TOUT EST DIT

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mercredi 14 septembre 2011

Delors: sauver la Grèce et sauver l'euro

L'ancien président de la Commission européenne, Jacques Delors, a jugé aujourd'hui  indispensable de maintenir la Grèce dans la zone euro pour éviter une contagion à d'autres pays.

"Si la Grèce quitte l'euro, c'est l'effet domino, le lendemain les marchés vont s'intéresser davantage aux autres pays, ce que l'Allemagne appelle 'l'olive zone', l'Espagne et l'Italie notamment", a-t-il déclaré lors de l'émission Question d'infos LCP-Le Monde-AFP-France Info-Dailymotion.  "Sauver le soldat grec, c'est sauver l'euro", a ajouté l'ancien ministre des Finances (1981-1984) et président de la Commission européenne (1985-1994).

La fin de la monnaie unique signerait selon lui "la fin d'une certaine idée de l'aventure européenne".  Jacques Delors a eu des mots sévères pour les dirigeants français et allemand Nicolas Sarkozy et Angela Merkel dans la conduite des affaires de la zone euro.  "On dirait que les 15 autres regardent la France et l'Allemagne. De temps en temps ils bougonnent (...), mais il n'y a plus cet esprit collégial, cet équilibre", a-t-il estimé.  "Quant aux institutions européennes, monsieur Sarkozy et madame Merkel leur ont mis tellement de coups sur la tête à monsieur Barroso et monsieur Junker que ces deux-là ne savent plus où se mettre, se taisent", a-t-il ajouté.

QUE NE SE TAIT-IL PAS CE SOMBRE CON ???

Faut-il punir les Grecs ?

Les Grecs nous ont menti pendant des années en truquant leurs comptes publics pour entrer dans l'Euro. Il ne font pas les efforts qu'ils prétendent faire. Faut-il refuser de payer leur ardoise et les sortir de l'Euro pour autant? Non, bien sûr. La Grèce, c'est l'Europe. Leur monnaie, c'est la nôtre et leurs difficultés sont les nôtres. L'Europe survivra et sortira plus forte. L'édito de Christophe Barbier.


La règle d'or, un "piège à cons" pour Delors ?

Pour Jacques Delors, la règle d'or sur l'équilibre des finances publiques n'est ni plus ni moins qu'un « piège à cons pour l'opposition ». 

Est-ce le début des débats socialistes en vue des primaires qui a poussé Jacques Delors à sortir de l'ornière ? Le père de la candidate Martine Aubry est intervenu mercredi à l'occasion de l'émission Questions d'info LCP/France Info/Le Monde/AFP/Dailymotion. Si certains reprochent à la maire de Lille son manque de dynamisme lors de la campagne pour l'investiture du PS, son père n'est semble-t-il pas fait du même bois. L'ancien président de la Commission européenne s'est vivement invité dans le débat public, critiquant largement la règle d'or proposée par Nicolas Sarkozy et visant à inscrire dans la Constitution l'équilibre des finances publiques. 
On croyait Jacques Delors favorable à une telle initiative. On se trompait. « Une règle d'or, pour qu'elle soit valable, il faut qu'elle définisse bien, ce qu'on appelle un déficit. Prenons un exemple, un pays X a 96 % de recettes par rapport à 100 de dépenses. Il se trouve que les 4 % de dépenses en plus sont des dépenses d'avenir. Est-ce qu'il doit tout faire financer par les recettes de cette année ? », s'est-il interrogé. Et de répondre : « Puisque ces dépenses profiteront aux prochaines générations », il faut recourir à l'emprunt ; et sur la règle d'or, il  « faut préciser les choses ».

Vide

L'ancien président de la Commission européenne a un avis bien tranché sur la question. Pour lui, « la règle d'or, c'est comme celui qui va à confesse et qui dit : 'je ne recommencerai pas'. (…) On se fout du monde, et pour la France, je n'en dis pas plus, c'est un piège à cons pour l'opposition. » Jacques Delors va même jusqu'à considérer cette proposition comme « une très bonne opération de marketing, mais derrière, c'est le vide ». 
Papa Aubry, Monsieur sans couilles ( il a tout de même eu la trouille de se présenter aux présidentielles 1995), nous sort une connerie de plus pour protéger sa fille.

