L'euro a la fièvre. Coup de chaud. Coup de froid, la monnaie unique subit les conséquences de la crise mondiale depuis deux ans. Plusieurs pays membres de la zone euro semblent même menacés de faillite : la Grèce hier, l'Irlande aujourd'hui, qui demain ? Le plan de sauvetage en faveur de l'Irlande, annoncé dimanche, n'a pas calmé les inquiétudes sur le Portugal, l'Espagne et l'on entend même cités les noms de l'Italie et de la... France ! Le débat a quitté le cercle étroit des spécialistes, il embrase les opinions publiques. L'euro peut-il disparaître, dix ans après être né ? Essayons d'y voir un peu plus clair.
D'abord quelques rappels. L'euro est une création unique dans l'histoire de l'humanité. Jamais, dans le passé, une quinzaine de pays, dont plusieurs dotés d'une monnaie constitutive de leur longue histoire, n'avaient décidé de renoncer à cette monnaie nationale, pour créer une monnaie unique à caractère fédéral. Originalité supplémentaire, la création de cette monnaie fédérale ne s'est pas accompagnée de la mise en place d'un État fédéral. Voilà donc, pour la première fois, une monnaie sans État.
Deuxième caractéristique, nous ne sommes pas sortis de la crise la plus grave que l'économie mondiale a connu depuis les années 1930. Certes, le souvenir des erreurs commises lors de cette dernière (fermeture des frontières, assèchement des liquidités, dévaluations en chaîne...) nous a évité d'aggraver la crise en prétendant la soigner. Pour autant, nous n'en sommes pas encore sortis et il nous faudra cinq à dix ans pour retrouver un nouvel équilibre mondial.
La clé du problème
Rien d'étonnant, dans ces conditions, si les grandes monnaies souffrent d'instabilité et si les pays qui leur sont attachés peinent à retrouver leur équilibre. Objectivement, depuis le début de la crise, l'euro nous a davantage protégés qu'affaiblis. Mais il ne pouvait, à lui seul, nous épargner toutes les souffrances de la remise en ordre.
La Grèce avait triché sur ses vrais chiffres, lors de son entrée dans la zone euro, où elle n'aurait dû venir que plus tard. L'Irlande avait laissé ses banques distribuer des crédits à des emprunteurs incapables de les rembourser, comme l'avaient fait les États-Unis à l'origine de la crise. L'Espagne a laissé se gonfler une « bulle » immobilière qui a fait des dégâts en explosant. L'Italie accumule, depuis longtemps, une dette publique excessive. La France elle-même n'est pas sans reproche, faute d'avoir réduit sa dette lorsqu'elle en a eu les moyens, au début du présent siècle. Ce que les Allemands avaient entrepris avant la crise (sous un gouvernement socialiste...).
Tout cela confirme qu'une monnaie unifiée ne peut suffire à définir une politique économique. Une monnaie sans État n'est sans doute pas viable dans la durée, même si l'on peut comprendre qu'on ne passe pas, du jour au lendemain, d'une monnaie fédérale à un État fédéral. La crise nous contraint à accélérer cette prise de conscience. Nos dirigeants l'ont-ils compris ? Ont-ils la capacité d'en convaincre l'opinion publique ? Français et Allemands, sans l'accord desquels rien n'est possible en ce domaine, sont-ils sur la même longueur d'onde ? De la réponse à ces trois questions, dans les prochains mois, dépend l'avenir de l'euro.
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