.
La France est souvent en première ligne pour aider la Grèce, épaulée par ceux qui redoutent une propagation de la crise (Espagne, Italie, Belgique...).
L'ALLEMAGNE: LE PREMIER DE LA CLASSE DONNEUR DE LEÇONS
Berlin se montre plus récalcitrant. Moteur économique de l'Europe et bon élève de la réduction du déficit, l'Allemagne affiche son agacement face aux dérives grecques et somme la Grèce de "faire ses devoirs". Soucieux de composer avec des électeurs qui ont le sentiment de payer pour les cancres d'Europe du Sud, le gouvernement d'Angela Merkel souffle le chaud et le froid. Quitte à semer la panique sur les marchés.
Après avoir imposé sa doctrine d'une stricte discipline budgétaire, l'Allemagne a flirté avec l'idée d'une forme de restructuration de la dette grecque, véritable épouvantail pour les marchés. Finalement, elle a amené ses partenaires à accepter une participation des créanciers privés de la Grèce (banques, assurances, fonds de pension...) au fardeau du sauvetage. Même si elle a dû se résigner à ce que ce soit sur la base du volontariat.
LA BCE: L'INSTITUTEUR INTRANSIGEANT
Présidée par le Français Jean-Claude Trichet, la Banque centrale européenne est le gardien du temple. L'institution de Francfort n'a de cesse de demander plus d'efforts budgétaires aux Etats, mais a aussi fait preuve de créativité face aux crises en passant outre certains tabous. C'est elle aussi qui tient tête à l'Allemagne et fixe les lignes rouges: non à la restructuration de la dette et à toute forme de défaut de paiement d'un pays de la zone euro.
LE FMI: LE MÉDIATEUR EXTÉRIEUR
Incapables de régler leur crise, les Européens se sont résignés au printemps 2010 à faire appel à l'institution internationale, qui a apporté son expertise dans la négociation du plan de redressement grec - et son écot, un tiers de l'aide totale.

Grèce : la grande dépression

Ce sont des voix anonymes qui appellent à l'aide au téléphone, des voix humaines qui souffrent de la crise que traverse leur pays et du poids de la récession économique. Elles ne savent plus quoi faire, alors elles décrochent leur téléphone pour appeler SOS-Dépression. Extraits de ces conversations.