Réformer les banques ? Pas avant 2019...

La réforme des banques britanniques vise à éviter que le contribuable ne soit de nouveau obligé de les renflouer. Mais, d'ici à sa mise en œuvre, de nouvelles crises ont largement le temps d'éclater.
 
Pour les observateurs de la crise bancaire, les jours qui viennent marqueront deux anniversaires : celui de la ruée des clients de Northern Rock, en septembre 2007 [la banque britannique a été nationalisée l'année suivante], et celui de la faillite du géant américain Lehman Brothers, le 15 septembre 2008. Cet effondrement a déclenché la crise qui devait finalement contraindre le contribuable britannique à renflouer les banques du pays [Royal Bank of Scotland (RBS) et Lloyds Banking Group] en octobre 2008.

Il ne faut donc pas s’étonner si, du point de vue des syndicats, la Commission indépendante sur les banques (CIB), dans son rapport sur le secteur [remis le lundi 12 septembre], repousse la réforme des banques aux calendes grecques. Sous la présidence de sir John Vickers, la CIB propose certes d'ériger une muraille entre les activités de banque de dépôts et les opérations d’investissements, plus risquées, mais il n’est apparemment pas nécessaire de mettre ces propositions en œuvre avant 2019 – ou, comme le ministre des Finances l’a dit  “d’ici la fin de la décennie”. [George Osborne s'est engagé à faire adopter les textes nécessaires durant l'actuelle législature, soit avant 2015, pour une mise en œuvre progressive.]

Quant à ceux qui espéraient des propositions radicales afin de renforcer les droits des consommateurs, habitués à être mal servis tout en se faisant escroquer par la vente de produits comme l’assurance décès-invalidité, ils en seront pour leurs frais. Il ne devrait pas y avoir d’enquête sur la concurrence dans un secteur dominé par le Lloyds Banking Group. En outre, la CIB est revenue sur une proposition précédente et ne demande plus à cet établissement de se séparer d'agences supplémentaires, se contentant des 632 actuellement mises en vente pour répondre aux exigences des régulateurs de l’Union européenne. [C'était la condition posée par l'UE pour le renflouement du Lloyds Banking Group par l'Etat.]

La CIB est la première à reconnaître que ses mesures sont “délibérément composées d’éléments modérés”, mais elle pense que, une fois combinées, elles auront des conséquences “d’une grande portée”. A en juger par les mouvements autour des actions des grandes banques le 12 septembre, l’inquiétude est à l’ordre du jour – à l’ouverture, les banques britanniques avaient chuté de 5 %, ce qui reste moins important que la dégringolade de leurs homologues françaises. Preuve que le marché réagit à l’aggravation de la crise dans la zone euro, au lieu de faire une fixation sur le rapport Vickers. D'ailleurs, en milieu de matinée, les actions des banques britanniques s’étaient reprises.

En réalité, Vickers n'est pas allé aussi loin que l'auraient souhaité les partisans d'une réforme radicale. Il n'y aura pas une séparation totale entre les banques de dépôt et les banques d'investissements “casinos”, telle que l'avait prônée Vince Cable, le ministre des Affaires [libéral-démocrate], afin d'éviter un nouveau sauvetage par les contribuables.

Ian Gordon, analyste bancaire chez Evolution, admet d'ailleurs que les banques ont échappé au “pire”. “Le rapport de la CIB est inopportun et n'apporte rien, mais cela aurait pu être encore bien pire, assure-t-il. Certes, nous continuons à considérer que les recommandations de la CIB accroîtront de manière permanente les risques d'instabilité au sein du secteur britannique des services financiers, ce qui ne pourra qu'avoir des conséquences négatives sur l'économie du Royaume-Uni dans son ensemble ; mais certains des pires excès du projet de ‘réformes’ extrémistes ont été, semble-t-il, limités. Nous admettons qu'un tel commentaire puisse paraître un peu bizarre, alors même que la CIB évalue encore la mise en œuvre de ses dangereuses propositions de ‘pare-feu’ à  4 à 7 milliards de livres [4,6 à 8,1 milliards d'euros]."

