TOUT EST DIT

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mercredi 16 février 2011

Voyage en Tunisie : la défense de Michèle Alliot-Marie s'effondre

Les nouvelles révélations du Canard enchaîné mettent encore plus à mal la défense, déjà fragile, adoptée par Michèle Alliot-Marie. Le journal satirique affirme que les parents de MAM ont profité du séjour tunisien de la famille pour acheter à Aziz Miled, propriétaire de l'avion mis à disposition de la ministre des affaires étrangères, des parts dans une société civile immobilière (SCI).

La "rencontre fortuite" n'en était pas une. La ministre avait dû justifier le premier scandale de son trajet en Tunisie, au moment des émeutes, à bord d'un avion appartenant à un homme d'affaires associé au clan Ben Ali-Trabelsi. Pour ce faire, elle avait invoqué un "hasard", expliquant qu'elle était tombée, à son arrivée à l'aéroport de Tunis, sur un "ami" qui se rendait justement à Tabarka, sa destination.

Une explication déjà passablement ébranlée par le fait que, comme l'a révélé le NouvelObs.com, Mme Alliot-Marie avait effectué, une semaine plus tard, un second vol à bord du même appareil, qui appartenait à la fois à Aziz Miled, l'ami de la famille Alliot-Marie, et à Belhassen Trabelsi, gendre du président Ben Ali.
Le même avion, un Challenger 604 immatriculé TS-IBT, a d'ailleurs permis à ce membre du clan de quitter la Tunisie à la chute du régime, révèle Mediapart.  Mme Alliot-Marie avait dû s'expliquer une deuxième fois sur cet autre trajet, qui invalidait déjà sa version d'une rencontre fortuite à l'aéroport de Tunis. La ministre avait jugé qu'il n'y avait "rien de nouveau", tout en promettant de ne plus profiter, à l'avenir, d'avions privés.

Les informations publiées mercredi 16 février par Le Canard enchaîné achèvent de démontrer que l'histoire d'une rencontre "spontanée" avec le riche homme d'affaires est fausse : les parents de la ministre ont conclu, avec Aziz Miled et son fils, une transaction financière, le 30 décembre, pour acheter des parts d'une société civile immobilière (SCI), pour un montant minimum de 325 000 euros. Un acte juridique complexe, qui ne se fait pas au hasard d'un voyage.
Le père de Mme Alliot-Marie contredit la ministre. De fait, le père de MAM a donné une autre version, mercredi 15 février sur Europe 1, contredisant totalement sa fille. Selon lui, la famille, qui devait rester en Dordogne pour les fêtes, a choisi au dernier moment de partir dans ce pays, car ils avaient besoin de "soleil".
Bernard Marie, 94 ans, se serait alors "tourné vers un ami qui s'appelle Monsieur Miled, que je connais depuis très longtemps et chez qui nous étions déjà allés. Il était d'ailleurs aussi venu chez moi, par le même jet". Il a raconté lui avoir téléphoné : "Je voudrais aller à Djerba. Est-ce que vous pouvez me trouver quelque chose là-bas ? Il m'a dit : 'Mais pourquoi Djerba ? Il fait aussi chaud à Hammamet ou Tabarka, où j'ai un hôtel.'" C'en est fini de la "rencontre spontanée" avec Aziz Miled et des explications de la ministre.
"C'est à ma demande que Monsieur Miled a organisé notre séjour ensemble dans un hôtel" qui lui appartenait, a encore expliqué Bernard Marie. La version de M. Marie pose une autre question : si ce voyage était un "coup de tête" de dernière minute, comment a-t-il pu prévoir la conclusion d'une vente immobilière d'un montant aussi important ? Mediapart affirme d'ailleurs que la venue de la ministre a donné lieu à un "branle-bas de combat" chez les autorités locales, qui ont organisé une petite réception à l'aéroport.
Qui a réglé la note de l'hôtel ? Le couple Alliot-Marie-Ollier affirmait jusqu'ici que les parents de la ministre avaient réglé la note du séjour dans le luxueux établissement d'Aziz Miled à Tabarka... mais se révélait incapable de fournir la moindre preuve de ce paiement. Pour cause : selon des sources locales, le séjour leur a été offert par M. Miled. "Avec Aziz, personne ne paie. Il n'y a jamais eu de facture", explique à Mediapart un proche anonyme de l'homme d'affaires.
Une transaction conclue durant les émeutes. Michèle Alliot-Marie avait également fourni des explications passablement embrouillées sur le contexte en Tunisie durant son séjour, expliquant qu'il n'y avait, à ce moment-là, "aucune répression" dans le pays, tout au plus "quelques événements qui n'avaient rien à voir avec ce qu'on a connu ensuite".
Elle avait été jusqu'à avancer que la tentative de suicide par le feu de Mohammed Bouazizi, déclencheur des mouvements populaires, s'était produite "à la fin" de son séjour. Ce qui est totalement faux, Mohammed Bouazizi ayant commis son geste dramatique le 17 décembre, soit une semaine avant l'arrivée de la ministre, de son compagnon, Patrick Ollier, et de ses parents. Le ministre des relations avec le parlement avait d'ailleurs reconnu cette erreur de date.
Le 30 décembre, date de la signature de la vente par ces derniers, les émeutes avaient atteint une telle ampleur que Ben Ali avait été forcé d'intervenir à la télévision, comme le montre ce reportage de la chaîne BFM TV, daté du même jour.



Sauf à faire preuve d'une légèreté à la limite de la faute professionnelle, Mme Alliot-Marie ne pouvait donc ignorer la situation dans le pays au moment où ses parents concluaient l'achat de ces parts de SCI.
Une ministre "en vacances" qui téléphone à Ben Ali. Autre contre-vérité : Mme Alliot-Marie avait commencé par affirmer qu'elle était en Tunisie "en vacances, comme des millions de Français", et que durant ses vacances, elle n'était "plus ministre". Devant les railleries provoquées par cette déclaration, elle était revenue sur ces propos, affirmant qu'elle "restait ministre 24 heures sur 24". Mais elle avait continué d'assurer qu'elle n'avait eu "aucun contact privilégié" avec le régime tunisien.
Ce qui est faux. Mediapart annonce que la ministre a bien eu un entretien téléphonique avec le président Ben Ali au cours de son voyage, ce que confirme le Quai d'Orsay. L'information jette le trouble sur une autre déclaration de Mme Alliot-Marie, qui avait proposé en janvier, à l'Assemblée nationale, d'offrir à la Tunisie le "savoir-faire français en matière de maintien de l'ordre".
Aziz Miled, une "victime" qui n'en est pas une. Le reste des explications de MAM était déjà peu crédible. Contrairement à ce qu'a continué d'affirmer la ministre, Aziz Miled, le vendeur des parts et le propriétaire de l'avion qu'a emprunté la ministre, n'était pas une "victime" du régime Ben Ali. Sans en être un thuriféraire, il avait su préserver ses intérêts en lui donnant régulièrement des gages de fidélité, allant jusqu'à financer une campagne électorale du président déchu.
Lire : Aziz Miled, victime ou complice du régime ?

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