La mondialisation a deux visages. Celui cruel des délocalisations, des usines françaises qui ferment et du made in China dont rien ne semble pouvoir freiner l'inexorable essor. Mais il y a aussi, il ne faut pas l'oublier, le visage de la reprise de nos exportations de vins et de spiritueux, des performances historiques d'un Airbus tiré par l'explosion du nombre de voyageurs en Asie et enfin de la progression continue des ventes du luxe tricolore. Au-delà même des produits à forte valeur ajoutée et du luxe, qui est un peu notre high-tech à nous, la présence française à l'international est aussi le fait d'entreprises comme Danone ou L'Oréal : des spécialistes des biens de consommation qui réalisent déjà ou réaliseront à terme plus de 50 % de leur chiffre d'affaires dans des pays dits émergents qui ont de fait déjà largement émergé. Ne boudons pas notre plaisir face aux succès réels de ces groupes qui séduisent directement le consommateur chinois, russe, brésilien ou africain et qui ont su prendre place sur des segments de marché certes parfois jugés non stratégiques par les planificateurs chinois, mais qui n'en restent pas moins hautement concurrentiels.
A l'heure des tensions politiques au Maghreb, des inquiétudes sur l'inflation en Chine ou du déclin démographique en Russie, certains mettent en garde contre le rêve d'un eldorado sur ces nouveaux marchés. La réalité démographique est cependant sans appel. Comme l'explique Virginie Raisson dans son « Atlas des futurs du monde » (1), l'Occident va vivre au rythme du « baby krach » et du papy-boom. Nos populations vont vieillir alors que la vitalité démographique va continuer de tirer le reste de la planète. En 1950, l'Europe et les Etats-Unis représentaient près d'un quart de la population mondiale et pratiquement l'essentiel de la richesse terrestre. D'ici à 2050, l'Occident ne pèsera plus que 10 % de la population mondiale et les premières puissances économiques seront chinoise et indienne. Nul ne prétendra qu'ils auront réglé tous leurs problèmes de pauvreté, d'inégalité des revenus ou de tensions politiques, mais le vent de la démographie et de la croissance les pousse. Et si, derrière chaque Chinois, il y a bien sûr souvent un ouvrier, il ne faut pas oublier qu'il y a aussi un consommateur.
(1) Virginie Raisson, « Atlas des futurs du monde », Robert Laffont.
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