Les patrons des banques ne vont pas manquer de se plaindre. Mais, étant donné que la plupart d'entre eux auront changé de poste en 2019, ce ne sera peut-être plus leur problème. Et, en 2019, nous aurons peut-être un nouvel anniversaire de crise à célébrer.


Consensus politique presque parfait
Le rapport de la CIB a finalement été adopté par le chancelier de l'Echiquier, George Osborne, longtemps réticent. Osborne, rapporte The Independent, a travaillé avec ses partenaires libéraux-démocrates à convaincre le Premier ministre David Cameron. Celui-ci était                                 
soumis à un intense lobbying de la part des banques, qui affirmaient que les réformes mettraient en danger la reprise. Le Labour a aussi approuvé le rapport, reprochant au gouvernement de "traîner des pieds" dans sa mise en œuvre.

Une farce tragique

Intégrer une taxe dans les factures d’électricité : la dernière proposition du gouvernement est un aveu d’échec des mesures prises depuis un an et demi, déplore Ta Nea. Et le comble, c’est que certains fonctionnaires refusent de l’appliquer. 

Comme dans les sombres tragédies de Shakespeare, la scène politique grecque peut être renversée par un seul personnage. Ce personnage n'est pas un premier rôle mais il est crucial dans l'évolution des scènes, et pas positif. Quelqu'un comme Iago dans Othello.
Toute proportions gardées, cette analogie pourrait s'appliquer à Nikos Fotopoulos, le président du syndicat Genop-DEI (l'Electricité de Grèce). Il est brun, mal rasé, vêtu de noir et a quelque chose de théâtral.  Mais surtout parce que ce syndicaliste surgit sur le devant de la scène à un moment critique de notre tragédie financière nationale.
Le gouvernement Papandréou est déséspéré. Il cherche environ 2 milliards d'euros pour combler le déficit public. Pour les recueillir, il a donc soumis l'idée d'imposer à nouveau les propriétés immobilières, en utilisant les factures d'électricité [pour identifier les propriétaires] car il n'y a pas de cadastre, tandis que DEI comptabilise au mètre carré près l'ancienneté et le quartier. Mais utiliser les factures de DEI pour imposer une nouvelle taxe [elle sera intégrée dans le calcul de la facture]  est l'aveu d'un échec. Le gouvernement reconnaît ainsi qu’il ne fait pas confiance aux mécanismes de récolte de l'impôt. C'est un bien triste constat qui remet en cause l’efficacité des taxes précédentes.

L'élite de l'Etat se retourne contre leur propre gouvernement

Le gouvernement va donc imposer une nouvelle taxe extraordinaire cette année et l'année prochaine. Il le fait parce que depuis 20 mois, il essaie en vain de réformer l'administration publique, de vendre des biens et de supprimer des organismes publics. Il y a eu des coupes sur les salaires, mais pas de véritables réformes. La mise en place d'un salaire unique pour tous les fonctionnaires à tellement d'exceptions que ce salaire s'annule de lui même, la mise en disponibilité de fonctionnaires est tellement obscure que l'Etat ne pourra pas y arriver sans licencier des employés d'Etat.
En réalité, le PASOK [le parti socialiste au pouvoir], pas plus que la Nouvelle Démocratie [l’opposition de droite], n'ose toucher à l'Etat parce que c'est sa propre création, même si c'est une horreur. Pour éviter de réformer l'Etat, le gouvernement préfère faire payer tous les propriétaires grecs.
C'est donc une pièce de théâtre avec un metteur en scène invisible mais, ironiquement, avec pour personnage Fotopoulos et les caïds de Genop-DEI qui refusent que les factures d'éléctricité soient utilisées pour appliquer la loi imposée par le gouvernement. Ces enfants du PASOK, qui constituent une élite de l'Etat, se retournent donc contre leur propre gouvernement. Ils préfèrent que le pays sombre dans la faillite plutôt que toucher à leurs avantages. Dans tous les cas, le coût sera important pour les Grecs. Le problème est donc qu'aucune vraie tragédie – de Shakespeare ou des financiers – n’a de fin heureuse. Au final, nous devront payer.

