TOUT EST DIT

TOUT EST DIT
ǝʇêʇ ɐן ɹns ǝɥɔɹɐɯ ǝɔuɐɹɟ ɐן ʇuǝɯɯoɔ ùO

samedi 15 octobre 2011

Crise de la dette - La France renverse sa stratégie

Paris se résigne à accentuer la restructuration de la dette grecque. Une nouvelle approche risquée, mais peut-être salutaire.

À peine le "chemin de croix" de la ratification du plan de sauvetage du 21 juillet est-il achevé que tout est à recommencer. Le feu vert du Parlement slovaque à l'extension du fonds de soutien à la zone euro (FESF) n'a en aucun cas mis un point final à la crise des dettes souveraines en Europe. Elle reste même la première menace sur l'économie mondiale.
Au point de devenir le sujet n° 1 - avec le risque de récession - du G20 finances qui se tient vendredi et samedi à Paris. Les priorités de la présidence française, telles que la réforme du système monétaire international, sont reléguées au second plan. Des discussions bilatérales, avec l'Allemagne notamment, doivent permettre de faire avancer le dossier. "La priorité absolue, c'est d'avoir trouvé les éléments de stabilité de la zone euro" d'ici au sommet de Cannes de clôture de la présidence française, explique-t-on maintenant à Bercy.
Nouvelle approche
Un virage à 180 degrés : depuis des mois, Paris affirmait s'en tenir à la stratégie définie au beau milieu de l'été pour sauver la Grèce, c'est-à-dire une décote des titres grecs détenus par les banques limitée à 21 %, une nouvelle aide européenne de 109 milliards d'euros et l'extension du rôle du FESF pour venir en aide aux pays en difficulté.
Or force est de constater que cette stratégie ne marche pas. La Grèce est étranglée par ses dettes. Le nouveau FESF ne parvient pas à conjurer le risque de contagion aux autres pays en difficulté, qui affole les marchés.
Conséquence, les banques européennes, gorgées de dettes souveraines à risque, n'inspirent plus confiance aux investisseurs. Elles hésitent même à se prêter entre elles, faisant peser la menace d'un gel du crédit en zone euro comme en 2008, après la faillite de la banque d'affaires américaine Lehman Brothers.
Restructuration dure
La France reconnaît maintenant que le secteur privé va devoir participer davantage à l'effort grec. Il pourrait être demandé aux banques d'éponger jusqu'à 50 % de perte sur leurs obligations. Cette restructuration dure de la dette semble devenue indispensable, mais pourrait fragiliser encore un peu plus les établissements financiers de la zone euro.
Paris s'est donc résigné à soutenir la recapitalisation des banques, comme le demande Christine Lagarde au FMI depuis fin août. À condition toutefois que le processus soit européen. Car Bercy veut à tout prix éviter de donner l'impression que les établissements français sont effectivement en difficulté. "Nous maintenons notre diagnostic sur la situation des banques françaises", explique-t-on, en justifiant l'augmentation des fonds propres par la nécessité de produire "un choc de confiance" dans la zone. Le ministère de l'Économie estime que les banques hexagonales n'auront pas besoin de faire appel à un guichet public. La discussion doit déterminer le niveau de réserve que les établissements devront atteindre et selon quel calendrier. Il plaide pour que le FESF puisse être mobilisé, y compris pour venir en aide aux banques des États qui ne sont pas sous programme de l'UE et du FMI.
Faire du FESF une banque ?
La France travaille donc activement à un nouveau renforcement de la force de frappe du fonds, aujourd'hui limitée à 440 milliards d'euros. Trop peu pour retenir le domino italien s'il venait à tomber. Toute la question est de savoir comment procéder, les Allemands refusant de remettre la main au portefeuille. Bercy espère encore la transformation du fonds en banque afin de lui donner un accès au guichet de la Banque centrale européenne. "On pense que c'est ce qui marcherait le mieux", explique-t-on, tout en pointant l'opposition de l'institution de Francfort et celle de Berlin. Le ministère de l'Économie travaille également sur d'autres pistes impliquant des bailleurs de fonds européens, voire internationaux. L'objectif est que la solution retenue ne nécessite pas une nouvelle approbation des parlements nationaux, une procédure bien trop longue et trop risquée.
Une stratégie risquée
Nicolas Sarkozy espère avoir fait adopter "des réponses durables, globales et rapides avant la fin du mois" pour que "l'Europe arrive au G20 unie et avec les problèmes résolus". Mais le plan européen est à double tranchant : la nouvelle restructuration de la dette grecque pourrait raviver l'inquiétude des investisseurs sur les autres pays européens aidés, l'Irlande et surtout le Portugal. Si la Grèce ne peut pas honorer à 100 % ses dettes, pourquoi ses voisins du Sud le feraient-ils ? Un affolement des marchés relancerait alors les doutes sur la solidité de l'Espagne et même de l'Italie.
C'est pourquoi certains économistes - de moins en moins nombreux, il est vrai - estiment que les Européens jouent aux apprentis sorciers. Pour parer ce risque, Paris assure vouloir à tout prix éviter un événement de crédit sur la Grèce, un mécanisme qui déclencherait l'activation des CDS, ces titres d'assurances contre un risque du défaut du pays. Car, non seulement les spéculateurs, qui ont acheté ces titres dans l'espoir d'empocher le pactole sans détenir de dette grecque, seraient récompensés, mais en plus ils se mettraient à jouer avec la dette d'autres pays. Selon Jean-Marc Daniel, économiste, professeur à l'ESCP Europe, cela se réglera devant la justice. Avec une forte incertitude sur l'issue des procédures.

