TOUT EST DIT

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mercredi 2 mars 2011

Quotas de femmes dans les conseils : pourquoi pas ?

Il est temps de briser, une fois pour toutes, le « plafond de verre ». Permettre aux femmes de donner toute la mesure de leur talent n'est pas seulement une question d'égalité. C'est aussi une nécessité économique. Les faits apportent, hélas, un cruel démenti : au sein des conseils d'administration des entreprises de l'Union européenne, seul un membre sur dix est une femme, et seuls 3 % des PDG sont des femmes. En Europe, les progrès ont été jusqu'alors extrêmement lents : la part des femmes siégeant aux conseils d'administration d'entreprises de l'Union n'a augmenté que d'un demi-point de pourcentage par an au cours de ces sept dernières années. A ce rythme, il faudrait encore attendre cinquante ans avant d'atteindre la parité hommes-femmes dans les conseils d'administration !

L'égalité entre les femmes et les hommes constitue l'un des principes fondateurs de l'Europe. Dès 1957, en effet, le principe de l'égalité des rémunérations pour un même travail a été intégré au traité de Rome. Plusieurs pays européens ont déjà ouvert la voie : la Norvège a été la première, en 2003, à instaurer un quota de 40 % de femmes dans les conseils d'administration, suivie de l'Espagne en 2007 et de l'Islande, qui a adopté des quotas femmes-hommes l'année dernière. Au mois de janvier, la France, berceau de l'égalité, a adopté une loi prévoyant que, d'ici à 2017, les femmes représenteraient 40 % des membres des conseils d'administration des plus grandes entreprises cotées en Bourse. Outre-Rhin, la classe politique allemande débat actuellement de l'opportunité d'imposer un tel changement. L'Autriche envisage également de prendre des mesures.

Les quotas sont certes discutables. Ils reviennent en effet à user de la manière forte pour briser le « plafond de verre », mais les résultats sont là : en Norvège, la part des femmes siégeant aux conseils de surveillance est passée de 25 % en 2004 à 42 % en 2009 ; en Espagne, la participation des femmes aux conseils d'administration est passée de 4 % en 2006 à 10 % en 2010. S'ils peuvent nous permettre de faire bouger les choses, les quotas doivent absolument rester une mesure transitoire, à n'appliquer qu'en dernier ressort.

Nous allons procéder en deux étapes : dans un premier temps, il appartiendra aux entreprises elles-mêmes de proposer des solutions. Au cours des prochains mois, la Commission européenne et plusieurs gouvernements nationaux rencontreront des PDG des plus grandes entreprises européennes cotées en Bourse afin d'entendre leurs propositions. L'autorégulation peut effectivement permettre de renforcer la présence des femmes au plus haut niveau de décision, mais elle doit être suivie de très près. En l'absence de progrès convaincants, la seconde étape serait claire : l'Europe devrait alors imposer des quotas juridiquement contraignants. La balle est à présent dans le camp des entreprises.

Le besoin de renforcer la présence des femmes dans les conseils d'administration des entreprises n'a jamais été aussi criant. Il ressort d'une analyse de McKinsey que le résultat d'exploitation des entreprises qui comptent le plus de femmes au sein de leur conseil d'administration dépasse de 56 % celui des entreprises qui ne comptent que des hommes à ce haut niveau de direction. Les conseils d'administration dans lesquels les femmes sont plus nombreuses sont plus performants en matière d'audit et de surveillance et de contrôle des risques que les conseils d'administration composés exclusivement d'hommes. Or, les femmes prennent 80 % des décisions d'achat des ménages - et nous ne parlons pas uniquement de pain ou de lessive. Demandez donc autour de vous qui a choisi le dernier ordinateur !

Nous souhaiterions que l'Europe donne un coup d'accélérateur pour ce qui concerne la représentation des femmes dans les conseils d'administration. Fixons-nous des objectifs ambitieux ! D'ici à 2015, les conseils d'administration devraient compter au moins 30 % de femmes et, d'ici à 2020, 40 %. Il serait bien sûr préférable que les entreprises y parviennent d'elles-mêmes. Mais si tel n'est pas le cas, nous sommes prêts, au besoin, à adopter des règles contraignantes à partir de 2012.

Il est grand temps d'agir à présent. Alors que nous sommes exposés à un risque de ralentissement de la croissance économique et de l'emploi suite à la crise de la dette souveraine, nous ne pouvons nous permettre de négliger le potentiel que représente une moitié de la population. Certaines entreprises ont déjà compris que la parité est bonne pour les affaires ; d'autres, en revanche, sont plus lentes à réagir. Le vent du changement souffle fort et les décideurs d'entreprise doivent choisir : soit faire en sorte que le « plafond de verre » se brise de lui-même, soit attendre qu'une intervention extérieure ouvre la première brèche.

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