TOUT EST DIT

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dimanche 12 septembre 2010

Soustraction

Elle a l’air tellement importante, cette audience papale qu’espère Nicolas Sarkozy, on nous la fait vivre des jours à l’avance, sans en connaître la date, sans même savoir si elle aura lieu!

Mais il faut communiquer sur une confession de résilience, comme si la promesse d’une absolution pouvait effacer les doutes de l’Eglise sur la politique rom de la France…

On ne remuera pas ici les souvenirs d’un discours au Vatican et du curé plus moral que l’instituteur ; on ne relancera pas la polémique sur un Président en rupture avec la laïcité: Benoît XVI n’est pas un interlocuteur indigne de la France, quand son honneur est en jeu. Cette course au pape ne choque que par contraste avec le mépris absolu qu’affiche le pouvoir envers toutes les autres critiques, et ce depuis des semaines.

Jeudi dernier, la France a fait basculer le Parlement européen, du centre droit au centre gauche, forgeant contre elle une alliance entre les gauches, les écolos, les chrétiens progressistes et les libéraux, tous unis pour lui demander l’arrêt des expulsions… Ce que la France, évidemment, ne fera pas, ignorant superbement les représentants du peuple européen. A la veille de la présidence française du G20, nous voilà cornerisés politiquement, quand nous n’avons jamais autant eu besoin de l’Europe. Nicolas Sarkozy, qui avait si bellement présidé, réveillé et entraîné l’Union dans la crise, dilapide son capital européen dans une opération de démagogie intérieure, et ne s’en préoccupe pas, juste inquiet de réparer avec un vieil homme de foi.

Le choix est politique, sans doute ; politicien, s’il s’agit de rameuter les cathos indignés sans perdre les réacs anti-Roms. Mais politique d’abord: il révèle autre chose, une soustraction que s’inflige ce pouvoir. Sait-il qu’elle lui fait perdre ce qu’il avait de rare et d’essentiel? Nicolas Sarkozy avait deux talismans, dans sa conquête et au début de son règne : la modernité et le conservatisme, l’audace et le ressourcement, l’ouverture et la conscience du passé. Il avait l’appétit des bouleversements, le pari de rendre la France au monde, tout en la rassurant dans son identité. Il avait l’Europe, et il avait le pape, et il voulait les deux, plus fort que ses adversaires, insaisissable parce que plus complexe que ses caricatures. Cette période est révolue. Nicolas Sarkozy se droitise et se banalise au rythme de son affaiblissement.

Ce que la séquence rom révèle, c’est le renoncement au monde, au profit d’un repli protestataire, un souverainisme hautain et dérisoire. La France se défend des Roms, elle se défend des eurodéputés, elle cultive
ses peurs devant une Europe consternée, elle se barricade sous les lazzis et feint de s’en moquer. Elle n’admet qu’une seule critique, ou ne recherche qu’une caution: celle d’un pape pris comme parangon des valeurs conservatrices, dont on n’est même pas sûr qu’il marchera dans la combine. Nicolas Sarkozy avait l’Europe et le pape? Seul le pape lui importe désormais, et s’il se trouve, seulement pour une photo.



Claude Askolovitch

Jeux de rôle

La retraite à 60 ans a été abolie vendredi par l’Assemblée nationale. Pour la première fois, un "acquis" est remis en cause. Et pas de manière subreptice, comme la révision des 35 heures ou les précédentes réformes des retraites.

1982-2010, une page de l’histoire sociale se referme. Cette réforme est nécessaire comme elle l’a été dans tous les pays développés. Elle passera grâce à un jeu de rôle des acteurs, la droite, la gauche et les syndicats. Nicolas Sarkozy veut avant tout établir devant l’Histoire sa capacité de réformer.

La mobilisation de mardi était presque trop faible pour la victoire dont il rêve. Afin de faire oublier, en 2012, le "président rétréci", cruellement décrit cette semaine par The Economist. La gauche, elle, sait qu’elle ne remettra pas en cause cette loi, quoi qu’en disent Martine Aubry ou Ségolène Royal. Il en ira de la crédibilité de celle-ci si elle arrive au pouvoir.

Quant aux syndicats, ils doivent tenir leurs troupes: les rapports de force de 2010 cristalliseront leur représentativité future. Sauf dérapage, le gouvernement devrait gagner la bataille des retraites. Mais il a perdu une guerre aggravée par l’affaire Woerth. Il apparaît comme injuste vis-à-vis des femmes ou des travailleurs les plus faibles.

C’est peut-être un explosif à mèche lente: les symboles sociaux s’inscrivent dans l’inconscient des peuples. Politiquement, ils se paient au prix fort.



Olivier Jay

Paradoxes européens... et turcs

L'Europe sait condamner au nom des grands principes : jeudi dernier au Parlement de Strasbourg, la France en a fait la déshonorante expérience pour sa politique d'expulsion des Roms. Moralement, les eurodéputés ont raison en donnant la priorité aux droits de l'homme et non à la froide légalité de la réglementation, même consacrée par les traités de l'UE.
Mais les grands principes peuvent aussi se transformer en arme à double tranchant, à manier avec précaution. Ainsi, l'UE salue avec force congratulations le référendum constitutionnel qui se déroule aujourd'hui en Turquie. Au nom des avancées démocratiques car la Turquie, candidate à l'Union européenne, mettrait enfin sa loi fondamentale en conformité avec les standards européens !
Dans les faits, les électeurs vont se prononcer sur la modification d'une vingtaine d'articles, la plupart sans véritable portée. Cependant, ce flot de propositions soumises à approbation populaire dissimule quelques chausse-trappes dans leur formulation. En clair : au nom du «plus de démocratie» voulu par l'UE - selon l'argument avancé par Ankara - le gouvernement turc voudrait réduire, voire porter à néant, les prérogatives des institutions garantes de la laïcité sous prétexte de redéfinir les rapports entre les pouvoirs politique et judiciaire.
Par exemple, comme pour les juges du Conseil supérieur de la magistrature, le nombre des membres de la Cour constitutionnelle serait augmenté et leur mode de sélection modifié. Or il s'agit d'instances qui jusqu'à présent ont su s'opposer au parti islamo-conservateur AKP dans ses tentatives de mettre fin à la laïcité héritée de Kemal Atatürk. Et cela va jusque dans les détails, jusqu'au port du foulard que le gouvernement veut autoriser dans les espaces publics et que les juges interdisent...
Ce référendum, loin d'être acquis d'avance puisque les sondages annoncent le « oui » et le « non » au coude à coude, aurait pour seul but d'accélérer l'« islamisation rampante » de la société turque, accusent les partis hostiles aux Premier ministre Erdogan. Avec l'aval hypocrite de l'Europe qui encouragerait la Turquie dans ces réformes tout en ne voulant pas d'elle. Avec la complicité non moins hypocrite des islamo-conservateurs AKP qui mettraient l'Europe en avant tout en refusant ses valeurs sur le fond pour les exploiter exclusivement sur la forme.
Et Bruxelles s'en contente... Finalement, les grands principes se réduisent à peu de choses quand tonne la realpolitik. A des résolutions votées à peu de frais. Comme jeudi dernier à Strasbourg...


Jean-Claude Kiefer

LA CONNE DU JOUR !

Elodie Bouchez: "Je déteste l’ennui"



AH BON, PARCE QU'IL EN A QUI AIMENT ÇA ?