Vu de l'étranger, il suffit parfois d'une photo à la Une d'un quotidien, ou d'une courte séquence dans un journal télévisé, pour diffuser la conviction qu'un pays est littéralement à feu et à sang. Certains y verront une terrible distorsion de la machine médiatique, et c'est souvent le cas. D'autres préféreront relativiser l'impact réel de cette représentation spectaculaire. Peu importe. Depuis quelques jours, l'image de la France qui circule chez nos voisins est celle, somme toute sans surprise réelle, d'un pays qui opte régulièrement pour la grève et la rue pour exprimer son mécontentement.
L'image d'une France « qui brûle », prisonnière d'une spirale de violence, est d'ailleurs aussi bien à la Une des quotidiens liés à la grande finance internationale, comme le Financial Times, que des journaux de gauche plus sensibles aux humeurs de la société comme le belge De Morgen. Signe que notre pays est bien sous observation, et cela à plusieurs niveaux.
Le monde économique est le premier à scruter l'évolution du débat français. Il y a deux siècles, les barricades inquiétaient les Cours européennes. Aujourd'hui, elles peuvent affoler les salles des marchés. Comme les autres pays en délicatesse avec leur déficit budgétaire, la France est attendue au tournant. Entre le nécessaire tour de vis budgétaire et les turbulences d'une nouvelle guerre monétaire qui pénalise la zone euro, la voie est étroite. D'autant plus étroite que les prévisions du Fonds Monétaire International annoncent clairement que la rigueur va peser sur la croissance, au point, peut-être, de nous gratifier d'une deuxième phase de récession, en début d'année prochaine.
Le monde politique européen n'est pas moins attentif à l'évolution de la crise française. À Dublin, Lisbonne ou Athènes, les gouvernants ont été ou sont contraints, compte tenu de l'ampleur des déficits et des pressions internationales, de faire avaler des potions particulièrement amères à leurs concitoyens. Depuis hier, l'austérité parle anglais avec un plan de rigueur sans précédent, de près de cent milliards d'euros, présenté par le gouvernement de David Cameron. Un demi-million de postes vont être supprimés dans la fonction publique. Les Britanniques vont, dans les prochains jours, être beaucoup plus attentifs aux coûts sociaux de ce plan qu'à l'âge de départ à la retraite des Français. Leurs dirigeants ne redoutent pas moins un mouvement social. La gestion française de la crise est, à cet égard, un signal à surveiller.
D'autant que la vraie grande inconnue demeure, comme toujours, l'opinion. Les mouvements de grève et les manifestations en France sont observés à l'étranger tantôt avec stupeur, tantôt avec envie. La stupeur, c'est celle de tous ceux qui doivent déjà partir plus tard, comme en Allemagne, en Espagne ou en Suède. L'envie, c'est celle de nombreux salariés, en Europe du Sud notamment, qui estiment que les mouvements sociaux français ont, par le passé, obtenu des résultats dont leurs propres syndicats ont toujours rêvé.
La presse européenne ne s'y trompe d'ailleurs pas en ne se limitant pas à l'héritage folklorique des protestations à la française. Au-delà des véhicules brûlés et des lycées bloqués, la réforme des retraites ne justifie qu'en partie l'ampleur du malaise. Un malaise nourri par deux ans de crise, elle, sans frontière.
ENFIN UNE FRANCE DE MERDE, QUOI !
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