A la Une

Derniers euros dans les caisses

"Il n'y a de l'argent que jusqu'en octobre", s’alarme To Vima. "Il y a donc urgence, et le retour des experts de l'UE et du FMI la semaine prochaine sera décisif. Le gouvernement grec fera tout pour que la sixième tranche du prêt de 100 milliards d'euros lui soit accordée. Sinon, c'est le défaut de paiement assuré. Cela effraie les marchés et déstabilise le gouvernement assommé par les pressions de ses créanciers et par les déclarations des dirigeants allemands dans la presse", note le quotidien.

Des marchés vraiment trop réactifs

Parler ou ne pas parler ? Que dire ou ne pas dire ? La crise financière est décidément un casse-tête pour nos gouvernants. Ils semblent perdus face à des marchés qui sursautent à la moindre rumeur, sur-réagissent au silence comme à une déclaration ou à un démenti. Au final, pour faire remonter un temps les cours, la simple annonce d'une téléconférence avec le premier ministre grec en fait autant que l'évocation d'une aide des grands pays émergents à l'Europe. Si le yoyo actuel a tendance à faire perdre leurs nerfs aux bourses, le tandem Sarkozy-Merkel doit garder les siens plus que jamais. Surtout après les dégâts produits par l'attentisme et les divisions de leurs partenaires européens, sans oublier les fuites dans leurs entourages. Un sacré champ de mines, dont nul en Europe y compris à Bruxelles, n'a réussi à prendre la mesure. Même le tabou ultime, la faillite partielle de la Grèce, n'est désormais plus exclu, illustrant l'absence d'une ligne directrice et d'un leadership affirmé. On comprend mieux la tentation du président de revenir à la politique nationale et à sa candidature, sujets qu'il maîtrise bien mieux : en promettant des places de prison et des mineurs délinquants encadrés par des militaires, il a fait réagir tout le monde et fâche Ségolène Royal. De la vraie communication électoraliste aux accents classiquement sécuritaires, qui ne coûte rien et dont personne n'est vraiment dupe. C'est bien plus simple que de parler aux marchés financiers. Eux exigent des projets clairs et financés, des résultats rapides et concrets. Et ils votent tous les jours à la Bourse, pas dans neuf mois…

Délit de paresse

Pendant de longues semaines encore, le président de la République fera savoir qu’il se consacrera jusqu’au bout à son «métier» de chef de l’État. Comprenez: pendant que les socialistes s’écharpent dans leurs primaires, je m’occupe du pays! Une posture sans surprise, mais elle ne trompe personne. Si Nicolas Sarkozy est bien à la manœuvre et si cet hyperactif a multiplié les voyages éclairs en province depuis son entrée à l’Élysée, il est déjà bel et bien en campagne pour 2012 au rythme de ses déplacements officiels aux six coins de l’Hexagone et, accessoirement, aux frais de la nation.

Hier, le thème était donc les mineurs délinquants et les prisons. Tout sauf une surprise puisque ce grand classique a fait partie de sa liste de favoris dès son arrivée au ministère de l’intérieur. Dix ans! Un long bail qui, en creux, fait apparaître l’échec d’une politique et l’incapacité de son promoteur à mener à bien les objectifs qu’il lui avait assignés.

Retour à la case départ, donc. Bien évidemment, on ne saurait reprocher au président l’évolution avérée de la délinquance juvénile vers des formes de plus en plus violentes et de plus en plus précoces. La tâche, mouvante, était difficile. Elle aurait sans doute mérité moins d’arrogance, de vantardises, d’annonces, et plus de ténacité, d’imagination, de constance.

