TOUT EST DIT

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jeudi 21 octobre 2010

Colère de réforme


Le climat social est à l'orage. Pour mieux en comprendre les ressorts, on peut s'inspirer du regard des artistes, et par exemple aller faire un tour à Beaubourg, au Centre Pompidou, à Paris. L'exposition « Arman » actuellement en cours présente, entre autres oeuvres, des colères et des coupes de l'artiste niçois. Afin de réaliser ses « colères » et révéler des identités subtiles d'objets, le peintre-sculpteur-plasticien les brise sur un support avant d'y fixer les débris à l'aide de vis.
Devant les objets déstructurés ou fracassés, le spectateur imagine remplacer les matériaux exposés par un objet immatériel : à quoi aurait abouti Arman s'il avait réalisé une colère de réforme ? Nul doute que l'un des débris aurait été constitué de cortèges urbains. Mais l'artiste aurait peut-être introduit aussi des éléments moins directement liés à la conjoncture immédiate de la réforme des retraites, des éléments dits de contexte. Il s'agirait alors de débris structurels d'une colère de réforme. Parmi ceux-ci, quelques chiffres de l'Insee occuperaient une place prééminente, comme le fait que 13,4 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (moins de 950 euros par mois) ou qu'un Français sur deux dispose d'un revenu mensuel inférieur à 1.580 euros. Parmi les autres débris structurels se trouveraient encore des chiffres, tels les 77,6 % de dette publique, les 7,9 % de déficit, ou encore les 2,8 % d'augmentation, en 2009, des violences faites aux personnes.
La sculpture ne pourrait se contenter de débris statistiques. Il lui faudrait agréger quelques éléments d'un climat. Il est courant de souligner l'inertie de la société française vis-à-vis du changement, même positif. La présente situation va bien au-delà : toute réforme est confrontée à un climat de défiance sans précédent. Ainsi Arman aurait-il sans doute adjoint à sa sculpture un débris de suspicion.
Arman travaillait les objets et non les projets politiques. D'ici à 2012, les réformes qui ne tiendront pas compte de chaque débris de cette sculpture imaginaire ne feront qu'attiser une colère préoccupante.

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