La Tunisie, l'Égypte d'abord. Le régime du colonel Kadhafi qui vacille. Bahreïn secoué. Le pouvoir algérien qui lâche du lest... Nous nous interrogeons sur l'aveuglement des démocraties occidentales qui se sont montrées souvent complaisantes avec des dirigeants qui offraient, entre autres avantages, celui de la « stabilité ». Ils préservaient les équilibres diplomatiques délicats, assuraient les contrats économiques en cours, pétroliers notamment, etc. Des partenaires peu sympathiques, mais prévisibles.
Nous avons découvert que si, en public, on « se bouchait le nez », les fréquentations répétées de ces partenaires avaient fini par tisser des amitiés troubles ou du moins peu lucides.
Cet aveuglement ou cette complaisance font penser, dans un autre ordre, à la crise financière dont nous peinons à nous relever. Il a fallu la folie des subprimes pour qu'on s'avise que le monde de la finance et du capitalisme mondialisé avait perdu contact avec le sens élémentaire des réalités humaines. Toutes les leçons n'ont pas été tirées.
Parmi les grands interlocuteurs des pays occidentaux, il en est deux qui présentent des caractéristiques étrangement semblables à celles de la Libye, de la Tunisie, ou de l'Égypte. Ces pays limitent les libertés politiques, répriment les voix dissidentes, s'en prennent aux journalistes désobéissants, mettent les ONG sous surveillance, musellent les oppositions, y compris par la manière forte. La corruption de l'appareil d'État et des administrations locales y fleurit presque sans limites. Une petite minorité s'accapare la richesse, et la justice y est aux ordres. Ces deux pays s'appellent la Russie et la Chine.
On donne à Poutine et Medvedev du « mon ami », comme on le faisait, hier, avec Moubarak. On déroule le tapis rouge pour Hu Jintao, alors que le Prix Nobel de la paix croupit en prison et que les avocats, qui défendent les victimes du « modèle chinois », sont aujourd'hui la première cible de l'arbitraire... La Chine serait-elle déjà trop puissante ? Le gaz russe n'aurait-il pas d'odeur ? On nous explique parfois que les peuples russes et chinois ne sont pas prêts à la démocratie, on laisse sous-entendre qu'ils n'aspirent pas aux libertés fondamentales, que leurs mentalités sont différentes... Mais on a laissé la Russie installer son « ordre » chaotique dans le Caucase, devenu plus instable que jamais. Et les Jeux Olympiques à Sotchi (sur les bords de la Mer Noire), en 2014, s'annoncent aussi problématiques que le furent ceux de Pékin, sur fond de répression contre les Tibétains et les Ouïgours...
Pourrait-on reconnaître que les peuples de Russie et de Chine ne sont pas différents des autres ? D'ailleurs, sur le web, des invitations à des « rassemblements du jasmin » invitent les Chinois à une nouvelle forme, sinon de désobéissance, du moins de désaveu civique. Pourrait-on convenir que la liberté n'est pas une menace, mais un droit ?
Rude tâche pour notre nouveau ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, que de trouver le ton juste, avec ses collègues européens. Il nous faut pour cela retrouver la confiance en l'homme, de quelque origine ou de quelque confession qu'il soit. Et cela commence... en France !
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