TOUT EST DIT

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jeudi 10 février 2011

Moubarak n’est pas Gorbatchev

L’administration Obama a fait une erreur – une de plus me direz-vous. En poussant à la démission précoce et immédiate du Président Moubarak, la Maison Blanche a porté atteinte à son propre intérêt dans le monde musulman, car il est peu probable que le dirigeant égyptien quittera le pouvoir avant septembre. Tout le monde pouvait s’en douter. L’Égypte n’est pas la Tunisie. Dieu merci ! En fait, l’erreur d’Obama, celle d’avoir voulu jeter Moubarak quand il aurait dû le soutenir, pourrait même s’avérer catastrophique pour l’Oncle Sam.
 Si Moubarak parvient à mobiliser une partie importante de la société en sa faveur et à maintenir la loyauté des services militaires et de sécurité, il sera en mesure de stabiliser la situation dans le pays jusqu’en septembre. Il mènera alors les réformes promises et mettra en place un nouveau gouvernement adapté aux nouvelles réalités politiques de l’Égypte.
Aussi bien dans les yeux de l’élite politique égyptienne et que dans ceux du peuple, sans même parler de l’intégralité du monde arabo-musulman-, cela signifierait surtout une sévère défaite de l’administration Obama et de sa politique étrangère.
Cela est particulièrement vrai dans des pays comme la Jordanie et l’Arabie saoudite, où les dirigeants sont restés de fidèles alliés des États-Unis pendant des décennies. Les parties prenantes dans ces pays perdront confiance dans l’administration Obama et, très probablement, arrêteront de croire que Washington est un partenaire fiable, sur qui l’on peut compter lors d’une crise interne.
Curieusement (et d’un point de vue russe), l’appel de l’Amérique aux autorités égyptiennes de s’abstenir à l’usage de la force contre les manifestants, peut aussi se révéler être une catastrophe pour le pays. Lorsque les autorités n’osent pas employer la force, les mouvements d’opposition n’acceptent presque jamais le moindre compromis. Comme le montre l’expérience de la Russie tsariste, le non-usage de la force par les autorités et l’abdication du tsar Nicolas II, ont accéléré l’effondrement de l’État.
La décision de Gorbatchev de ne pas utiliser la force lorsque l’opposition exigeait des réformes radicales, a entraîné la désintégration de l’Union soviétique.
Actuellement, il n’existe pas de force politique importante et réellement organisée en Égypte en dehors de la force politique au pouvoir. Il y a très peu de communication directe avec la société civile. Dans de telles circonstances, des élections anticipées, libres, démocratiques et compétitives signifierait le transfert du pouvoir aux Frères Musulmans. Nous avons déjà vu cela avant, avec les élections au sein de l’Autorité Palestinienne et celles au Liban, où les démocrates libéraux ne sont pas dans la majorité, et où des partis et mouvement terroristes tels que le Hamas et le Hezbollah  sont plus proches des espoirs et des aspirations de l’homme dans la rue.
Par conséquent, dans les circonstances actuelles, il y a trois scénarios possibles. Le premier est le suivant : en dépit des demandes officielles de Washington, Moubarak restera en place et en septembre, proposera des élections libres et propres.
Le deuxième résultat potentiel : si la crise continue de la sorte, une dictature militaire suivra avec des conséquences floues. Selon les experts, l’armée égyptienne n’a pas l’expérience politique nécessaire pour cela.
Et enfin : Moubarak va démissionner dans un proche avenir sous la pression exercée par les manifestants et par Washington. L’Égypte sera alors balayée par le chaos. Après les élections, la faiblesse des institutions sera mise en valeur avec la prise de pouvoir des radicaux religieux.
Après un Bush fort et ne tremblant devant rien, l’Amérique propose un Obama faible et sans stratégie géopolitique fiable. Tout le travail de la diplomatie américaine est aujourd’hui effacé et personne ne peut plus faire confiance à Washington. Combien de temps faudra-t-il aux Républicains pour regagner la confiance des régimes amis ? Personne ne le sait. Est-ce au moins possible ?

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