mercredi 2 février 2011
14 juillet -14 janvier
L'effet sismique de la révolution tunisienne invite à revenir sur son instant initial. La symbolique des dates parle. Le 14 janvier 2011, la dictature s'est effondrée dans l'instant où le satrape mafieux s'est enfui, tandis que, le 14 juillet 1789, la monarchie a vacillé lorsque la prise de la Bastille a montré la fragilité de l'absolutisme. Chacune de ces deux dates aura soulevé les mêmes espoirs. Des peuples épuisés d'injustices, révoltés de l'arrogance des puissants, se sont jetés avec un admirable courage à la conquête des libertés démocratiques. Partout en Europe hier, à Tunis, au Caire et peut-être ailleurs aujourd'hui, les jeunes, les miséreux et les élites culturelles auront pensé au moins l'espace d'un jour qu'un soleil de liberté s'est soudain levé dans leur ciel.
Mais il leur faut voir aussi les nuages qui menacent. Sans forcer la comparaison entre deux époques, il est aisé de distinguer les mêmes nuages pour les mêmes causes de météorologie politique. D'abord, les causes internes. Dès que la parole se libère, les opinions et les forces qu'elles représentent se mettent à diverger. Nous eûmes nos girondins, nos montagnards et toutes les factions intermédiaires ; les Tunisiens et les Egyptiens vont voir surgir toute la gamme des options politiques doublées de variantes religieuses. Risque de tensions garanti. Et comment faudra-t-il représenter ces courants : par la représentation proportionnelle, au risque d'un Parlement ingouvernable, ou par un scrutin majoritaire, au risque de brimer des minorités au moment même où elles accèdent à la parole ? Ce sera l'un des choix les plus difficiles pour la définition des nouvelles institutions.
Les nuages viennent aussi de l'extérieur : les régimes en place, monarchiques ou militaires, ont intérêt à ce que le nouveau cours démocratique échoue. Il a déjà ébranlé le pouvoir égyptien. Un succès durable pourrait étendre la contagion bien au-delà. Après 1789 aussi, les voisins autocratiques de la jeune Révolution française s'étaient ligués contre elle. Souhaitons à la jeune révolution arabe de connaître bientôt son Valmy.
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