"Merkozy" agace les dirigeants européens

Les autres pays de la zone euro reprochent au couple franco-allemand de les mettre sur la touche.

José Manuel Barroso avait rendez-vous vendredi après-midi avec Nicolas Sarkozy pour préparer le sommet de la zone euro du 23 octobre qui devra, coûte que coûte, mettre au point un plan global de sortie de crise. Sans quoi, prévenait récemment le président de la Commission européenne, l'ampleur de la crise, devenue "systémique", ne pourra que s'accroître, pour menacer toute l'économie mondiale.
José Manuel Barroso se fera-t-il l'écho auprès du président français des sentiments mêlés d'exaspération et d'attente envers le couple franco-allemand dont lui font part les autres dirigeants européens ? Beaucoup soulèvent la question franco-allemande, confirme un proche de Barroso, mais pas toujours de façon négative. "Quand le couple franco-allemand ne fait rien, on lui reproche son manque de leadership. Et quand il fait mal, comme à Deauville, on lui reproche d'imposer ses vues. La voie est étroite pour Merkel et Sarkozy", résume un diplomate européen.
Ah, Deauville ! octobre 2010, "Merkozy", comme on surnomme les deux dirigeants dans les institutions européennes, propose une vaste réforme du Pacte de stabilité et une révision des traités européens d'ici à 2013. C'est l'exemple type du donnant-donnant concocté sans consultation des partenaires. La Commission et plusieurs dirigeants réagissent très mal. "Inacceptable", condamne Jean-Claude Juncker, président de l'Eurogroupe et Premier ministre du Luxembourg. "Ce serait irresponsable de mettre sur la table des chimères à propos de nouveaux traités", renchérit Viviane Reding, vice-présidente de la Commission.
Marre de rouler à l'aveuglette
Aujourd'hui, le couple franco-allemand a-t-il retenu les leçons de Deauville ? Pas franchement, s'il faut en croire Jean-Claude Juncker. Le dirigeant luxembourgeois, connu pour ses convictions fédéralistes, a encore récemment dégainé contre ses voisins. Le gouvernement économique de la zone euro, tel que le prévoient les pays membres de l'union monétaire, "ne doit pas être un commando franco-allemand. La coordination de la politique économique ne peut pas vouloir dire j'atterris à Paris et je roule à l'aveuglette derrière une voiture marquée follow me", a-t-il déclaré au quotidien allemand Handelsblatt.
Même son de cloche à Rome. Peu après la réunion, infructueuse, de Berlin, dimanche dernier, entre Sarkozy et Merkel, le ministre italien des Affaires étrangères s'est fait un devoir de critiquer "l'axe" franco-allemand : "Cette rencontre est une perte de temps alors que la Grèce est aux abois. Une situation globale ne se résoudra pas par des axes bilatéraux", a lâché Franco Frattini.
Rien ne change ? Pourtant si, dit-on à La Haye, où l'on se réjouit "du bon travail et des contacts fréquents que nous avons avec la chancellerie à Berlin". Forts de leur triple A, les Néerlandais sont très actifs. Ils ont fait des propositions pour renforcer la discipline budgétaire, comme la nomination d'un commissaire européen doté de pouvoirs forts pour sanctionner les États laxistes. Le Premier ministre Mark Rutte en parlera d'ailleurs mardi à Paris avec Nicolas Sarkozy.
Énervant, mais indispensable
"Le problème du couple franco-allemand, c'est que les marges de manoeuvre sont infimes, résume un diplomate. Nous sommes dans une situation de crise aiguë. Du coup, plus encore que d'habitude, on ne peut rien faire sans un accord franco-allemand, mais, plus encore que d'habitude, cet accord est si bordé, les enjeux sont si importants, et les conséquences si énormes, que c'est difficile de modifier un seul paramètre de l'accord sans le mettre à mal entièrement."
Commentaire de José Manuel Barroso, vendredi, invité des journées parlementaires de l'UMP : "Évidemment, rien ne peut aboutir en Europe sans une coopération étroite entre la France et l'Allemagne et nous ne pouvons que désirer et appuyer tous les efforts pour une convergence entre les deux plus grandes économies de la zone euro. Mais en même temps, il faut travailler ensemble avec nos institutions, c'est la seule façon d'avoir avec nous tous les autres États membres, grands et petits, riches et moins riches, anciens ou nouveaux."

 

Les «indignés», anatomie d'un mouvement déstructuré

Ceux qui se surnomment «les 99%» et ne tolèrent plus la «cupidité» des 1% les plus favorisés vont manifester leur ras-le-bol dans 951 villes du monde entier samedi. Mais le mouvement, né en Espagne en mai, ne s'appuie sur aucune direction centrale.

Le 15 mai dernier des «indignés» espagnols campaient sur la place de la Puerta del Sol à Madrid. Empruntant leur nom au pamphlet de Stephen Hessel, ils se déclaraient inspirés par le Printemps arabe pour crier leur révolte face à l'explosion du chômage et à la politique d'austérité mise en place par le gouvernement … Depuis, la contestation s'est étendue dans le reste de l'Europe mais aussi outre-Atlantique. Cinq mois après la naissance du mouvement en Espagne, c'est dans 82 pays que ces «indignés» vont manifester le samedi 15 octobre. De Zurich jusqu'à New York, en passant par Rome, Tijuana, Hong Kong et Johannesburg, des appels ont été lancés dans 951 villes du monde entier.