Celui qui fut le ministre de l’Intérieur avait pourtant, dès le départ, insisté sur l’urgence de développer des centres éducatifs fermés qui apparaissent comme autant de lieux adaptés pour éviter à des jeunes de prendre le chemin de la prison, et leur ouvrir une voie vers un salut. Mais peu d’efforts, finalement, ont été réellement entrepris pour généraliser et enrichir les expériences souvent positives menées par nombre d’associations spécialisées.

Plus spectaculaire, la solution de facilité a prévalu. L’incarcération. De ce point de vue, M. Sarkozy est coupable de paresse dans la conception, primaire, de sa politique répressive. Ses orientations n’avaient aucune chance de corriger le retard dans l’exécution des peines, ni de remédier au désastre carcéral français dénoncé depuis tant d’années, y compris à l’échelon européen. Surpeuplement, vétusté, insuffisance d’encadrement spécialisé... Des usines criminogènes qui non seulement fabriquent de la récidive mais transforment des petits voyous en brutes beaucoup plus difficilement récupérables à la sortie.

Alors, 30 000 places de détention supplémentaires, pourquoi pas? Des encadrements militaires plutôt que la prison, pourquoi pas (avec toutes les précautions, toutefois, pour qu’ils ne soient pas des camps livrés à l’arbitraire d’un régime d’exception et du non-droit)? Mais assez de rodomontades! Des actes, maintenant! Ce qui suppose d’expliquer un vrai volontarisme de société. Et son coût.

Recomposition au Proche Orient

Il y a un peu plus d'un an, la diplomatie israélienne pouvait encore tabler sur trois axes majeurs de son environnement proche. La stabilité du régime syrien, dont c'était d'ailleurs la seule vertu. La solidité des relations avec l'Égypte, premier État arabe à avoir signé, dès 1979, la paix avec Israël. La coopération militaire et stratégique avec la Turquie.

Ces axes, aujourd'hui, n'existent plus. La Syrie est au bord de l'implosion sous la pression incessante de la rue. L'Égypte n'est plus dirigée par Moubarak, chassé en février, mais par des militaires qui viennent de laisser saccager l'ambassade israélienne au Caire. La Turquie n'est plus un allié depuis que l'épisode sanglant de la flottille pour Gaza a fini de brouiller les deux partenaires. Depuis, surtout, qu'Ankara étale ouvertement ses visées diplomatiques sur l'ensemble de la région.

Israël, plus isolé que jamais, ne peut plus compter sur ses alliés. Ses ennemis (l'Iran, le Hamas, le Hezbollah) ne baissent pas la garde pour autant. Le contexte y est pour beaucoup. Les choix du gouvernement Nétanyahou aussi, prisonnier d'un attentisme sécuritaire qui le place à la remorque des bouleversements en cours.

Car c'est, en fait, toute la région qui est en pleine recomposition, sous l'effet cumulé du Printemps arabe et des suites de la guerre en Irak. Le vote, la semaine prochaine aux Nations Unies, d'une résolution qui pourrait mener à une reconnaissance internationale de l'État palestinien ajoute à la mobilité du tableau, comme un facteur d'accélération aux répercussions assez imprévisibles.

Le « moment turc »

Nouvel acteur clé, la Turquie de Recep Tayyip Erdogan est la puissance montante de ce nouveau Proche Orient. La visite triomphale que le Premier ministre turc effectuait hier au Caire, ses voyages à suivre en Libye et en Tunisie, les desseins stratégiques finement élaborés depuis cinq ans par son ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, la vigueur de l'économie turque dont la croissance au second trimestre a atteint 8,8 % cette année : tout corrobore cette montée en puissance. Même l'exportation des séries télévisées turques sert ce dessein d'influence.