Un employé de 38 ans : "Rien ne va bien, récemment. Le travail devient plutôt stressant. L'idée de le perdre me hante. Ne pensez pas que c'est juste une peur, c'est une réalité. Les gens perdent leur travail. Je n'ai plus confiance en moi, je suis tout le temps irritable, et mon sommeil est chaotique. Pour ma femme, c'est encore pire. Elle a un travail à temps partiel, et ils lui ont annoncé qu'elle devait partir à la fin du mois. A cause de la crise, comme ils disent. Quand nous sommes ensemble, j'essaye de ne pas lui montrer ce que je ressens. Je ne veux pas peser davantage sur elle. Je ne sais pas ce que je vais faire. Je suis désespéré."
Une mère, soucieuse pour son enfant : "Mon fils a 26 ans. Il est diplômé de l'université, et il essaie de trouver un emploi. Je m'inquiète pour lui. Cette recherche l'a beaucoup déçu. Il n'a pas trouvé de travail et ça a un impact négatif sur tous les aspects de sa vie. Il n'a pas de vie personnelle, et il ne sort pratiquement pas de la maison. Il m'a dit hier qu'il se considérait comme un raté. J'ai essayé de l'encourager en lui disant que beaucoup de jeunes sont confrontés aux mêmes problèmes à cause de la crise économique, mais je ne pense pas que ça l'aide. Oui, je suis vraiment inquiète pour lui."
Un retraité : "J'ai 68 ans et je ne me sens pas très bien en ce moment. J'ai peur de l'avenir. Je n'ai jamais ressenti ça auparavant. Je prendrai ma retraite en 2012, mais j'ai peur qu'à cause de la crise ce soit vraiment dur. Il y a des moments où ça me met en colère, mais le plus souvent je me sens sans espoir et sans secours. Je n'ai pas l'énergie que j'avais dans le passé. Un de mes amis me dit de demander de l'aide. Il pense que je suis déprimé."
SOS-Dépression a été mis en place en mai 2008 par l'Institut universitaire de recherche sur la santé mentale. La mise en place d'un programme baptisé Anti-stigma était destiné à encourager à parler des troubles mentaux, dans une société méditerranéenne, fortement marquée par l'emprise de l'Eglise orthodoxe, où il est mal vu d'aller chez le psy.
Il s'agit de consultations par téléphone, de conseils donnés à des gens qui n'osent pas franchir la porte d'un cabinet ou, de plus en plus, parce qu'ils n'ont pas les moyens de le faire. La ligne a enregistré plus de 6 000 appels. "La crise économique a augmenté le nombre de personnes qui appellent pour résoudre leurs problèmes dus au chômage et à l'incertitude du futur. 27 % des appels sont directement liés aux conséquences de la récession", explique Marina Economou, responsable de SOS-Dépression.
Les psychiatres évaluent entre 25 % à 30 % la hausse des consultations provoquées par la crise. "Il y a un afflux de demandes pour des cas de psychiatrie légère : angoisse aiguë, crise de panique, dépression, explique Dimitris Ploumidis, responsable d'un centre universitaire de santé mentale, dans le quartier de Kaisariani, à l'est d'Athènes, et aussi vice-président de l'Association des psychiatres de Grèce. En septembre 2010, il fallait deux semaines d'attente pour une consultation, aujourd'hui il faut deux mois et demi."
Dans une étude intitulée "Dépression et détresse économique en Grèce", publiée dans la revue Social Psychiatry and Psychiatric Epidemiology, de juillet 2010, Marina Economou et trois autres collègues constataient que "les personnes exposées à des conditions économiques défavorables ont plus de chances de développer des dépressions sérieuses". L'étude comparait 2 008 et 2009, alors que la récession s'est fortement aggravée en 2010.
"La crise, les difficultés économiques ravivent les peurs et les angoisses personnelles", explique Dimitris Ploumidis. Son collègue Stelios Stylianidis, professeur à l'université d'Athènes, qui consulte dans le public et le privé, fait le même constat : "Quand on ne peut pas investir dans son avenir, ce non-investissement psychique crée un état de détresse. La porte reste ouverte à l'émergence de troubles psychiatriques." Il a deux exemples précis des effets de la crise sur le psychisme, à chacun des bouts de l'échelle sociale.
C'est un peu la wonder woman et le clochard. Une femme de 47 ans était sous-directrice d'une société. Elle a été licenciée, au début de l'automne 2010, au moment où elle se sentait à l'apogée de sa carrière. "Tous ses liens sociaux ont été construits autour de son travail. Elle ne perd pas seulement son salaire, mais tout repère symbolique. C'est la destruction de son image et de son monde interne. Elle s'effondre", explique le docteur Stylianidis.
A l'autre bout de l'échelle, un clochard de 51 ans a élu domicile en plein centre d'Athènes. Il a son banc sur la place Korai, près de l'université. Il travaillait dans une usine au sud d'Athènes. Il dévale la pente très vite : alcool, violences conjugales, divorce. "Il a un sentiment de honte, de désarroi, mais il conserve sa fierté. Il refuse d'aller dans les foyers d'hébergement de la ville", explique le psychiatre qui l'a rencontré dans le cadre d'une mission sur les SDF du centre-ville. "Ils m'ont traité comme un chien, je serai un chien", lui a-t-il dit. Il a adopté un chien sans collier, sa seule compagnie.
Alors que les psys sont confrontés à cet afflux de clients, les budgets sont coupés, pour cause d'économies. Des psychologues ne sont pas payés depuis trois ou quatre mois. L'argent n'est plus débloqué pour les médicaments, qui sont en principe donnés à des patients nécessiteux.
Le jour de la manifestation du 15 juin, qui a fait trembler le gouvernement, Stelios Stylianidis a revêtu une camisole de force pour protester avec des patients et leurs parents, regroupés au sein de l'association Apapsy, contre les coupes dans le budget de la santé mentale. "Des patients, même des psychotiques, me disent qu'ils ont besoin de moi, mais qu'ils ne peuvent pas me payer, explique-t-il. Certains abandonnent leur traitement ou ont recours à l'automédication. Les pharmaciens constatent une augmentation de la consommation des antidépresseurs. Malheureusement pas toujours sur ordonnance."
Dimitris Ploumidis ne constate pas d'évolution vers des pathologies plus importantes. "Mais on risque d'être confrontés à de la psychiatrie lourde si le système de soutien familial est totalement ébranlé." La solidarité intergénérationnelle, même si elle est rudement mise à l'épreuve, sert encore d'amortisseur à la crise.
On peut parfois être fier d'être à la dernière place de l'Europe : la Grèce est le pays de l'Union européenne où il y a le moins de suicides, avec un taux de 2,8 pour 100 000 habitants. Mais faut-il dire"était" ? "C'est en train de changer", explique Aris Violatzis, psychologue dans l'organisation non gouvernementale Klimaka, qui gère un autre centre d'aide, SOS-Suicide. En 2009, leur nombre a augmenté de 18 % par rapport à 2007. Les spécialistes attendent une hausse plus importante en 2010. "Nous estimons que le nombre a doublé en 2010", explique M. Violatzis. Le directeur du département psychiatrique de l'hôpital Sismanoglio à Athènes, Kostas Lolis, réévalue, lui, ce taux à 5,7 pour 100 000 habitants. Un résultat qui placerait la Grèce devant Chypre et l'Italie, mais en dessous de la moyenne européenne (12 suicides pour 100 000 habitants).
L'étude "Dépression et détresse économique en Grèce" constate que le nombre de personnes souffrant d'épisodes dépressifs majeurs ayant des envies suicidaires est passé de 2,4 % à 5,2 %, entre 2008 et 2009. Ces taux sont respectivement de 35 % et 48,6 % pour les personnes en difficulté économique.
"Nous avions une quinzaine d'appels par jour, aujourd'hui, cela peut aller jusqu'à quatre-vingts, explique Aris Violatzis. Parfois, nous écoutons longtemps ces personnes. Je suis resté pendant des heures avec une mère de 40 ans qui appelait de son balcon au 5e étage, prête à se jeter dans le vide. J'ai parlé avec elle jusqu'à ce qu'une équipe d'urgence arrive sur place. Parfois, nous allons chez les gens pour retirer les lacets, les armes, pour les protéger."
Les suicides ont eu lieu principalement à Athènes et en Crète, où plusieurs hommes d'affaires sont passés à l'acte après des problèmes financiers. "Le suicide n'a jamais une seule cause, mais nous avons de plus en plus d'appels de gens qui gagnaient bien leur vie et qui n'y arrivent plus financièrement", poursuit M. Violatzis. Le suicide est encore tabou dans la société grecque. Des popes ont refusé d'enterrer religieusement des personnes suicidées.
Ce nouveau désespoir grec ne se résume pas à des problèmes de crise économique. Il a des causes plus profondes. "La grosse angoisse des gens, c'est où en est l'avenir de la Grèce", explique Dimitris Ploumidis. La Grèce n'est redevenue un pays qu'en 1821, après quatre siècles de joug ottoman. De guerres civiles en dictatures, son histoire moderne est très douloureuse, et il y a une énorme fierté d'être grec dans l'ensemble de la population. "Les Grecs sont atteint dans leur identité, relève Aris Violatzis. Ils ont honte. Le monde entier les considère aujourd'hui comme des tricheurs, les moutons noirs de l'Europe. C'est très difficile à accepter."
"Je suis universitaire, je vais souvent à Bruxelles pour des réunions, j'ai conscience que nous avons gaspillé de l'argent, mais aujourd'hui je ne supporte plus ces sourires ironiques que je vois quand je dis que je suis grec", explique Dimitris Ploumidis. Il pourrait reprendre le poème célèbre du Prix Nobel de littérature, Georges Séféris, qui chantait : "Où que me porte mon voyage, j'ai mal à la Grèce."