Leur message aux hommes politiques et aux élites financières, tel qu'on peut le lire sur le site 15october, est le suivant: «Le pouvoir en place travaille au profit de quelques-uns en ignorant aussi bien la volonté de la majorité que le prix humain et environnemental que nous payons. Cette situation intolérable doit cesser.» Sur le site du mouvement Occupy Wall Street, la tonalité est la même: «La chose que nous avons tous en commun, c'est que nous sommes les 99% qui ne tolérerons pas plus longtemps la cupidité et la corruption des 1% restants». En Italie, le programme est résumé ainsi: «Occupation des places publiques par les millions de personnes qui ne veulent plus payer l'énorme crise économique et sociale à la place de ceux qui l'ont causée: pouvoirs politiques industriels, économiques et financiers».
Pas d'instance centrale

Cette journée d'action fait franchir un cap important au mouvement, qui se dote désormais d'une dimension internationale. «C'était nécessaire pour pouvoir faire le poids face au pouvoir des marchés financiers qui agissent à l'échelle globale», affirme Sophie Banasiak, «indignée» parisienne.

Cependant, il n'existe aucune instance centrale pour coordonner les différentes actions. «Si le collectif Democracia Real Ya a joué un rôle moteur dans la mobilisation initiale en Espagne, il ne prend pas le dessus, que ce soit au niveau de la capitale, du pays ou du monde, explique Héloïse Nez, sociologue à l'Université Paris 13. De nombreux collectifs travaillent ensemble, mais aucune n'a l'hégémonie sur le mouvement qui se veut horizontal et égalitaire. Il n'y a pas de têtes visibles et les indignés prennent soin de changer régulièrement de porte-parole».

«Si on te demande ‘qui est derrière ça', réponds leur : ‘moi'» rétorque-t-on à ceux qui cherchent les organisateurs. La propagation d'une ville ou d'un pays à l'autre doit donc se faire spontanément, par émulation. Un processus largement facilité par les réseaux sociaux, où plusieurs mots-clés émergent, tels que «yeswecamp», «#yosoy15O», «#event15oct» ou encore «#Globalrevolution»… «Je ne sais même pas qui exactement a lancé l'idée du 15 octobre, reconnaît ainsi Spyros, supporter du mouvement OccupyLSX à Londres. On a vu cet appel pour samedi et on a été inspiré par le mouvement Occupy wall street pour faire la même chose chez nous.»
Des revendications spécifiques à chaque pays

Si les mécontents du monde entier ont trouvé des dénominateurs communs, les revendications et doléances se déclinent toujours selon les problématiques nationales. En Espagne, l'accent de Democracia Real Ya a été mis sur la réforme de la loi électorale pour en finir avec le bipartisme ainsi que sur l'arrêt des expulsions de propriétaires endettés. Dans les pays anglo-saxons, c'est principalement la finance, pointée comme responsable de la crise, qui est prise pour cible. En témoigne le nom des mouvements qui s'y développent, «Occupy Wall Street» et «Occupy London Stock Exchange (OccupyLSX)». En Israël, la mobilisation vise le logement cher tandis qu'en Italie, les indignés refusent de payer «une dette qu'ils n'ont pas contractée». Mais tous ces thèmes centraux n'empêchent pas chaque manifestant d'exprimer d'autres préoccupations. En Espagne certains pointent l'impunité autour des crimes du franquisme et aux Etats-Unis on dénonce la brutalité policière ou encore la peine de mort…

Surtout, chaque ville conserve son autonomie : l'information circule globalement, mais «les décisions, elles, se prennent au niveau des assemblées dans chaque ville, explique Sophie Banasiak. Chaque ville choisit son propre mode de décision. A Paris et à Madrid par exemple, c'est au consensus. La dimension internationale ne change rien au fait que l'essence du mouvement est locale : elle est dans la rencontre physique et le dialogue sur les places».

Un second tour plus incertain qu’il n’y paraît

Les dés sont jetés mais sur quelle face vont-ils retomber ? Il serait bien présomptueux d’avancer le nom du vainqueur de la primaire socialiste.

Dans le match des ralliements, François Hollande mène désormais 5-1 au tableau d’affichage mais cette unité des chefs autour de celui qui est sorti nettement en tête au premier tour ne garantit en rien sa victoire au second.

Les ralliements de Ségolène Royal puis d’Arnaud Montebourg ont pu laisser croire que cette fois, la partie était pliée et qu’elle allait donner l’avantage au Corrézien. Rien n’est moins sûr.

Les aléas de la science politique prennent un malin plaisir à contrarier les calculs mathématiques des observateurs. Inconnue majeure, les variantes de la composition du corps électoral contribuent, un peu plus, à brouiller les calculs. Quant aux fidèles des quatre éliminés du 9 octobre, rien ne peut préjuger des bons reports de leurs votes.

Cela fait beaucoup de paramètres incontrôlables et au risque de surprendre, le résultat de dimanche soir reste ce matin totalement imprévisible.

Avec le PS, en 2011, comme avec Nicolas Sarkozy en 2007, « demain, tout est possible ». Le plus drôle, c’est la discrétion nouvelle des instituts de sondage échaudés par un premier tour qui, une fois de plus — et c’est heureux pour la démocratie — a déjoué tous leurs pronostics même si, contre toute évidence, ils s’obstinent à ne pas vouloir le reconnaître…

Martine Aubry qui les pourfend volontiers mais seulement quand ils ne lui sont pas favorables, s’est appliquée à rallier « la gauche » du parti derrière son panache. C’est de ce côté, elle le sait, qu’elle trouvera les voix pour gagner. Et cette battante ne s’est interdit aucun artifice de campagne pour marquer ce positionnement fort à distinguer de la gauche prétendument « molle » de son rival.