Ce choix délibéré d'Ankara est favorisé par la faiblesse américaine et les turbulences arabes qui viennent d'ôter au Caire et à Damas une part de leur influence. Le « moment turc » se nourrit en outre d'une corde malheureusement sensible dans toute la région. Que les critiques à son encontre soient fondées ou non, l'hostilité à Israël fédère. Erdogan sait qu'en agitant l'épouvantail israélien, il gomme d'autant mieux tout ce qui pourrait être perçu par les populations arabes comme une résurgence de la puissance ottomane.

Et les Palestiniens dans tout cela ? Longtemps à l'écart du mal nommé Printemps arabe, ils voient leur cause faire un retour fulgurant au centre de la scène diplomatique. Pour de bonnes raisons, tant la demande de reconnaissance internationale est légitime. Pour mille autres raisons aussi, moins généreuses. Le dossier palestinien n'est-il pas, depuis des lustres, un gage de plus-value diplomatique pour tous ceux qui s'en saisissent ?

Pataquès Sarkozy-Merkel sur le sauvetage des banques et de la Grèce

L'Elysée a nié vers 14 heures la publication, mardi 13 septembre, d'un communiqué commun entre la chancelière allemande, Angela Merkel, et le chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy. Pourtant, l'idée d'une initiative franco-allemande a été annoncée par l'agence Reuters tandis qu'un conseiller de l'Elysée confirmait au Monde la publication d'un communiqué dans l'après-midi.  Après avoir rappelé leur engagement à ratifier le plan de sauvetage grec, invité Athènes à respecter ses engagements, les deux dirigeants devaient réaffirmer leur volonté de soutenir leurs banques. Ceci alors que M. Sarkozy reçoit le président du conseil de l'Union européenne, Herman Van Rompuy, mardi en fin d'après-midi.
En fait, un communiqué était bel et bien en préparation au service de presse de l'Elysée mardi matin. Le premier ministre, François Fillon, a évoqué une initiative franco-allemande au petit déjeuner de la majorité. Visiblement, le feu vert de Berlin n'était pas encore là.  "Pouvez-vous confirmer la publication d'un communiqué dans l'après-midi ?", a-t-on demandé à un responsable allemand: "Non", répond-il au Monde.
Le pataquès de communication révèle l'immense fébrilité des dirigeants européens, notamment français, qui étudient toutes les options pour sauver leurs banques des attaques des marchés.
Pour sortir de la crise, il faudrait assainir le bilan des banques et les recapitaliser. Il n’est pas possible de faire appel aux marchés financiers, tant la défiance est forte. D’où l’idée d’avoir une participation de l’Etat. Nationalisation ? Bercy oppose un "triple démenti". Mais l’idée d’une intervention n’est pas exclue dans les cercles du pouvoir. "Evidemment que c’est étudié, c’est étudié dans tous les pays du monde", explique un proche de l’exécutif. L’intervention pourrait prendre la forme d’une participation au capital, de prêts participatifs, etc. "C’est une poignée de milliards d’euros qui ne change pas l’endettement de la puissance publique", poursuit ce proche. Avec l’idée de s’octroyer une clause de retour à meilleure fortune.
En 2008, l’Etat avait sauvé les banques mais n’avait pas profité de leur extraordinaire rebond en Bourse. "Si on va à la faillite, on verra. Mais pour l’instant on n’y est pas", poursuit un conseiller de M. Sarkozy.
Il n’est pas exclu d’avoir une réponse coordonnée comme lors du sauvetage de 2008. Le Fonds européen de stabilité financière (FESF), dont les nouvelles missions ont été arrêtées le 21 juillet, aura la capacité de recapitaliser les banques. En France, le bras armé habituel de l’Etat est la Caisse des dépôts, mais "pour l’instant, elle n’est pas mise à contribution", assure ce conseiller.
Pour l’heure,  le financement au jour le jour est assuré par la Banque centrale européenne (BCE). La crainte est que les déposants retirent leurs avoirs. "Ce n’est pas le cas pour l’instant", explique cet expert.
Le renforcement des fonds propres des banques impliquerait une opération vérité sur les comptes. "La BNP et la Société générale n’ont provisionné leurs créances grecques qu’à hauteur de 21 %. Elles doivent faire comme Axa et aller à 40 %", accuse un haut responsable financier français. Les règlements de comptes commencent. "Les banques auraient dû accepter une restructuration de la dette grecque de 30 % à 40 % il y six mois. Mais Michel Pébereau [patron de BNP Paribas] a refusé de payer, prétextant que cela allait créer un effet de contagion sur les autres pays", poursuit ce responsable. Henri de Castries, patron d’Axa, lui, prônait un sacrifice immédiat, mais n’a pas été entendu, l’Elysée choisissant la ligne Pébereau. "Le provisionnement à 21 % a été recommandé par les institutions internationales", défend un banquier de la place.
Le calendrier est serré avec la tenue d’un Eurogroupe, en présence du secrétaire américain au Trésor, Timothy Geithner, vendredi à Wroclaw en Pologne, alors que le G7 n’a pas permis de dégager une ligne de conduite claire. "Si une déclaration euro-américaine, ou Europe-Fonds monétaire international, ne suffit pas, la convocation d’un conseil européen apparaît inéluctable", poursuit cet expert financier.

