TOUT EST DIT

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mardi 15 février 2011

Alger: "Ce n’est qu’un début!"

Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi à Alger face à 25.000 policiers. "Nous avons brisé le mur de la peur", assurent les opposants à Bouteflika. 
 Des laïques et des islamistes. Le chef du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Saïd Sadi, un laïque. Et l’un des fondateurs du Front islamique du salut, Ali Belhadj. Des étudiants, des travailleurs et des chômeurs. Des femmes et des hommes, de simples quidams et des intellectuels… Tous ont bravé les forces de l’ordre pour défier hier le pouvoir dans le centre d’Alger. Place de la Concorde, les manifestants ne cachaient par leur fierté. Alger a connu samedi une journée de contestation peut-être historique. Interdite par les autorités, la manifestation, organisée à la suite de l’appel lancé par la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD), née dans la foulée des émeutes contre la cherté de la vie qui ont fait cinq morts et 1.000 blessés début janvier, a réuni près de 5.000 personnes, selon le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme, Mostepha Bouchachi. Un chiffre modeste, comparé aux centaines de milliers de manifestants du Caire, mais impressionnant quand on sait la difficulté de manifester en Algérie. La preuve : face à ces quelques milliers de manifestants (estimés à 250 par le ministère de l’Intérieur), les autorités ont déployé plus de 25.000 policiers.

De nombreuses références à la révolution égyptienne

Au départ, leur idée était, comme à Tunis ou au Caire, de marcher à travers les rues de la capitale pour crier leur colère. Mais très rapidement, les manifestants ont été bloqués par le très important dispositif de sécurité, qui a procédé à des interpellations musclées. Bloqués en plein centre de la capitale sur la place du "1er-Mai", rebaptisée symboliquement place "Tahrir du Caire", les marcheurs ont scandé des slogans hostiles au régime du président Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999. Au lendemain de l’éviction du pouvoir d’Hosni Moubarak en Egypte, les manifestants ont lancé en arabe des "Algérie libre", "Le régime dehors!", "Système, dégage!". Certains ont aussi exigé le départ du chef de l’Etat et des changements politiques rapides. Des groupes de jeunes ont tenté de percer le cordon de sécurité, sans succès. Les organisateurs de la marche ont alors demandé aux manifestants d’éviter l’affrontement. De fait, le rassemblement s’est dispersé vers 15 heures sans débordements, ce qui n’a pas empêché la police de procéder à de très nombreuses arrestations. La Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme en a dénombré "plus de 300", contre 14 pour les autorités.
Pas de quoi décourager les contestataires algériens qui comptent suivre l’exemple des révolutions tunisienne et égyptienne. "Nous allons décider dans les prochains jours de la suite à donner à notre mouvement, mais cette manifestation n’est que le début", a déclaré samedi Mostepha Bouchachi. Des marches et des rassemblements devraient de nouveau se dérouler dans tout le pays. En attendant, Bouchachi a salué la mobilisation de samedi: "Si on avait pu marcher, il y aurait eu des dizaines de milliers de personnes avec nous", déplorait-il, avant d’accuser le pouvoir de se "donner en spectacle et de dépenser beaucoup d’argent pour empêcher les Algériens de s’exprimer". Les prochaines manifestations seront déterminantes. La colère sourde de la société algérienne ne demande qu’à s’exprimer dans des villes comme Oran, Annaba, Constantine et Boumerdès où des rassemblements, prévus également samedi, ont été soit interdits, soit durement réprimés; à Oran, une marche réunissant 400 personnes place du 1er-Novembre s’est achevée par une trentaine d’interpellations. Le chef local de la CNCD, l’universitaire Kaddour Chouicha, son fils et deux journalistes ont été emmenés dans un fourgon de police puis relâchés.

Bouteflika lâche du lest

Inquiet des exemples venus de Tunis et du Caire, le président Bouteflika a annoncé au début du mois la levée prochaine de l’état d’urgence (en vigueur depuis 1992), l’ouverture de la télévision et des radios publiques à l’opposition ainsi qu’un nouveau plan d’action contre le chômage et la crise du logement. Mais ces mesures n’ont pas convaincu les Algériens. Comme en Tunisie, les tentatives d’immolation par le feu n’ont pas cessé. Jeudi, un jeune a tenté de se suicider de cette façon à Ghardaïda, dans le sud du pays. A travers tout le pays, les opposants au régime de Bouteflika commencent à y croire: "Nous avons brisé le mur de la peur, assure Fodil Boumala, l’un des fondateurs de la CNCD. Samedi, les Algériens ont récupéré leur capitale."

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