La police étant d’une redoutable efficacité, comme on le voit ces jours-ci avec la guignolade du vol Djihad Air Istanbul-Marseille, le gouvernement a décidé de lui assigner une nouvelle et noble tâche : traquer les assassins en puissance qui fument en voiture en la présence d’enfants de moins de 12 ans. Ni l’aggravation continue de la délinquance, ni la mobilisation contre la menace terroriste intérieure ne seront suffisantes pour détourner les forces de l’ordre de cette nouvelle mission. On imagine assez bien la scène où quelques valeureux pandores sifflent un véhicule et son conducteur, cigarette au bec, pour vérifier l’âge des passagers sanglés à l’arrière. On voit comme si on y était le père ou la mère exhibant successivement permis de conduire, carte grise, attestation d’assurance et livret de famille pour tenter de justifier ses audaces tabagiques. Et l’on devine, à côté de la multiplication des radars, se déployer des brigades anti-clopes, sortes de BAC d’un nouveau genre.


Mais où s’arrêtera l’Etat ? 

Où fixera-t-on les limites de la liberté individuelle face à la déresponsabilisation permanente de chacun ? 

Quand la bien-pensance, mère de toutes les atteintes à la différence, sera-t-elle traquée et enfin remplacée par une société de confiance ? Que la cigarette soit un danger mortel, nul n’en disconvient plus. Qu’il faille davantage en faire prendre conscience et en restreindre la consommation en augmentant les prix ou en limitant son usage dans les lieux publics, nul ne le conteste plus. Mais entrer dans un lieu privé, la voiture, pour y mettre des détecteurs de fumée est un nouvel accroc à la liberté. Petit à petit, les espaces de libre arbitre se réduisent, grignotés par la société d’assistance. Pourtant, plus le collectif s’immisce dans nos vies, plus l’individualisme et le repli sur soi se renforcent. 

Terrible équation.