La zone euro peut-elle éviter l’extinction ?

Le ministre de l’Economie, Philipp Rösler – qui est aussi le chef de file du FDP, appartenant à la coalition Merkel – est le responsable de cette inoubliable phrase : « la faillite de la Grèce n’est plus tabou ». Quant au ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, d’après Der Spiegel, il aurait élaboré deux scénarios possibles, dont celui de la faillite de la Grèce accompagnée d’une sortie de la zone euro.
Avez-vous remarqué, cher lecteur, que depuis quelques jours, les médias n’ont plus que le mot tabou en bouche ? Le « tabou » sur le défaut de la Grèce serait levé. De même que le « tabou » de sa sortie de la zone euro. Une manière polie de nous avouer que gouvernements et autorités concernées nous avaient menti ces derniers mois en excluant ne serait-ce que la possibilité de défaut de la Grèce. Que les stress tests bancaire étaient complètement faussés et absolument pas réalistes.

Cette manipulation pudique de la réalité se paie chère sur toile de fond de dissensions grandissantes non seulement au sein de la zone euro (entre l’Allemagne et le reste de l’Europe) mais aussi au sein même de la BCE et des différents pays membres de la zone.
Un rapport d’UBS sème encore plus le doute (vous pouvez le lire ainsi qu’un résumé, ici) : « Sous sa forme actuelle et avec ses membres actuels, l’euro ne fonctionne pas. Soit son fonctionnement, soit ses membres devront changer ».
Changer le fonctionnement de la zone euro
Une solution régulièrement évoquée mais qui, une nouvelle fois, se heurte aux défauts structurels de la zone euro : la multiplicité des intérêts de chacun de ses membres. La crise de la dette européenne a déjà l’occasion pour la BCE de passer outre ses principes en rachetant de manière massive les obligations des Etats en détresse.
Jean-Claude Trichet semble aussi avoir mis un mouchoir sur sa lutte contre l’inflation. La semaine dernière, il a d’ailleurs annoncé que la BCE n’augmenterait pas ses taux directeurs.
Quelles réformes pourraient être introduites ? La principale reviendrait à donner encore plus de pouvoir à la BCE pour… faire de l’assouplissement quantitatif par exemple. Ce qui permettrait certes de calmer pour un certain temps les marchés mais ne résoudrait rien. Cela reviendrait à donner un quasi-blanc-seing aux Etats pour s’endetter encore plus. L’exemple américain – et la dégradation de sa note souveraine cet été – démontre les dangers d’une telle politique.
Autre solution : mettre en place un euro à plusieurs vitesses (nous vous en parlions il y a quelques jours dans La Quotidienne. Un pour les pays à économie forte comme l’Allemagne ou les Pays-Bas. Un autre pour les économies en difficulté, Grèce, Espagne, Portugal, etc.
Un peu dans le même genre, certains évoquent la possibilité de coexistence d’une monnaie unique (pour les échanges internationaux) coexistant avec une monnaie nationale.
Malheureusement, de tels changements impliqueraient une certaine cohésion et volonté commune des pays de la zone euro. Or il est plus facile de faire la liste de leurs dissensions que celle de leurs points d’accord. En débat :
– la création d’eurobonds
– les modalités du déblocage du nouveau plan d’aide à la Grèce
– la mise en place de sanctions pour les pays ne respectant pas les règles fixées par l’UE
– la nécessité de création d’une autorité économique commune à la zone euro
