Le dernier dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev, célébré dans le monde pour avoir mis fin à la guerre froide, fête discrètement, mercredi 2 mars, ses 80 ans en Russie, où il suscite l'indifférence, voire le mépris. M. Gorbatchev, Prix Nobel de la paix en 1990, doit accueillir trois cents amis et proches dans une salle de banquet d'un centre commercial moscovite.
Les télévisions publiques russes ont diffusé des émissions sur la perestroïka et l'évolution de la carrière politique de Mikhaïl Gorbatchev. Les journaux ont publié des interviews, où il critique le régime russe actuel, et des commentaires sur son rôle pour la Russie, sans lui rendre un hommage particulier.
UN "LOURD HÉRITAGE ÉCONOMIQUE"
Le quotidien de référence Kommersant n'accorde aucune couverture à l'événement, alors que le journal économique Vedomosti analyse dans un éditorial les raisons de la chute de l'URSS, que la majorité des Russes attribuent à Gorbatchev. "Ce ne sont pas les réformes de Gorbatchev qui ont provoqué la chute de l'URSS, mais les problèmes économiques", écrit Vedomosti en soulignant que l'ex-dirigeant avait reçu "un lourd héritage économique".
Le quotidien officiel Rossiiskaïa Gazeta donne la parole à l'académicien Rouslan Grinberg, un ancien collaborateur de M. Gorbatchev, pour qui il reste "celui qui a dirigé le pays, entre espoirs et déceptions". A Ekaterinbourg, fief de l'ex-président russe Boris Eltsine, ennemi juré de M. Gorbatchev, l'avenue Lénine a été rebaptisée mercredi en avenue Gorbatchev, et un panneau où il est écrit "Merci Gorbatchev" y a été affiché, a rapporté l'agence Interfax.
Mais le jugement des Russes reste sans appel : près de la moitié d'entre eux éprouvent de l'indifférence envers Gorbatchev, 20 % éprouvent du "mépris" et seulement 10 % du "respect" pour l'ancien dirigeant. M. Gorbatchev ne désespère pas pour autant. "La lutte n'est pas finie. De plus en plus de Russes comprennent que Gorbatchev avait raison", estime-t-il dans un entretien à Komsomolskaïa Pravda publié mercredi.
"LES RACINES POURRIES" DU POUVOIR RUSSE
Il se souvient, dans cette interview, de son enfance dans "un bled perdu" dans le sud de la Russie "où il n'y avait ni radio ni électricité", où il a travaillé pendant cinq ans sur une moissonneuse-batteuse avec son père tout en rêvant de voyages. Il confie aussi que le moment le plus heureux de sa vie a été sa rencontre avec Raïssa, qu'il épousera à 22 ans et avec qui il vivra 46 ans. "J'ai pris 20 kilos après sa mort. La vie m'est devenue indifférente", témoigne-t-il.
Dans une autre interview au journal Argoumenty i Fakty, M. Gorbatchev critique un pouvoir russe dont "les racines sont pourries" et met en garde contre la répétition des scénarios des révolutions qui secouent les pays arabes. "Il ne faut pas agacer les gens et continuer de les priver" de liberté, prévient-il.
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