TOUT EST DIT

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mardi 25 janvier 2011

Sobriété et réalisme

Faut-il l'attribuer aux sondages ? À une pré-stratégie de campagne ? À un mûrissement personnel ? Ou à l'objective complexité du monde multipolaire ? Qu'importe, toutes ces raisons peuvent être bonnes, mais une chose est sûre : c'est un nouveau style que Nicolas Sarkozy a étrenné, hier, lors de la troisième conférence de presse de son quinquennat.

Pas de volontarisme. Pas d'envolée lyrique sur la refondation du monde, de sa finance, de son ordre. Pas de détails people. Pas d'accrochage avec les plumes les plus acides de la presse française. Pas de phrase choc ni de réflexe d'autodéfense. Tous les sujets ont été abordés avec une sobriété inhabituelle. Adaptée à la gravité des sujets.

À commencer par l'économie mondiale. Si, au coeur de la crise, il y a deux ans, Nicolas Sarkozy rêvait de piloter la refondation d'un système monétaire international, il a passablement réduit la voilure. L'ordre du jour est présenté comme une conquête. Surtout, le lexique retenu traduit une volonté d'avancer à pas mesurés. La présidence française du G 20, dont le point d'orgue sera le sommet de Cannes, en novembre, sera ainsi « collective ».

Paris mesure les exigences de Washington et de Pékin, et dit vouloir « faire converger les intérêts ». Nicolas Sarkozy affirme, certes, qu'il va se battre pour la naissance d'une taxe sur les transactions financières, pour une régulation du marché des matières premières, pour la naissance d'un organisme de contrôle des déséquilibres, mais l'époque des annonces grandiloquentes, se chassant l'une après l'autre, semble révolue.

Ce réalisme nouveau valait aussi, hier, pour les sujets les plus brûlants de l'actualité internationale. La Tunisie, notamment. Le Président a fait son mea culpa, affirmant à plusieurs reprises que la France avait sous-estimé les aspirations des Tunisiens. Surtout, il a revendiqué « une certaine réserve » en convoquant la part coloniale de notre histoire. « La puissance coloniale est toujours illégitime à prononcer un jugement sur les affaires internes d'une ex-colonie. » Le propos est risqué, compte tenu des dimensions que furent celles de l'empire colonial français. Il n'en a pas moins le mérite de poser, au plus haut niveau, un thème trop peu débattu et trop souvent refoulé.

Concernant les otages, Nicolas Sarkozy a prôné la fermeté et le courage face au terrorisme. Pesant ses mots. Laissant comprendre le poids de la décision de faire intervenir, sans succès, les forces françaises lors de l'enlèvement des deux jeunes au Niger. Le ton, volontairement grave, était d'autant plus approprié que, moins de deux heures plus tard, l'attentat de Moscou confirmait, dramatiquement, l'actualité de la menace terroriste.

Réserve, prudence, réalisme. Tout cela sied à une posture de Président, et donc de candidat à sa propre succession. Mais les calculs électoraux importent moins que la force des enjeux. Or, la révolution tunisienne, ses répercussions dans le monde arabe, l'appel d'air qu'elle peut éventuellement susciter pour les terroristes, les envolées des cours des matières premières et les émeutes potentielles dont elles sont porteuses, tous ces sujets exigent doigté et réalisme.

En Algérie, au Maroc, au Sahel, en Côte d'Ivoire, au Liban, partout où la diplomatie française est sollicitée par un regain de crise, la nouvelle doctrine du Président va être mise à l'épreuve. Dans un monde indifférent aux postures électorales françaises.

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