TOUT EST DIT

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mardi 30 novembre 2010

Zone euro :
le dernier coup de poker


Un accord européen a été conclu dimanche, qui va accorder 85 milliards d’euros à l’Irlande, qui institue un mécanisme permanent de sauvetage après 2013, et décide que les créanciers privés pourront être mis à contribution... Avec l’objectif d’éviter que la contagion ne s’étende partout.


Ce matin, pour être honnête, on ne sait pas si la zone euro, qui marche depuis des semaines au bord du précipice, a fait un pas pour s’en éloigner ou va finir tomber au fond. Les raisons de pessimisme ne se sont pas envolées d’un coup !


Une formule du patron d’une grande institution internationale résume bien (« off ») les choses : « Quand l’euro a été créé, tout le monde pensait que la zone euro deviendrait une grande Allemagne. On découvre que c’est peut-être une grande Grèce ». C’est exagéré mais il est pathétique à voir que les pompiers sont obligés d’aller de pays en pays. 85 milliards pour l’Irlande, c’est presque autant pour la Grèce, pays trois fois plus gros. Il est tout aussi invraisemblable de voir que, sur les marchés, la Grèce est jugée plus risquée que la Jamaïque, l’Espagne que le Liban, la Belgique que le Panama ... Le plan d’urgence de dimanche est le fruit d’une grande peur et il faudra peut-être aider le Portugal pour protéger l’Espagne.


Y-a-t-il des points positifs dans tout cela ? Il y a un point clair : la volonté d’unité affichée après les cafouillages de ces dernières semaines – unité construite sur le tandem franco-allemand, avec Angela Merkel et Nicolas Sarkozy à la manœuvre et José Manuel Barroso au milieu. La réalité est qu’en quelques mois, l’Europe a changé de nature, et un nombre important de tabous ont sauté.


Il faut se rappeler que l’idée d’aider un Etat en difficulté était interdite (le « no bail out »), elle ne l’est plus : c’est, premier tabou, la solidarité financière. Le deuxième tabou qui saute, c’est la création d’un mécanisme de sauvetage permanent et non plus temporaire. Le troisième tabou, c’est le fait que soit envisagée une restructuration des dettes, avec des créanciers privés qui ne seraient plus remboursés (ce que voulaient les Allemands) mais pas automatiquement, au cas par cas (ce que voulaient les Français). Cela veut dire au passage et implicitement qu’on se rend compte que les plans de rigueur ne marcheront peut-être pas mais aussi que l’Europe est prête à mettre en place un dispositif qui a des airs de famille avec le Club de Paris ...


Les dirigeants européens ont intégré le fait que le coût politique, économique, historique d’un échec serait tel qu’il n’est pas envisageable. DImanche, l’Europe a mis en place un mécanisme de résolution des crises comme, dans un règlement de copropriété, on prévoit des procédures pour résoudre les différents dans un immeuble. Evidemment, il aurait fallu y penser depuis dix ans quand sous les yeux de tous, la Grèce, l’Irlande, le Portugal, l’Espagne ont construit leur forte croissance en partie sur du sable, des illusions et des bulles – immobilière et bancaire.


Cette journée de lundi sera tendue sur les marchés financiers. Dans les jours qui viennent, un immense coup de poker va être joué. Mais, en fait, c’est bien cette question qui est posée à moyen terme : inventer un modèle européen de croissance. Sans cela, soyons directs : c’est le précipice assuré.

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