Il n’est pas exagéré d’affirmer que dans cet exercice périlleux pour l’avenir du (ou de la) futur(e) candidat(e) PS, elle a largement dépassé les bornes que lui imposait son statut de secrétaire générale sortante du parti.

Jouant le tout pour le tout, la maire de Lille a entrepris de déconsidérer méthodiquement son rival avec une férocité électorale qui n’a d’égale que celle du chef de l’État. « Le changement vraiment, le changement enfin », comme elle le répète en boucle, sur un ton volontiers populiste, c’est elle ! Son adversaire n’est que « le candidat du système ». De… « l’establishment » ? comme dirait… Jean-Marie Le Pen ?

Jamais, sans doute, « La dame des 35 heures » n’a suscité autant d’affectueux espoirs dans cette droite UMP dont elle a toujours été l’une des cibles favorites. C’est qu’elle serait une adversaire plus coriace mais beaucoup plus facile pour le président sortant ! Jusque-là, son agressivité caricaturale a payé. Cette méchanceté politique délibérée sera-t-elle finalement récompensée ?

À boulets rouges sur les « roses »

À l'UMP, la primaire socialiste, on eût aimé… Ce devait être une machine à broyer. Nicolas Sarkozy n'aurait eu qu'à sortir du bois pour donner le coup de grâce à celui ou celle qui, éreinté par deux tours de chauffe, se présenterait sur la ligne de départ. On pensait assister, amusé, au spectacle de la division. De la coupe aux lèvres, il y avait loin. Certes des chicayas, forcément des inimitiés qui resurgissent et en dernier, une Martine Aubry qui cogne au risque de se tromper d'adversaire. Trois semaines où, avec fatalisme, l'UMP a regardé passer le train, inaudible et comme submergée par la résonance inattendue de l'événement. Les désaccords ont éclaté là où on ne les attendait pas. Entre le président et le Premier ministre, entre Jean-François Copé et Xavier Bertrand, les uns jugeant le processus contraire à la Ve République, les autres reconnaissant ses mérites. Si l'espace médiatique a à ce point été saturé, la raison en est simple : les Français apprécient cette manière moderne de faire de la politique. Aussi la droite doit-elle reprendre la main, remonter le moral de militants exaspérés et d'élus inquiets sur leur sort. La mobilisation générale a été lancée aux journées parlementaires UMP, elle se poursuivra mardi lors d'une convention visant à dénoncer le programme socialiste. Encore un mauvais moment à passer : peut-on à la fois parler d'un match « nul », au sens propre, entre Aubry et Hollande, et lui consacrer deux temps forts ? Viendra ensuite, pour le candidat-pas-encore-désigné-mais-presque, celui de la ripost e « forte », de « l'agressivité » retrouvée. Il paraît que Nicolas Sarkozy regrette le temps où il dirigeait l'UMP.

DSK-Banon, la double indécence

Tristane Banon ne traînera pas Dominique Strauss-Kahn aux assises. Le parquet considère que la jeune femme n’a pas subi de “tentative de viol” en 2003. Pour le reste, qui tient à des écarts libidineux, les faits sont prescrits. Le code pénal, à l’opposé d’internet qui garde tout en mémoire, reconnaît le droit à l’oubli. Et la victime, ici, a beaucoup trop tardé pour déposer sa plainte.

Faute de se tenir au palais, le procès se déroule devant le jury médiatique.

Triste spectacle, Tristane s’enivre au parloir des “people”. Elle accable, dans un livre charge, le “cochon” qui a ruiné sa vie. Son avocat, M e Koubbi, préfère parler “d’un agresseur sexuel non jugé”.

En face, DSK brandit la vérité judiciaire comme unique étendard et s’estime “totalement blanchi”. Oui, le ponte du PS a jadis tenté “d’embrasser sur la bouche” une gamine égarée dans son bureau. Mais quoi, on ne va pas faire des histoires pour si peu ! “Nous avons badiné” ose-t-il en guise d’explications. Le badinage, pardi, c’est tout l’esprit français ! Musset, Marivaux, les fêtes galantes, au bon plaisir des libertins…

Nous voici au carrefour de deux indécences. La première met en spectacle un drame intime qu’il eût mieux valu confier à la justice huit ans plus tôt. La seconde vise à transformer en grivoiserie légère une conduite parfaitement odieuse. Aux uns et aux autres, à la fin, le tableau d’ensemble laissera un goût amer.

Unis dans l'adversité

Par les temps qui courent, alors que la crise financière et économique se prolonge dans une crise sociale très dure, comme on le voit en Grèce, il est plus que temps que l'Europe fasse preuve d'unité.

« Unis dans la diversité », telle est sa devise. Nous pouvons aujourd'hui la redire autrement : « Unis dans l'adversité » et plus unis que jamais.

Cependant, comment s'unir sinon autour d'un projet ? Or, l'Union européenne semble ne plus avoir de projets à l'horizon. C'est pourtant le fait d'en avoir toujours un à réaliser qui la fit progresser depuis plus d'un demi-siècle.