Grèce : les argentiers mondiaux craignent la contagion

En dépit des signaux rassurants émis par le gouvernement grec, mercredi 22 juin, les grands argentiers mondiaux restent sceptiques quant à la capacité d'Athènes de surmonter ses difficultés financières.

Le président de la banque centrale américaine (Fed), Ben Bernanke, a déclaré, mercredi, que la crise économique en Grèce pourrait constituer une menace pour la stabilité du système financier mondial si une solution n'était pas trouvée. "Je pense que les Européens apprécient l'importance incroyable de résoudre la situation grecque", a-t-il souligné. "Nous avons été en communication étroite avec nos collègues en Europe. Evidemment pas impliqués dans les négociations, mais nous avons été bien informés", a-t-il précisé.
"Nous sommes principalement en train de suivre la situation de près et nous faisons de notre mieux pour que nos propres institutions soient bien positionnées par rapport à la dette publique de ce qu'on appelle les 'pays périphériques'" de la zone euro, a expliqué M. Bernanke.
"Un défaut de paiement désordonné dans un de ces pays secouerait sans doute les marchés financiers dans le monde. Cela aurait de grandes répercussions sur les écarts de taux sur les marchés du crédit, sur le prix des actions, et ainsi de suite", a-t-il estimé. "De ce fait, je pense que les effets sur les Etats-Unis seraient tout à fait considérables" même si "l'exposition directe est relativement réduite" pour les banques américaines, a-t-il ajouté.
LES OBLIGATIONS FACTEURS DE TRANSMISSION
De son côté, le président du Comité européen des risques systémiques (CERS), Jean-Claude Trichet, également président de la Banque centrale européenne (BCE), a mis en garde contre des risques potentiels de contagion de la crise de la dette dans l'Union européenne et au-delà.
"La plus sérieuse menace qui pèse sur la stabilité financière dans l'UE vient de l'interaction entre les vulnérabilités des finances publiques de certains Etats membres et le système bancaire, avec des effets de contagion potentiels dans l'Union et au-delà", a déclaré M. Trichet. Refusant de citer nommément la Grèce, il a évoqué "les difficultés de la mise en place des programmes (d'austérité) dans certains pays" comme un défi pour le système financier.
Parmi les facteurs de transmission de la crise de la dette à d'autres Etats, le CERS a notamment cité l'exposition du secteur privé aux obligations. Le comité a également évoqué les tests de résistances des banques, "instrument important de la transparence dans le système bancaire européen".

