TOUT EST DIT

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mardi 15 février 2011

L'opposition iranienne défie à nouveau le régime

Des manifestations ont été durement réprimées lundi par le pouvoir, qui craint la contagion égyptienne. Une personne a été tuée.
Pari tenu. Après plus d'un an de silence, les insoumis de Téhéran ont osé reprendre, lundi, le chemin de la contestation. Rassemblés par grappes éparses -pour tenter de contourner les cordons sécuritaires déployés à travers la capitale -, ils sont plusieurs milliers à s'être déplacés, à pied ou en voiture, de la place Imam Hossein à la place Azadi (Liberté), dans l'ouest de la capitale. Dans les contre-allées, à l'abri du regard des officiers de police, les plus enhardis se sont même risqués à crier quelques slogans. «Mort au dictateur !» ou encore «Libérez les prisonniers politiques !», peut-on entendre sur quelques vidéos d'amateurs transmises au Figaro . Une jeune femme, présente sur les lieux, raconte avoir également noté de nouveaux slogans, inspirés des révoltes du monde arabe, comme «Moubarak ! Ben Ali ! Nobaté Seyed Ali !» («Moubarak ! Ben Ali ! Au tour de Seyed Ali» - en référence à Ali Khamenei, le guide suprême).
Sur d'autres images, en provenance de villes de province - Ispahan, Tabriz, Kermanchah -, on peut voir les manifestants faire le v de la victoire, les doigts tendus vers le ciel. Une victoire qui reste néanmoins relative. En fin d'après-midi, les rassemblements pacifiques ont viré, dans plusieurs endroits, en accrochages entre manifestants et forces de l'ordre. Ces dernières ont chargé la foule avec du gaz lacrymogène. Les contestataires, eux, ont brûlé des bennes à ordures renversées sur la chaussée. Un mort par balle et plusieurs blessés ont été signalés des deux côtés. «On s'attend à des clashs pendant la nuit», prévenait, en fin de journée, Arash, un manifestant joint par téléphone.
Officiellement, la manifestation, lancée à l'initiative des deux principaux leaders de l'opposition, Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, avait pour objectif de «soutenir la lutte des peuples égyptien et tunisien» contre la «dictature», en saisissant au pied de la lettre les discours anti-Moubarak du pouvoir iranien. Officieusement, il s'agissait d'une journée «test» pour la dissidence iranienne, largement fragilisée par une répression sans merci. Depuis plusieurs mois, la «vague verte» née de la contestation postélectorale de juin 2009 - et dont l'activisme, à travers Facebook, Twitter et YouTube inspira les résistants tunisiens et égyptiens - peine à se ressaisir. L'expulsion de nombreux étudiants de l'université, l'arrestation de milliers de manifestants, la condamnation de journalistes et dissidents à de lourdes peines de prison - voire à la pendaison pour certains - ont rendu quasi impossible toute nouvelle forme de mobilisation.

«Un nouveau départ»

En fin de semaine dernière, l'étau s'était resserré d'un cran avec l'interpellation d'une vingtaine de personnes proches des ténors de l'opposition et le brouillage stratégique des programmes en persan de la chaîne britannique BBC - très regardés par les jeunes. Lundi, Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi ont même été empêchés de sortir de chez eux par des agents en civil. Craignant une contagion venant d'Égypte, les autorités avaient fait couper leurs lignes téléphoniques. Contactés sur place, plusieurs manifestants ont également fait part de leurs craintes d'être convoqués par les services de renseignements dans les jours à venir. «Mais ça valait quand même le coup d'aller manifester», précise l'un d'entre eux, qui y voit «un nouveau départ». Pourtant, il sait que les obstacles au changement sont encore très nombreux. Selon lui, on ne peut pas comparer l'Iran à l'Égypte ou à la Tunisie. «Les Tunisiens ont eu la chance d'avoir l'armée de leur côté. Ici, ce n'est pas le cas. Et puis, en Tunisie comme en Égypte, les couches défavorisées ont joué un grand rôle dans les manifestations. En Iran, le mouvement vert, encore très citadin, devrait en tirer des leçons pour l'avenir», dit-il.

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