– la nécessité de recapitaliser les banques européennes – et avec quel argent
Jusqu’à présent, ils étaient tous à peu près d’accord sur la nécessité d’empêcher une faillite de la Grèce mais de nombreuses voix discordantes s’élèvent ces derniers temps – essentiellement en Allemagne, il faut bien le reconnaître.
Bref, on voit mal comment les Européens parviendront à mettre en place des réformes du fonctionnement de l’euro.
Pouvons-nous encore éviter l’explosion de la zone euro ?
L’Union européenne peut-elle vraiment exploser en vol ? Pour tout vous dire, cher lecteur, nous n’en savons rien.
Quand nous lisons les analyses de nos collègues outre-Atlantique, nous en sommes à deux doigts d’en être persuadés. Puis quand nous lisons la presse française, nous finissons par nous laisser bercer par les douces promesses de nos gouvernements qui nous promettent de ne pas laisser tomber la Grèce et l’euro.
Je mise sur la force d’inertie. Cette mystérieuse capacité de nos économies à survivre à peu près tout et n’importe. Alors, certes la zone euro sera mal en point et bancale mais elle pourrait survivre.
Une situation qui fait penser à celle du Japon depuis plus de 20 ans. Un marasme, une économie morte-vivante, qui ne se relève pas mais qui ne disparaît pas complètement non plus… En attendant le prochain cataclysme économique.
Et vous, qu’en pensez-vous ?
Vous n’avez pas de boule de cristal, nous non plus – même si nous le ne regrettons en ce moment –, mais vous avez des idées.
La zone euro risque-t-elle d’imploser ? Les Européens parviendront-ils à faire évoluer son fonctionnement pour répondre à la fois aux attentes des Allemands et à celles des Grecs ? Pourrons-nous éviter la contagion aux autres pays de la zone ?
Donnez-nous votre avis sur notre site moneyweek.fr (ci-dessous).
Que faire ?
Evidemment, en période de troubles, les vieux réflexes font surface. Les investisseurs se précipitent sur :
Le dollar. Très mauvais choix. Pour le moment, l’Europe est dans le collimateur des marchés, mais ils ne tarderont pas à s’intéresser de nouveau à la dette américaine et à son dollar moribond.
- Les obligations d’Etat, et en particulier les bons du Trésor. Très mauvais choix. Comme pour le dollar, les obligations américaines vivent sur leur réputation usurpée de placement sûr. N’oubliez pas la dégradation de la note souveraine américaine – et ce n’est que le début. Préférez les obligations des pays émergents, moins risquées et au rendement intéressant.
- L’or. Bon choix… mais peut-être pas pour tout de suite. Comme vous l’explique Simone Wapler dans son article « Jusqu’où pourrait nous emmener une consolidation de l’or ? », l’or pourrait corriger dans les semaines qui viennent. Pas de panique, cette baisse devrait être temporaire et surtout limitée – vers les 1 500 $ probablement. Simone vous préviendra quand il sera de nouveau temps de passer à l’achat. Entretemps, les matières premières affichent une belle tenue face aux marchés actions. L’occasion idéale de s’intéresser à d’autres formes d’investissement sur l’or – je pense en particulier aux minières.
Nous aborderons tous ces sujets au cours de notre Jour de l’Or. Nous fermons les inscriptions dans deux jours… n’attendez donc plus pour réserver votre place ici.
- Restez cash. Cela vous permettra de vous placer de nouveau dès que les signaux passeront dans le vert – nous vous tiendrons bien évidemment au courant !
D’ici là, courage, c’est une mauvaise passe !