La France se traîne. L'an dernier, sa production n'a progressé que de 1,5 %, selon le chiffre publié hier par l'Insee. Les révisions inévitables de cette première estimation ne devraient pas changer en profondeur l'image de l'année 2010, qui peut se résumer en deux mots : petit rebond. Rebond, parce que l'activité est repartie après une chute de 2,5 % en 2009, la plus mauvaise année depuis 1944. Petit, parce que la croissance a été faible. Après la récession de 1993, la croissance avait atteint 2,2 % en 1994. Après celle de 1975, l'activité avait gagné plus de 4 %. Et, en 1945, elle avait grimpé de plus de 8 %. Aujourd'hui, la machine paraît bridée. Elle ne parvient pas à accélérer au-delà de 0,5 % par trimestre, son rythme de progression depuis la fin 2009. En ce début 2011, l'investissement des entreprises et la reconstitution de leurs stocks pourraient stimuler l'activité, un effet positif compensé par l'affaiblissement prévisible de la consommation.
Au fond, cette langueur ne devrait pas nous surprendre. Car l'économie française ne cesse de ralentir. Dans la décennie 1960, son rythme de croissance approchait 6 % l'an. Il est passé à 2,5 % dans les années 1980, 2 % dans les années 1990 et à peine... 1,2 % dans la décennie 2000. Une moyenne qui englobe certes la grande récession, mais aussi les années qui l'ont précédée, où un endettement galopant à plus de 10 % l'an avait dopé l'activité et nourri la crise. Une moyenne qui s'explique surtout par des gains de productivité de plus en plus faibles, alors qu'ils constituent le seul ressort de la croissance durable.
Nos gouvernants n'ont pas pris la mesure du problème. Dans leurs lois de Finances, ils prévoient systématiquement une croissance entre 2 % et 2,5 % (sauf pour les années 2009 et 2010, marquées par la crise). Sur la décennie 2000, ils l'ont surestimée de pratiquement 1 % par an. Et ça continue. Le programme triennal transmis à Bruxelles prévoit 2 % en 2011... et 2,5 % en 2012 et 2013. Nous sommes dans le rêve. Il est temps de revenir à la réalité. La croissance sera moins forte dans les années à venir et ses recettes ne suffiront pas à résorber le déficit. Les Britanniques ont adapté brutalement leur budget à la croissance lente cette année, les Espagnols l'an dernier. Les Allemands l'ont fait au cours de la décennie écoulée. L'Italie s'en sort au ralenti. Pas la France. Cette adaptation devrait constituer la toile de fond de la campagne présidentielle. Si la croissance accélère, si un président parvient à la chercher avec les dents, ça ne sera que du bonheur en plus.
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