Aujourd'hui, c'est la peur qui sévit un peu partout, comme si l'on ne pouvait plus maîtriser notre destin. Certes, il faut se protéger mais, quand au nom d'une démondialisation plus qu'hypothétique, on annonce à grands sons de trompe qu'il faut décider de recourir à un certain protectionnisme européen, on oublie que « la préférence communautaire » fait partie du Traité de Rome depuis 1958. Nos divers candidats feraient bien d'étudier les textes avant de partir en campagne pour recréer ce qui existe déjà. Ils devraient plutôt se montrer fermes et volontaires dans l'application des textes existants.

Et cela d'autant plus qu'il est plus urgent d'agir et que nous ne devrions pas tergiverser davantage. Ainsi, Georges Soros, célèbre financier, entouré de nombreuses personnalités politiques et économiques des pays européens, appelle les gouvernements de l'Union à résoudre au plus vite la crise de la dette, sous peine, excusez du peu, de détruire le système financier mondial !

Un gouvernement fédéral est nécessaire

L'euro, dit-il, est loin d'être parfait. Raison de plus pour remédier aux erreurs de construction. Il préconise trois solutions : un établissement financier commun, doté de fonds et de l'autorité nécessaire pour faire respecter les règles budgétaires ; le renfort du contrôle et de la régulation du système financier ; l'instauration d'une stratégie de convergence économique. Il conclut : « L'euro a besoin d'une solution européenne. La recherche de solutions nationales conduira inévitablement à l'effondrement de la zone euro ! »

Nous sommes prévenus et désormais conscients du danger qui nous guette. Il est tellement redoutable que nous n'imaginons pas que l'on puisse aboutir à une telle catastrophe. Pourtant, les pires catastrophes surviennent dans l'Histoire. La dernière guerre mondiale était impensable pour ceux qui sortaient de la première guerre. Or, disait Churchill, n'ayant pas résisté au nazisme comme il l'aurait fallu, et croyant ainsi éviter la guerre, nous avons eu la guerre avec les souffrances physiques et morales qu'elle entraîne.

La lucidité aujourd'hui impose de recourir d'urgence à une solution européenne. C'est cela, le grand projet qui manque. Il devrait rassembler les membres de l'Union dans un gouvernement fédéral. De fait, son autorité empêcherait les spéculateurs de poursuivre leurs entreprises destructrices.

C'est à ce projet que les candidats à la présidence de la République française devraient appeler nettement en s'engageant à agir prioritairement en ce sens.

Et si les vingt-sept États ne sont pas prêts, alors que ceux qui veulent aller de l'avant créent ce noyau dur qui donnera le sens de la marche et ranimera l'espérance.

Steve Jobs, ou le triomphe de l'esprit

Même ceux qui refusent de devenir des "Apple geeks" (et il y en a de moins en moins) le savent : Steve Jobs, l'un des plus grands entrepreneurs de la Silicon Valley, est mort. Le dirigeant de la marque à la pomme était un personnage hors du commun. Entrepreneur infatigable, il cofonde Apple dans son garage avec Steve Wozniak à l'âge de 20 ans avant d'en être renvoyé en 1985. Il met à profit cette situation pour entreprendre à nouveau avec NeXT et Pixar Animation Studios, pour finalement retourner chez Apple en 1996 et devenir le "chief executive" visionnaire que l'on sait. Patron craint, il a la réputation d'être égocentrique et de ne pas toujours contrôler ses humeurs. Mais les faits parlent pour lui : il était clairement l'un des "grands" de notre époque et a influencé par ses innovations la vie de millions de gens. De la trempe des Andrew Carnegie et autres John D. Rockefeller, il est comparé à juste titre à Henry Ford, celui qui démocratisa l'automobile, ou encore à Thomas Edison, le génial inventeur qui entre autres perfectionna l'ampoule électrique.

Si l'on ne peut que célébrer le génie entrepreneurial de Steve Jobs, son histoire personnelle est riche en enseignements pour la vie de tout un chacun (on pourra réécouter à bon escient son allocution à l'université de Stanford en 2005). N'oublions pas non plus qu'avant de réussir à produire des iPod, des iPhone, et autres iPad, Steve Jobs avait essuyé de multiples échecs. Peu de gens se souviennent de l'ordinateur personnel Lisa, par exemple, qui avait coûté des millions mais qui n'avait pas rapporté grand-chose. Pourtant, l'échec n'a jamais freiné son désir de poursuivre ce qui le passionnait, bien au contraire. On le voit bien, la vie de Steve Jobs est riche en préceptes, mais le plus important d'entre eux se trouve ailleurs, dans le coeur non visible de sa réussite entrepreneuriale.

Cet "ailleurs" est au plus profond de la nature humaine. C'est l'idée que les phénomènes qui nous concernent le plus, même s'ils possèdent une contrepartie visible dans le monde matériel qui nous entoure, sont, à la base, des manifestations de la grandeur de l'esprit humain. "L'essentiel est invisible pour les yeux", dit le renard dans "le Petit Prince". Et cette affirmation n'est pas seulement vraie pour les théologiens ou les philosophes, elle l'est aussi dans les domaines qui nous touchent tous les jours. En effet, la créativité de l'homme est la première des ressources ; toutes les autres ne lui sont que subordonnées. Les Indiens d'Amérique connaissaient l'existence du pétrole car ils pouvaient en trouver parfois en surface, mais ils ne savaient qu'en faire et ils l'évitaient autant que possible. Ce n'est qu'au XIXe siècle que l'homme découvrit qu'il pouvait l'utiliser pour s'éclairer, et ce fut un progrès énorme au vu des moyens d'éclairage plus anciens. La véritable ressource n'est pas cet élément que l'on va chercher dans les profondeurs de la terre, mais l'idée qui est née dans l'esprit de celui qui en a découvert l'usage. L'homme est capable d'introduire de l'information nouvelle dans l'univers qui l'entoure. Comme un sculpteur, il donne un sens à la matière.

