TOUT EST DIT

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lundi 31 janvier 2011

Le piège du Nil

L’Égypte est devenu un piège pour l’Amérique. Si Washington abandonne Moubarak du jour au lendemain, ce sera un saut dans l’inconnu. Mais plus il tardera à le lâcher et plus ses chances de rester l’allié tutélaire de la plus peuplé des nations arabes seront hypothéquées.

Depuis samedi, Barack Obama et Hillary Clinton tentent bien de promouvoir une option médiane en incitant le raïs à faire des efforts démocratiques mais cette stratégie a rapidement atteint ses limites. Si les choses tournent mal pour le pouvoir, les États-Unis, malgré toutes leurs admonestations, seront jugées complices du régime honni. L’avertissement de Mohammed ElBaradei -soutenu par les très opportunistes Frères musulmans- qui a critiqué la tiédeur de la réaction de la Maison Blanche, résume à lui seul toute la pression qui pèse sur les épaules du président américain.

En évoquant, pour la première fois, «une transition en bon ordre», le département d’État a franchi une frontière qu’il ne voulait pas atteindre si tôt. Mais avait-il le choix d’attendre quand, au Caire, les manifestants montrent clairement que les «aménagements» décidés par le président égyptien pour remanier son équipe n’ont convaincu personne? Barack Obama a jugé que non. Le président américain va délibérément conserver deux fers au feu le plus longtemps possible tout en souhaitant qu’un vent de liberté se renforce sur le pays.

En réclamant une «transition», la chef de la diplomatie américaine donne le sentiment d’ouvrir délibérément et officiellement la succession de M.Moubarak. Elle n’aurait pu mieux lui indiquer la sortie au profit d’un successeur qu’elle voudrait aussi modéré que rassurant et, au fond, dans la lignée de l’actuel président. Les casseroles en moins.

En face, Hosni Moubarak fait la sourde oreille. Son refus de se plier aux injonctions de l’Amérique mais aussi d’écouter celles du trio européen montre qu’il est prêt à prendre beaucoup de risques pour se maintenir au pouvoir. Un scénario catastrophe pour l’avenir politique du pays, pour sa stabilité politique et pour la paix avec Israël. Rien ne dit qu’il pourra être évité: ce ne serait pas la première fois qu’un ancien militaire s’accrochant à son pouvoir jetterait son pays dans la guerre civile ou l’obscurantisme religieux faute d’avoir réagi à temps. En maniant volontiers l’intimidation la plus grossière, le clan Moubarak montre qu’il ne reculera devant rien... Mauvais signe.

Le président Obama, lui, joue gros dans ce dossier dont dépend aussi l’avenir du Proche-Orient. Le voilà condamné à être extrêmement prudent... et à se préparer à réagir au quart de tour. Le moindre retard à l’allumage serait pris, en effet, comme un mépris pour l’auguste révolution du papyrus. La crédibilité des États-Unis en serait abîmée pour longtemps.


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