TOUT EST DIT

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vendredi 4 février 2011

La vraie bataille des ports

il ne faut pas se tromper de combat : la rude bataille, qui dure, entre les grévistes CGT des ports et le gouvernement autour du droit à la retraite anticipée, n'est pas celle du syndicalisme et du politique. Elle n'est pas même celle de la CGT et du capitalisme. Bien sûr, dans le feu de ces vieilles passions françaises que réveillent des exactions sociales d'un autre temps, forte est la tentation de l'amalgame. Ce ne sont pas les circonstances qui manquent de blâmer la confédération CGT pour son défaut de responsabilité. Pas plus tard qu'à l'automne dernier, elle et ses partenaires ont eu le tort de n'avoir ni su ni voulu organiser en bon ordre la retraite de la rue, une fois perdue la bataille des retraites. Et les blocages illégaux des dépôts de carburant, consentis faute de mot venu de Bernard Thibault, devaient être réprouvés. Mais, si condamnable soit-elle, cette obstination n'était jamais qu'une dérive de l'action syndicale.

Or, quoi que l'on pense de la CGT, le mouvement qui paralyse, depuis plus de quinze jours et pour quelque temps encore les ports français, n'a que peu à voir avec ces méthodes. Etat dans l'Etat cégétiste, la fédération des ports et docks n'obéit plus qu'à ses intérêts propres et se soucie comme d'une guigne d'une ligne confédérale qu'elle méprise. De CGT, elle n'a que le nom, pas l'identité, noyée depuis longtemps au fond des eaux troubles du port de Marseille. Ce fossile d'un syndicalisme stalinien n'est plus mû par l'ambition de changer le rapport des forces sociales, ni même par le désir d'améliorer les conditions collectives de travail, mais par la seule préservation des privilèges d'une corporation en voie de disparition. Loin d'appartenir au noble registre des luttes sociales, ce mouvement est une privatisation des ports au profit d'un petit monde de privilégiés dont la Cour des comptes vient de mettre utilement en lumière le temps de travail ridiculement faible, les rémunérations anormalement élevées, et les pratiques « illégales ».

Refuser de leur accorder une préretraite à 56 ans financée sur fonds publics, qui n'a d'ailleurs jamais fait l'objet de la moindre promesse formelle, ce n'est donc pas seulement faire oeuvre de cohérence avec une réforme générale des retraites repoussant progressivement de deux ans l'âge de départ. C'est avant tout rappeler à un minimum de morale publique une profession qui n'a que trop longtemps abusé de la passivité de l'Etat. Cela la préparera utilement à passer, dans quelques semaines, sous pavillon privé.

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