Et pourtant une approche "matérialiste" domine toujours le discours économique et politique. Les exemples sont nombreux. Pour commencer et contrairement à beaucoup d'idées préconçues, avoir des ressources naturelles n'est ni nécessaire ni suffisant au développement économique ; au contraire, c'est souvent une entrave. Les idées mercantilistes du XVIIIe siècle qui visaient à favoriser les industries nationales et ne voyaient la richesse que dans une balance commerciale excédentaire justifient encore bien des politiques (protectionnistes) actuelles. Les gouvernements, malgré des discours contraires, favorisent souvent la production (matérielle) aux dépens de la création. On ne veut pas de fermetures d'entreprises alors que celles-ci retardent l'émergence d'idées nouvelles. On limite le temps de travail pour mieux "partager" les emplois. La comptabilité nationale, concept éminemment matérialiste, ne prend en compte que la valeur indiquée par les prix, pas la valeur d'échange réelle qui est invisible aux statisticiens. L'Union soviétique est sans doute le meilleur exemple d'une économie guidée entièrement par des principes matérialistes : pour atteindre des quotas de production, des entreprises d'État avaient une fois produit des clous inutilisables car pesant une tonne. Enfin, la lutte des classes n'est pas qu'une notion familière à quelques marxistes invétérés, elle transparaît dans le discours politique et social quotidien. Elle procède aussi d'une même vision matérialiste qui voit toute richesse dans la détention d'un capital physique, mais pas dans la créativité humaine.

"Il n'est de richesses que d'hommes", disait Jean Bodin au XVIe siècle. C'est l'économiste Jean-Baptiste Say dans les années 1800 qui fut le premier à montrer l'importance de cet aphorisme en mettant en évidence le processus entrepreneurial et créatif du marché libre qui est à l'origine de la richesse des nations. Aujourd'hui, personne mieux que Steve Jobs n'incarne cette idée. En ce sens, il est une figure héroïque de l'homme qui crée et transforme, réalisant ainsi son potentiel véritable ; ce que nous sommes tous appelés à faire. Au-delà de toutes les leçons de vie extraordinaires qu'il nous lègue, l'enfant adopté qui partit de rien laisse un message important au monde : celui du triomphe de l'esprit humain. Écoutons-le !

Aide à la Grèce: le secteur privé à la rescousse



Des cocos pour l’Europe

Après un an et demi de retard et de déni, la Grèce est en train de restructurer ses dettes. Ceci ne suffira pas en soi à tirer un trait sur la crise de la zone euro. La Grèce devra également réduire la taille de son secteur public, réformer son administration fiscale et prendre d’autres mesures pour moderniser son économie. Ses partenaires européens devront construire un pare-feu autour de l’Espagne et de l’Italie pour empêcher leurs marchés des capitaux et leurs économies d’être déstabilisés. Les banques qui encourent des pénalités sur leurs bilans devront être recapitalisées. Il faudra réparer les failles dans la gouvernance de la zone euro.
Cependant, la première étape indispensable est une profonde dévaluation de la dette grecque – en deçà de la moitié de sa valeur nominale. Le fardeau pour le contribuable grec sera allégé, ce qui est une condition préalable à la réduction des salaires, pensions et autres coûts et ceci est donc essentiel à la stratégie de « dévaluation interne » nécessaire pour restaurer la compétitivité grecque. Forcer les obligataires à accepter une « marge de sécurité » sur ce qu’ils vont percevoir, promet également de décourager à l’avenir les prêts imprudents aux souverains de la zone euro.