La « guerre » en Libye au révélateur

Difficile à vérifier : l'intervention en Libye aurait déjà occasionné, au bout de trois mois, un surcoût de 100 millions d'euros. La guerre, ça coûte des vies humaines - 62 de nos soldats ont été tués sur les différents théâtres d'opérations -, ça grève aussi le budget de la Nation. La question de savoir si la France a les moyens de participer à plusieurs fronts de guerre ne restera peut-être plus longtemps taboue en période d'austérité budgétaire. A fortiori si la campagne libyenne s'éternisait. La situation évolue peu sur le terrain ; le spectre du bourbier commence à poindre. Le potentiel de Kadhafi est certes affaibli mais celui-ci résiste et les conditions d'une transition démocratique ne sont toujours pas réunies. Jusqu'à présent, l'opinion s'est montrée non pas insensible mais plutôt indifférente à l'engagement en Libye, légitimé il est vrai par l'ONU et circonscrit dans sa finalité : protéger les civils de la répression sanglante. Cette neutralité bienveillante pourrait s'infléchir et l'opinion se lasser d'un statu quo à l'horizon indéfinissable - l'interrogation ne porterait plus sur la chute du dictateur mais sur sa date, hypothétique - et s'émouvoir de la « douloureuse » qui enfle. Déjà, de hauts responsables militaires s'inquiètent des conséquences sur les ressources humaines et matérielles de l'armée, qui ne sont pas inépuisables. Aussi le vote de la représentation nationale, le 12 juillet, qui doit autoriser la prolongation de l'engagement de la France, arrive-t-il à point nommé. Il est temps d'éclairer les Français et de vérifier si l'union sacrée, du PS à l'UMP, résiste à une guerre qui s'enlise et coûte de plus en plus cher.

Nouvelle donne pour 2012

Le paysage politique a vraiment changé avec l’élimination de Dominique Strauss-Kahn, malgré les dénégations des responsables du PS.
Les primaires de ratification ou de consécration qui étaient attendues avec Dominique Strauss-Kahn ont fait place à des primaires d’affrontement entre deux poids lourds et plusieurs poids moyens ou plume. M. Hollande et Mme Aubry seront obligés de se distinguer l’un de l’autre afin de l’emporter et donc de se porter des coups qui rendront plus difficile le rassemblement de leurs partisans, comme on l’avait vécu en 2007 avec Ségolène Royal.

La thématique très porteuse de la morale revendiquée sans cesse par les socialistes n’a pas résisté à l’affaire Dominique Strauss-Kahn. A partir du moment où l’immoralisme se porte aussi bien ici que là, la morale disparaît en tant que valeur politique ajoutée. Les délits sexuels sont condamnés par nos concitoyens encore plus sévèrement que la corruption et les délits financiers, surtout lorsqu’on a failli présenter à l’Elysée l’homme qui en est accusé.
La carte générale de la droite et du centre est en voie de révision : l’extrême droite semble avoir fait son plein avec Mme Le Pen, le centre reste aussi flou que surchargé de candidatures virtuelles (Bayrou, Borloo, Villepin) et Nicolas Sarkozy, de plus en plus chef d’Etat régalien et de moins en moins « touche-à-tout », reconquiert jour après jour un espace et des marges de manœuvre. La seule chose que l’on puisse affirmer dix mois avant, c’est que l’élection présidentielle sera serrée, sans doute à 51-49, dans un sens ou dans l’autre. Ce n’était pas le cas début 2011.