Ce qui nous amène à la question de savoir pourquoi il a fallu un an et demi aux décideurs politiques pour en arriver à ce point. La réponse est qu’il y a de fortes incitations à retarder. Le gouvernement grec, pour lequel la restructuration est un aveu d’échec, continue d’espérer que de bonnes nouvelles vont surgir comme par magie. De même, les banques françaises détenant des obligations grecques s’accrochent au moindre reste d’optimisme possible pour faire furieusement pression contre la restructuration. Les décideurs européens, quant à eux, craignent que la restructuration de la dette souveraine ne risque d’endommager le système financier et ne soit un mauvais point pour leur union monétaire.
Les incitations à retarder sont innombrables. La question est de savoir ce que l’on peut faire à leur sujet. Plutôt que de recourir chaque fois aux renflouements et au retard, n’y a-t-il pas là un moyen plus rapide et plus décisif de restructurer les dettes des souverains insolvables ?
Une réponse serait d’ajouter aux futurs contrats obligataires des dispositions contractuelles qui pourraient déclencher automatiquement la restructuration nécessaire. Le concept provient du débat sur la réforme du secteur bancaire, où existe un problème analogue pour les renflouements et les cautions. En raison de la difficulté à mettre les banques dans une procédure comparable à celle d’une faillite, il y a une incitation, semblable à celle qui se pose dans le contexte de la dette souveraine, à reporter le processus douloureux d’imposer des pertes sur les porteurs d’obligations et de fournir à la place un plan de sauvetage et d’espoir pour le meilleur.
Des obligations convertibles d’appoint (contingent convertible bonds) ou « cocos », ont été proposées pour résoudre ce problème. Lorsque le capital d’une banque tombe en deçà d’une limite spécifiée au préalable, ses cocos convertissent automatiquement la dette à proportion égale d’une fraction de leur prix antérieur. De cette façon, les obligataires se portent caution et aident à la recapitalisation de l’institution financière en question.
En étendant cette idée à la dette souveraine, les détenteurs d’obligations d’État pourraient stipuler que si le rapport dette souverain/PIB dépasse un seuil indiqué, les paiements du capital et des intérêts aux obligataires seraient automatiquement réduits. L’idée est que s’il n’y a pas d’incitation suffisante à la restructuration dès le début d’une crise, elle doit être intégrée antérieurement.
Les « cocos souverains » ont cet avantage que leur activation ne constituerait pas un incident de crédit déclenchant les swaps sur défaillance (credit-default swaps ou CDS) souscrits sur les obligations. L’existence de grandes quantités de CDS, avec une incertitude quant à l’identité de leurs souscripteurs, a inspiré la réticence à procéder à la restructuration. Les cocos souverains apaiseraient la crainte de créer un incident semblable à celui d’AIG, dans lequel un souscripteur trop gros pour faire faillite est surexposé.
Les objections à l’encontre de cette idée ont commencé par la question de savoir s’il y aurait une demande suffisante pour ces nouveaux instruments de la dette souveraine. En fait, le succès des banques dans l’émission des cocos suggère que les investisseurs en sont friands.
Il existe aussi un risque que le gouvernement manipule la dette et les statistiques du PIB sur lesquelles se base le déclencheur de conversion. Délocaliser le calcul de ces résultats vers une entité indépendante, comme le Fonds monétaire international, pourrait résoudre ce problème.
Des inquiétudes sont envisageables quant à l’ajout de cocos aux obligations souveraines qui pourraient augmenter les coûts d’emprunt des gouvernements. Mais la littérature sur les instruments connexes, connus comme clauses d’action collective, suggère que les coûts d’emprunt augmenteraient seulement pour les gouvernements approchant de leur limite de solvabilité – c’est-à-dire, proche du déclencheur des cocos. Et augmenter les coûts d’emprunt pour les gouvernements ayant des dettes dangereusement lourdes – ce qui les découragerait de faire d’autres emprunts – est précisément ce que nous voudrions faire.
L’ajout de cocos aux obligations d’État va exiger la résolution d’une multitude de problèmes techniques. Mais ne pas les ajouter est une recette pour obtenir davantage de retard, de renflouements et de chaos, la prochaine fois que les dettes d’un souverain comme la Grèce deviendront insoutenables.

Dette grecque: défaut de 50% selon Minc

Alain Minc, économiste proche de Nicolas Sarkozy, affirme s'attendre à une restructuration de la moitié de la dette grecque, estimant que cela est "à la portée du système bancaire européen", dans un entretien qui sera diffusé dimanche par Radio J.

"On est allé vers un compromis qui est lequel? La Grèce restera dans la zone euro, on organisera ce qu'on appelle un défaut, c'est à dire qu'en effet les gens qui ont prêté abusivement à la Grèce perdront une partie de leurs créances", déclare M. Minc, invité du "Forum" Radio J.

Comme on lui demande le niveau que ce défaut partiel pourrait atteindre, il répond que "tout le monde a en tête autour de 50%". "Que ça soit 50 ou 60 (pour cent), ce n'est pas une grande différence. Je pense qu'on finira vers 50. C'est à la portée du système bancaire européen, et sinon il se recapitalisera auprès de ses actionnaires", ajoute ce conseiller officieux du chef de l'Etat.

Il s'agit, selon l'économiste, d'un "soutien qu'on donne à la Grèce pour l'aider à sortir de cette impasse", mais "il faut qu'elle fasse des efforts". "Le problème de la Grèce (...) c'est que les Grecs ne savent pas recouvrer des impôts, dit-il. Il faut aider les Grecs à faire deux choses: avoir une administration fiscale qui collecte l'impôt", et "les aider à privatiser des actifs importants qu'ils doivent vendre de façon transparente et organisée".

Longtemps réticente, la France semble s'être résolue à une restructuration encore plus musclée de la dette publique grecque, synonyme de renoncement des banques européennes à une part importante de leurs créances sur la Grèce.

Concernant l'euro, dire que cette monnaie est menacée relève de la "boutade", selon Alain Minc. "Je ne sais pas ce que c'est que la crise d'une monnaie surévaluée. Or cet euro que l'on daube aux quatre coins du monde est surévalué de 20% par rapport au dollar, dit-il sur Radio J.

M. Minc se félicite en outre de ce que "l'attachement à la défense de la zone euro (soit) absolument unanime". "On est en train d'aller vers une nouvelle gouvernance de la zone euro, on est en train de créer (...) une union plus étroite des +pays coeur+ de l'Europe, qui sont ceux de la zone euro", souligne-t-il.

"Cette Europe noyau est en train de se mettre en place (...) sous le poids de la crise et de la contrainte", note Alain Minc, selon qui "la disparition des bouffonneries de (Silvio) Berlusconi au profit de (Mario) Monti (ancien commissaire européen) ou d'un homme politique responsable ramènera l'Italie à sa place, au coeur de la construction européenne". "En France, que ce soit Martine Aubry ou François Hollande, ils sont profondément européens, comme l'est Nicolas Sarkozy", ajoute-t-il.

On rentre dans le rang…

Comme on pouvait s’y attendre, la Slovaquie, qui menaçait de faire capoter le projet de renforcement du Fonds européen de stabilité financière (FESF), a revu sa position. Plus exactement, après un premier vote de refus du Parlement, le texte a été soumis une seconde fois aux élus qui cette fois ont dit « oui ». La technique n’est pas nouvelle : il en a été ainsi de tous les référendums à propos de l’intégration européenne où l’on a fait revoter jusqu’à l’obtention du « bon » résultat. Et pas une fois de plus, bien sûr.

Les choses en étaient arrivées au point où le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, avait déclaré jeudi, avant le second vote du Parlement slovaque, que la zone euro envisageait de mettre fin à la règle de l’unanimité dans ses prises de décision.

Changer les règles du jeu en cours de route, c’est aussi une spécialité européenne.

L’opposition slovaque, petit pays plus pauvre que la Grèce qui va devoir payer pour ses voisins plus fortunés, reposait sur de bonnes raisons mais ce ne sont pas celles-ci qui, en définitive, l’ont emporté. Le refus des socialistes slovaques a été avant tout une manœuvre sur un vote où le gouvernement engageait sa responsabilité, comme l’explique Yves Daoudal dans son Daoudal-Hebdo paru mercredi soir : ils espéraient en tirer quelque bénéfice politique en « monnayant » leur acceptation à retardement. C’est semble-t-il ce qui a eu lieu. Que ne ferait-on pas pour faire perdurer l’acharnement thérapeutique sur l’euro ?

C’est donc « gagné », le FESF va voir sa capacité d’action élargie. Il pourra lever de l’argent sur les marchés en apportant la « garantie » des Etats de la zone euro (mais pas la Grèce, tout de même ; ni l’Espagne qui vient de se voir rétrograder à AA- par Standard and Poors ?). En empruntant, grâce à sa note AAA, à des taux avantageux, il pourra reverser les fonds aux pays en difficultés qui n’arrivent plus à emprunter sur les marchés… pour financer leur dette.

Le FESF a aidé jusqu’à présent l’Irlande et le Portugal et bénéficie désormais d’une capacité effective de prêt de 440 milliards, dont tout le monde convient qu’elle est loin de couvrir les besoins actuels ou prévisibles. Il va surtout pouvoir acheter de la dette publique de pays en difficulté (traduisez : « pourrie ») au taux fort sur les marchés secondaires, créances qui ne doivent pas jouer sur sa note… Tour de passe-passe ?

On nous annonce aussi un autre moyen pour la FESF de démultiplier sa force de frappe via un « effet de levier » comme la fourniture d’une garantie portant sur 20 % d’une dette souveraine en cas de défaut : sans fonds supplémentaires, le FESF porterait ainsi sa capacité d’intervention à 2 500 milliards d’euros sans débourser un centime supplémentaire. Tour de passe-passe encore, dira le profane à qui on ne prend pas la peine d’expliquer à quelle sauce sera mangée l’argent des contribuables européens.

Mais – et c’est peut-être un tout petit signe de volonté d’assainissement – on annonce en même temps une restructuration plus importante que prévue de la dette grecque, les banques et détenteurs privés de créances devant probablement accepter de passer par pertes et profits une part accrue de leurs titres. Jusqu’à 50 %, selon des hypothèses qui circulent actuellement, contre les 21 % prévus en juillet. Des décisions à ce sujet pourraient être annoncées à l’occasion d’un grand sommet le 23 octobre à Bruxelles des dirigeants européens pour sauver la Grèce et la monnaie commune, qui sera précédé durant deux jours par des réunions ministérielles.

Mais toutes ces « solutions » définitives et successives, les assurances données qui disparaissent au contact de la réalité, laissent songeur. Sans surprise, les bourses européennes ont plongé jeudi et les banques, très exposées pour certaines sur le front grec, vont avoir du mal à recapitaliser à hauteur de 9 % – un nouveau plancher en voie d’établissement par l’UE. Elles devront se fournir sur les marchés privés ou, éventuellement, auprès du FESF qui décidément doit avoir des poches sans fond ! Cette proposition de Barroso a rencontré l’approbation de François Baroin.

Un ancien ministre britannique, Norman Lamont, a publié mercredi dans le Daily Mail une tribune dénonçant la folie du système, où il voit une véritable « chaîne de Ponzi » comme celle qui a fait la triste renommée de Bernard Madoff. On fait ainsi appel à de nouveaux investisseurs pour rembourser les premiers à qui l’on a promis des revenus mirobolants pour de l’argent qui est englouti dans un puits sans fond…

Et il explique que le système qui consiste à faire jouer la Banque centrale européenne (BCE) et le fameux FESF pour assurer la manœuvre a une raison principale : le refus de redemander encore une fois aux parlements nationaux des contributions qui rendraient le sauvetage de l’euro (encore plus) impopulaire. Et à chaque fois avec des mesures d’urgence à peine suffisantes pour maintenir l’euro à flot. Le système ne peut marcher, souligne-t-il : il ne serait viable qu’avec une intégration économique et fiscale dont les électeurs ne veulent pas. « Mais le fait terrifiant est bien que le plan alternatif concocté par les ministres des finances de la zone euro retiendrait le monde en otage en mettant en danger tout le capital et toutes les réserves de la BCE », écrit-il. Et c’est une « atrocité constitutionnelle », ajoute-t-il, le « pire des affronts à la démocratie » qu’on ait connus jusqu’ici dans l’affaire européenne, même en comptant le traitement réservé aux référendums.

Et si la BCE fait défaut ? Eh bien, ce seront les pays de la zone euro – les pays aidés – qui devront assurer le sauvetage.